Sorti en 1978, le Prophet-5 est le premier synthé analogique polyphonique entièrement programmable. Le Prophet-5 Rev2 conserve les circuits SSM du rarissime modèle Rev1, qui lui apporte ce caractère sonore tant prisé et cette stabilité toute relative si décriée…
![Test du Prophet-5 Rev2 de Sequential : Le pionnier](https://img.audiofanzine.com/img/fr/article/cover/3493.jpg?fm=pjpg&w=704&h=396&fit=fill&s=43d4797f4c1db880805220fd1271726b)
Magnifique objet
La connectique est placée sur le panneau arrière : sortie audio mono, entrée CV/Gate (commande de la voix n° 5 à 1V/octave), sortie CV/Trigger, pédale de relâchement (ancêtre de la pédale de maintien), entrée CV vers le VCF, entrée CV vers le VCA, interface K7 (en option pour les premiers modèles) et interrupteur de protection mémoire. Le cordon secteur est captif, l’alimentation est interne. Sous le capot, on découvre une électronique entièrement traversante, avec une carte analogique aussi jolie que créative : des dessins exotiques, des pistes aux courbes magnifiques, rien de symétrique… tout cela est fort peu rationalisé ! Les VCO SSM2030 portent une résistance de compensation en température sur le dos enfermée dans une gaine thermosoudée. Le nombre d’ajustables fait peur, il n’y a pas de dissipateur de chaleur, on comprend vite les problèmes de stabilité de la machine.
Son emblématique
Quiz comparatif
Ayant sous la main les Rev2, Rev3 et Rev4, il était difficile de résister à monter un petit quiz : six programmes emblématiques issus des banques originelles de Prophet-5 ont été enregistrés : Brass (11), Low Strings (12), Mute Clav (13), Sync I (17), Octave Sawteeth (35) et Sweeping Harmonics (44). Les réglages entre Rev3 et Rev4 n’ont même pas été retouchés, tellement ils étaient semblables. Il a fallu en revanche pas mal triturer le Rev2, plus fantasque, pour le faire rentrer dans le rang. Les trois pistes étaient toujours ouvertes, sinon on aurait tout de suite pu distinguer les Rev2 et Rev3, pas exempts de bruit de fond, du Rev4, vraiment silencieux. Le but est donc de deviner, pour chaque extrait, l’ordre dans lequel les différentes révisions sont jouées. Pour les plus téméraires, les réponses sont à poster dans les commentaires sur le test. Allez, courage…
![](https://img.audiofanzine.com/images/u/audio/489259.png)
- Quiz 1100:33
- Quiz 1201:18
- Quiz 1300:37
- Quiz 1701:07
- Quiz 3500:28
- Quiz 4401:04
SSM Inside
Le VCF est un filtre résonant passe-bas 4 pôles uniquement. On peut en régler la fréquence de coupure (avec des escaliers très audibles, nous l’avons dit), la résonance, la modulation par l’enveloppe dédiée (positive uniquement) et le suivi de clavier (0 ou 100 %). Lorsqu’on monte la résonance, les fréquences ont tendance à s’écraser un peu. Au-delà de 7 sur 10, le filtre entre en auto-oscillation, qui peut atteindre des niveaux très élevés si on pousse le réglage. Le signal termine sa course dans le VCA, possédant sa propre enveloppe, avant de rejoindre directement la sortie. Il n’y a ni effet, ni arpégiateur, ni séquenceur dans un Prophet-5. Les 5 voix peuvent être jouées à l’unisson, avec priorité à la dernière note jouée. Il n’y a pas de possibilité de désaccordage, mais l’accordage naturellement approximatif des VCO SSM fait merveille ici. C’est uniquement en mode Unisson que le Glide (portamento) est actif. Les synthés Oberheim concurrents avaient un portamento polyphonique, eux !
Modulations polyphoniques
La molette de modulation permet de doser l’action de 2 sources globales (LFO et bruit rose) vers 5 destinations cumulables (fréquence du VCO A, PWM A, fréquence du VCO B, PWM B et VCF). Les deux sources sont mélangées par un potentiomètre de balance, permettant de combiner leur action (50/50 au centre). Le LFO, toujours en cycle libre, offre trois ondes cumulables (dent de scie, triangle, carrée — donc pas de S&H) et travaille entre 0,04 et 20 Hz, soit juste en dessous de l’audio. La quantité de modulation dépend de la position de la molette : en bas, aucune modulation ; en haut, modulation maximale.
Enfin, la section Poly-Mod permet de réaliser des modulations polyphoniques, par opposition à la molette, globale pour toutes les voix. On trouve 2 sources (enveloppe du VCF et VCO B en audio) et 3 destinations cumulables (fréquence du VCO A, PWM A, VCF). Chaque source dispose d’un dosage pour la quantité de modulation. Cette section est vraiment très intéressante, car elle induit des fluctuations entre les voix, liées aux imperfections de calibration, tout en permettant des modulations audio (FM exponentielle, FM sur le filtre, PWM audio). Là, le Prophet-5 sort des sentiers battus et se différencie des concurrents Oberheim, moins dotés dans ce domaine. Tous les réglages (hormis le volume final) sont sauvegardés, nous l’avons dit. L’ensemble de la mémoire de programmes peut être archivée et réinjectée ultérieurement en audio via l’interface K7, en option sur les premiers modèles.
Kits d’extension
On trouve assez peu de kits d’amélioration pour le Prophet-5 Rev2. D’abord, un kit Midi Kenton assez classique. Ensuite, un kit d’interface K7 permettant de sauvegarder ses 40 programmes en audio (). Enfin, un kit d’extension de 40 à 120 programmes (carte avec RAM additionnelle et sélecteur 3 positions à installer en externe, proposé également par analogsynthservice.com).
![](https://img.audiofanzine.com/images/u/audio/489223.png)
- 01 Famous Stabs00:16
- 02 Soft Pad00:21
- 03 Soft Brass00:10
- 04 Low Strings00:54
- 05 Funk Clav00:20
- 06 Little PWM00:44
- 07 Slow Brass00:30
- 08 Poly Filter00:14
- 09 Filtered Bass00:33
- 10 Boss Bass00:28
- 11 Q Bass00:21
- 12 Daft Church00:17
Conclusion
Sa production, s’étalant de 1978 à 1984, n’a pas pour autant été un long fleuve tranquille. Le Prophet-5 aura connu différentes révisions, avec des changements de CI analogiques, une rationalisation des cartes et une modernisation permanente de la partie numérique, jusqu’au Midi. Tous les modèles possèdent les mêmes fonctions de synthèse à quelques détails près. Les différences commencent dans la gestion et le nombre de programmes. Mais c’est surtout dans le caractère sonore qu’elles se creusent. Le Rev2 est le modèle le plus convoité, plus fiable que le Rev1 mais pas pour autant totalement fiabilisé, conservant son grain chaleureux tant prisé. Le Rev3 est plus rationalisé, stable et fiable, au détriment d’un caractère un peu plus brut et raide. Le choix entre les deux dépend du budget, de la proximité d’un bon technicien et de rares opportunités. Mais quel que soit le modèle, les archéologues de la synthèse auront une légende entre les mains. À eux d’en faire le meilleur usage !