C'est donc au tour de l'EVO 16, le plus gros modèle de la gamme lancée il y a deux ans par la marque anglaise. La 16 reprend les principes de la série (construction, design, options...) et l'adapte à une interface desktop aux nombreuses entrées et sorties, multipliant donc ses possibilités...
Et c’est ce point en particulier que nous allons mettre en avant dans ce test : le fait que, de facto, l’EVO 16 soit une interface qui diffère, par ses caractéristiques propres, du projet de départ de la gamme dans laquelle elle s’inscrit, tel qu’il avait été annoncé au NAMM 2020. En effet, là où la gamme « iD » représente le flanc plus classique de la production d’Audient (de belles desktops robustes avec des préamplis de bonne qualité), la gamme EVO devait être une proposition plus simple, économique, et axée sur un marché plus grand public, voire spécifiquement pour les créateurs numériques. Les EVO 4 et 8, jusqu’ici, avait tenu cette promesse grâce à leur facilité de prise en main, leur petit format, leur côté un peu « gadget » (sans connotation négative)… Cela impliquant des interfaces avec peu d’entrées et de sorties, mais plutôt des options comme le bouton de réglage automatique du gain.
Mais, récemment, Audient a commencé à brouiller les pistes ! D’un côté, l’iD44 MKII inclut la fonction Loopback et, d’un autre côté, l’EVO 16 propose, pour un prix raisonnable (prix constructeur : 469 euros), une interface avec 24 entrées/sorties, dont 8 préamplis micro, 2 entrées instrument, 8 sorties ligne, un écran LCD… Il s’agit donc d’une interface qui, au sein même de la production d’Audient, vient faire concurrence à l’iD44 MKII.
Nous reparlerons rapidement de toutes ces options, mais pour commencer procédons à notre habituel déballage.
Déballage
Dans les grandes lignes, l’EVO 16 reprend la plupart des éléments de design des plus petits modèles de la gamme mais en les réadaptant à un format plus « classique ». L’interface est d’une taille assez importante (350 × 310 × 50 mm), ce qui la range dans la catégorie des « grandes desktops ». Son poids, également, est plutôt élevé, à 3 kg. On est donc clairement pas sur une interface de voyage…
On retrouve le coloris noir mat et les angles adoucis qui font le style de la gamme, avec ses petits boutons ronds et concaves. Cependant, là où l’EVO 4 et 8 ressemblaient plutôt à des petites boîtes « gadgets », conçues comme un objet numérique mobile (on avait même l’impression que l’EVO 4 pouvait se glisser dans la poche comme un portable), le modèle 16 assoie clairement son ambition d’être un appareil « classique » de (home-)studio : deux entrées à l’avant (pratique pour brancher rapidement un instrument), suivies de tous les contrôles, c’est-à-dire :
- l’habituel encodeur cliquable qui peut servir à régler les gains d’entrée (avec 8 boutons de sélection, un par entrée, sur la face avant), où les niveaux de sortie du monitoring enceinte ou casque (un bouton pour les enceintes, deux boutons pour les deux sorties casque, là aussi sur la face avant)
- Sous les deux boutons de sélection des sorties casques, on trouve les deux jack 6,35 mm TRS des sorties.
- Juste à côté un bouton « F », dont la fonction est assignable au sein du logiciel (nous y reviendrons).
- À côté des boutons de sélection d’entrée, on trouve un commutateur 48 volts
- Un commutateur de circuit haute impédance pour les entrées 1 et 2
- Le bouton Smart Gain, présent sur toutes les interfaces de la gamme
- Pour finir, juste à côté de l’encodeur, un écran LCD couleur permet de contrôler le réglage des niveaux de gains et de sortie, ainsi que le niveau des signaux à l’entrée et à la sortie.
Sur la face arrière, on trouve les 6 autres entrées micro et ligne, sur combo XLR Jack TRS 6,35 mm, suivi des 8 sorties ligne. Tout à gauche, avant la prise secteur, les 2 entrées et 2 sorties optiques (ADAT ou S/PDIF), ainsi que la sortie WordClock.
Comme on le comprend, l’interface en elle-même est déjà très complète, et permettra à l’utilisateur de choisir, selon ses préférences personnelles, de travailler plus tôt au sein de l’environnement numérique, ou directement sur le hardware, ou bien entendu un mix des deux. Dans tous les cas nous avons trouvé, lors de ce test, la prise en main de l’interface très facile, avec une utilisation instinctive qui est grandement facilitée par un design plutôt spacieux.
Une petite critique ? La connectique n’est pas fixée au châssis de l’appareil. Ainsi, elle sera plus susceptible de se « fatiguer » à force d’usage, puisque la contrainte mécanique viendra se reporter plus fortement sur les soudures et sur le circuit imprimé. Cependant, tout le châssis, lui, est facilement démontable, donc toute intervention qui s’avèrerait nécessaire en sera facilitée.
On notera finalement que l’interface de 14 pouces peut recevoir des ailettes de rackage (vendues par Audient, en supplément) pour l’adapter au format 19 pouces.
Voyons maintenant ce que nous réserve le logiciel.
Logiciel
Le software qui accompagne l’EVO 16 reprend les grandes lignes habituelles des logiciels Audient :
On peut choisir de faire apparaître les entrées analogiques, optiques et les canaux USB indépendamment. Les voies ont toutes les options habituelles : mute, solo, inversion de phase, chaînage stéréo… En plus d’un master, on a l’option d’envoyer les voies sur 4 mix supplémentaires.
De plus, le logiciel donne constamment accès aux contrôles de Talkback, Master Mono, Dim et Mute, ainsi qu’à la sélection d’une paire d’enceintes alternative. Une barre inférieure déroulante permet, en plus, pour les entrées analogiques de faire apparaître les contrôles de gain, l’alimentation fantôme et, pour les entrées 1 et 2, le circuit haute impédance.
Pour finir, le logiciel donne accès aux paramètres de l’interface, dans lesquels, en plus des réglages attendus (la résolution par exemple) vous trouver tout le plan de routage des entrées/sorties, ainsi que quelques options supplémentaires : format ADAT ou S/PDIF pour les E/S numériques, sortie mono droite, gauche ou sommation, source pour la sortie Clock, balance panoramique de la paire d’écoutes alternative et réglage du niveau d’atténuation du bouton Dim.
Pour finir avec les réglages de l’interface, une pression longue sur l’encodeur cliquable vous donne accès, sur l’écran de l’interface, à un menu « Motion UI » qui vous permet de mettre l’interface en pause, de sélectionner la brillance de l’affichage, d’assigner la fonction du bouton « F », de contrôler le taux d’échantillonnage de l’interface, et le format numérique sélectionné, et de réinitialiser les réglages d’usine.
Place au benchmark !
Benchmark
Précisons-le d’abord, l’EVO16 travaille dans une résolution max de 24 bits/96 kHz. Un petit tour du côté de RTL Utility nous apprend que la latence réelle est la suivante :
En mettant le buffer sur 256 samples en 44 kHz, le logiciel remonte une latence de 14.626 ms.
En mettant le buffer sur 256 samples en 48 kHz, le logiciel remonte une latence de 14.125 ms.
En mettant le buffer sur 256 samples en 96 kHz, le logiciel remonte une latence de 8.323 ms.
En mettant le buffer sur 128 samples en 44 kHz, le logiciel remonte une latence de 4.979 ms.
En mettant le buffer sur 128 samples en 48 kHz, le logiciel remonte une latence de 8.458 ms.
En mettant le buffer sur 128 samples en 96 kHz, le logiciel remonte une latence de 4.979 ms.
En mettant le buffer sur 64 samples en 44 kHz, le logiciel remonte une latence de 5.306 ms.
En mettant le buffer sur 64 samples en 48 kHz, le logiciel remonte une latence de 5.125 ms.
En mettant le buffer sur 64 samples en 96 kHz, le logiciel remonte une latence de 4.323 ms.
Afin de tester l’interface, nous avons fait un benchmark avec notre fidèle APx515 d’Audio Precision. Comme d’habitude, nous publions les résultats obtenus en THD, rapport signal/bruit et déviation des voies, pour les entrées et sorties analogiques. Pour toutes les configurations, je règle le gain pour obtenir le meilleur résultat possible.
Gain max : nous le mesurons à 57,566 dB, c’est assez proche de l’annonce du le constructeur (58 dB).
Commençons par les entrées ligne :
Déviation : ±0,097 dB. Excellent.
THD : toujours sous 0,005 % et souvent vers 0,001 %, là aussi c’est très bon.
Rapport signal/bruit : 95,247 dB.
Passons aux entrées micro :
Déviation : ±0,213 dB. Un peu moins bien que les entrées ligne, cela étant surtout dû à une plus important déviation dans le haut et bas du spectre. Toutefois, cela reste vraiment très bon !
THD : Principalement entre 0,001 et 0,002 %. C’est excellent !
Rapport signal/bruit : 95,361 dB.
Qu’en est-il de la sortie casque ?
En restant sur l’entrée micro…
Déviation : ±0,270 dB, c’est vraiment très bien, on est souvent sur des déviations beaucoup plus importantes dans le haut du spectre avec le gain de l’ampli casque au maximum.
THD : Là aussi, on est majoritairement sous 0,002 %, avec à peine plus au-dessus de 3 kHz.
Rapport signal/bruit : 92,483 dB, pour une sortie passant par un étage d’amplification en plus, c’est très bon.
En conclusion, que dire si ce n’est « super » ? Certes, l’on peut aujourd’hui trouver des résultats meilleurs, mais pour des prix souvent 3 fois plus élevés. Et, globalement, l’EVO 16 nous renvoie de meilleurs résultats que la récente iD44 MKII ! Dans la gamme où s’inscrit cette interface, ces résultats sont très bons, voire excellents.
Conclusion
Vous l’aurez compris, on aime beaucoup cette EVO 16.
En vérité, son premier argument (à notre avis) c’est son prix : cela peut paraître assez prosaïque, même un peu vulgaire mais, fondamentalement, l’EVO 16 assemble tout ce qu’on peut attendre d’une bonne desktop d’Audient (et même plus !), mais pour moins cher : la qualité des préamplis, 8 entrées analogiques, 8 sorties lignes, une interface robuste (même si, oui, les connectiques ont l’air un peu moins solide que sur la gamme « iD »), avec un logiciel pratique et complet… et cela pour 100 € de moins que l’iD44 MKII !
Si l’on ajoute à cela les E/S optiques, le bouton Smart Gain, l’écran LCD, la fonction Loopback… On doit bien reconnaître que cette interface est, tout simplement, très séduisante et très convaincante. Nous avons d’ailleurs trouvé peu à redire tout au long de cet article, et au moment de conclure nous ne pouvons peut-être que noter l’absence d’E/S MIDI (mais ce n’est pas la seule interface, de loin, à ne plus inclure ce format), et l’absence d’un deuxième port USB qui permettrait de chaîner facilement les interfaces… Bref, l’EVO 16 n’est peut-être pas un game changer, puisque c’est une interface assez « simple » (sans effets intégrés, par exemple), mais dans cette simplicité c’est probablement aussi une des meilleures interfaces d’Audient.