Successeur amélioré de Guru, Geist vient d’être mis à jour en version compatible avec les systèmes 64 bits. L’occasion de faire le tour de l’outil de production de grooves signé FXpansion.
Qu’il semble loin le temps de Amulet Audio Software et de ses plug-ins comme la Series One (pour Direct-X, Mac, BeOS, Pulsar…). Depuis rebaptisé FXpansion, l’éditeur a imposé ce nom dans le domaine des bridges, logiciels permettant d’utiliser un format de plug-in dans une application ne le gérant pas à l’origine (comme VST-DX devenu le Cakewalk VST Adapter, VST-to-AudioUnit Adapter, etc.) et surtout dans le domaine de la boîte à rythmes (appellation un rien réductrice), avec les DR-005, DR-008, puis la petite révolution BFD en 2003.
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D’une révolution l’autre, en 2005 débarque Guru, drum sampler co-développé par Devine Machine et FXpansion, dont les qualités et l’invention avaient conduit à lui accorder l’Award de l’Innovation AF, voir le test Ici.
Les années passent, le roi est mort, vive le roi : voici Geist, qui reprend les concepts de Guru avec de nombreuses améliorations, et le passage à la compatibilité 64 bits apportée par la dernière mise à jour. D’où test.
Introducing Geist
Geist est disponible en téléchargement sur le site de l’éditeur (ainsi qu’en version boîte), au tarif de 222 €, et offre une application standalone et des plugs AU, VST et RTAS livrés avec plus de 2 Go de contenu, compatible PC et Mac (à partir de Mac OS 10.5.8, et sur Mac Intel seulement). L’installation fait appel au Manager habituel de FXpansion, avec numéro de série et validation via internet. Geist reprend bien entendu nombre de fonctions et caractéristiques de son prédécesseur, tout en apportant nombre de fonctionnalités nouvelles, même si l’éditeur tient à préciser (fortement…) que Geist n’est pas une nouvelle version de Guru. On peut télécharger le mode d’emploi de Geist à cette adresse.
Ainsi, on retrouve l’architecture globale consistant en huit moteurs audio indépendants, offrant chacun 16 pads et 24 patterns. Chaque pattern peut contenir jusqu’à 16 pistes, chacune correspondant à un pad. Chaque pad dispose de huit layers. La disposition reste à peu près la même, même si bien sûr les fonctions ont été changées et/ou améliorées.
Naviguer, ouvrir, détecter
La gauche du logiciel présente toujours le browser maison, dont le fonctionnement intègre maintenant un moteur de recherche, qui offre via un champ à renseigner la recherche par mot-clé à l’intérieur de plusieurs sections pré-identifiées par Geist : d’abord la banque d’usine, ensuite l’arborescence menant au dossier Geist dans les Documents, puis les différents disques connectés à l’unité centrale, qu’ils soient externes ou internes. Quelques listes permettent de garder en mémoire les favoris, le résultat des recherches et quelques raccourcis. On dispose de tous les outils de navigation habituels, dont un utile rappel du chemin vers le fichier, dossier ou preset affiché. Grâce aux diverses possibilités de lecture automatique, de survol des fichiers, de slicing automatique, on peut quasiment pré-écouter tout élément ou fichier son dans le navigateur. L’import ou l’ouverture sont très simplifiés, puisqu’un simple glissé-déposé vers un pad, une touche Pattern assigne automatiquement tous les paramètres ou sons, ou y applique une détection et une assignation automatiques (on y reviendra). On apprécie aussi l’aide contextuelle qui affiche la fonction et l’utilité de chaque paramètre dès que la souris s’attarde un peu sur l’interface.
Autre fonction de cette partie de l’interface, l’assignation des contrôleurs Midi ou de l’automation de l’hôte. Dès la sélection de la fonction, tout paramètre pouvant être piloté via un contrôleur (CC) ou l’automation se voit identifié via un marquage vert ; il suffit alors de cliquer sur le paramètre, de bouger le potard, fader ou bouton du clavier ou de la surface de contrôle ou de cliquer sur l’un des 32 Host Parameters pour consolider la relation entre le contrôleur physique ou logiciel et la fonction de Geist. On peut ensuite effacer, réassigner, verrouiller le lien, un affichage en colonnes donnant précisément tous les renseignements possibles sur cette automation (nom du paramètre, amplitudes min et max, type, etc.). Un exemple d’efficacité qui ne sacrifie pas la profondeur et l’information à la sacro-sainte simplicité.
De l’automatisme et de la reconnaissance
Une des grandes forces de Guru, puis de Geist, est la fonction de détection automatique des transitoires dès qu’un fichier audio est ouvert (ouvert par le navigateur, ou via un glissé-déposé sur un des Pads depuis un dossier, le bureau, etc.). Car, non seulement Geist place les marqueurs façon Rex sur le fichier (rappelons que le logiciel importe les fichiers rex2 directement), mais encore permet-il via les divers boutons d’extraction de les assigner, classifier et sauvegarder automatiquement. De plus, Geist tente d’assigner chaque tranche (Slice) à l’une des “lignes” de quatre pads : ainsi en bleu sont assignées les parties analysées comme étant des Kicks, en rose, les Snares, en jaune les HiHats et en vert les Percussions. Bien évidemment, via un simple clic droit, toutes ces Slices peuvent être ré-assignées à l’une ou l’autre des classifications.
Prenons ce pattern :
L’import est immédiat, et la reconnaissance des transitoires quasi complète. À noter que FXpansion a intégré de tout nouveaux algorithmes. La plupart du temps, après la première détection, il faudra procéder à des ajustements de la Sensitivity, aux ajouts et effacements de quelques marqueurs. Les utilisateurs de Recycle! ne seront pas perdus, puisqu’on retrouve ici quasi toutes les fonctions du logiciel de Propellerhead, tout du moins dans la gestion des marqueurs.
Une fois validée cette reconnaissance et les différentes sauvegardes effectuées, le pattern est utilisable tel quel, c’est-à-dire reprenant le groove d’origine, adaptable à tous les tempos désirés, y compris en en modifiant le placement via le réglage Swing, mais aussi en tant que kit, ce qui permet de programmer de nouveaux patterns à partir des sons isolés correspondants à chaque transitoire reconnue. Comme sur l’exemple suivant (qui reste très simple pour le moment, sans trafics sonores).
Chaque élément peut être sauvegardé de façon indépendante, c’est-à-dire que l’on peut aussi bien disposer du Preset englobant toutes les caractéristiques et constituants, que du Kit, du Pattern, d’un Pad, etc.
On peut ainsi importer un pattern et le faire jouer par un tout autre kit et inversement. Par exemple, on importe ce loop :
Et l’on remplace le kit par celui créé lors de l’exemple précédent :
Tout comme on peut simplement faire l’inverse.
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Dans les deux cas, un minimum d’ajustement a été effectué, en particulier en ce qui concerne les vélocités et le forçage des layers. On peut en effet programmer le déclenchement d’un layer plutôt qu’un autre, notamment via la visualisation MultiGraph View (voir encadré).
Le résultat peut sembler de peu d’intérêt musical (pour le moment…), mais il illustre le nombre de possibilités quasi infini, alors que l’on n’utilise aucune des fonctions de mix, d’effets, et autres manipulations possibles, que l’on abordera plus loin. D’où l’importance d’une bonne détection, et surtout de l’utilisation du mode Classify plutôt que Use Layers si l’on veut travailler dans cette optique d’échanges kits-patterns, afin que chaque “coup” rythmique soit identifié pour ce qu’il est (kick, snare, hat ou percussion). Ce Classify est d’ailleurs tellement efficace que l’on regrette de ne pas disposer de plus d’identifiants (Cymbal, Toms, etc.), ce qui permettrait encore plus de précision et de facilité de permutation.
Édition
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Les trois plus grandes nouveautés de Geist sont l’intégration d’un mode Song (son absence dans Guru lui ayant valu le seul point négatif de son bilan), une amélioration plus que conséquente des possibilités de traitement et de mixage et un échantillonneur en temps réel (voir encadré).
Song, tout d’abord, permet de séquencer tout simplement des patterns, sur autant de rangs que d’Engines, soit huit au maximum. Les fonctions sont réduites au strict nécessaire, puisque tout le travail créatif ou d’automation s’effectue en amont, au niveau des patterns et des différents étages de mixage.
Voici quelques exemples de Song. On remarque que des mélodies peuvent être incluses, puisqu’un ou plusieurs Engines peuvent être dédiés à ce type de son, que ce soit par l’intermédiaire d’échantillons d’accords ou de séquences d’accords complets, ou par une répartition de notes chromatiques sur les Pads, via le mode Chromatic Playback.
Question fonctions d’édition, mixage et effets, on ne sait plus où donner de la tête, puisqu’on peut insérer des effets de façon indépendante au niveau des Layers, des Pads, des Engines, du Master et sur quatre Bus ! On y reviendra.
Quand on sélectionne un Pad, puis la fenêtre Pad/Layers, la colonne de gauche présente un onglet pour le Pad, puis huit onglets pour chacun des Layers. La sélection de l’onglet Pad permet de régler le mode de déclenchement des Layers, par la vélocité, en mode Round Robin, ou de façon aléatoire. Les zones de vélocité sont librement réglables à la souris, c’est rapide, efficace, rien à redire. On dispose aussi d’un volume global, d’un Pan, d’un choix de sortie, de la réponse de l’amplitude à la vélocité et de quatre départs vers les effets.
Quand on sélectionne un des onglets Layer, on accède à un moteur audio indépendant, chaque Layer disposant du même. On peut forcer les réglages à être répercutés sur tous les Layers, les Pads ou par rang, tout comme on peut choisir d’éditer chaque Layer de façon totalement indépendante. À cet effet, on trouve Pan, Gain, envoi vers les quatre Send, inversion de phase et mode Reverse. Puis un module pour régler l’accord, avec réponse à la vélocité (indispensable pour certains effets de caisse claire ou de cymbale), un module de Timestretch très performant (Dirac3 à l’œuvre, soit l’un des meilleurs algorithmes disponibles, signés S. Bernsee, créateur de la Time Factory pour Prosoniq) et un module Filter, offrant cinq modes (Low, High et Band Pass, Notch et Peak), chacun en configuration deux ou quatre pôles, avec Drive et réaction à la vélocité. On connaît l’expérience de FXpansion en matière de filtres, ceux-là n’échappent pas à la règle : ils sont très efficaces.
Enfin, on peut choisir les assignations de deux enveloppes que l’on éditera de façon graphique sur la forme d’onde, l’une dédiée d’abord à l’amplitude plus deux autres paramètres (le choix est un peu limité, hélas), l’autre ne disposant pas de destination fixe.
Mixage
On passe ensuite à l’un des quatre mixeurs (oui, quatre…) disponibles. Même principe, dans le Layer Mixer, on dispose d’un Mix global, de volumes, Pan, et d’un ensemble de six effets indépendants et de quatre départs par Layer. Au menu des effets, Distortion, Dynamics, EQ, Filters, FX et Reverbs tout est là, les réverbes étant de plus signées Overloud, éditeur de l’excellente BReverb dont sont dérivés quatre des modèles ici présentés. Rien ne manque, sauf peut-être quelques effets simples de spatialisation comme des Tremolo, des Autopan, etc. Niveau filtre, on est aussi gâté puisque ce n’est pas moins de neuf modèles différents qui sont à disposition, dont un Hoover assez hallucinant, regroupant quasi tous les modes possibles. Un Audio Freezer permet même de produire tous les effets de Stutter imaginables. On peut sauvegarder les réglages sous forme de presets par effet, ainsi que sous forme de banques d’effets, gardant en mémoire chaînage et réglages.
Le Pad Mixer reprend le même principe, six effets indépendants et quatre départs par Pad, avec volume, Pan, Mute et Solo indépendants et les mêmes possibilités de sauvegarde. On continue avec l’Engine Mixer, qui reprend (non ? si) exactement les mêmes avantages et possibilités que ses camarades, tout en offrant un onglet Setup supplémentaire : ce dernier regroupe un Mute, un Solo, un menu de choix d’un modèle pour forcer le swing du moteur audio sélectionné (chacun peut disposer du sien propre), qui peut être importé depuis le pattern en cours, un Template Midi ou un réglage de Guru. Viennent ensuite les réglages de Pitch global, de Swing et de modification du tempo (indépendant donc pour chaque moteur…). Est-il utile de rappeler que tout ce que l’on vient de décrire, Pad, Layer et Engine Mixers, sont disponibles pour CHAQUE moteur audio.
Et l’on termine par le Global Mixer, offrant les quatre onglets des Auxiliaires (chacun avec six slots d’effets…), un Mute, un Solo, le choix de sortie et un Pre/Post et le Master (avec aussi, oui ? Six slots d’effets, bravo).
Incroyable. Cet ensemble de sections est certainement l’un des plus puissants à l’heure actuelle, qui ne peut être comparé qu’à celui de BFD2, auquel il doit beaucoup. Les possibilités sont gigantesques, mais comme toute chose elles ont leur corollaire : plus on empile, plus l’ordinateur hôte est sollicité. Donc attention aux doubles emplois et effets superfétatoires : il ne faudra pas hésiter à tailler dans l’inutile.
Pour être pertinent en matière d’exemples sonores, tant les possibilités sont nombreuses, il faudrait réaliser un nombre trop important de fichiers. Pour se faire une idée forcément succincte, voici une boucle de la bibliothèque d’origine, utilisant à divers degrés les effets inclus, à tous les étages possibles.
Bilan
En toute honnêteté, au regard de toutes les améliorations apportées, notamment en ce qui concernait le seul véritable manque de Guru, l’échantillonnage, les hallucinantes possibilités de trafic sonore, la gestion de l’import, de l’export de fichiers, le mode Classify, les sauvegardes de presets à chaque étage/niveau du logiciel, la souplesse d’édition, les niveaux d’Undo, le Retro recording (enregistrement de ce que vous avez joué, après l’avoir joué), l’efficacité de la détection, la superbe qualité des effets (les compressions, réverbes, filtres sont excellents), la gestion de l’automation interne comme externe, et toutes les autres fonctions du logiciel, il m’est difficile de trouver quelque chose à redire. Une très belle réussite signée FXpansion.