Annoncée durant le NAMM 2020 et finalement sortie en France en novembre de la même année, la Symphonie Desktop se retrouve cette semaine sur notre banc d’essai.
Voilà, elle est là, la petite desktop de la série Symphony. Avant de commencer le test, et pour prévenir nos lecteurs : nous savons que le temps d’attente autour de l’interface et l’indisponibilité de certains éléments au moment de sa sortie a agité les colonnes de notre forum. Ce test n’aura pas pour fonction de trancher dans ces discussions : dans un souci d’objectivité, nous considérons seulement l’appareil que nous avons entre les mains, car c’est seulement de lui que nous pouvons juger sur pièce. Et il y a beaucoup à dire !
Posage sur le bureau !
On sort l’interface de son carton, et de ses protections en mousse bien dense. Première bonne chose, Apogee n’est pas trop radin sur les accessoires : l’alim (bien évidemment) accompagnée de deux adaptateurs (pratique pour voyager), un câble USB-C – USB-A et un autre 100% USB-C, donc on ne se trouve pas limité par le format présent sur l’interface. Pour préciser, l’interface fonctionne en USB 2.0 pour l’audio, et en USB pour le MIDI.
L’interface est ultra-sobre, écran tactile oblige : un gros bouton et puis c’est tout. Il sert à contrôler tous les paramètres gérables depuis le hardware, mais aussi à mettre l’interface sous tension.
On n’est pas sur du Class Compliant, il faut donc télécharger un driver avant de lancer l’appareil.
Passons en revue les entrées et sorties. Presque tout se situe en face arrière : deux entrées micro/ligne/instruments sur combo XLR/jack 6,35 mm ; deux connectiques Toslink pour, en tout, 8 entrées/sorties en S/PDIF et ADAT ; deux sorties Jack TRS pour les sorties moniteur et un jack 3,5 mm pour la sortie casque 2. On ajoute à cela les connectiques USB déjà notées ci-avant, et l’alimentation, qui se bloque à l’aide d’un système à baïonnette.
Sur le devant, très peu de choses : une entrée instrument en plus, mais qui est en fait la même que l’entrée 2, à l’arrière, et une sortie casque (sortie 1).
Et puis voilà, on a fait le tour, car tout le reste se contrôle depuis l’écran tactile (ou depuis votre STAN, bien entendu). Ici, je note qu’à notre avis cette Symphony Desktop est clairement située entre la Zen Tour Synergy Core d’Antelope, et la Twin X Duo mkII d’Universal Audio, aussi bien au point de vue de la gamme de prix (1499 euros, donc juste entre les deux) que des propositions technologiques et marketing (, design sobre et élégant chez les deux marques, émulations réputées et un côté « qualité plus que quantité » pour Universal Audio, utilisations des effets sans latence lors de la prise pour Antelope, ainsi que l’écran tactile).
A ce propos, parlons de cet écran tactile. Sur ce qui est de la réactivité et de la rapidité, il n’y a, à notre sens, vraiment rien à redire : c’est bien fait, les icônes sont assez larges et espacées pour les gros doigts, et l’écran répond facilement au toucher. C’est fluide. Deux choses sont très appréciables : premièrement, il est possible de contrôler une majorité de paramètres et d’options depuis l’écran (émulation de préampli en DSP, compression et égalisation avec des vraies interfaces visuelles intuitives à l’écran, console, entrées et sorties, etc.) ; deuxièmement, ce qui est très frappant, c’est la fluidité et la modularité du workflow. Ainsi, pour aller d’un point A à un point B dans l’affichage, il existe toujours plusieurs « chemins d’accès », tous assez intuitifs (rien que sur l’écran, entre les taps et les swipes, on a souvent le choix, plus les options d’affichage au sein de votre STAN). On imagine donc que chaque utilisateur pourra aisément s’habituer à une manière de travailler, sans que cette manière soit à 100% imposée par la machine. C’est une approche intéressante de la part d’Apogee, qui offre la possibilité à chacun de se forger ses habitudes personnelles par rapport à son appareil.
Quelques spécificités quant à l’usage des entrées : en format jack, elles sont automatiquement dévolues à l’entrée instrument, tandis qu’en XLR, elles permettent d’accéder soit aux préamplis micro (les préamplis Stepped Gain, plus les émulations Alloy embarquées) ou aux niveaux lignes. Les préamplis micros ont soit un gain réglable (pour le préampli de base), voire la possibilité de réglage gain/volume qui permet de jouer sur la chaleur ou même la saturation (pour les émulations). Les niveaux lignes n’ont pas de réglage de niveau d’entrée, à la place ils existent simplement en deux sensibilités différentes (+4 dBu, –10 dBV).
Passons maintenant au benchmark…
Dans mon bench, bench, bench…
Afin de tester l’interface, nous avons fait un benchmark avec notre fidèle APx515 d’Audio Precision (lien). Comme d’habitude, nous publions les résultats obtenus en THD, rapport signal/bruit et déviation des voies, pour les entrées et sorties analogiques. Pour toutes les configurations, je règle le gain pour obtenir le meilleur résultat possible.
À 16 échantillons, nous obtenons une latence de 1,86 ms en entrée, et 2,49 ms en sortie pour les deux interfaces.
Commençons donc avec les entrées ligne :
J’envoie un sweep de 1 Vrms dans l’entrée 1, en sensibilité +4 dBu, et je mesure le signal aux sorties moniteur 1 et 2, non atténuées. En sortie je mesure à peu près un gain de 12 dB.
Linéarité : Vraiment rien à redire. À part une légère oscillation à partir de 5 kHz, on obtient un résultat vraiment très plat. Nous mesurons une déviation de ±0,039 dB. C’est mieux que ses deux concurrentes.
THD : Là aussi, que dire à part que c’est excellent ? Intégralement en dessous de 0,001% et pour une bonne partie du spectre e dessous de 0,0005%. On est soufflé.
Le rapport signal/bruit, mesuré à 1 kHz, est de ±100,9 dB.
Avec les entrées ligne réglées sur –10 dBV, nous avons obtenu exactement les mêmes résultats, avec un rapport signal/bruit de ±101,1 dB.
Passons aux entrées micro :
Ici j’envoie un sweep de 100 mVrms et je mesure le signal au niveau des sorties moniteurs, en sélectionnant le préampli Stepped Gain. Avec 100 mV en entrée, on peut aller jusqu’à 37 dB de gain avant saturation.
Linéarité : Pareil ! On obtient exactement le même résultat que sur l’entrée ligne, avec une déviation de ±0,039 dB. C’est très bon pour un préampli micro qui, développant plus de gain, aura généralement tendance à développer aussi plus de défauts.
THD : Là aussi, on a des résultats de très haute volée. Moins de 0,001% sur la majorité du spectre, avec moins de 0,0005% en dessous de 1 kHz. C’est du très bon.
Le rapport signal/bruit, mesuré à 1 kHz est de ±101,2 dB
Il me semblait intéressant de voir les résultats obtenus avec les émulations DSP. Pour le « préampli à transistor britannique » AP-66, on a une déviation de ±0,119 dB et une THD qui oscille autour de 0,005 %. Plus on monte le gain, plus on colore le son, et plus on voit baisser les résultats, évidemment. Pour le « préampli à tube américain » AP-57, on obtient avec le même signal à l’entrée, et le gain à zéro, une sortie avec de la distorsion asymétrique :
Donc là, pas grand intérêt de mesurer la linéarité ou la THD, la distorsion est un paramètre recherché dans l’émulation, on obtiendra bien évidemment des résultats élevés.
Voilà maintenant la réponse en fréquence de la sortie casque :
Rien que du très classique ici : une linéarité relative, mais avec des pertes dans l’aigu. THD mesurée à 0,001 % en moyenne, c’est très correct.
Allez, finissons ce benchmark avec l’entrée instrument :
Linéarité : Similaire à toutes les autres entrées, à ±0,039 dB.
THD : C’est un peu plus haut qu’ailleurs, avec des résultats plus proche de 0,002 %, et allant même jusqu’à 0,005%. On reste quand même dans de la très haute qualité.
Les résultats sont exactement similaires sur les deux entrées.
Conclusion
À l’issue de ce benchmark, difficile de se montrer dur avec l’appareil qui nous a été confié. En effet, au point de vue des performances, on est face à une interface qui fait facilement aussi bien que la concurrence (en comparant seulement avec d’autres desktops, bien sûr, et dans sa gamme de prix), parfois même légèrement mieux que d’autres machines que nous avions testées. Tout avoir misé sur l’écran tactile pour les contrôles intégrés par sur l’appareil, c’est à notre avis l’idée qui peut le plus diviser : d’un côté, à l’ère du smartphone, c’est une évidence (et, en plus, cela nous semble bien réalisé ici), ensuite cela pourra non seulement en dérouter certains, mais également créer une méfiance (quel longévité ?). Toutefois, il ne faudrait pas penser que l’écran représente une limite absolue de l’appareil, puisqu’il n’offre l’accès à rien qui ne soit également accessible depuis la STAN. En bref, nous avons à faire à une interface qui s’axe vraiment dans la lignée des desktops compactes, élégantes (plus façon UA que Metric Halo), et chères (c’est indubitable, mais c’est le prix de la qualité, aussi) : et sur ce plan, elle réussit vraiment son pari.