Dans l'épisode précédent, nous avons vu comment enregistrer une basse électrique en direct. Bien que pouvant se suffire à lui-même, ce type de prise délivre un son manquant cruellement de corps, ce qui s'avère parfois problématique lorsque la production sur laquelle vous travaillez nécessite une fondation plus charnue. Afin de redonner du poil de la bête à votre groove, il convient d'en passer par une forme d'enregistrement plus conventionnelle : la captation via un ou plusieurs microphones du son produit par un ampli basse.
Disclaimer
À l’instar de ce que je vous disais au début de ce chapitre concernant l’importance du choix et du réglage de votre basse, il va sans dire que c’est exactement la même tisane pour l’ampli que vous aller utiliser. Chaque ampli basse possède évidemment une pâte sonore qui lui est propre et les fonctions d’égalisation du signal ne sont pas là uniquement pour remplir un espace vide. Quant aux HP, nous n’allons pas nous étendre sur la question, mais sachez cependant que de manière générale plus un haut-parleur est grand, plus il sera capable de reproduire un son plein et profond. À l’inverse, les petits haut-parleurs délivrent un son plus précis et tranchant.
Bref, comme d’habitude, essayez autant que faire se peut de choisir le couple ampli / HP ainsi que les réglages qui collent le plus au rendu souhaité pour le titre que vous enregistrez.
En piste
Pour réaliser les exemples audio de cet épisode, j’ai utilisé la technique du reamping sur l’un des enregistrements directs que je vous ai présentés la semaine dernière. Pour info, il s’agit de la prise d’une Fender Jazz Bass réalisée au médiator avec le micro chevalet coupé et le potentiomètre de tonalité au minimum. De plus, sachez que la tête d’ampli utilisée est une Ampeg SVT-CL avec tous les potards d’égalisation à midi et le switch « Ultra Lo » enclenché. Quant aux HP, il s’agit d’une gigantesque armoire Ampeg SVT-810E Heritage qui se sentait un peu à l’étroit dans mon modeste home-studio… Mais passons…
En matière de micro pour repiquer un ampli basse, j’ai toujours eu un faible pour les micros dynamiques car ils encaissent sans broncher les forts niveaux de pression acoustique inhérents à ce genre de prise tout en délivrant un punch sonore fort bienvenu pour cet instrument. Ma référence est encore une fois l’inénarrable RE20 d’Electro-Voice, mais comme j’ai promis au début de cette série de faire avec les moyens du bord, nous allons nous contenter du classique Shure SM57 couplé à l’un des préamplis de ma petite interface audio TC Electronic Konnekt Live. Comme vous allez pouvoir le constater, ce tandem est loin d’être ridicule :
Sur le premier extrait, le micro est perpendiculaire à l’un des HP, la capsule pointe vers le centre de ce dernier, collé à la grille. Pour le deuxième, le SM57 a été décalé par rapport à l’axe du haut-parleur. Enfin, le troisième illustre un décalage encore plus important, de façon à ce que la capsule du Shure pointe vers le bord extérieur du HP.
Ainsi collé à la grille, l’effet de proximité bat son plein et renforce l’épaisseur du son. Comme vous pouvez l’entendre, plus le micro est excentré par rapport à l’axe du haut-parleur et plus le son s’adoucit. La perte de punch dans l’attaque des notes et l’atténuation dans le haut du spectre profitent à la rondeur et la « chaleur » du rendu.
- 04 sm57 10 Center 00:23
- 05 sm57 20 Center 00:23
- 06 sm57 40 Center 00:23
Pour les trois extraits ci-dessus, le SM57 est revenu en plein dans l’axe du HP, mais il a été éloigné de celui-ci petit à petit d’environ 10 cm, puis 20 cm, et enfin 40 cm. À l’écoute, il y a une certaine perte de définition qui est cependant compensée par le fait que plus le micro s’éloigne et plus il est susceptible de capter les fréquences aiguës provenant des autres HP du baffle ici utilisé. Notez qu’évidemment, l’effet de proximité s’estompe avec l’éloignement, mais le corps ne disparait pour autant. Si pour une raison ou une autre, votre enregistrement semble brouillon dans le bas et / ou le bas-médium, reculer le micro peut s’avérer salvateur, à condition que votre lieu d’enregistrement ne soit pas trop réverbérant dans ces zones du spectre.
Passons à présent à une captation de cet ampli basse via un statique, en l’occurence un AKG C414 en position cardioïde :
- 07 414 20 Center 00:23
- 08 414 20 Edge 00:23
Le C414 est placé perpendiculairement au baffle, d’abord dans l’axe d’un haut-parleur, puis excentré sur le bord extérieur du cône, le tout à environ 20 cm de distance pour ne pas heurter sa sensibilité. Comme nous pouvions nous y attendre, le rendu est plus précis, défini et équilibré qu’avec le SM57. Le déplacement vers le bord du HP provoque toujours un adoucissement dans le haut du spectre, mais c’est moins flagrant qu’auparavant. Bref, l’ensemble sonne dans une certaine mesure de façon plus naturelle qu’avec le SM57. Cependant, il est à noter que ces deux exemples sont moins « pêchus » et « gras » que les précédents. C’est pourquoi il est parfois utile d’enregistrer un ampli basse avec plusieurs micros… Mais nous verrons cela la semaine prochaine !
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