Deuxième instrument conçu par la société française SynthR, le SYNTHR4 est un synthé analogique monodique et paraphonique capable de mémoriser l’état des routages entre modules. Nous avons testé l’un des premiers exemplaires…
Le SYNTHR4 est un synthé 100 % français développé de manière artisanale par une petite équipe de passionnés d’instruments et de musiques électroniques. Aux commandes, Rémy Wasselin, fondateur de SynthR, une jeune entreprise savoyarde créée fin 2019. Il a conçu l’instrument, le boitier et les cartes analogiques. Il a été aidé par Jean-Luc Lartigue pour le développement de la partie numérique, Yves Usson pour la programmation des effets et Jean-Luc Briançon pour les démonstrations. Une interview de Rémy est disponible en fin d’article. La machine étant construite à l’unité dans son atelier, c’était aussi facile d’en attraper une que de croiser un Dahu. Par bonheur, l’aussi passionné que sympathique David, alias systemj69, a eu plusieurs bonnes idées simultanées : commander l’un des premiers exemplaires, se le faire livrer juste avant de partir en vacances et habiter à quelques encablures du studio. Un grand merci à lui de nous avoir confié son gros bébé avant même d’avoir eu le temps de le déballer ! Ouvrons donc ce grand écrin avec délicatesse…
Physique avantageux
Le SYNTHR4 est un grand module qui se pose à la verticale comme un ARP2600, doté d’un boitier en bois abouté épais et d’une façade en alu, construit artisanalement, façon haute couture. Du coup, on ne s’étonnera pas de soulever 14 kg pour 625 × 485 × 225 mm. La qualité de construction est à tous les niveaux, que ce soit la finition cirée du bois, les assemblages soignés, les potentiomètres vissés, les curseurs lumineux, les interrupteurs rétroéclairés ou la connectique vissée. La façade regorge de larges commandes organisées en une vingtaine de modules, assez faciles à repérer grâce à une disposition claire. On trouve au bas mot 80 potentiomètres, 4 sélecteurs rotatifs, 12 curseurs linéaires 45 mm, 137 boutons-poussoirs carrés, un encodeur-poussoir et un écran graphique OLED couleur.
La connectique est assez complète : à l’avant, deux prises Midi DIN In/Thru. À l’arrière, sur une petite plaque métallique, sont concentrées une paire de sorties audio gauche/droite, deux sorties CV (VCO1 et VCO3), deux sorties Gate (enveloppes VCF/VCA) et une sortie horloge. Les sorties audio sont en jack 6,35, les CV/Gate en mini-jack. S’y ajoutent une prise USB B (notes Midi, vélocité, pression, pitchbend, molette de modulation, maintien, horloge, transport du séquenceur et mise à jour du système), une prise USB A hôte (clavier de commande) et une prise Midi DIN (Polychain/sortie). Pas très loin, on trouve une borne IEC 3 broches (alimentation interne, merci). On aurait aimé avoir des entrées CV de modulation (par exemple vers les ondes continues des VCO, les VCF, les VCA…) et des entrées audio vers les VCF. Les VCF étant interchangeables, l’opération se fait en dévissant le panneau arrière, en extrayant une carte fille de ses supports et en embrochant une autre à la place. Cela n’annule pas la garantie tant qu’on ne touche pas à l’alimentation, il faut juste être délicat avec les connecteurs.
Philosophie singulière
Le SYNTHR4 est un synthé précâblé dont on peut activer le routage des modules et doser leur action. Cela se fait par enclenchement d’interrupteurs lumineux, dont l’état est mémorisé au sein de 64 patches. En revanche, les potentiomètres ne sont pas scannés, donc leur position n’est pas mémorisable, comme sur un synthé purement analogique. Il faut bien avoir cela à l’esprit, c’est un usage spécifique voulu qui ravira certains et en détournera d’autres. L’idée, simple, est d’éviter de brasser sans cesse des cordons inesthétiques dès qu’on veut modifier le routage ; avec le SYNTHR4, on mémorise la connexion de cordons virtuels prédéfinis et on touille en live pour créer sa performance. Les types d’effets, les réglages d’arpège et l’éventuel numéro de séquence associé au patch sont aussi mémorisés. Tout cela peut être archivé via Sysex.
Pour certains réglages additionnels (LFO3, effets, arpèges, séquences, mémoires, système), il est nécessaire de passer par les menus. La navigation n’est pas toujours super intuitive, on doit se contenter d’un sélecteur, un encodeur-poussoir et une touche Escape qui ne remonte pas toujours là où s’y attend. Parfois on a une liste déroulante, parfois une sélection par flèche uniquement en avant, pas très pratique. On aurait préféré des menus plus homogènes et des commandes plus adaptées (genre deux encodeurs-poussoirs, l’un pour naviguer et entrer, l’autre pour régler et sortir). On s’y fait, c’est juste que tout le reste est tellement immédiat… La prise en main détaillée est décrite dans un manuel fourni en langue française et des tutos vidéo sur le site du constructeur.
Gros son
Ce qui donne immédiatement la banane sur le SYNTHR4, c’est ce gros son généreux, authentiquement analogique. Le niveau de sortie est élevé, il n’y a pas de bruit de fond ni de ventilateur, le son est très présent, avec un espace stéréo agréable, surtout quand les filtres diffèrent. Rapidement, on crée des basses grasses, rondes, filtrées ou punchy. Les leads peuvent couper, résonner, planer. Les possibilités d’intermodulations audio conduisent à une grande variété de timbres, certains dans la veine vintage, d’autres plus modernes, plus agressifs. Les différents modes de split bien pensés permettent des mélanges intéressants. La paraphonie est quant à elle une porte ouverte aux accords de cuivres et nappes, avantageusement passés dans les deux VCF.
En fait, on fait rapidement évoluer le son sans trop d’efforts, car tout tombe sous la main (sauf quand on est debout et grand, car les inscriptions sont placées sous les commandes). C’est bien de pouvoir mémoriser l’état des routages via les interrupteurs, mais la variété sonore est telle qu’on est souvent tenté d’en faire autant avec les potentiomètres. Mais comme déjà précisé, ceci n’est pas possible, le SYNTHR4 est un synthé d’exploration live, avec lequel on est sûr de ne pas faire deux fois de suite le même son ou jouer la même performance. C’est cette approche que viennent renforcer l’arpégiateur et les séquenceurs, davantage des outils de direct que d’enregistrement, soutenus par des effets bien adaptés.
- SynthR4_1audio 1 Huge Bass01:19
- SynthR4_1audio 2 Para Phone00:54
- SynthR4_1audio 3 One Arp02:45
- SynthR4_1audio 4 Seq Split01:43
- SynthR4_1audio 5 TD Esque01:28
Quatre VCO
Sur le plan du moteur sonore, le SYNTHR4 fait partie des synthés généreux, avec 4 VCO, 2 Sub VCO, 1 générateur de bruit, 1 mixeur/routeur, 2 VCF, 2 VCA, 3 LFO et 3 enveloppes. Les modules peuvent opérer suivant différents modes de jeu astucieux : mono à 4 VCO/2 VCF/2 VCA, split dual mono avec pour chaque zone 2 VCO/1 VCF/1 VCA, paraphonique 4 notes, accords 4 notes ou split avec accords 3 notes + mono 1 note. Bref, de quoi satisfaire bon nombre d’usages. Les VCO sont basés sur des circuits SSI2130, ceux qui équipent notamment le Take 5 de Sequential. Leur accordage est numérique, sur +/- 2 octaves et par demi-ton en continu. Un contrôle visuel est prévu pour les accorder à la main, bien utile en paraphonie. Un Autotune permet d’adapter le synthé à différentes conditions thermiques. Les VCO sont scindés en deux familles (1–3 et 2–4). Les VCO1–3 offrent 4 formes d’ondes cumulables (sinus, triangle, dent de scie, impulsion). La PW peut être réglée à la main (10 à 90 %) ou modulée via 2 bus avec dosages séparés : LFO1 ou enveloppe de modulation ; LFO2 ou VCO2. On trouve également une fonction Supersaw constituée d’une onde dent de scie modulée à 0,1 Hz et d’une seconde onde dent de scie modulée par le LFO2. Le pitch est modulable via 2 bus avec dosages séparés : LFO1, enveloppe de modulation ou pression ; LFO2 ou VCO2. Les VCO1–3 possèdent enfin un Sub VCO à 4 ondes cumulables : triangle, dent de scie, carrée à –1 octave et carrée à –2 octaves.
Les VCO 2–4 sont très différents. À la place des ondes cumulables, ils génèrent une onde continuellement variable passant par triangle, dent de scie et impulsion. La forme d’onde est modulable par le LFO2 ou l’enveloppe de modulation. La PW peut être réglée à la main (10 à 90 %) ou modulée via 2 bus avec dosages séparés : LFO1 ou enveloppe de modulation ; LFO2 ou VCO1. Le pitch est modulable par 2 autres bus avec dosages séparés : LFO1, enveloppe de modulation ou pression ; LFO2 ou VCO1. Enfin, les VCO2–4 peuvent être synchronisés respectivement aux VCO1–3 (Hard Sync). Pour être complet dans les intermodulations de VCO, rien de tel que le double modulateur en anneau entre VCO1 et VCO2 ou 4, ainsi qu’entre VCO3 et VCO2 ou 4. Pour couronner le tout, chaque VCO dispose d’un portamento indépendant, avec bouton d’activation et réglage de temps, sympa.
Deux VCF et VCA
Toutes les sources (4 VCO + 2 Sub + Ring Mod) rejoignent un générateur de bruit (blanc et/ou rose) dans un mixeur, avec réglage des niveaux puis routage vers les 2 VCF (l’un, l’autre ou les deux, suivant le mode de voix). Chacun est suivi d’un VCA fixe, on ne peut modifier le routage entre les paires de VCF/VCA (appelées « voix »), chacune agissant en parallèle de l’autre. Dommage, ça aurait été sympa de pouvoir envoyer la sortie d’un VCF vers l’autre ou doser une balance entre VCF. Dans le SYNTHR4, on peut choisir ses deux VCF parmi une collection assez éclectique de filtres passe-bas et multimodes. On trouve aujourd’hui plus de dix cartes : Moog, ARP 4012, ARP 4072, SEM, Steiner Parker, Synthex (AS3320), Pro-One (AS3320), SVF3320 (AS3320), Polysix (SSI2144), Jupiter-8 (AS3109) et Jupiter-6 (AS3109). Ce sont des filtres discrets ou basés sur des circuits intégrés contemporains (entre parenthèses), pas des répliques exactes. En tout cas, ceux que nous avons testés spécifiquement (Polysix, Synthex, ARP 4012, JP-8, JP-6) sonnent merveilleusement bien, chacun avec son caractère singulier (cf. extraits sonores spécifiques en fin de paragraphe).
On peut régler la fréquence de coupure, la résonance, le suivi clavier (0 à 120%), le contour de l’enveloppe de VCF, ainsi que la source et la quantité de modulation de 2 bus additionnels : LFO1, LFO2 ou VCO1/3 ; molette ou pression. Pour les filtres multimodes, 3 sélecteurs permettent de choisir le mode, avec cumul pour les filtres à variable d’état (SEM et SVF3320). Un petit reproche : la pente du VCF de type JP-8 se règle avec un cavalier ; on aurait préféré une gestion logique de la pente, quitte à utiliser un bouton de mode en façade. Derrière le VCF se trouve le VCA correspondant, dont on peut régler le gain initial (pour les drones), l’action de l’enveloppe de VCA dédiée, l’action du LFO2 et le point de panoramique. Ce dernier est modulable par le LFO3 (simultanément pour les 2 VCA, avec inversion de phase).
- SynthR4_1audio 6 2044 LP00:35
- SynthR4_1audio 7 4021 LP00:36
- SynthR4_1audio 8 JP-8 LP(4)00:35
- SynthR4_1audio 9 JP-6 LP00:35
- SynthR4_1audio 10 Synthex LP00:36
- SynthR4_1audio 11 JP-6 BP HP00:32
- SynthR4_1audio 12 Synthex BP(2) HP00:34
Modulations variées
Au rayon des modulations, le SYNTHR4 ne déçoit pas. Il est doté de 3 LFO numériques (2 LFO à commandes directes et un troisième partiellement éditable via le menu) à oscillation libre. Pour le LFO1, on trouve une touche d’activation, des réglages de fréquence et division temporelle (0,025 à 50 Hz via 6 gammes de division/multiplication), 16 formes d’ondes (rampe, dent de scie, carré, triangle, sinus, sinus|, -|sinus|, S&H et autant d’ondes alternatives variables) et un réglage continu de symétrie d’onde. L’amplitude peut être pilotée par la molette ou l’enveloppe de modulation. Le LFO1 peut se synchroniser à l’horloge interne, le LFO2 ou le Midi. Sa fréquence est modulable par le LFO3. Le LFO2 possède une touche d’activation, des réglages de fréquence et division temporelle (0,05 à 100 Hz via 6 gammes) et quasiment les mêmes ondes que le LFO1. Son amplitude est modulable par la molette de modulation, la pression ou le clavier (= Gate avec délai de 0 à 3 s). On peut appliquer une quantification variable à la forme d’onde (effets d’escaliers). Enfin, le LFO3 dispose d’une activation, d’un réglage d’amplitude, de réglages de fréquence et division temporelle (60 s à 500 Hz via 2 gammes) et de 7 formes d’onde (sinus, rampe, dent de scie, carré, triangle, S&H et tension variable).
Passons maintenant aux 3 enveloppes numériques générées par des PIC Electric Druid. La première est routée vers les 2 VCF avec des quantités de modulation distinctes. Elle est de type ADSR avec inversion de polarité (négative ou positive via un cavalier placé sur le panneau arrière, merci), mode de redéclenchement, réponse en amplitude suivant la vélocité (sans dosage) et paramètre de bouclage (jusqu’à 300 Hz). La deuxième enveloppe est routée vers les 2 VCA, avec là encore des quantités de modulation séparées. Elle est aussi de type ADSR avec mode de redéclenchement, réponse en amplitude suivant la vélocité et bouclage. Enfin, l’enveloppe de modulation est routée vers les VCO et le LFO1. Il s’agit d’une DADSR avec bouclage. Ces enveloppes sont très rapides, mais leurs temps ne dépassent pas les 10 secondes. En mode paraphonique, 4 enveloppes de VCA « cachées » permettent de simuler une quasi-polyphonie, en agissant indépendamment sur le volume des 4 VCO (les VCF restant partagés).
Effets numériques
Le SYNTHR4 intègre deux unités d’effets numériques identiques (FX1 et FX2), agissant chacune sur leur « voix » de sortie respective. On ne peut donc pas créer des configurations complexes (bus de départ, envoi d’un FX vers l’autre, etc.), tout se passe en parallèle. Chacune offre un réglage de mix (signal purement analogique à zéro) et deux paramètres ajustables dont le rôle varie suivant le type d’effet (vitesse, profondeur, durée, délai, feedback…).
Au menu, on trouve 2 phasers (basse et haute résonance), 2 chorus (idem), 2 flangers (idem), 2 réverbes (courte et longue), 2 réverbe avec shimmer (-1 octave et +1 octave), 2 échos avec shimmer (idem) et 2 délais (écho, pingpong). La qualité est très bonne et tout à fait en ligne avec l’univers sonore de la machine, bravo Yves pour cette contribution ! Les types d’effets sont mémorisés dans les patchs, mais pas la position des potentiomètres, ce qui est un peu ballot vu que les effets sont numériques et que leurs réglages physiques sont souvent sans rapport d’un algorithme à l’autre.
Arpégiateur original
Au fur et à mesure que nous avançons dans le test, nous sentons bien les influences « TD-esques » qui ont présidé à la conception du SYNTHR4. L’arpégiateur et les séquenceurs sont tout à fait adaptés à ce type d’ambiance planante. L’arpégiateur peut mémoriser jusqu’à 16 notes. On règle l’horloge (interne, Midi, LFO2), le motif (11 types, tels que comme joué, ordre ascendant, retour alterné à la note basse, retour alterné à la note haute…), la direction (haut, bas, alterné, aléatoire et brownien), la transposition d’octave (+1 à +3), le swing (bipolaire), le temps de Gate (5 à 95 %), puis le comportement des VCO2–3–4 par rapport au VCO1.
Arrêtons-nous sur ce point : les cycles d’arpège des VCO 2–3–4 peuvent être copiés, inversés, alternés (1 note sur 2–3–4) ou retardés (de 2–3–4 pas) par rapport au cycle du VCO1. Il s’ensuit des rythmiques complexes et envoûtantes qui se décalent sans toujours se répéter. Il ne reste plus qu’à ajouter un petit délai dans la section FX et on décolle immédiatement. En mode split, on se retrouve avec un arpège à main gauche et un son duophonique à main droite, bien vu. On peut même exporter le fruit de l’arpégiateur vers le séquenceur mono, à concurrence de 64 notes maximum, bravo. Les notes arpégées peuvent être envoyées en Midi, parfait. Un puissant et original arpégiateur !
Séquenceurs divers
En alternative à l’arpégiateur, le SYNTHR4 propose plusieurs types de séquenceurs. Le premier est un séquenceur à pas. Dans les 16 pas disponibles, on mémorise la note (par incrémentation) et le mouvement des VCF (via les potentiomètres de fréquence de coupure, qui sont cette fois bel et bien lus). On règle ensuite le tempo, la division temporelle, l’horloge (interne, LFO2, Midi), la direction (haut, bas, alterné, aléatoire et brownien), le Gate, la transposition par demi-ton par rapport à la note jouée au clavier et le comportement des VCO (même esprit que l’arpégiateur, mais avec des réglages différents, notamment des intervalles). L’intérêt de ce séquenceur est de pouvoir agir en temps réel sur les 16 pas, représentés par les 16 interrupteurs de la section mixeur : suivant l’appui (long, bref, répété), on peut boucler, sauter, ou ratcheter un pas (2–3–4 fois), jouissif ! En mode split, cela fonctionne comme pour l’arpégiateur. Ce séquenceur offre 64 mémoires.
On continue avec le séquenceur mono. Il offre 64 pas, caractérisés par une note, une durée et une accentuation. Un pas correspond à une vélocité de 50 %, contre 100 % pour un pas accentué. La durée d’un pas va de la ronde à la double-croche ; on peut aussi générer 2–3–4 ratchets. Le mode split fonctionne comme pour les précédents modules. Ce séquenceur offre aussi 64 mémoires. On passe au séquenceur d’accords, comprenant 64 pas d’accords de 1 à 4 notes. En mode split, on peut enregistrer un accord de 3 notes à main gauche et jouer le VCO1 seul à main droite. Là encore, il y a 64 mémoires. Mieux, on trouve deux modes Song (Mono et Chord), permettant chacun d’enchaîner jusqu’à 8 séquences et sauvegarder le tout au sein de 32 mémoires. Les notes séquencées peuvent être transmises en Midi, sympa là encore. Le seul petit bémol à ces modules est sans doute l’ergonomie, car ils s’opèrent le plus souvent via les menus, pas toujours très intuitifs, notamment la sélection des paramètres de manière cyclique.
Conclusion
Nous tenons une nouvelle fois à remercier David pour le prêt de son SYNTHR4 flambant neuf, qui doit bien s’éclater maintenant qu’il l’a récupéré ! Il est toujours agréable de tester un beau synthé, qualitatif, conçu avec un parti pris original, qui plus est par une petite équipe française de passionnés fort sympathiques. Clairement tourné vers les fans de synthés analogiques sans mémoire qui se touillent en live, le SYNTHR4 parvient à apporter un certain niveau de modularité sans l’inconvénient des câbles, vu la possibilité de mémoriser l’état des routages.
On reste donc sur un son et un contrôle tous deux analogiques, à quelques exceptions près, en particulier les commandes qui concernent le pitch et la programmation des fréquences des VCF dans le séquenceur. S’y ajoutent des modules numériques, tels que le double multieffets, l’arpégiateur futé et les différents séquenceurs. Tout n’est pas idéal, comme la navigation dans les menus, qui plombe un peu l’ergonomie. Côté son, on a clairement tout ce qu’on aime sur un synthé analogique. Nous lui souhaitons un bel avenir, qui semble déjà bien tracé jusqu’en 2023… Allez, Award Valeur Sûre 2022 !
Interview de Rémy Wasselin, fondateur de SynthR
Pourquoi as-tu décidé de créer ta société ?
Pour des raisons très matérielles : pouvoir commander chez des professionnels qui ne fournissent pas les particuliers de manière simple, pouvoir acheter hors taxes à l’étranger. L’exemple de Baloran aussi, bien que ce soit son activité principale, alors que je suis à la retraite. Également pour vendre le SYNTHR3 de manière officielle. Enfin, le fait que ma vie professionnelle (directeur d’achats, responsable informatique) ne m’ait pas permis d’assouvir mes envies de création technique.
Comment se sont faits tes premiers pas ?
J’avais une passion d’adolescence, le modulaire en DIY, où je pouvais associer la musique (j’ai une formation classique) et l’électronique qui a toujours été un hobby. J’ai réellement commencé avec le Formant, puis des extensions. J’ai tout vendu à l’arrivée de mon 1er enfant, faute de place et de temps. Puis en période de chômage vers 2007, j’ai découvert tout ce qui existait en DIY sur Internet et je n’ai pu résister. J’ai fait mes armes avec mon modulaire, en commençant à créer des modules personnels puis à vendre quelques circuits imprimés. À la demande de Jean-Luc Briançon, qui cherchait une alternative à Moog, j’ai commencé à cogiter et ça a abouti au SYNTHR3. Je connaissais depuis un certain temps Jean-Luc Lartigue, nous partagions les mêmes goûts. Il s’est lancé dans l’aventure avec son savoir-faire en numérique et programmation, ne cessant de progresser. Une autre rencontre, Laurent Cartaux, emballé par le projet, m’a aidé à mettre au point le boitier bois.
Pourquoi avoir décidé de créer le SYNTHR4 ?
Le SYNTHR4 est pour moi la suite logique du SYNTHR3, conçu dans un esprit modulaire (on pouvait interchanger chaque module, comme les filtres du SYNTHR4). C’était un synthé compliqué à réaliser et perfectible bien sûr. J’en ai fait dix. J’avais en tête une phase II, mais il n’y avait plus assez de demandes client, je l’ai donc abandonné pour basculer sur le SYNTHR4 avec plus de capacités audio et logicielles.
Quelles ont été les difficultés rencontrées ?
Elles sont de deux ordres : design et production. Design parce que j’ai pris le risque d’utiliser le SSI2130, un VCO intégré très peu connu et très différent du précédent, l’AS3340, lui très connu. Il me plaisait car il offrait des spécifications supérieures. Changement aussi de type d’enveloppe, en passant des AS3310 analogiques à des enveloppes numériques. Production, car j’ai transformé presque tous les circuits intégrés en CMS et que je réalise la soudure moi-même, avec un risque sur le VCO vu sa taille. Je lui ai donc créé un petit circuit imprimé et je sous-traite la soudure à un prototypiste.
Quelles sont tes plus grandes satisfactions ?
C’est que des musiciens s’intéressent à mon produit et lui trouvent quelques qualités. Bien sûr, on n’est pas dans le monde du polyphonique avec lequel je ne cherche pas à lutter.
Quels groupes et quels synthés t’ont le plus influencé ?
Sans hésiter Tangerine Dream et Klaus Schulze. Les synthés modulaires Moog bien sûr et le GRP A4.
Que fais-tu dans la vie quand tu ne développes pas tes machines ?
Actuellement, en dehors du ski l’hiver, de quelques randonnées l’été et de la maintenance d’une maison, je ne fais que produire du SYNTHR4. Le 10e est réservé et il ne me reste plus de temps pour les amis.
Quels-sont tes projets ?
Je pense que je vais m’arrêter là en matière de développement, sauf si un artiste a une commande sur mesure. Je continuerai à produire du SYNTHR4 tant qu’il y aura de la demande. La prochaine étape serait un polyphonique, je l’ai en tête, Jean-Luc est mûr maintenant, mais je ne pourrai pas lutter contre tous ces poly 6 voies et plus qui sortent dans les moins de 2000 €. D’autre part, un poly aujourd’hui c’est 30 % d’analo et 70 % de soft avec un processeur puissant, mais ça ce n’est pas pour moi.
VCF optionnels pour la route…