Nouvelle interface ? Oui et non. En 2019, nous avions parlé dans ces colonnes de l'interface spéciale guitare d'IK Multimédia, mais sans vous offrir de test. Alors, à l'occasion de sa recréation en version Solo et de la sortie du logiciel ToneX, nous avons saisi l'opportunité de la passer au détecteur de bon son.
Présentée au NAMM Show 2020, l’Axe I/O Solo de IK Multimédia est en fait la version réduite de leur interface AXE, déjà produite depuis 2019. La version solo reprends la plupart les fonctions de sa grande sœur, et donc il s’agissait pour nous, avec ce test, non seulement de s’inscrire dans une actualité récente, mais de rattraper un manque concernant cette interface, la version Solo proposant principalement un format plus compact et plus portable. D’ailleurs, en étudiant les données fournies par le constructeur, on remarque rapidement – au-delà de ce qui a disparu – quelques changements au niveau des spécifications : dans la plupart des cas, la version Solo propose des niveaux de gain réduit, et des plages de fréquences légèrement plus restreinte. Rien d’alarmant malgré tout, puisque l’on reste bien au-delà du domaine de l’audible. Bien entendu, nous ferons le tour de ces questions techniques lors du benchmark, mais en attendant nous allons procéder au déballage de l’interface et faire le tour des différentes entrées, sorties et options qu’elle propose.
De l’axiome…
Les premiers changements qui nous frappent, par rapport à la version antérieure, ne sont pas particulièrement surprenants : l’appareil est plus petit (et passe à la forme carré pour l’occasion) et plus léger aussi (il fait 1 kg contre 1,3 kg). La nouvelle AXE nous arrive également dans un carton moins rempli : en effet, cette nouvelle version est autoalimentée ! Donc, bonne nouvelle, plus besoin de la transporter avec son alimentation, cela va encore dans le sens de la portabilité. Mis à part ces quelques changements externes, le design reste exactement le même, avec un boîtier métal assez solide, et des joues et boutons en plastique robuste, dans un style « coque de renforcement ». Le code couleur reste au noir, avec des touches colorées calquées sur la norme des VUmètres à LED de l’appareil (vert-orange-rouge). Rien à signaler de plus, car d’un point de vue externe, la construction ne s’est améliorée ni n’a empirée : métal solide, oui, mais connectique non fixée sur les façades avant et arrière ; des joues de protection qui seront utiles pour le transport et pour la scène mais qui, d’un point de vue esthétique, ne nous ont pas paru du meilleur goût (après, chacun le sien…).
Passons à la façade avant, qui contient tous les contrôles, une entrée et deux sorties. Sans surprise, on y trouve toutes les entrées et sorties dédiées aux instruments, au reamping, et à l’écoute sur casque – rien que du très classique, mais ça mérite d’être souligné, car dans l’ensemble l’ergonomie du produit nous a séduit. De gauche à droite : l’entrée instrument (qui bénéficie de son entrée spécifique et de son préampli spécifique, ce qui est un peu la spécialité d’IK Multimedia, même s’ils ne sont pas les seuls sur ce terrain). Cette entrée bénéficie d’un contrôle de gain, accompagné de son VUmètre 5 bandes à LED, et de trois contrôles supplémentaires : le levier « Passive/Active » qui permet de commuter un étage de préamplification en plus, dès l’entrée, selon que le micro est passif ou, vous l’avez compris, actif. Sur Active, cet étage de préamplification est court-circuité. Un contrôle « Pure/JFET » agit sur la coloration du second étage de préamplification. En mode Pure, il est très linéaire (se technologie est non spécifiée par le constructeur), et en mode JFET, on active un étage basé sur un transistor à effet de champ dont les caractéristiques sont employées pour imiter la coloration harmonique d’un tube. On verra au benchmark, mais on s’attend à un résultat plus coloré. Au-dessus de ces deux commutateurs à l’évier, on trouve un bouton de potentiomètre, nommé Z Tone, et qui permet d’adapter progressivement l’impédance d’entrée depuis une valeur heute (1 M ohm, proche de l’entrée d’un amplificateur), et une valeur assez basse (2,2 K Ohm). Ce potentiomètre offre donc une charge réglable au micro de votre guitare, et permet ainsi d’en changer la réponse en fréquence. Plus spécifiquement – et cela tombe sous le sens de l’adaptation des impédance entre elles – le réglage « Sharp » (1 M ohm), avec son impédance très élevée, vous permettra de garder une clarté maximale, tandis que plus l’impédance sera réduite, plus les aigus seront atténués, et plus une bosse apparaîtra et se déplacera progressivement vers le bas-médium, vous donnant un son plus sourd, gras, et qui ira bien avec un gain saturé.
La seconde entrée est beaucoup plus simple : elle est consacrée au micro ou au niveau ligue, qui sont sélectionnés automatiquement selon le branchement sur le combo XLR jack 6,35 mm. En façade avant, cette entrée bénéficie d’un gain, d’une alimentation +48 VDC et d’un VUmètres à LED 5 bandes. Pour finir, la section à droite de la façade est consacrée aux sorties, avec d’abord l’habituel sélecteur rotatif qui permet de régler le mix de monitoring entre l’entrée directe et la sortie de votre STAN. Ensuite, la sortie casque avec son atténuateur, le master principal, et la sortie « Amp Out » (consacrée au Re-amping).
Sur la façade arrière, on peut trouver l’entrée numéro 2 (micro/ligne, signlée dans le paragraphe ci-avant), les deux sorties sur Jack TRS 6,35 mm pour brancher vos moniteurs, les deux connecteurs (là aussi sur fiche Jack 6,35 mm) pour brancher deux footswitchs (une très bonne idée, déjà exploitée sur la version précédente). On ajoute à cela, l’E/S MIDI et la fiche USB type B 2.0, qui sert au raccordement avec l’ordinateur et à l’alimentation.
Alors quelles sont les différences avec la version précédente ? On remarque que quelques éléments ont disparu : la deuxième entrée instrument (ça s’appelle pas Solo pour rien…), la deuxième entrée micro/ligne, la possibilité de choisir ses presets en façade, et l’accordeur intégré. C’est dommage… on le regrette un peu, car il est bien pratique sur la version plus développée. Au niveau des sorties, la version Solo s’est amincie en éliminant deux sorties ligne.
Avant d’en arriver au benchmark, que conclure de cette description exhaustive (ou qui essaie de l’être) ? Nous pouvons dire que l’impression première, en abordant l’interface, et que la marque italienne a plutôt visé juste : il nous semble que les options qui ont été éliminés, et donc celles qui ont été conservées, forment vraiment le coeur de ce qui faisait l’intérêt de l’AXE I/O jusqu’ici. La Solo (tout est dit dans son nom) devrait permettre au guitariste débutant et/ou à celui qui souhaite un système nomade simple, de retrouver la plupart des options intéressantes de la version de 2019 : une sorte de version « essentielle » pour se fabriquer un set-up simple.
…À l’action
Afin de tester l’interface, nous avons fait un benchmark avec notre fidèle APx515 d’Audio Precision. Comme d’habitude, nous publions les résultats obtenus en THD, rapport signal/bruit et déviation des voies, pour les entrées et sorties analogiques. Pour toutes les configurations, je règle le gain pour obtenir le meilleur résultat possible.
Résolution : 24bit/192KHz max
Commençons par l’entrée instrument. Pour le meilleur résultat je règle sur Active (un étage d’amplification en moins), Pure (distortion minimale) et sur Sharp (plus haute impédance).
Déviation : ±0,105 dB, c’est très correct pour une entrée instrument, là-dessus le constructeur tient la ligne (c’est le cas de le dire).
THD : Majoritairement autour de 0,02 %, c’est plutôt élevé. Lorsqu’on obtient un tel résultat, vous vous en doutez, on reteste à différent niveaux d’entrée, pour vérifier que l’on n’a pas causer de saturation, malgré tout le temps passé à régler le système. Eh bien non, le résultat reste le même.
Rapport signal/bruit : 72,976 dB. Rien de honteux, et surtout rien de surprenant avec une telle THD.
Essayons un réglage différent de l’entrée instrument, le réglage presque « opposé » : passif/JFET/impédance à 12h, entre Sharp et Bold
Déviation : voilà une surprise, que nous ne nous expliquons pas… ±0,097 dB, le préampli est (légèrement) plus linéaire lorsqu’il a plus de gain et un préampli à transistor à effet de champ utilisé pour leur « coloration typée tube ».
THD : À peine plus élevée qu’avant, avec toujours une grande partie de la bande passante aux alentours de 0,02 %
Rapport signal/bruit : La THD monte un peu, le rapport signal/bruit baisse. Rien d’étonnant là dedans : 71,638 dB.
Voyons ce que cette entrée donne sur la sortie pour le reamping :
Déviation : ±0,543 dB, la déviation étant surtout située sous 30 Hz et au dessus de 2 kHz. En gros, on prend les résultats précédents, mais avec des pertes.
THD : Principalement située autour de 0,05 %, c’est encore plus élevé qu’avant. La tendance se confirme
Rapport signal/bruit : 61,061 dB. CQFD. La Sortie Amp Out semble ne pas, selon nos tests, être la meilleure fonction de l’AXE I/O Solo.
Et les autres entrées ? Voici rapidement les résultats, généralement meilleurs.
Ligne
Déviation : ±0,094 dB
THD : inférieure à 0,003 % jusqu’à 1 kHz
Rapport signal/bruit : 99,556 dB
L’entrée micro est encore un peu meilleure, avec une déviation de ±0,066 dB et un rapport s/n à 100,093 dB.
Et ça donne quoi à l’oreille
Il n’y a pas grand intérêt à vous faire entendre des presets d’Amplitube que nous avons déjà testé, mais de voir l’impact qu’ont les modes JFET/PURE et le passage de Sharp à Bold sur l’entrée Instrument. Et les différences sont manifestes :
- 1 – PURE – SHARP00:21
- 2 – PURE – BOLD00:17
- 3 – JFET – SHARP00:16
- 4 – JFET – BOLD00:15
On dispose en effet avec ces modes et le potard Z-Tone de quoi vraiment faire pencher la balance spectrale vers quelque chose de plus brillant ou plus sombre, mettant plus ou moins en avant les graves et les aigus. Voilà qui permettra de s’adapter à toutes sortes de guitare en amont de tout traitement logiciel ensuite, et sera intéressant pour compenser les faiblesses de certains micros manquant de rondeur ou de mordant suivant les contextes…
Pour ce qui est d’exemples plus musicaux, vous pouvez enfin vous référer au test du ToneX qui ont été réalisés avec l’Axe I/O…
Conclusion
Voilà un produit qui nous avait plutôt séduit en commençant à le prendre en main : rapport fonctionnalités/encombrement, bonne ergonomie, robustesse, options intéressantes, E/S MIDI et sortie reamping, l’adaptation d’impédance d’entrée comme outil pour transformer le son… IK Multimedia semble s’être concentrer sur les caractéristiques essentielles de son produit pour nous proposer une sorte de passe-partout malin et bien conçu pour les guitaristes. Ajoutez à cela un bundle plus que généreux, l’absence de gadget (genre un tube 12A-quelque-chose-7 complètement sous-alimenté pour dire « notre préampli offre un son digne des meilleurs amplis à lampes »… Laissez-moi rire), le tout à un prix plutôt sympathique (entre 250 et 300 euros chez la plupart des revendeurs) et vous vous dites que l’Axe I/O Solo est un outil bien pensé pour le guitariste qui souhaite se lancer dans l’enregistrement à la maison ou, pourquoi pas, comme équipement dédié spécialement aux prises guitares dans un environnement home-studio déjà existant.
Mais, et c’est vraiment là que le bât blesse, les bonnes émulations d’ampli, de haut-parleur, d’effets sont monnaies courantes aujourd’hui, et sont proposées avec des interfaces dont les résultats sonores (et là je ne parle que dans l’optique du benchmark) mettent IK pas loin d’être KO. Quelques exemples récents d’entrées « instrument » montre à quel point l’on trouve aujourd’hui aussi bien, ou même mieux, en tout cas en ce qui concerne la linéarité, et cela pour moins cher. Alors certes, la sortie de reamping constitue vraiment l’élément qui différencie cette desktop/amptop d’autres interfaces de même gabarit mais, comme semblent l’indiquer les mesures, celle-ci n’est pas irréprochable. Dommage…