Fondée en 1984, MOTU s’est forgé une solide réputation dans le monde de l’audio pro, mais, chez AF, on doit bien avouer qu’on n’a pas souvent pris le temps de s’y pencher. On répare ça avec la MOTU 828, une interface qui a su évoluer depuis 2001, et qui s'est déjà taillé une solide réputation.

La marque américaine MOTU (Mark of the Unicorn, ce nom est formidable !) est depuis de nombreuses années un acteur incontournable de l’audio numérique, notamment dans le domaine des interfaces audio pour musiciens et ingénieurs du son. C’est vrai que, chez AF, nous avons rarement eu l’occasion, ou peut-être pris le temps, de tester les produits MOTU en profondeur, malgré leur réputation plus que solide. Un petit test de la MOTU 828 vise donc à combler cette lacune, et nous permettra de nous pencher sur une interface réputée de la marque.
En effet, la MOTU 828, lancée à l’origine en 2001, a évolué au fil des années pour devenir une interface référence de la marque. Dans la gamme actuelle de MOTU, l’interface 828 représente la solution pour ceux qui cherchent une interface avec de nombreuses entrées et sorties, en se situant juste en dessous de la 1248 (testée il y a maintenant 10 ans par Red Led) mais sans l’option de réseau numérique par technologie AVB, qui fait une des particularités de la marque américaine. Trêve de propos introductif, c’est parti pour le test !
Présentation de la connectique et des fonctions matérielles de la MOTU 828
Avant de pointer du doigt ce qui a retenu notre attention, on va commencer par une description rapide et objective de l’appareil. Sur la face arrière, de droite à gauche :
- On trouve d’abord quatre jacks 6,35 mm TRS qui forment un couple d’envois et retour (SEND & RETURN / MIC INSERT 1 & 2) permettent d’insérer un effet externe dans la chaîne audio des deux premiers préamplis micros. On commence assez fort, parce que ce genre de détail est assez rare aujourd’hui sur les interfaces que nous testons dans cette gamme de prix.
- Ensuite, l’on a 10 entrées niveau ligne (LINE IN 1–10) au format jacks 6,35 mm TRS. C’est assez généreux !
- Juste après, on trouve les sorties niveau ligne principales (MAIN OUT (A) – LEFT / RIGHT) au format XLR pour la connexion de l’interface aux enceintes de monitoring ou à un système de diffusion principal. Format XLR, là aussi, c’est assez remarquable, on est généralement sur du jack TRS. On reviendra sur ce détail plus loin.
- Suivent les 10 sorties niveau ligne (LINE OUT 1–10) sur jacks 6,35 mm TRS, là aussi c’est généreux, et, en plus, les sorties sont couplées en courant continu, pour l’envoi de tensions de contrôle (VC) !
- Une entrée pour commande au pied (FOOTSWITCH sur jack 6,35 mm TRS) qui peut servir à déclencher des fonctions dans le logiciel ou sur l’interface (ex: talkback, lecture, etc.). Ce n’est pas commun, et là aussi c’est bien pensé.
- Entrée et sortie MIDI (MIDI IN / OUT) sur prise DIN 5 broches.
- Entrée et sortie S/PDIF (au format RCA)
- Entrée et sortie optique A et B (au format TOSLINK). Chaque port peut transporter jusqu’à 8 canaux audio en ADAT.
- Une entrée et une sortie au format BNC pour l’horloge (WORDCLOCK IN / OUT) pour assurer la synchronisation avec le reste de la chaîne numérique.
- Puis la connexion vers l’ordinateur sur port USB-C (compatible avec USB 2.0 et 3.0) et le connecteur d’alimentation IEC, pour relier l’appareil au secteur.
Passons à la face avant et, cette fois-ci, lisons là de gauche à droite :
- D’abord, deux entrées sur combo XLR/jack (MIC/LINE/INSTRUMENT 1 et 2) pour micros, instruments (guitare/basse) ou sources ligne. Chacune est équipée d’un bouton PAD pour atténuer le signal d’entrée, d’un interrupteur 48V pour activer l’alimentation fantôme et, bien sûr, d’un potentiomètre de gain.
- Deux sorties casque au format jack 6,35 stéréo (3,5 mm) avec chacune un contrôle de niveau indépendant)
- Section de contrôle A/B : un ensemble de boutons pour gérer le routing et le monitoring. Plus précisément :
– AB ON : active la commutation A/B.
- A / B : sélection de la paire de moniteurs active.
- MUTE : coupe les sorties principales.
- MONO : passe les sorties en mono.
- TALK : active le micro de talkback.
- À côté, on trouve l’habituel écran LCD couleur multifonction. Il permet l’affichage des niveaux d’entrée et de sortie avec Vumètres numériques et la visualisation des routages, des effets, etc.
- Il est accompagné d’une section navigation/menu avec une petite molette de navigation cliquable pour la sélection et les trois boutons MENU, BACK et SELECT pour la navigation dans les paramètres. C’est un point important, car souvent ces tâches sont dévolues à l’encodeur principal, celui qui sert à régler le niveau de monitoring. Ici, on garde une indépendance entre les contrôles de l’audio et les contrôles de navigation. C’est un détail, mais un détail intéressant.
- On termine avec l’encodeur principal de volume de sortie, et le bouton de commutation de l’appareil. Et voilà !
Que dire de tout cela ? Un premier point important, et que vous avez peut-être remarqué, est que nous avons déjà réussi à soulever plusieurs aspects positifs rien que dans une liste qui se voulait « objective ». Alors, bien sûr, on pourrait souligner que l’appareil offre de nombreuses entrées et sorties, analogiques comme numériques, mais c’est attendu dans une interface de cette gamme de prix. Pour rester bref, disons surtout qu’à ce niveau (de qualité et de prix), la 828 se situe bien dans l’offre actuelle. Pour ce qui est des E/S, si différences il y a, celles-ci vont correspondre à ce dont vous avez fondamentalement besoin : l’Antelope Discrete 8 Pro Synergy Core a plus d’entrées micro et des sorties de reamplification, mais pas de boucle d’effets ; la 16Rig d’Arturia a plus d’entrées ligne, mais n’a qu’une seule sortie casque et pas de footswitch, la RME UCX II a la fonction DURec (enregistrement directement sur support mémoire USB) mais n’a pas autant d’entrée ou de sortie… Bref, ce sont des différences que l’acheteur doit connaître pour simplement distinguer ce qui correspondra le plus à ses besoins. Mais c’est aussi, de notre point de vue, ce qui fait que la 828 se place sans problème dans sa gamme, car ce qu’elle offre n’a pas à pâtir à la comparaison.
Pour se focaliser sur quelques points particuliers, on notera que l’on appréciera particulièrement la présence de deux sorties casque, d’un footswitch (pratique pour le talkback, par exemple, ou pour couper la réverbe en DSP entre les prises, pour mieux communiquer entre la cabine et le studio), d’un encodeur indépendant pour naviguer entre les menus et du système A/B qui permet de passer facilement d’un système d’écoute à un autre. L’emploi de sortie monitoring au format XLR est intéressant. Les constructeurs l’évitent habituellement pour des questions évidentes de place, mais le format XLR est, dans mon expérience de technicien, plus solide et durable que le Jack 6,35 mm, et son système de clip de sûreté le rend généralement supérieur dans des situations où l’on ne va pas régulièrement brancher et débrancher la connexion entre les appareils.
Voilà pour le matériel physique, passons maintenant au numérique.
Logiciel de contrôle de la MOTU 828 : routing, mixage et effets intégrés
Le logiciel fourni avec l’interface est excellent. Il est non seulement très fourni, mais il parvient malgré cela à conserver une interface utilisateur lisible et une architecture claire. La première page, nommée « HOME », est une sorte d’équivalent de la face avant de votre interface. Un second onglet, « DEVICE » permet de paramétrer des éléments courants, puis suivent les onglets des E/S (INPUTS et OUTPUTS) et sept onglets permettant de créer 7 mix différents, répartis sur les 5 paires de sorties lignes et les deux sorties casques.
Impossible ici de tout lister, alors nous nous concentrerons surtout sur les aspects les plus critiques :
- la possibilité de vraiment paramétrer le talkback (niveau de diffusion, niveau d’atténuation des mix pendant le talkback, type de déclenchement — temporaire ou fixe — et sélection des mix vers lesquels il se trouve envoyé.
- La possibilité de gérer depuis l’onglet HOME le monitoring direct de n’importe quelle entrée ou ensemble d’entrées vers n’importe quelle sortie, sous la forme d’une matrice.
- La fonction « Optical Expander » dans l’onglet DEVICE, qui va router toutes les entrées et toutes les sorties analogiques vers les deux entrées et deux sorties optiques.
- La possibilité de choisir le format ADAT ou TOS pour les connexions optiques, et cela de façon indépendante pour les entrées et les sorties !
- La possibilité d’ajouter les retours USB que vous souhaitez dans vos mix (par exemple, retours 1/2 sur le mix principal, retours 3/4 et 5/6 sur le mix casque…). À la carte !
- La fonction de contrôle en réseau, qui permet de prendre le contrôle du système interface-logiciel depuis une tablette.
- La possibilité de choisir si le niveau de monitoring général s’applique à une, deux, trois… Ou même toutes les sorties ensemble. Pratique pour mixer en immersif.
- La possibilité d’envoyer n’importe quel mix, mais aussi n’importe quelle entrée, analogique ou numérique, en solo vers les casques, voire même le mix « wet » de la réverbe intégrée, grâce à un simple menu déroulant. Même chose pour la boucle de « loopback ».
- La possibilité d’appliquer, sur chaque entrée, et en temps réel, un traitement d’égalisation (4 bandes paramétriques), un gate et un compresseur. En plus de cela, chaque mix bénéficie, de façon autonome, d’une égalisation (3 bandes paramétriques) et une réverbe sur le master.
On s’arrêtera là, mais c’est clairement déjà beaucoup.
Performances audio mesurées de la MOTU 828 (latence, THD, dynamique)
Précisons-le d’abord, la MOTU 828 travaille dans une résolution max de 24 bits/192 kHz. Un petit tour du côté de RTL Utility nous apprend que la latence réelle est la suivante :
Afin de tester l’interface, nous avons fait un benchmark avec notre fidèle APx515 d’Audio Precision. Comme d’habitude, nous publions les résultats obtenus en THD, THD+N, déviation des voies et IMD (sauf pour la sortie casque), puis la réponse en amplitude de chaque canal mesuré. Pour toutes les configurations, je règle le gain pour obtenir le meilleur résultat possible.
Plage dynamique : 105,3 dB (AES-17, pondération A)
1 – Commençons par les entrées ligne :
Déviation : ±0,1 dB (fréquence de référence : 1 kHz)
THD+N : – 98 dB / THD : – 105 dB (@ 1 kHz)
Distorsion d’intermodulation : – 96 dB (type SMPTE, @ 1 kHz)
En amplitude, on mesure :
2 – Passons aux entrées micro :
Déviation : ±0,15 dB (fréquence de référence : 1 kHz)
THD+N : – 105 dB / THD : – 113 dB (@ 1 kHz)
Distorsion d’intermodulation : – 104 dB (type SMPTE, @ 1 kHz)
En amplitude :
Gain max : 65,9 dB (entrée micro, @ 1 kHz)
3 – Qu’en est-il de la sortie casque ?
Déviation : ±0,07 dB (fréquence de référence : 1 kHz)
THD+N : – 49 dB / THD : – 51 dB (@ 1 kHz)
En amplitude :
4 – Et pour finir, la sortie ligne :
Déviation : ±0,05 dB (fréquence de référence : 1 kHz)
THD+N : – 98 dB / THD : – 110 dB (@ 1 kHz)
Distorsion d’intermodulation : – 100 dB (type SMPTE, @ 1 kHz)
En amplitude :
FAQ
La MOTU 828 est-elle compatible avec les DAW comme Ableton Live ou Pro Tools ?
Oui, elle est compatible avec tous les DAW supportant le standard Core Audio (macOS) ou ASIO/WDM (Windows).
Peut-on utiliser la MOTU 828 sans ordinateur ?
Non, elle nécessite un ordinateur pour le routage avancé et l’accès aux effets DSP via le logiciel de contrôle.
Les effets intégrés sont-ils utilisables en enregistrement ?
Oui, les effets DSP (EQ, compresseur, gate, reverb) peuvent être appliqués en direct sur les entrées, idéal pour un monitoring avec traitement.
La fonction Loopback est-elle disponible ?
Oui, la MOTU 828 permet de router l’audio interne de l’ordinateur pour des usages de streaming ou capture de système.
La latence est-elle faible ?
Oui, la latence mesurée est très faible, bien adaptée aux usages exigeants comme le jeu en direct ou les prises studio.
Caractéristiques techniques
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Interface audio USB-C (compatible USB 2.0/3.0)
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Résolution maximale : 24 bits / 192 kHz
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2 entrées micro/ligne/instrument sur combos XLR/jack avec gain, pad et alim. fantôme
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10 entrées ligne symétriques sur jack TRS 6,35 mm
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10 sorties ligne symétriques sur jack TRS 6,35 mm (DC-couplées)
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2 sorties monitoring principales sur XLR
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2 sorties casque indépendantes avec volume séparé
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Insert/send/return sur les deux premières entrées
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Entrée/sortie S/PDIF (RCA)
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2 entrées/sorties optiques ADAT (jusqu’à 16 canaux)
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Entrée/sortie Word Clock (BNC)
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Entrée/sortie MIDI (DIN 5 broches)
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Entrée footswitch (jack TRS)
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Écran couleur multifonction avec navigation dédiée
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Logiciel de mix et de routage via navigateur
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7 mix internes indépendants avec EQ, compresseur, gate, reverb
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Contrôle réseau via tablette ou navigateur
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Monitoring A/B avec fonction talkback
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Fonction Loopback et effets DSP en temps réel