Quelques mois seulement après le Circuit Tracks, Novation sort une nouvelle groovebox dédiée au sampling, le Circuit Rhythm, 4ème produit de la gamme, avec son concept sans écran, ses pads, et son workflow novateur simplifié au possible. Cela fonctionne-t-il aussi bien dans ce nouveau contexte ?
Depuis le Circuit original de 2015 ou « OG », Novation a fait évoluer son concept de groovebox, avec de multiples mises à jours de firmware, la sortie du Circuit Mono Station qui était une déclinaison chez les synthés analogiques, puis avec le Circuit Tracks que nous avions regardé puis testé récemment dans nos colonnes, version aux stéroïdes du OG avec ses deux pistes MIDI supplémentaires, la possibilité de stocker des « packs » sur carte SD, de multiples améliorations ergonomiques, et toujours le moteur numérique de synthèse du Mininova.
Mais nous étions plutôt restés sur notre faim concernant les évolutions de la partie drums ou samples, qui avait peu évolué et qui nécessitait d’utiliser des « tricks » pour en faire autre chose qu’un lecteur de sons de batterie électronique. La raison de cela on la connaît maintenant, c’était le développement du Circuit Rhythm en cours, axé exclusivement sur les samples — exit donc le moteur de synthèse et le pilotage de machines externes comme sur le Tracks — et sur le sampling en live comme sur les autres grooveboxes dédiées !
L’approche marketing n’a rien de nouveau, Elektron ou Korg ayant déjà sorti par le passé des grooves machines par deux dédiées au choix à la synthèse ou au sampling (Digitakt et Digitone, Electribe 2 et Electribe Sampler, Model:Samples et Model:Cycles, etc.). Avec les deux machines côte à côte, voyons ce que le Circuit Rhythm, proposé environ pour 390 euros, nous propose d’intéressant…
Connectique et contrôles
Ce nouveau produit est donc une groove machine ou groovebox de 240×210×40 mm, un outil de production musicale parfaitement autonome avec une batterie intégrée (annoncée à 4 heures d’autonomie), qui peut servir de séquenceur, de lecteur de sample, de sampler à la volée, de contrôleur MIDI avec ses encodeurs rotatifs et sa grille de 4 × 8 pads familiers pour les utilisateurs de Launchpads, un outil de performance live, et encore d’autres choses si on le connecte par USB à un ordinateur, ce qui permet de le mettre à jour, de transférer des sons, et d’en faire une interface MIDI.
En ouvrant la boite, on trouve le joujou avec un câble USB, une prise d’alimentation universelle et puis c’est tout, pas de manuel imprimé ou de petit pense-bête des fonctionnalités principales malheureusement.
Toute la connectique est présente à l’arrière, avec les éléments déjà présents sur le Circuit OG : deux sorties jack 6.35 mm, une sortie casque, le slot Kensington MiniSaver, un port USB, le bouton d’allumage qu’il faudra enfoncer plusieurs secondes pour allumer la machine. Le Circuit Rhythm propose en plus un port pour carte microSD, deux nouvelles entrées audio 6.35 mm, la suppression de l’entrée alimentation (le port USB joue ce rôle à présent), le remplacement de l’entrée et de la sortie MIDI au format 3,5 mm par une entrée et une sortie MIDI au format DIN classique, avec un port THRU supplémentaire qui peut aussi être configuré comme deuxième sortie et une sortie sync pour synchroniser le tempo de plusieurs machines, tout pareil que pour le Circuit Tracks.
Le port USB a un certain nombre d’usages dans la machine. Il permet de communiquer avec un ordinateur comme entrée et sortie MIDI (ce qui permet par exemple de jouer d’un instrument virtuel via la surface de contrôle, de lancer des clips dans Ableton Live, de séquencer le Circuit Rhythm avec des clips présents sur l’ordinateur, de récupérer directement les informations de tempo, etc.), il remplace l’alimentation du Circuit OG et recharge la batterie interne, et donne accès aux fonctionnalités de l’application Components dont nous parlerons plus loin. À notre grand regret néanmoins, le port USB ne permet pas d’en faire une interface audio, donc d’envoyer et de recevoir des données audio. Pour faire le mixage d’un morceau réalisé avec le Circuit Rhythm, il faudra se contenter de la sortie stéréo analogique.
Enfin, le Circuit Rhythm propose 8 encodeurs rotatifs, qui permettront d’agir sur le son du moteur de lecture de samples, un potentiomètre de volume général, un autre de « master filter » qui agit directement sur la sortie audio (passe-bas à gauche de la position centrale à cran, passe-haut à droite), et une vingtaine de boutons pour accéder aux fonctionnalités du produit, dont un bouton play/stop et un bouton record bien en évidence.
Mise en place
Après avoir enregistré la machine sur notre compte Novation, on accède à une liste de téléchargements pour le Circuit Rhythm, les manuels utilisateur dans toutes les langues au format PDF ou en ligne, l’application Novation Components qui permet de faire communiquer l’ordinateur et le Circuit Rhythm, le driver Novation USB pour Windows, un accès à des vidéos tutoriel sur une page dédiée, et un bundle de logiciels et de samples. Au moment du test, nous avions accès à un pack de samples Loopmasters de 3 Go, et des accès temporaires via le Novation/Focusrite Sound Collective aux plug-ins GForce Micromonsta et Yum Audio Pitch Dropout (en gros, tous les deux/trois mois l’éditeur donne un code qui permet d’acquérir un nouveau plug-in, mais l’offre expire au bout d’un certain temps et on vous en propose une nouvelle dans la foulée).
Une fois tous ces éléments téléchargés, il est l’heure d’allumer le Circuit Rhythm, et aussi de le brancher sur l’ordinateur pour réaliser une éventuelle mise à jour du firmware. Au démarrage, la groovebox affiche son niveau de batterie, ou indique s’il est branché, et charge le dernier pack et le dernier projet dans ce pack qui ont été utilisés. On remarque d’ailleurs que le Circuit Rhythm est reconnu comme un disque dur à la connexion à l’ordinateur, comme c’était le cas avec le Circuit Tracks, qui contient quelques informations de démarrage et un lien HTML vers la page du site de Novation donnant accès aux téléchargements et aux tutoriels vidéo. Cette fonctionnalité, appelée « Easy Start Tool » et qui peut d’ailleurs être désactivée dans les paramètres de la machine, ne permet pas toutefois d’avoir accès au contenu musical lui-même ou au contenu de la carte microSD malheureusement.
Ces données musicales sont organisées sous la forme de packs, autour duquel tout le contenu est organisé, qui est lui-même constitué de 128 échantillons sonores ou samples mono dont la durée totale ne doit pas excéder 220 secondes, de 64 slots pour les projets, l’équivalent des sessions dans le Circuit OG (c’est-à-dire vos séquences, réglages de mixage, etc), et de 16 presets de Grid FXs (on va en parler un peu plus loin). Enfin grâce à la carte microSD, il est possible d’avoir sur sa machine stockés jusqu’à 32 packs, contre un seul sur le OG, et un seul également sur le Rhythm sans carte microSD, ce qui décuple les possibilités de stockage de sons et de projets enregistrés.
Notons que toutes les cartes microSD ne sont pas compatibles, et que de nombreux utilisateurs ont fait part de problèmes dans leur utilisation. C’est pourquoi Novation recommande sur une page dédiée de n’utiliser que certaines références en classe 10, formatées en FAT32. De mon côté, la première carte microSD que j’avais essayée avec le Circuit Tracks ne fonctionnait que par intermittence après avoir enlevé puis remis plusieurs fois la carte dans le port à l’arrière. Puis j’ai acheté une des références recommandées, et depuis je n’ai jamais eu le moindre problème avec. Idem sur le Circuit Rhythm.
Le workflow Circuit
L’ergonomie générale et l’organisation des fonctions disponibles sur le Circuit Rhythm sont strictement identiques à ce qu’on a vu sur le Circuit Tracks. Les fonctions en commun sont placées aux mêmes endroits, l’édition de notes se fait de la même manière. On aurait du mal à les différencier si le Tracks n’était pas de couleur noire et le Rhythm tout de gris vêtu (ce que je trouve moins joli d’ailleurs personnellement).
Comme la groovebox n’a pas d’écran, un certain nombre de choix se font à l’aveugle, plus spécifiquement la navigation dans les projets ou les différents sons. Mais le gros avantage de l’approche c’est que toutes les commandes sont accessibles seulement à portée d’un ou deux appuis de boutons/pads. Lorsque deux commandes sont assignées sur le même bouton, on peut sélectionner la seconde en restant appuyé sur Shift, en appuyant deux fois sur le bouton, ou en activant une fonction dans le menu Setup qui permet d’appuyer une seule fois sur Shift pour faire l’équivalent du « rester appuyé », qui s’appelle le « Sticky Shift » et qui a été introduite récemment dans le Circuit Tracks également. Et la plupart des fonctions proposent heureusement un feedback visuel très efficace au niveau des pads, par exemple pour montrer le niveau de vélocité sélectionné sur chaque pas, ou sur les boutons qui ont leurs labels lumineux pouvant changer de couleur en fonction de la situation.
Dans chaque projet, on a accès à 8 pistes de samples, ce qui est la différence majeure avec les autres Circuits qui ne disposaient que 4 pistes de ce genre. Le moteur audio permet de jouer en tout 8 samples différents en même temps en conséquence. Mais sur chaque piste, grâce à la fonctionnalité du « Sample Flip », il est possible pour chaque pas de jouer un sample différent, comme sur les autres Circuits, ce qui ouvre pas mal de possibilités artistiques.
Ensuite, dans un projet donné, le morceau est organisé sous forme d’abord de patterns, au nombre de 8 pour chaque piste soit un total de 8 × 8 patterns par projet. Un pattern est simplement une liste de notes ou pas qui ont été enregistrés à la volée ou en appuyant sur des pads, et associés pour chaque pas à un sample, que l’on peut sélectionner dans la vue associée, et qui se lancent automatiquement ou à la fin de la lecture de celui qui est déjà activé en fonction de la situation. Chaque pattern a 16 pas par défaut, ou 32 si on active d’un appui la touche qui double le nombre de pas disponibles et permet de permuter la vue entre les pas 1 et 16 et les pas 17 et 32. Pour chaque pas, grâce au Sample Flip, on peut assigner un sample, une valeur de vélocité, une longueur de jeu ou « Gate », une probabilité de jouer la note ce qui constituait pour moi une des « killer features » du Circuit Tracks, et via l’automation un volume de piste ou un pan, et différentes valeurs pour les effets ou pour les paramètres assignés aux différentes macros accessibles sur chaque piste dans le Circuit Rhythm. On peut également changer aléatoirement la répartition des pas avec le bouton « Mutate » ou faire toutes sortes de manipulations standard avec les boutons « Clear » et « Duplicate ».
Chaque pattern dispose aussi de paramètres globaux comme la direction de lecture des notes (en avant par défaut, en arrière ou aléatoire, là aussi une fonction que j’avais beaucoup appréciée sur le Circuit Tracks), le nombre de pas effectifs qui peut être n’importe quel nombre entre 1 et 32, très utile pour les signatures ternaires ou alambiquées, et une vitesse de lecture des pas, qui permet de doubler la vitesse par défaut ou de diviser celle-ci par quatre, avec des intermédiaires ternaires. Cette dernière fonction peut être très utile pour caler plus de musique avec un nombre de pas réduit dans un pattern donné, si on n’a pas besoin de pulsations très rapides. Enfin, chaque pas dispose d’une fonction appelée Micro-Step qui permet soit de jouer jusqu’à 6 fois plus de pas que les 32 maximum autorisés si on joue plusieurs fois le même son sans rien modifier à ses réglages (là aussi ça peut être très utile pour caler plus de contenu musical dans un seul pattern), soit de modifier le positionnement d’une note par rapport à la grille de pas, pour jouer des triolets ou pour faire des placements de notes plus humains. À l’enregistrement des pas à la volée, il est d’ailleurs possible de choisir parmi deux modes de fonctionnements, un qui cale toutes les notes jouées sur les pas de manière exacte, et un qui profite de la résolution supplémentaire disponible proposée par les micro steps…
Toujours dans les fonctionnalités en commun avec le Circuit Tracks, le Circuit Rhythm permet via un onglet dédié de modifier le tempo (par défaut à 90 BPM ici contre 120 BPM sur le Tracks, intéressant ça), le swing, et le niveau de la piste de clic quand elle est activée. On a également le retour de la vue « Mixer » qui permet de régler le volume et le pan de chaque piste, avec un pad « mute » utile en performance, et l’accès aux « scènes » qui permet de séquencer la sélection des patterns, qui peuvent eux-mêmes être associés dans une chaine, ce qui est très efficace pour créer des morceaux qui se « jouent tout seuls », ajouter plus de variations, ou pour séquencer simplement la sélection de plusieurs patterns en même temps. Les effets assignés à chaque piste sont strictement les mêmes, avec un préset de réverb à choisir parmi 8 et un préset de délai parmi 16 à appliquer sur chaque piste avec le niveau de send réglable, le compresseur sidechain qui est vite indispensable, et le master compressor appliqué tout le temps sur la sortie du signal qui est débrayable si besoin.
Pour plus d’infos sur le workflow de la machine, n’hésitez pas à aller voir le test du Circuit Tracks dans lequel je suis rentré un peu plus dans les détails.
Four to the floor I was sure
Parlons maintenant du cœur du sujet, ce qui différencie le Circuit Tracks du Circuit Rhythm. La première chose qu’on remarque à l’utilisation, c’est que les 8 encodeurs donnent accès à 8 fonctions d’édition des samples (contre 4 seulement utilisées sur les autres Circuits), dont les intitulés sont on ne peut plus clair, et qui ne bougent pas en fonction des réglages comme c’était le cas avec les macros sur les Circuit Tracks et OG. On retrouve le réglage de pitch général, dont le pas peut être réglé sur un demi-ton au lieu de 20 cents avec la touche Shift, celui de distorsion et du filtre passe-bas. On a aussi un nouveau contrôle de filtrage passe-haut, de résonance qui affecte le filtre passe-bas, mais pas le filtre passe-haut malheureusement, deux contrôles qui permettent d’éditer la position du début de la lecture du sample et sa longueur et dont on peut réduire le pas avec la touche « Shift », et enfin un réglage original de « slope » qui permet au choix d’ajouter une phase d’attaque ou une phase de decay de durée variable (le Circuit Tracks proposait simplement la partie decay). Les choses deviennent très intéressantes à partir de là, car on peut enfin régler de manière précise le pitch d’un sample, sa forme, sa durée, et faire un peu de sound design moins rudimentaire que sur le Circuit Tracks.
De plus, le navigateur de sons donne accès à 128 slots pour les samples contre seulement 64 sur les autres Circuits, avec une durée totale des échantillons sonores qui peut aller jusqu’à 220 secondes, contre 198 secondes sur le Tracks et 60 sur le OG. L’augmentation du nombre de slots est la bienvenue, mais la durée totale disponible peut être encore un peu limite comme nous allons le voir plus loin.
Autre différence, le navigateur de présets ne permet plus d’afficher les sons disponibles sur 4 lignes de pads, mais seulement sur 2, ce qui était un peu déroutant au début pour un habitué du Circuit Tracks et du sample flip. Pour aider à la navigation, lorsqu’on passe d’une série de samples à l’autre avec les boutons flèches, un des boutons numérotés de sélection de piste se met en surbrillance quelques instants, ce qui est loin d’être toujours commode, mais en général bien suffisant pour se repérer.
Ces changements se comprennent par l’ajout de nouvelles vues et réglages associés. Maintenant, sur chaque piste et pour un projet donné, dans la vue « Sample Mode » il est possible de sélectionner 3 modes de fonctionnement pour la lecture des samples : One Shot (le son est toujours joué en entier au lancement jusqu’au prochain événement, avec toujours ce comportement bizarre qui n’éteint pas le son en mutant la piste), Gated (la durée est dépendante du réglage de gate, qui n’était pas présent dans la partie samples des autres Circuits) ou Looped (le son est joué en boucle jusqu’au prochain événement). Le dernier mode ouvre d’ailleurs la possibilité de faire de la synthèse un peu simplifiée, en jouant sur la durée d’un sample pour le rendre très court, et générer une forme d’onde à partir de n’importe quelle source, qu’on pourra alors traiter avec les effets des encodeurs, y compris avec de la modulation ! L’onglet permet aussi au choix d’activer ou non l’option « Reverse » qui permet de jouer les samples à l’envers (très utile par exemple avec des cymbales), l’option « Choke » qui permet d’assigner la piste à un groupe dans lequel seulement le dernier sample joué a le droit d’être entendu tandis que les autres sont éteints à la demande (imaginez un charley ouvert sur une piste et un charley fermé sur une autre par exemple).
Mais surtout, cet onglet permet de choisir entre le Keyboard Mode et le Slice Mode qui sont les deux grosses nouveautés majeures selon moi du Circuit Rhythm. Le premier mode permet de faire apparaitre un clavier sous la vue du séquenceur, et donc de jouer du sample sur une étendue de plusieurs octaves grâce à l’utilisation d’un algorithme de pitch shifting. Ainsi utiliser des enregistrements de notes seules ou d’accords de synthétiseurs et instruments acoustiques dans la partie samples devient assez agréable, là où tout est suffisamment rudimentaire dans le Tracks pour pousser à se limiter à des sons percussifs la plupart du temps… Par contre, le nombre de notes accessibles est limité par la capacité de l’algorithme de pitch shifting de +/- 3 octaves, en tenant compte de la position du potentiomètre de tuning. Mais surtout, alors qu’on peut bien sûr enregistrer un choix de notes sur chaque pas dans le séquenceur, il est impossible de faire de la polyphonie sur une piste donnée. Cela signifie que si on veut entendre 4 notes simultanées jouées à partir du même son, il faudra au choix les jouer sur 4 pistes séparées, ou enregistrer dans un même son l’accord en question et le jouer sur une seule piste. De même, si on utilise le Circuit Rhythm comme séquenceur pour du matériel externe, la limitation des +/- 3 octaves et l’impossibilité de rentrer de la polyphonie rendent l’exercice moins intéressant que sur le Circuit Tracks… Et il est impossible de remplacer ce clavier d’une octave par 2 lignes de notes présentes dans une gamme également comme dans les autres Circuits, à cause de la disparition de l’onglet « Scales », dommage. Cet onglet a moins de sens dans le Circuit Rhythm, car on ne sait pas toujours quelle est la note exacte jouée dans un sample donné.
Quant au mode slice, l’autre nouveauté du Circuit Rhythm, il permet de découper un sample en 2 à 16 parties, soit automatiquement avec des pads qui coupent l’échantillon en 4, 8 ou 16 parties de taille égale, soit manuellement en lisant le sample et en appuyant sur des pads au début de chaque partie dans la vue Expanded Note dédiée à cette fonctionnalité. On peut également ajuster la longueur et le début de chacune de ces parties. Une fois ce travail fait, chaque pad dans la vue des notes permet de jouer une des parties, ce qui permet de jouer des différents éléments séparément d’une boucle de rythme par exemple, par exemple en inscrivant chaque partie dans un pas avec le séquenceur, puis en activant le mode de lecture aléatoire des pas ou en appuyant sur le bouton « Mutate ». Cela permet également de palier à l’absence de time stretching sur le Circuit Rhythm (on reviendra là-dessus), puisque cette astuce bien connue permet également de rejouer une boucle à n’importe quel tempo, avec plus de succès évidemment sur le matériel rythmique que mélodique, quoi que dans ce dernier cas le rendu « lo-fi » peut être apprécié. Ainsi, lorsque les pas du séquenceur sont visibles, il est possible de changer de sample, ou de changer la note ou encore de jouer avec les différentes sections du son dans le cas d’une boucle.
Parlons d’une autre application possible du mode slice. Certaines banques de sons proposent des « one shots » de batterie électronique/acoustique ou de percussions sous forme de fichiers audio qui contiennent le même élément joué différemment à la suite ou avec différentes vélocités, par exemple dans Ableton Live. Charger un tel fichier audio dans le Circuit Rhythm avec le mode slice et un peu d’édition des positions de démarrage permet d’avoir accès, sur un slot donné, au même son joué avec différentes vélocités, voire de faire manuellement du Round Robin (changer de sample en cours de lecture pour éviter l’effet « mitraillette ») ! Cette fonctionnalité peut s’avérer très utile avec des sons typés acoustiques pour leur donner un peu de réalisme supplémentaire, et j’ai eu l’occasion de m’en servir pour jouer les bongos sur une des démos réalisées pour mon précédent test du Neural DSP Archetype : Cory Wong…
Repeat after me
Enfin, avant de parler de sampling, quelques mots sur une autre grosse nouveauté du Circuit Rhythm par rapport aux autres Circuit, les Grid FXs. Une vue supplémentaire permet d’accéder à 16 pads qui sont assignés pour un pack donné à une série d’effets, avec des paramètres fixés dans l’application Components. On peut alors maintenir appuyé un de ces pads en cours de lecture pour que l’effet associé soit appliqué sur le bus master, ce qui inclut aussi les signaux qui pourrait venir des entrées audio physiques, ou appuyer une seule fois dessus si la fonction « Latch » accessible sur un autre pad est activée. Il existe 7 effets différents dans la version actuelle du Circuit Rhythm, qui sont les suivants : une simulation de platine vinyle, un phaser, un bitcrusher, un filtre modulé par un LFO, un module qui joue des petites parties du signal découpées en fonction du tempo à l’envers, un « Gater » qui coupe et active successivement avec un LFO le volume général, et le « Beat Repeat » qui répète une section du signal en boucle à une vitesse spécifique. Chaque effet est paramétrable dans Components, et ce qu’on assigne au projet est en fait le type d’effet avec un préset pour cet effet donné. Il n’est malheureusement pas possible à l’utilisation de changer leurs paramètres directement dans le Circuit Rhythm. En effet, tous les autres contrôles accessibles en dehors des pads sus-cités ont strictement les mêmes fonctionnalités que dans l’onglet « Mixer ». Autant les pads « Mute » peuvent être intéressants dans ce contexte, autant je pense que pouvoir assigner les potentiomètres aux contrôles des Grid FXs plutôt qu’au volume des pistes dans cet onglet aurait pu être plus intéressant… Et faire de la sorte permettrait également de pouvoir utiliser plus de Grid FXs différents que ceux qui existent actuellement. Par exemple, je n’aurais pas dit non à un effet Tape Start/Stop, un filtre en peigne, un flanger, des effets de délai et de réverbération avec du feedback à fond ou en mode freeze, un générateur de scratchs comme sur des platines, etc. De plus l’effet se produit sur tout le bus master, et là aussi on aurait pu apprécier sélectionner seulement certaines pistes pour les traiter, tout comme je l’avais suggéré pour le Master Filter dans le test du Circuit Tracks…
Au passage, la vue « Expanded Note », qui affiche donc au choix deux claviers (Keyboard Mode) ou la partie pour éditer le slicing (Slice Mode), a remplacé une vue présente dans le Circuit Tracks qui permettait de jouer via 4 pads des 4 sons par défaut assignés aux 4 pistes de samples. Cette vue existe toujours dans le Circuit Rhythm, elle est juste accessible à un autre endroit et s’appelle « Drum Pads ». Le bouton en question était celui du choix des gammes et tonalités dans le Circuit Tracks, fonctionnalité qui a donc purement et simplement été supprimée dans le Circuit Rhythm. Avec la vue « Drum Pads », on peut également via 8 pads jouer de chaque sample par défaut pour chacune des 8 pistes. Mais cette vue rajoute aussi une fonctionnalité supplémentaire intéressante, qui permet à l’appui d’un des pads de jouer du sample associé en répétition, à une vitesse spécifiée encore par un autre pad. On a donc un équivalent du Grid FX Beat Repeat, mais pour une seule piste à la fois, ce qui est plutôt intéressant ! Écoutons à présent une démo de ces Grid FXs…
Notons d’ailleurs que le Circuit Rhythm, contrairement au Circuit Tracks, permet de sélectionner comme source pour le sidechain la piste sur laquelle est appliquée la compression, ce qui permet d’avoir accès à un compresseur classique !
Circuit Sampling
Parlons à présent du sampling, la fonctionnalité clé du Circuit Rhythm. Contrairement au Circuit Tracks, le Circuit Rhythm permet — pour dire les choses de manière terre à terre — de remplir des slots vides du pack en cours avec de l’audio qui vient de l’extérieur, en utilisant les deux entrées externes. On peut même commencer à travailler sur un pack vide et le remplir au fur et à mesure de samples ! Cela apporte un certain confort, par rapport à l’approche des autres Circuits qui nécessitent toujours l’utilisation de l’application Components, car on peut faire vraiment tout le sound design directement dans la bécane. Il va de soi aussi que ici encore plus qu’avec le Tracks, l’utilisation d’une carte SD est obligatoire si on veut faire du sampling avec la groovebox dédiée… au sampling ! Après on peut aussi s’amuser un peu avec le pack de base le temps de récupérer de la matière et les projets démos inclus, comme celui-ci en écoute :
Pour remplir un nouveau slot avec de la matière — qui pourra être slicée ou détunée voire renversée — on branche notre source audio sur les entrées du Circuit Rhythm, et on va dans l’onglet « Sample Rec ». On pourra alors observer sur les 16 pads du haut la liste des slots disponibles ou déjà utilisés, à l’aide d’un code couleur. On peut faire défiler les slots avec les flèches haut et bas comme dans le navigateur de samples classiques. On peut également traiter les samples déjà disponibles, par exemple enlever des silences avant et après et les supprimer de la source audio définitivement avec le bouton Save et les potentiomètres « Start » et « Length », très utiles pour gagner de l’espace mémoire et pour rendre les samples plus facilement utilisables. Et on peut même en supprimer avec le bouton Clear pour libérer des slots ou réenregistrer quelque chose. Puis, on choisit le slot vide en rouge qui nous intéresse, on lance l’audio externe, on appuie sur « Record ». On voit alors les pads de la ligne numéro 3 changer de couleur de gauche à droite pour indiquer la longueur de ce qui a déjà été enregistré, en relation avec l’espace disponible restant sur le pack. Puis on réappuie sur « Record » et le son est dans la boîte. On ne peut pas faire plus simple.
Tout en bas de la vue, on observe également quatre pads qui donnent accès à des options d’enregistrement plutôt utiles. Le pad « Threshold on/off » permet de choisir si le Circuit Rhythm commence à enregistrer l’audio lorsque le niveau entrant est au-dessus d’un certain seuil, ou dès l’appui sur le bouton « Record ». Cette fonction est si utile que j’ai tendance à l’utiliser systématiquement… Ensuite, on peut activer ou non un atténuateur analogique de –12 dB qui permet de réduire le gain d’entrée dans le Circuit Tracks, ce qui peut être utile si vous avez des appareils audio avec un volume un peu fort et l’impossibilité de réduire ce volume sur la machine, ce qui peut créer de la distorsion. D’un autre côté, lorsque le volume d’entrée est très bas, j’ai pu constater que le Circuit Rhythm applique de la normalisation sur le sample avant de la stocker, ce qui peut avoir ses avantages comme ses inconvénients, mais convient plutôt à la philosophie de l’appareil vu que les volumes dans l’onglet Mixage sont par défaut au maximum et qu’on peut seulement les réduire…
Les deux autres pads ont également une importance particulière. Le pad « input monitoring » permet d’activer ou d’empêcher l’écoute du son qui vient de l’entrée stéréo extérieure, en dehors de l’enregistrement évidemment. Notons d’ailleurs que les samples enregistrés sont toujours systématiquement en mono (en faisant la somme des deux canaux) malheureusement, mais que le son que l’on entend lorsque ce pad est activé est lui bien stéréo. Cela permettra notamment de brancher un instrument stéréo (par exemple un Circuit Tracks) ou deux sources mono en plus sur le Circuit Rhythm, dont on pourra dans ce cas précis régler le volume dans la partie « Sample Rec » avec le potentiomètre 8. De plus, l’audio extérieur passe bien aussi dans les Grid FXs, ce qui donne un côté multi effet à la machine, ou hub final pour une configuration live multi appareils, et du coup ce bouton peut servir de « Mute » pour l’audio extérieur en cours de set…
Enfin, le pad « Resample On/Off » permet de choisir la source pour l’enregistrement, soit l’entrée audio, soit la sortie du moteur du Circuit Rhythm. En effet, il est tout à fait possible de jouer le pattern ou la configuration de scènes en cours, et de lancer l’enregistrement. Avec Input Monitoring activé d’ailleurs, le rendu tiendra compte également dans le cas du resampling interne de l’audio externe. On pourra alors aller se balader sur les autres vues, lancer un autre pattern, jouer avec les Grid FXs, puis revenir et terminer l’enregistrement. On peut faire énormément de choses avec cette fonctionnalité. Quelques exemples en vrac :
- Jouer un accord polyphonique avec un seul sample sur 4 pistes, et l’enregistrer dans un nouveau slot pour le rejouer sur seulement une piste et le transposer. On pense d’ailleurs à ces fameux accords majeur 7 transposés via le sampling avec des notes qui tombent hors de la tonalité en fonction de la transposition, très caractéristiques dans certains styles de musique électroniques…
- Faire l’équivalent d’un « freeze » dans les STANs, ce qui permet de capturer ce qui est actuellement joué par la machine, pour le rejouer sur une seule piste, et ainsi libérer plein d’espace supplémentaire pour pouvoir recommencer à ajouter de nouveaux sons !
- Idem que précédemment, mais cette fois-ci traiter le résultat comme de la matière sonore, que l’on peut modifier avec le mode slice, accélérer ou ralentir, rejouer différemment plus ou moins aléatoirement, transposer, traiter avec des Grid FXs de manière successive et donc « resampler » plusieurs fois d’affilée notamment avec les modélisations de platines vinyles, etc.
- Empiler des couches successives de matière sonore comme on le ferait avec un looper et des instruments plus traditionnels en entrée, comme une guitare branchée dans une pédale de préamplificateur puis dans le Circuit Rhythm
Rhythm & Business
On se rend alors vite compte une fois le tour du propriétaire réalisé de l’étendue des possibilités contenues dans cette petite machine, parfois juste avec un petit pad tout seul dans un des nombreux onglets comme celui du resampling interne. On ressent une impression de liberté initiale plus importante je trouve qu’avec le Circuit Tracks, puisqu’on peut jouer avec autant d’information mélodique que l’on veut avec les 8 pistes, la première piste pouvant contenir une boucle de batterie en entier qu’on pourra arranger à notre guise, avec le « Sample Flip » qui permet de faire du « Patch Flip » sur une même piste, et le pseudo freeze interne, et qu’on peut faire plus de choses niveau sound design sans toucher à l’ordinateur, même si la question de la polyphonie se pose.
Autre expérience à partager, j’ai eu parfois l’impression que je pouvais facilement aller sur les mêmes territoires sonores que sur mon Circuit Tracks avec ce Circuit Rhythm, qui n’est pas forcément une machine dédiée uniquement aux fans de hip-hop, puisqu’on peut sampler des « single notes » venant de n’importe quel synthétiseur, ainsi que des accords, et rajouter des sons de drums classiques comme sur les packs du Circuit Tracks. Je me suis ainsi créé un pack dédié à cette utilisation, très axé musique électronique, avec des sons en provenance d’un Korg MS-20, de mon Minilogue XD, de quelques plug-ins d’instruments virtuels comme u-he Hive ou encore d’un Waldorf Streichfett. On peut même un petit peu modifier le rendu de ces enregistrements, comme on le ferait sur un synthétiseur, avec les potentiomètres de filtrage, d’enveloppe et de distorsion. On sera évidemment plutôt limités niveau modulations et changements radicaux de caractère sonore, même si l’automation des filtres présents sur le Circuit Rhythm permet de faire beaucoup de choses. Et on peut enregistrer des notes d’instruments acoustiques…
D’ailleurs, il y a aussi des choses intéressantes à faire en créant de la matière sonore de manière aléatoire « from scratch » à partir de n’importe quel sample. Je me suis amusé par exemple à créer un son de pad assez convainquant à partir d’une « cowbell » typée TR 909, en jouant simplement avec les paramètres accessibles, et en enregistrant un accord via le resampling interne avec un peu de réverb. On peut aussi réduire la taille du sample au minimum et le faire boucler à l’infini avec le mode « Loop », puis on traite avec les mêmes paramètres. Même si on peut parfois avoir l’impression de faire toujours un peu la même chose, on peut avoir quelques surprises. Et j’en profite pour parler de ma tentative d’utiliser les formes d’ondes de Adventure Kid, qui sont open source et disponibles ici, que les aficionados du sampling connaissent bien. Malheureusement, pendant l’écriture du test, je n’ai pas réussi à en faire quelque chose, car une étape dans l’import vers le Circuit Rhythm ne se passe pas bien, et que je suis actuellement en train d’en discuter avec le support technique. J’ai réussi à les faire sonner correctement en ajoutant un peu de silence manuellement à la fin des samples avant l’importation, mais cela oblige ensuite à modifier à la main la longueur du sample, ce qui casse l’intérêt du concept de la forme d’onde déjà à la bonne taille prête à l’emploi…
De même, rien n’empêche comme avec le Circuit Tracks d’enregistrer la sortie du Circuit Rhythm, qui lit ses différents patterns, et d’y brancher sur les entrées audio un synthé ou une guitare électrique, pour en jouer en live pendant la lecture…
Se pose alors la question que toute personne débutante ou habituée au sampling va se poser qui est la suivante : quelles sont les différentes sources de matière sonore à ma disposition pour jouer avec dans mon Circuit Rhythm ? On a déjà parlé de sons de drums – pas forcément que électroniques – de single notes venant d’instruments divers et variés, d’accords. On peut aussi jouer enregistrer dans le Circuit Rhythm ce qu’on enregistrerait dans un STAN, à savoir des prises de guitare, de voix, ou de n’importe quel autre instrument, qu’on pourra empiler sur un minimum d’espace avec le resampling interne si on le souhaite ou triturer dans tous les sens. On peut bien évidemment importer directement des « loops » que l’on trouve un peu partout. Mais malheureusement, comme d’autres machines dédiées au sampling parfois beaucoup plus chères, il n’y a pas d’algorithmes de time stretching inclus en interne dans le Circuit Rhythm. Vous devrez soit vous contenter de caler le tempo de vos boucles et de vos projets sur la machine (en utilisant l’ordinateur pour modifier le tempo de la source si besoin), ou « tricher » un peu en utilisant la fonctionnalité du slice, qui peut parfaitement convenir en fonction de la situation. Ici on sent un peu le manque de time stretching avec le calage des notes de batterie, mais toute la partie slice se fait sans problème dans le Circuit Rhythm à partir uniquement d’un certain morceau de soul…
Et en vrac, on peut brancher dessus un enregistreur Zoom classique ou un préampli avec son microphone dynamique, pour ajouter des sons venant de l’extérieur ou transformer le Circuit Rhythm en séquenceur de bruits de bouche et de matière sonore expérimentale du quotidien, la mythique platine vinyle avec son catalogue de disques associé, et n’importe quel smartphone qui donne aujourd’hui accès via YouTube, Spotify ou votre librairie de morceaux en MP3 personnelle, à une quantité astronomique de morceaux de musique que l’on peut triturer à l’envi comme tous les artistes que vous connaissez si bien et que je n’ai pas besoin de citer, la première vidéo aléatoire de YouTube sur le jardinage ou des extraits d’interviews et de tests de vos journalistes préférés, qui peuvent servir de voix ou de formes d’ondes pour faire des lignes de basse !
Après on tombe quand même sur des sources de frustration, comme le fait qu’on ne puisse pas copier les settings d’une piste à l’autre, la taille disponible par pack que l’on peut vite approcher si on n’y fait pas attention, les temps de chargement de pack ou d’allumage qui peuvent grimper jusqu’à une vingtaine de secondes pour un pack qui utilise tout l’espace disponible, ou encore le fait que ce concept de pack, dans le contexte du Circuit Rhythm, me semble moins pertinent avec certaines matières sonores, que l’on va accumuler pour faire un morceau, peut-être deux, et ensuite être obligés d’utiliser un autre pack pour faire d’autres choses. De plus, la carte SD obligatoire est sous-exploitée par le firmware actuel du Circuit Tracks, puisqu’on est limités à 32 packs seulement par carte SD, ce qui correspond à peu de choses près à moins d’un gigaoctet de stockage. Gageons que dans un futur proche on puisse créer beaucoup plus de packs en fonction de l’espace mémoire accessible, ou avoir accès à plus de sons dans un même pack en optimisant les temps de chargement comme sur d’autres grooveboxes…
Autre chose, l’application Components qui permet de transférer des packs fonctionne avec le Circuit Rhythm de la même façon qu’avec le Circuit Tracks. Certaines fonctionnalités sont un peu cachées, des éléments de l’ergonomie me semblent peu intuitifs, des fonctions ne sont accessibles qu’en ouvrant la carte SD dans un lecteur pour l’ordinateur, et je pense que les nouveaux utilisateurs apprécieront un peu d’améliorations à ce niveau-là. Mais surtout, les temps d’envoi de packs vers le Circuit Rhythm, pour peu que celui-ci soit chargé niveau durée des samples, peuvent être très très longs (plusieurs minutes). Heureusement, on pourra aussi envoyer des samples ou des projets directement dans les slots qui nous intéressent pour ne pas avoir à faire des transferts complets systématiquement.
Tracks ou Rhythm ?
Parlons maintenant de la question que certains intéressés peuvent se poser : Circuit Tracks ou Circuit Rhythm comme premier produit de la gamme Circuit ? Il y a des différences évidentes entre les deux, le premier proposant deux instances d’un module de synthèse plus de quoi brancher deux synthétiseurs voire des configurations plus complexes, et le second ne pouvant jouer que des sons enregistrés, mais transposables et découpables, avec une entrée stéréo en plus et les Grid FXs qui donnent aussi des possibilités modulaires. Mais trancher n’est pas toujours si évident que ça à mes yeux.
En effet, une autre différence moins visible est que le Circuit Tracks révèle vraiment son potentiel plutôt connecté à des machines, là où le Circuit Rhythm, une fois vos packs constitués, pourra être utilisé seul avec moins de limitations. Plus besoin de mon Korg MS-20 tout le temps par exemple une fois que des notes seules de quelques patchs par ci par là ont été enregistrées, et plus besoin non plus de me rappeler des patchs à positionner pour obtenir certains sons. De même, si je veux réécouter un projet réalisé sur le Circuit Tracks avec des machines branchées dessus, il faudra que je me rappelle des machines en question et des présets utilisés, là où le Circuit Rythm rejoue seul tout ce dont j’avais besoin. Et on pourra peut-être couvrir plus de registres avec le Circuit Rhythm étant donné qu’on peut y enregistrer à peu près n’importe quoi. Mais sampler un synthétiseur note par note et en jouer, avec la polyphonie en plus et les fonctionnalités autour des gammes du Circuit Tracks, ce n’est pas tout à fait la même chose évidemment… De manière générale, il y a des choses plus simples ou plus évidentes à faire sur l’un que sur l’autre et vice-versa. Bref, je n’ai pas de réponse définitive à vous apporter, juste ces éléments supplémentaires pour vous pousser à réfléchir plus loin si besoin.
Avant de conclure, je rajouterai un dernier mot sur la complémentarité du Circuit Tracks et du Circuit Rhythm. L’utilisation des deux ensemble permet de pouvoir profiter de leurs forces en minimisant leurs faiblesses. On pourra utiliser le moteur de synthèse du Tracks et y brancher d’autres modules, ajouter des pédales d’effets un peu partout, tandis que le Rhythm, qu’on préfèrera en fin de chaine, appliquera ses Grid FXs sur tous les sons et apportera ses possibilités accrues en termes de manipulation de matière sonore. On pourra même lancer la lecture sur les deux en même temps en les connectant en MIDI. Un autre usage possible de la combinaison est de pouvoir stopper la lecture sur une des deux machines sans l’arrêter sur l’autre pour procéder à des changements de packs… Cette expérience m’a laissé songeur sur la pertinence d’un Circuit Pro qui serait justement la somme de ces deux machines ! Et j’ai découvert à la fin du test que la fonction side chain fonctionne toujours si le volume de la piste de kick est au minimum possible, tant que la piste n’est pas mutée, donc il est utile de rajouter une piste de kick sur chaque Circuit même si on ne l’entend pas dans le mix final pour faire « remuer » toutes les pistes de synthé…
Conclusion
Pour conclure ce test, je suis plutôt conquis par cette nouvelle itération du concept Circuit de Novation, qui m’a permis de (re-)découvrir un peu les joies créatrices du sampling. Je trouve que le concept Circuit colle très bien avec celui de la groovebox sampling, et que Novation a eu raison de vouloir sortir une version gonflée aux stéroïdes de leur moteur de lecture de samples. Bien évidemment, on ne trouvera pas dans la machine certaines fonctionnalités des concurrents plus chers, qui permettent d’avoir sous la main l’équivalent d’un STAN et d’un ordinateur sur une machine autonome. J’ai vu également beaucoup de critiques sur les réseaux sociaux à la sortie du produit sur l’absence d’enregistrement stéréo, de polyphonie, du time stretching – même si souvent celui-ci est proposé de manière rudimentaire ailleurs. Personnellement, je pense que le propos ici est avant tout la mise en avant du workflow Circuit et de la simplicité d’utilisation. De ce point de vue, de ce que j’ai pu constater et au travers de mes discussions, le Circuit Rhythm est probablement le sampleur hardware le plus agréable à manipuler du marché, grâce à l’absence d’écran et à la pertinence de l’ergonomie. Et il propose suffisamment de possibilités pour occuper pleinement les utilisateurs. Il constitue également pour moi un super point d’entrée pour des débutants sur les techniques de sampling, au même titre que par exemple l’application iOS Koala – plus limitée évidemment, mais moins chère pour ceux qui ont déjà le hardware qui va avec. Je pense aussi que ce Circuit Rhythm pourrait intéresser pas mal d’utilisateurs du Circuit OG, probablement plus complémentaire que le Circuit Tracks niveau fonctionnalités.
Néanmoins, comme pour le Circuit Tracks, ce produit n’est pas pour tout le monde. La lecture du manuel y est obligatoire pour pouvoir apprécier tout son potentiel et l’utiliser sans réfléchir. La navigation des sons « à l’aveugle » n’est pas toujours des plus pratiques. Le pack d’usine fourni avec la machine permet de s’amuser un peu, on en fait vite le tour et il est en fait un peu hors de propos sur une machine dédiée au sampling. Enfin pour moi, la critique la plus importante que je ferais à ce produit c’est encore — ici aussi comme avec le Circuit Tracks — l’absence de moyens d’enregistrer chaque piste séparément, par exemple via l’audio par USB. Cela oriente très fortement l’utilisation du Circuit Rhythm vers celle d’un instrument de performance, orienté live, plutôt qu’un élément central pour la production avec une certaine maitrise possible sur le rendu sonore, le mixage et des traitement offline étendues. Difficile donc de dire si ce produit va vraiment faire de l’ombre aux MPCs, à un Elektron Digitakt, sans parler de toutes les machines comme l’Octatrack qui sont dans des délires vraiment très éloignés. Je pense que certains vont l’adorer, et que d’autres vont continuer à utiliser l’existant qui aura plus de sens pour l’utilisation qu’ils en font. Et cette catégorisation des usages existe aussi pour les autres produits de toute façon.
Au passage, dans le test du Circuit Tracks, nous avions eu la mauvaise impression que la partie samples était volontairement bridée au profit de la nouvelle itération du concept dédiée au sampling, et cette impression est ici confirmée malheureusement. J’espère que les développeurs chez Novation auront la gentillesse de rajouter certaines des fonctions que j’ai aimées dans le Circuit Rhythm — que je vais devoir rendre prochainement — dans l’autre machine !
En tout cas, ne boudons pas notre plaisir, cette machine montre qu’on peut encore innover sur la partie ergonomie, et faire de la musique n’a pas toujours besoin d’être compliqué ou alambiqué, ce qui correspond à ma vision de l’intérêt des configurations « DAW-less ». Le Circuit Rhythm constitue une intéressante et pertinente alternative au Circuit Tracks, avec le même côté pédagogique et immédiat malgré quelques différences de philosophie, il apporte des évolutions appréciables au Circuit OG sur la partie sample, il n’est pas simplement un gimmick marketing pour doter Novation d’un produit supplémentaire dans sa gamme Circuit. On attend là aussi ses prochaines évolutions de firmware qui ont permis au Circuit OG d’évoluer pas mal au cours du temps, et le Circuit Tracks semble déjà suivre ce chemin. Pour cette raison, j’accorde au Circuit Rhythm l’award innovation comme pour le Circuit Tracks.
PS. Je voudrais ajouter des remerciements à Shirow pour tous ses éclaircissements et nos discussions sur le monde du sampling qu’il connait infiniment mieux que moi !
PPS. J’aimerais également parler de ma déception concernant l’équipe en charge du développement des Circuits chez Novation, que j’ai contactée depuis le début de la rédaction du précédent test en utilisant différents contacts. J’aurais aimé pouvoir discuter avec eux du concept et pourquoi pas avoir une interview qui aurait pu être publiée dans ces lignes. Je leur ai également fait parvenir des listes de « feature requests ». Mais je n’ai eu à ce jour aucun retour de leur part, ce qui est d’autant plus dommageable que je n’ai pas réussi à trouver d’interviews ailleurs non plus. Les choses se passent mieux heureusement du côté des équipes de support technique.