Après les échantillons et les boucles, FXpansion profite de sa maîtrise de la modélisation issue de DCAM pour présenter Tremor, une boîte à rythmes aux sonorités vintage.
Depuis ses débuts en 1999 avec son « Amulet » VST-DX Adapter, FXpansion, alors connu sous le nom d’Amulet Audio Software, n’a pas chômé : changement de nom, d’abord, et production régulière de logiciels, dont certains très remarqués : Series One (pour Direct-X, Mac, BeOS, Pulsar…), VST-to-AudioUnit Adapter, DR-002, DR-005, l’excellente DR-008, quelques annonces non suivies de résultats (MindFX 1 & 2, SoL et Drum Nine), le révolutionnaire BFD en 2003, puis Guru, drum sampler co-réalisé avec Devine Machine en 2005, BFD2 en 2007, la quatuor de synthés DCAM en 2009, Geist en 2010 et Tremor, enfin, annoncé en janvier de cette année.
Laissant de côté ce qui était précédemment au cœur de la plupart de ses instruments virtuels consacrés à la batterie, à savoir l’échantillonnage, l’éditeur a profité des techniques de modélisation mises au point pour DCAM, et propose une boite à rythmes aux sonorités vintage. Voyons ce qui se cache sous le capot.
Introducing FXpansion Tremor
Le logiciel est disponible au téléchargement uniquement sur le site de l’éditeur (pour la somme de 119 euros TTC). Téléchargement et installation ne posent aucun problème (Tremor pèse à peine 39 Mo), l’autorisation s’effectuant via l’habituel FX License Manager et le numéro de série fourni à l’achat. Compatible Mac et PC, l’instrument est fourni sous forme d’application autonome et de plug-ins compatibles 32 et 64 bits (sauf RTAS, 32 bits seulement).
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Pour parler rapidement technique, FXpansion n’a pas modélisé physiquement les paramètres propres d’éléments de batterie, de percussions, les modes propres des membranes, ou de formes (cylindres, plaques de métal, etc.) comme a pu le faire AAS avec Chromaphone par exemple. À la place, l’équipe a profité des recherches effectuées pendant le développement des synthés DCAM, et a implémenté une modélisation d’oscillateur analogique, appelé « cloud oscillator », qui dispose de plusieurs partiels et harmoniques, qui peuvent justement être ordonnés pour reproduire les fameux modes propres des membranes. Le tout complété d’effets eux aussi modélisés d’après des effets et principes analogiques, d’un step sequencer sophistiqué, et d’un système de modulation apparemment très performant.
Au cœur du tremblement
L’architecture sonore repose donc sur un ensemble de huit synthétiseurs complets et semblables, l’éditeur prenant le pari de fournir un ensemble audio capable de répondre à toutes les situations plutôt que de proposer un synthé avec oscillo dédié par élément, comme d’autres le font. Deux types de présentation sont disponibles, Kit et Synth.
La première présente une interface très simplifiée, composée de huit slots (plus un) avec trois à quatre rotatifs aux assignations personnalisées suivant l’un des huit instruments disponibles (Kick, Snare, Hi Har Closed et/ou Hi Hat Open, Cymbal, Synth, Tom, FX, Clap). On dispose ensuite des habituels Mute, Solo, Pan et Level, ainsi que d’un Preview. Vient ensuite un menu déroulant Output, permettant de choisir entre les neuf sorties, et un autre offrant le choix entre des présets par instrument (on peut ainsi avoir un kit composé de trois Kick, trois Snares et deux Hi Hat). Un dernier Slot ne comprenant qu’un fader et un indicateur de niveau permet d’ajuster le volume global.
Un clic sur Synth permet d’afficher le moteur audio de chaque slot, et là, on passe aux choses sérieuses. Pas moins de 18 modules constituent le synthé (rappelons qu’il y en a huit indépendants…) ; commençons par les quatre LFO, dont deux sont en fait globaux, ce qui signifie que l’on dispose de deux LFO par synthé, tous pouvant être synchronisés au tempo en fonction de divisions rythmiques, et offrant plusieurs formes d’ondes (que l’on vérifiera dans l’écran central dont l’affichage varie selon la position de la souris sur l’un ou l’autre des paramètres). On bénéficie ensuite d’un générateur de Sample & Hold. Viennent ensuite trois générateurs d’enveloppe AHD (attaque, maintien et chute, le quatrième paramètre Curve permettant de régler la courbe de la chute), l’un assigné uniquement à l’amplitude, les deux autres librement routables.
Le cœur sonique de Tremor est constitué de l’ensemble constitué par Oscillator et Harmonics. Le premier présente les réglages que l’on est en droit d’attendre, Pitch, Shape (Saw, Square, Triangle en continu), accord, FM, PWM et Sync. C’est avec Harmonics que le synthé se différencie : ce module agit selon deux modes, Membrane, qui reproduit donc l’agencement des partiels d’une membrane circulaire en vibration, et Harmonic qui correspond à des sons plus classiques. Voici six exemples de l’un et l’autre, commençant par Membrane :
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On dispose aussi d’un générateur de bruit, d’un Mixer offrant outre le volume de l’oscillateur et celui du Noise, un Suboscillo, jusqu’à trois octaves. Un switch Show Set-up permet d’ouvrir une sous-fenêtre dans laquelle on pourra basculer le synthé en mode poly (mono par défaut), l’assigner à l’un des trois Link Groups disponibles (ce qui donnera un déclenchement simultané des synthés assignés), choisir l’un des groupes Choke (qui arrêtera la voix jouant sur le synthé assigné au même groupe), etc.
On termine par le filtre, doté d’un mode Fat, et qui regroupe la plupart des filtres déjà présents dans Geist, par exemple, et dont on connaît la très bonne qualité. Ce filtre est entouré de deux Drive, l’un Pre l’autre Post, disposant de sept modes, l’ensemble revenant quasiment à l’architecture du filtre disponible dans BFD2.
Du mouvement, encore
Autre élément de l’instrument, et pas des moindres, le séquenceur, qui fonctionne selon deux modes, Pattern et Graphs. Un Preset regroupera ainsi le kit choisi, les Patterns y correspondant (jusqu’à 24).
Le mode Patterns affiche une classique grille de 32 pas, que l’on pourra définir en termes de durée (d’une mesure à une quadruple croche en triolets !) et dont on remplira les cases via un outil crayon, le glissement cliqué-tiré permettant de modifier la vélocité (ou les Repeats, ou les Probability, un réglage permet de définir une certaine forme de jeu aléatoire, réglant la probabilité du son d’être déclenché à chaque tourne du pattern) ou via la fonction Insert, l’éditeur ayant fourni un certain nombre de rythmes prédéfinis.
Voici un exemple de pattern, puis ce même pattern dont quelques éléments ont été changés en Repeats.
Chaque instrument bénéficie bien entendu de sa propre ligne, avec Mute et Solo, on dispose d’un Swing, de fonctions de copie, déplacement, etc., assez sophistiquées. Mais, jusque-là, rien que de très habituel, même si l’ergonomie et la conception ne souffrent aucun reproche.
Ce serait ignorer les petites flèches à droite de chaque ligne d’instrument. Elles permettent en effet de paramétrer une boucle indépendante par instrument, ce qui permet de créer instantanément et de façon totalement indépendante des lignes polyrythmiques à l’intérieur d’un rythme de base !
Voici le même pattern que précédemment, donc un bon vieux 4/4 sur deux mesures, avec le Rim tournant en 10/8, la Snare en 15/16, etc. (voir capture d’écran).
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Simplissime, super efficace, bravo FXpansion !
L’autre mode, Graphs, permet comme son nom l’indique, de créer des courbes, graphiques et pas que l’on utilisera comme sources de modulation grâce aux boutons dédiés dans la partie Transmod (voir encadré). Sachant que l’on dispose de quatre Graphs par pattern…
Pour finir, voici des exemples de patterns, reflétant parfaitement quelques-unes des possibilités de l’instrument, sachant que l’on peut aller encore plus loin, puisque l’on dispose réellement de huit synthés complets, la principale différence avec un synthé « normal » étant l’absence d’enveloppe traditionnelle (il faudrait au moins une ADSR).
Téléchargez les fichiers sonores : flac.zip
Bilan
Nier la qualité de spécialiste des batteries virtuelles/boîte à rythmes serait faire preuve d’une bien belle mauvaise foi. Depuis la DR-OO2 (gratuite…) jusqu’à BFD2, de Guru à Geist, l’éditeur a fait depuis longtemps ses preuves, proposant des produits de qualité, et d’une conception alliant la plupart du temps efficacité et ergonomie. Parfois, il lui faut un peu de temps avant que son produit ne soit parfaitement stable (rappel des premières versions de BFD, par exemple), mais c’est plutôt rare. Avec Tremor, quasiment aucun souci, à l’exception d’une plantade sévère m’obligeant à jeter les préférences ; mais, bon, je n’aurais pas dû changer de fréquence d’échantillonnage pendant que le standalone était actif…
Le synthé au cœur de Tremor est d’une très bonne qualité, en tout cas pour faire ce pour quoi il est prévu : du son percussif vintage, voire plus récent sans oublier tout type d’effet, même le plus farfelu. Les effets sont bien connus maintenant, d’excellente qualité, même si l’on peut regretter l’absence des réverbes BReverb et des algos du Vintage Limiter de PSPAudioware. À la différence de logiciels équivalents utilisant des modules sonores plus spécialisés par instrument, il faudra ici passer plus de temps à trifouiller et paramétrer dans tous les sens, mais l’ouverture de la synthèse ici adoptée permettra plus et différent. Et cela est à ce prix. De plus, d’un point de vue son et réalisme, cette synthèse est largement supérieure à l’utilisation d’échantillons.
De son côté, le séquenceur est une vraie avancée, que l’on aimerait retrouver sur tous les instruments utilisant ce type de step sequencer (je n’ai pas trouvé trace d’autre produit fonctionnant de la même manière pour la polyrythmie, merci de compléter dans le forum si vous en connaissez). Il mériterait même un Award du type « innovation technique au sein d’un produit ».
En tout cas, voici encore un excellent produit, plutôt spécialisé, certes, mais remplissant parfaitement son office et à placer en tête des instruments similaires, d’abord pour la qualité de sa synthèse et de ses effets, et ensuite par celle de son séquenceur.