À peine la marque Sequential ressuscitée, Dave Smith retrouve son amical concurrent de toujours pour créer l’OB-6, un synthé analogique polyphonique aux couleurs Oberheim.
Lorsque Dave Smith se lance sur le marché au début des années 70, il atterrit sur les plates-bandes d’un autre pionnier de la synthèse, Tom Oberheim. Les deux compères vont alors se livrer une amicale concurrence pendant une bonne dizaine d’années, à coup de Prophet et d’OB. On retient surtout les duels Prophet-5 Rev2/Rev3 versus OB-X/OB-Xa/OB-8, entre 1978 et 1985. À cette époque, on est Sequential ou on est Oberheim. En effet, même si les modèles respectifs partagent les composants cruciaux depuis l’OB-Xa et le Prophet-5 Rev3 (CEM3340 pour les VCO, CEM3320 pour les filtres et CEM3310 pour les enveloppes), le reste du design leur donne un grain bien différent, qui fera la patte de chaque marque pendant toute cette époque : brute et gras pour les Prophet, riche et brillant pour les OB…
Ayant retrouvé l’usage de la marque Sequential en 2014, Dave se met à développer un nouveau synthé analogique polyphonique basé sur des VCO-VCF-VCA discrets, avec une ergonomie et un son proche du Prophet-5 d’antan. C’est une réussite bien méritée dès sa présentation au NAMM 2015, que nous avons eu le plaisir de tester ici même. Dans le secret le plus absolu digne des temples les plus obscurs, Dave et Tom vont alors se rapprocher pour développer un nouveau synthé couleur Oberheim, basé sur le SEM de 1974, intégré à la plateforme du Prophet-6. Il s’agit donc de concevoir une carte voix qui prendra place, en 6 exemplaires, sur la carte mère Sequential. Ainsi au NAMM 2016, les deux compères présentent la main dans la main leur nouveau bébé : l’OB-6. Pari réussi ?
Lignes bleues
C’est une nouvelle fois grâce à la société Thomann que nous avons pu tester l’OB-6 : elle nous a livré un instrument nickel, double emballage, comme d’habitude, la classe ! Donc encore un grand merci à elle…
L’OB-6 reprend les matériaux et les dimensions du Prophet-6. C’est un cœur Oberheim dans un corps Sequential. La qualité de construction est excellente : coque entièrement métallique, flancs vissés en bois… Le prix proposé est nettement supérieur à celui du Prophet-6 (qui pour sa part a baissé depuis son introduction), c’est donc un synthé très onéreux. Avec les lignes bleues sur fond noir et les boutons noirs en plastique rappelant les OB-Xa/OB-8, le look est un peu moins réussi que le Prophet-6. La sérigraphie omet les repères de valeurs autour des potentiomètres rotatifs, comme sur les originaux, dommage ! On dénombre 34 potentiomètres (dont certains, bipolaires, à détente centrale), 9 encodeurs crantés, 37 petits boutons poussoirs lumineux rectangulaires, 18 gros boutons poussoirs et un tas de petites LED rouges. On retrouve les 6 afficheurs à 3 LED 7 segments rouges du Prophet-6. D’ailleurs, la majorité de l’architecture sonore du Prophet-6 est reprise dans l’OB-6, mais la position des modules diffère toutefois : modulations à gauche, suivies des VCO, du mixeur, du filtre, des enveloppes et du VCA final.
La partie supérieure du panneau est occupée par l’horloge, l’arpégiateur, le séquenceur et les effets, sections quasi identiques au Prophet-6. Le bandeau inférieur est réservé à la transposition par octave (plus ou moins 2), le portamento, le mode des voix, le Drift, la gestion des programmes et les réglages globaux de la machine. Niveau ergonomie, on frise à nouveau la perfection : tous les paramètres sont directement accessibles en façade (seuls les paramètres globaux utilisent des fonctions secondaires et tertiaires des touches de programmes) ; pour faciliter la programmation, on trouve les fonctions BASIC PROGRAM (réinitialisation des réglages), COMPARE (soit au programme initial, soit au programme stocké à l’emplacement où on s’apprête à sauvegarder son œuvre), LIVE PANEL (mode Manuel correspondant à la position physique des commandes), différents types de réponse des potentiomètres (saut, relatif, seuil)… Les molettes de pitch et modulation sont rétro-éclairées en rouge, comme sur le Prophet-6. On les préfère aux leviers Oberheim de la première heure… Le clavier de 4 octaves, identique lui aussi, est sensible à la vélocité et à la pression ; il est très agréable au jeu, même si nous trouvons les courbes de vélocité proposées trop sélectives sur les faibles accents (jouer pianissimo n’ouvre pas assez subtilement les VCA). Le Prophet-6 proposant désormais 8 courbes de réponse au lieu de 4 depuis son OS1.3.1, on peut penser que l’OB-6 bénéficiera de la même mise à jour ; nous avons contacté le support DSI pour mener l’enquête…
Connectique et entrailles
La connectique est intégralement placée à l’arrière et en tous points identique à celle du Prophet-6 : de droite à gauche, on trouve une sortie casque (jack 6,35 stéréo), les sorties audio gauche/droite (jacks 6,35 asymétriques), 4 prises pour pédales (2 continues pour contrôler la fréquence de coupure du filtre passe-bas et le volume global, 2 interrupteurs pour contrôler le Sustain et le séquenceur), un trio MIDI (In/Out/Thru), une prise USB type B (MIDI, CC, NRPN, Sysex, Dump en émission/réception sans besoin d’installer un driver, mais pas d’audio via USB) et le connecteur IEC pour cordon secteur (alimentation interne universelle, les bonnes habitudes semblent enfin prises). Bon point qualité, tous les jacks sont solidement vissés au panneau arrière. Un petit retour sur l’entrée pédale dédiée au séquenceur : elle permet de lancer la lecture du séquenceur et de l’arpégiateur, ou de déclencher les pas du séquenceur avec une impulsion audio externe (trigger), ou encore de « Gater » les enveloppes. Il n’y a hélas pas d’entrée audio pour traiter un signal externe, on en a pris l’habitude sur les polyphoniques DSI…
Pour zieuter dans les entrailles de la bête, de même conception mécanique que le Prophet-6, on enlève 2 vis sur chaque flanc, puis à nouveau 2 vis de part et d’autre du cadre métallique périphérique, puis on relève le panneau avant fixé sur une charnière. Un petit câble maintient le panneau à la verticale, ce qui permet d’admirer l’intérieur : d’abord, une grande carte mère comprenant l’électronique numérique, la sommation des voix et la connectique ; puis 6 cartes voix enfichées à la verticale comme des barrettes SIMM ; ces dernières portent des circuits CMS de part et d’autre, avec beaucoup de composants discrets (résistances, capas, transistors, quad AOP, doubles OTA…). Elles portent aussi le schéma de principe du SEM dont elles s’inspirent largement, ainsi que la signature de Tom Oberheim (cf. photos). À droite, l’alimentation interne est protégée par une tôle perforée. Des petits connecteurs relient la carte mère au panneau de commandes, aux molettes, au clavier et à l’alimentation. On est donc bien en présence de cartes filles Oberheim greffées sur une carte mère de Prophet-6. Encore une fois, ça sent les neurones dans la conception…
Grain Oberheim
Un petit mot sur les fonctions globales de l’OB-6 avant de plonger dans le son et la synthèse. Comme sur le Prophet-6, on peut régler la transposition par demi-ton sur plus ou moins une octave, accorder finement l’appareil, choisir le canal MIDI (1–16 ou tous), le statut de l’horloge (interne, MIDI, USB), les modes d’émission et de réception des commandes MIDI (CC ou NRPN), la méthode de transmission des Sysex (MIDI ou USB, pour les programmes, les 16 tempéraments alternatifs interchangeables ou les mises à jour d’OS), le mode Local, le mode de réponse des potentiomètres (déjà évoqué), la courbe de vélocité (4 types – espérons 8 dans un futur OS), la courbe de pression (4 types) ou encore le dump des programmes… Tout cela, nous l’avons dit, est accessible en mode Global, grâce aux 10 touches programmes qui prennent chacune deux nouvelles fonctions, sérigraphiées en façade, accessible via l’écran à LED principal et deux touches d’incrémentation/décrémentation… c’est le seul cas où l’OB-6 nous invite dans ses menus, pas de quoi se perdre !
L’OB-6 renferme 1 000 programmes, dont 500 Presets et 500 mémoires utilisateur, organisés en 10 banques. Dès le premier son (000), le grain Oberheim nous saute aux oreilles. On se rend compte immédiatement que l’OB-6 incarne bien cette couleur généreuse et brillante. Les strings cuivrés et les cuivres stringés, spécialités maison, sont excellents. Dès que le filtre 2 pôles se met en action, ça colore agréablement, sans auto-osciller à résonance élevée. De nos vénérables Oberheim, c’est de l’OB-8 que l’OB-6 se rapproche le plus, lorsqu’on cherche à le faire sonner ainsi (OB-8 en mode filtre passe-bas 2 pôles). Il est moins crémeux qu’un OB-X ou qu’un SEM, certainement parce que les oscillateurs sont différents. Mais cessons-là la comparaison, car l’OB-6 offre des territoires sonores bien plus vastes que nos chers vénérables OB.
Déjà l’expressivité et les modulations leur sont supérieures ; ensuite, la section d’effets parfaitement adaptée apporte une finition impeccable : un petit coup de délai, un phaser délicat, un chorus large ou une réverbe ample… Mais l’OB-6 ne se limite pas aux gros sons polyphoniques. Il est notamment capable d’une étonnante variété de basses : grasses (en utilisant toutefois l’unisson pour obtenir une largeur capable de rivaliser avec nos vieux coucous) ou filtrées (avec le filtre à réponse variable, on va de la rondeur Moog au pincement SEM, en passant par l’acidulé TB-303). La rapidité des enveloppes permet des sons claquants avec des attaques ou déclins courts. Pour les leads, cela va de l’impulsion techno aux voix synthétiques, en passant par les saturations qui accrochent naturellement (avec la distorsion analogique intégrée). On peut aussi créer des sons de cloche ou des drones (effet Ring Mod Oberheim modélisé, LFO rapides…). L’OB-6 ne sonne pas comme un Prophet-6, il y a certes une petite zone de recouvrement sur les sons basiques, mais dès qu’on filtre ou qu’on module, chacun affiche sa propre personnalité, bien marquée.
- DSI/Oberheim OB-6 Programs26:34
- OB 6 00 00:50
- OB 6 01 00:29
- OB 6 03 00:23
- OB 6 04 00:20
- OB 6 07 00:39
- OB 6 12 00:12
- OB 6 13 00:18
- OB 6 16 00:29
- OB 6 18 00:15
- OB 6 19 00:34
- OB 6 20 00:23
- OB 6 21 00:31
- OB 6 22 00:20
- OB 6 29 00:37
- OB 6 31 00:35
- OB 6 36 00:38
- OB 6 41 00:28
- OB 6 43 00:29
- OB 6 52 00:33
- OB 6 62 00:24
- OB 6 64 00:31
- OB 6 66 00:32
- OB 6 70 00:44
- OB 6 82 00:28
- OB 6 93 00:34
Tom and Jerry
L’OB-6 est un synthé analogique polyphonique 6 voix, dont le son est basé sur des composants analogiques discrets (VCO, VCF, VCA). Pas le moindre circuit intégré (type SSM/CEM/DSI-120) pour générer les sons. Le pilotage en tension des composants analogiques et la génération des modulations sont numériques, mais avec suffisamment de puissance DSP pour ne pas créer d’aliasing à fréquence élevée. L’encodage de certains paramètres cruciaux nous est toutefois apparu insuffisant, tels que la fréquence de coupure du VCF limitée à 165 valeurs (par demi-ton, couvrant 7 octaves) ; du coup, on entend un effet d’escalier quand on tourne le potentiomètre, lorsque la résonance est prononcée (c’est toutefois moins prononcé que sur les anciens OB) ; c’est d’autant plus rageant que la résonance du VCF ou les formes d’onde variables des VCO sont codées sur 256 valeurs, et que la machine transmet les NRPN MIDI ! Dommage sur un synthé de cette classe, pour le coup on se retrouve presque au temps des OB… Tant qu’on râle, on en profite pour passer une couche sur le fait que l’OB-6 ne peut pas séparer ou empiler deux programmes, contrairement aux OB-Xa et OB-8 vieux de 30–35 ans !
Le son prend sa source au sein de 2 VCO un peu différents de ceux du Prophet-6. On peut les accorder sur 9 octaves sur une plage de 16 Hz à 8 kHz (5 octaves avec le potentiomètre, le reste avec les touches de transposition d’octave), avec un réglage par demi-ton et un désaccordage fin (sur plus ou moins un quart de ton) pour le VCO2. Les OB permettaient de mélanger les formes d’ondes de leurs VCO pour enrichir le contenu harmonique, l’OB-6 permet de régler continuellement (à la discrétisation de l’encodage près) la forme d’onde pour chaque VCO. Sur le VCO1, on peut passer d’une onde dent-de-scie à une onde carrée. Sur le VCO2, on peut passer d’une onde triangle à une onde dent-de-scie, puis à une onde carrée. Dans cette dernière position, un potentiomètre permet de régler la largeur d’impulsion (onde carrée au centre), par ailleurs modulable comme nous le verrons. On peut basculer le VCO2 en basse fréquence (utile pour les modulations, nous y reviendrons) et le déconnecter du suivi de clavier. Le VCO1 peut être synchronisé par le VCO2 (son cycle redémarre à la fréquence imposée par le VCO2), pour produire des effets harmoniques riches lorsque les deux VCO sont à des fréquences différentes. Les VCO étant très stables, il y a une fonction rebaptisée ici Detune (ex-Slop), pour simuler l’instabilité de l’accordage des VCO vintage, très utile… Le VCO1 possède un Sub-VCO, générant une onde carrée (triangle sur le Prophet-6) à l’octave inférieure. On trouve aussi un générateur de bruit blanc. Les 4 sources sonores sont finement dosées avant d’attaquer les VCF. Quand on pousse les niveaux du mixeur, on peut faire saturer les circuits. C’est bien plus souple que ce que les vieux OB permettaient en matière de mixage des VCO !
Filtre à SEM
Les derniers produits DSI/Sequential ne font plus usage du CI DSI120. Ils utilisent au contraire des filtres analogiques discrets. L’OB-6 n’échappe pas à la règle, avec un unique filtre multimode discret spécifique, directement inspiré du filtre SEM Oberheim. Il s’agit d’un filtre 2 pôles résonant continuellement variable entre les modes passe-bas, réjection de bande (Notch) et passe-haut. Un sélecteur permet de le faire basculer en mode passe-bande. Ce filtre est un petit bijou, responsable en très grande partie du grain Oberheim. Développé sur le SEM au milieu des années 70, il sera intégré aux systèmes 2, 4, 8 voix (TVS, FVS, EVS) puis porté sur l’OB-X, dans une version simplifiée (mode passe-bas uniquement, bien que les autres modes soient « récupérables » sur les circuits internes). Sur l’OB-6, on peut régler la fréquence de coupure (sur 165 pas, par demi-ton), la résonance (sur 256 pas), la transition entre les modes (passe-bas, Notch, passe-bande), le contour d’enveloppe (bipolaire) sur la FC, le suivi de clavier (0, 50 % ou 100 %) sur la FC, l’activation de la vélocité sur l’enveloppe VCF et l’inversion en mode passe-bande. Ce filtre ne peut pas entrer en auto-oscillation, il est au contraire très colorant, responsable du son crémeux Oberheim.
Sur l’enveloppe de filtre, on retrouve la même astuce que sur le Prophet-6 dans la section X-Mod : en choisissant « FILTR FREQ » comme unique destination, jouer sur la quantité de « FILTER ENV » en conjonction avec « AMOUNT » de la section VCF modifie la courbe de réponse de l’enveloppe, l’accélérant ou la ralentissant. Excellente initiative, que ne permettaient pas les anciens OB dotés d’enveloppes analogiques. Le signal passe enfin dans la section VCA finale, dotée d’une enveloppe ADSR dont la quantité de modulation est assignable à la vélocité.
En sortie audio, on peut régler l’espacement stéréo des voix (produites alternativement à gauche et à droite) et le volume programme (en plus du volume global qui, lui, n’est pas mémorisé). Cette mémorisation est d’autant plus utile pour gérer les écarts de niveau entre les programmes, notamment lorsque les 6 voix sont jouées à l’unisson, que ce soit un désaccordage (programmable via la fonction DETUNE) ou un accord automatique.
X-Mod
Les OB possédaient une petite matrice de modulation pour assigner l’unique LFO à certaines destinations, comme le pitch des VCO, la largeur d’impulsion des ondes carrées, la coupure du VCF ou le VCA. Il faudra attendre l’Xpander ou le Matrix-12 pour voir apparaitre une matrice de modulation digne de ce nom.
Sur l’OB-6, on a un mélange des deux, tout en restant simple et en accès direct, avec un LFO et une section X-Mod. Le LFO est cette fois numérique, mais reste unique et global. Il est capable d’osciller jusque dans les niveaux audio (500 Hz) et peut, si on le souhaite, se synchroniser à tout ce qui bouge (séquenceur, arpégiateur, délais, horloge MIDI). Le cycle du LFO est redéclenché à chaque nouvelle note, sauf si des notes sont déjà maintenues, auquel cas il poursuit son cycle. Il offre 5 formes d’onde judicieusement choisies : triangle bipolaire, dent-de-scie (descendante) positive, rampe (ascendante) positive, carré positif et S&H bipolaire (onde aléatoire à paliers). Avec l’onde S&H, lorsqu’on tourne le potentiomètre de fréquence complètement à droite, on accède à une sixième forme d’onde : le bruit blanc, très astucieux ! Le LFO peut moduler 7 destinations : la fréquence de chaque VCO, la PWM de chaque VCO (séparément), le VCA, la fréquence de coupure du VCF et le mode du VCF (transition passe-bas/Notch/passe-haut). On peut régler la quantité de modulation initiale appliquée par le LFO. Si cette dernière est à zéro, seule l’action de la molette de modulation engendre une modulation.
Passons maintenant à la X-Mod, une petite matrice à modulations polyphoniques. Comme sur le Prophet-6, nous avons 2 sources (enveloppe du VCF et VCO2) qui peuvent être routées vers 5 destinations. Chaque source opère avec sa propre quantité de modulation bipolaire. Les deux modulations sont ensuite additionnées et routées vers les destinations activées, parmi lesquelles le VCO1, la forme d’onde (continue) du VCO1, la largeur d’impulsion du VCO1, la fréquence de coupure du VCF, le mode du VCF (transition passe-bas/Notch/passe-haut) et la transition mode normal/passe-bande du VCF. C’est ainsi qu’on peut faire de la FM entre les VCO, moduler le filtre à fréquence audio ou faire varier son mode de réponse en temps réel. On retrouve bien l’esprit des modulations matricielles des derniers dinosaures Oberheim, avec des modulations maîtrisées, sans effet numérique indésirable.
L’OB-6 peut aussi moduler les sons via l’aftertouch du clavier (pression monophonique). La modulation est bipolaire et peut atteindre 6 destinations activées individuellement : fréquence du VCO1, fréquence du VCO2, profondeur de modulation du LFO, volume, fréquence de coupure du VCF et mode du VCF. Terminons ce chapitre dédié aux modulations par le portamento, à vitesse ou à temps constants, déclenché pour toutes les notes (lorsqu’il est activé) ou uniquement entre notes liées. Voilà au final une section bien pensée, accessible en direct, qui peut toutefois paraître légère aux habitués des grosses matrices de modulation des derniers gros Oberheim ou de certains DSI.
Effets modélisés
La section d’effets a été améliorée par rapport à celle d’origine sur le Prophet-6, avec des nouveaux algorithmes modélisant des effets vintage Oberheim. D’ailleurs, le Prophet-6 bénéficie d’une mise à jour intégrant les nouveaux effets. On trouve une section d’effets numériques et une distorsion analogique. Les effets numériques sont générés par un DSP travaillant à 24 bits/48 kHz, puis convertis en analogique, où ils reçoivent tout ou partie du signal du VCA, dosé avec le potentiomètre « MIX » (balance Wet/Dry). Ils peuvent être désactivés (True Bypass), afin de conserver un signal analogique pur pour ceux qui le souhaitent. Les réglages d’effets sont sauvegardés avec les programmes. On a donc deux effets numériques placés en série (A vers B). Chacun offre plusieurs algorithmes : simulation de BBD, délai numérique, chorus vintage, flanger vintage à résonance élevée, flanger vintage sans feedback, phaser à 6 étages avec résonance élevée, phaser à 6 étages avec résonance faible, simulation du phaser 6 étages Oberheim (phaser délicat avec résonance douce) et simulation du Ring Mod Oberheim (modulation d’amplitude avec suivi de clavier, capable d’osciller dans les niveaux audio).
En plus de ces 9 algorithmes, l’effet B possède 4 types de réverbération : hall, pièce, réverbe à plaque et réverbe à ressorts. Ces choix sont judicieux sur un synthé analogique polyphonique. Il n’y a que deux paramètres éditables par effet : temps et feedback pour les délais, vitesse et profondeur pour les chorus/flanger/phaser, modulation et suivi de clavier (marche/arrêt) pour le Ring Mod, temps et premières réflexions pour les réverbes hall/pièce/plaque, et enfin déclin et tonalité pour la réverbe à ressorts. Les temps de délai peuvent être synchronisés à l’arpégiateur, au séquenceur ou à l’horloge MIDI, suivant différentes divisions temporelles (de 4 temps à la double-croche, en passant par les triolets et les valeurs pointées), à concurrence d’un retard maximum d’une seconde (au-delà, ils basculent sur la division temporelle double). Bref, on va à l’essentiel, un peu comme chez Nord. La qualité de ces effets est très bonne et colle parfaitement au territoire sonore de la machine, encore plus avec les nouveaux effets. En sortie, l’OB-6 offre une distorsion analogique stéréo, dont on peut régler la quantité en maintenant la touche EFFECT plus d’une seconde et en tournant le potentiomètre MIX.
Arpège ou séquence ?
L’OB-Xa et l’OB-8 possédaient un arpégiateur, mais ces derniers avaient disparu sur l’Xpander et le Matrix-12. Avec l’OB-6 (tout comme avec le Prophet-6), on a les deux, mais pas en même temps ! L’arpégiateur est assez basique : on peut en régler le tempo (avec un bouton TAP, un encodeur ou la synchro MIDI, avec plusieurs divisions temporelles), l’étendue d’action (sur 1, 2 ou 3 octaves vers le haut), le motif de jeu (vers le haut, vers le bas, alterné, aléatoire ou suivant l’ordre des notes jouées). Avec la fonction HOLD activée, on peut ajouter des notes à l’arpège en cours. Depuis l’OS 1.5.5, les notes arpégées sont transmises via Midi ou USB, merci…
Le séquenceur, derrière ses deux boutons, est tout aussi basique mais n’en est pas moins intéressant. Il est identique à celui du Prophet-6, avec 64 pas de 1 à 6 notes. La programmation se fait pas à pas. On appuie sur RECORD, on joue une note ou un accord, et tant qu’on maintient au moins une note, on peut en ajouter d’autres dans le pas en cours. Dès qu’on relâche toutes les notes, l’OB-6 incrémente d’un pas. On peut créer des pas de notes liées ou de silences. En appuyant sur PLAY, l’enregistrement s’arrête et la lecture commence jusqu’au dernier pas entré où elle boucle. On ne peut pas enregistrer de mouvement des potentiomètres ou des CC MIDI, c’est bien dommage. Impossible également d’éditer/corriger les séquences après coup (on peut juste effacer les pas en reculant dans la séquence). On peut jouer par-dessus le séquenceur, à concurrence de la polyphonie maximale. En maintenant la touche RECORD, on peut transposer le séquenceur à la volée, fonction bien appréciable. Également depuis l’OS 1.5.5, les notes sont transmises via MIDI ou USB, comme pour l’arpégiateur ! Chaque séquence est sauvegardée avec son programme.
Conclusion
Comme pour le Prophet-6, ce test fut un véritable plaisir à réaliser. La couleur sonore fait incontestablement référence aux gros Oberheim des 80’s, avec cette générosité et ce brillant sur les sons polyphoniques. Mais il ne faudrait pas cantonner l’OB-6 à l’imitation de ses ancêtres. La variété sonore nous a surpris si bien que nous avons enregistré un tas d’exemples audio. Une belle variété de basses, de leads ou de textures métalliques sont possibles avec cette machine. Ceci est en particulier dû à l’excellent filtre à réponse variable, dérivé du légendaire SEM. Du coup, sa filiation avec le Prophet-6 est toute relative, du moins sur le plan sonore. Alors, lequel prendre ? Les deux feront la paire, comme à la grande époque où les fans de Prophet-5 et d’OB-X s’affrontaient… L’OB-6 hérite toutefois des défauts du Prophet-6 dont il reprend en grande partie la conception : escaliers audibles sur le filtre à résonance élevée quand on manipule le potentiomètre de coupure et mono-bitimbralité. Avec la conception des voix analogiques par carte fille, on s’était pris à rêver d’un super Prophet avec grand clavier et modes split/dual… et ce fut une réincarnation cosignée Oberheim ! Saluons à nouveau le génie de Dave, associé ici au talent de Tom, pour un petit bijou qui mérite amplement l’Award valeur sûre Audiofanzine 2016 !
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