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Test du Roland JP-8080 - Le juste prix de la modélisation

Moins de deux ans après le JP-8000, Roland porte au petit écran sa modélisation analogique. Comme toujours chez le constructeur, la version rack est boostée, moins chère, sans que l’ergonomie ne semble ici en souffrir. Vite, mon zappeur !

Déci­dé­ment, 1998 sera un grand cru pour Roland, qui nous séduit par la diver­sité de ses nouvelles émis­sions, parmi lesquelles le DtD VS-1680, les dance machines MC-505, JX-305 et SP-808, ainsi que le module GM SC-880. Seuls les échan­tillon­neurs purs et durs ont été un peu délais­sés par le construc­teur depuis quelques temps (en atten­dant le prochain S-itcom). Sur le segment des synthé­ti­seurs à modé­li­sa­tion analo­gique, le JP-8000 et le Nord Lead se sont bien battus en leur temps et depuis, on compte de grosses poin­tures made in Europe tels que le Virus d’Ac­cess, le Nord Lead II de Clavia ou encore le Super­nova de Nova­tion. Avec le JP-8080, Roland entend renfor­cer sa présence sur un marché curieu­se­ment boudé par les autres construc­teurs nippons (on omet l’AN1x de Yamaha avec beau­coup moins de contrô­leurs ou le Z1 de Korg à modé­li­sa­tion physique bien plus sophis­tiquée). Dans un paysage audio­vi­suel jusque-là très serré en termes de perfor­mances et de tarifs (de 12.000 à 15.000F TTC), le JP affiche un prix agres­sif sous la barre des 10.000F TTC. Voyons quels sont les autres argu­ments de la machine pour empor­ter les faveurs des musi­ciens fondus de synthèse datant de l’ORTF. Antenne dans dix secondes !

Une Famille en Or

Roland JP-8080

Le JP-8080 fait partie d’une famille d’ins­tru­ments qui allie à la fois convi­via­lité et rapi­dité d’uti­li­sa­tion. Ceci est dû, en grande partie, à son astu­cieux format qui permet soit une utili­sa­tion en console, soit un montage en rack 19 pouces 6 unités (cornières amovibles four­nies) et sa face avant, qui reprend de façon presque exhaus­tive l’en­semble des para­mètres de la machine sous forme de 60 inter­rup­teurs, 30 poten­tio­mètres rota­tifs et 12 curseurs pour les enve­loppes. Merci Roland pour les poten­tio­mètres cran­tés en leur centre lorsqu’ils sont liés à des valeurs bipo­laires et les faders linéaires d’en­ve­loppe. Par contre, les touches « compare » et « undo » ne font pas partie de la famille.

La roue de la fortune

La roue tourne dans le monde de la synthèse sonore et les nouvelles versions comportent toujours leur lot d’amé­lio­ra­tions par rapport à leurs prédé­ces­seurs. Le JP-8080 n’échappe pas à la règle ; voici un résumé des nouveau­tés par rapport au JP-8000 :

  • Modu­la­teur de voix (filtre à formant)
  • Banque de filtres 12 bandes
  • Entrée stéréo externe pour la synthèse
  • 192 perfor­mances / 384 patches en Rom
  • Géné­ra­teur de bruit sur l’os­cil­la­teur 2
  • « Motion Control » passé à 99 mesures
  • Inter­face pour carte Smart­me­dia
  • Midi : 2 entrées et 1 sortie (Out / Thru)
  • Effet distor­sion ajouté dans le multi-effets
  • Mode « Unison » avec réglage de Detune

Au milieu de ce beau monde, un petit LCD rétro-éclairé 2 × 16 carac­tères affiche en direct le nom des programmes et la valeur du para­mètre édité (moyen­nant une gymnas­tique rébar­ba­tive). Il est même possible, en action­nant les poten­tio­mètres, de faire affi­cher la valeur stockée sans modi­fier le son. C’est bien, mais on aurait préféré avoir de base les deux valeurs affi­chées en même temps et une option, comme sur le Virus d’Ac­cess, évitant que le mouve­ment d’une commande ne fasse sauter immé­dia­te­ment le para­mètre sur sa posi­tion actuelle. La face arrière est beau­coup plus dépouillée, avec un trio Midi inédit (2 In et 1 Out, nous y revien­drons), une sortie et une entrée (merci !) stéréo sous forme de 4 jacks 6.35mm asymé­triques, ainsi que la prise 3 broches pour cordon secteur (alimen­ta­tion interne à détec­tion de tension auto­ma­tique). Astu­cieu­se­ment, Roland a placé les connec­teurs très en retrait, ce qui permet de bran­cher les câbles sans qu’ils ne débordent du panneau arrière, comme sur le Micro­wave XT de Waldorf. Ainsi, en rack, la connec­tique ne vient pas occu­per une unité supplé­men­taire. En résumé, le JP-8080 hérite des petits défauts d’édi­tion du JP-8000 et on souhaite que Roland y remé­die rapi­de­ment, ceux-ci étant essen­tiel­le­ment logi­ciels. Bref, une ergo­no­mie presque parfaite (la prise casque est même à l’avant !) qui se traduit par une prise en main immé­diate et un remarquable confort d’uti­li­sa­tion. Une belle famille !

Monte le son

Roland JP-8080

La mémoire sonore du JP-8080 est orga­ni­sée en groupes conte­nant chacun 128 programmes et 64 perfor­mances. La machine comporte 3 groupes presets (Rom) et 1 groupe utili­sa­teur (Ram), ainsi qu’une inter­face pour carte Smart­me­dia 2 Mo et 4 Mo dont les capa­ci­tés de stockage sont respec­ti­ve­ment 32 et 64 groupes : autre­ment dit, une carte 4 Mo pourra conte­nir le nombre astro­no­mique de 8.192 programmes et 4.096 perfor­mances (on est loin des cartes 16K hors de prix capables de mémo­ri­ser un maxi­mum de 32 programmes, sans parler des inter­faces cassette).

Dans la liste des sons d’usine, « Chariots » est une perfor­mance « vangé­li­sée » très évoca­trice repre­nant, en split, la basse répé­ti­tive arpé­gée et la nappe à ouver­ture de filtre. « Feed­ba­cker Lead » est un solo de guitare au feed­back accro­cheur qui utilise avec brio la toute-puis­sance du premier oscil­la­teur du JP et le morphing affecté à l’af­ter­touch. Pour les basses, rien de tel que « JP-303 » pour donner un peu d’aci­dité à un mix ou « Juno Sub Bass » pour réveiller des boomers endor­mis. Pour les amateurs de nappes, « String Machine » fait un usage inten­sif de la forme d’onde « super­saw » du premier oscil­la­teur, tandis que « MKS80 Space » donne une idée de ce qu’est un son planant à souhait.

Enfin, les effets spéciaux spec­ta­cu­laires ne sont pas en reste avec « AKS Sweep », effet digne d’un modu­laire à appa­ri­tion progres­sive, descente de pitch et ralen­tis­se­ment de LFO commandé par l’af­ter­touch. D’ailleurs, la Rom de la machine est bour­rée d’imi­ta­tions parfaites de vintages Roland, (Juno, Jupi­ter et autres TB) si bien que le JP-8080 risque fort de faire arrê­ter sur le champ ceux qui sont partis à la chasse aux trésors. Mais outre l’imi­ta­tion des vintages de la marque, le JP se débrouille fort bien dans le clonage des (feus) concur­rents, si l’on en croit « P5 Sync » ou « Matrix Sweep », mais un peu moins bien sur « Mini Bass », faute de punch. En fait, le JP-8080 est un cham­pion des textures grasses, des nappes à balayage de filtre, des effets spéciaux et des solos à feed­back. Les résul­tats de la modé­li­sa­tion analo­gique sont excel­lents, même si le punch de certains dino­saures semble avoir disparu avec eux. Tout de même, faux pas rêver !

Thalassa

Pour créer ses ondes et former de grosses vagues, le JP-8080 utilise une synthèse à modé­li­sa­tion analo­gique, c’est-à-dire une descrip­tion mathé­ma­tique des compor­te­ments élec­tro­niques des machines d’an­tan à ampli op, diodes et autres tran­sis­tors. Mais les ingé­nieurs de Roland en ont profité pour rajou­ter des petites subti­li­tés afin d’amé­lio­rer le concept. De ce fait, la géné­ra­tion sonore est basée sur deux oscil­la­teurs dont le premier est capable de produire quatre formes d’ondes évoluées, en complé­ment des habi­tuelles pulse, rampe et triangle. La première, bapti­sée « super­saw », se compose de pas moins de 7 ondes en dent de scie. Il est possible de régler le niveau et le désac­cord des 6 ondes secon­daires par rapport à l’onde prin­ci­pale. 7 sur 7, voilà qui explique les excel­lents sons de strings très épais produits par la machine.

Roland JP-8080

La seconde, « triangle mod », est une onde trian­gu­laire enri­chie en harmo­niques dont le contenu peut être modulé par le LFO1, capable de produire des sons aigres-doux. La troi­sième est un bruit qui peut passer par toutes les couleurs grâce à un filtre passe-bas réso­nant oscil­lant (statique) dédié. La quatrième et dernière, « oscil­la­tor feed­back », est basée sur un contrôle harmo­nique et une réinjec­tion de signal, afin d’imi­ter de façon très réaliste des leads accro­cheurs de guitare distor­due. Dans cette confi­gu­ra­tion, la machine fonc­tionne d’ailleurs en mode solo.

Pour être complet, notons que les formes d’onde rampe et triangle de l’os­cil­la­teur 1 disposent d’un réglage alté­rant leur contenu harmo­nique modu­lable par le LFO1. Enfin, l’os­cil­la­teur 2 dispose d’un géné­ra­teur de bruit en plus des 3 ondes de base. Les deux oscil­la­teurs peuvent ensuite être synchro­ni­sés, modu­lés en anneau ou en FM (« cross modu­la­tion » maison), ce qui permet, entre autres, d’ob­te­nir des sons métal­liques, des pianos élec­triques « piquants » ou des sons de cloche disso­nants. Pour créer des tempêtes, le LFO1 (avec fade-in et 4 formes d’ondes) et l’en­ve­loppe de pitch (deux segments avec réglage bipo­laire) peuvent agir (hélas, ensemble) sur la hauteur des deux oscil­la­teurs, sur l’os­cil­la­teur 2 ou sur la quan­tité de FM. Quali­ta­ti­ve­ment, la modé­li­sa­tion des oscil­la­teurs est une réus­site, on sent la patte du marin expé­ri­menté.

Télé Filtre

Le signal audio arrive alors dans un filtre multi­mode réso­nant capable d’en­trer en oscil­la­tion lorsque la réso­nance est pous­sée à l’ex­trême (créa­tion d’une onde sinu­soï­dale). Celui-ci peut être confi­guré en passe-bas, passe-haut ou passe-bande, le tout en 12 ou 24dB par octave. Il manque à notre sens un mode à réjec­tion de bande permet­tant de creu­ser le son et une pente de 18dB par octave pour ce grain acidulé typique­ment TB-303. Ceci dit, le filtre est d’une effi­ca­cité redou­table et apporte au son un carac­tère vintage indé­niable si l’on fait réfé­rence à l’im­mense pano­plie de nappes planantes à la Jupi­ter et autres Prophet très réus­sies.

Pour faire évoluer le filtrage, le JP-8080 est doté d’une enve­loppe dédiée ADSR agis­sant unique­ment sur la fréquence de coupure avec modu­la­tion bipo­laire. Comme toute ADSR, cette enve­loppe est inca­pable de réali­ser simul­ta­né­ment des modu­la­tions posi­tives et néga­tives (il manque un second segment de niveau et de temps). De plus, on aurait égale­ment aimé pouvoir faire varier la réso­nance dans le temps, ce que l’ar­chi­tec­ture du JP-8080 ne permet pas, puisque le LFO1 agit lui aussi unique­ment sur la fréquence de coupure du filtre. Par la suite, le signal ainsi filtré attaque l’étage d’am­pli­fi­ca­tion où l’at­tend l’en­ve­loppe de volume ADSR et un réglage de pano­ra­mique. Ce dernier peut être soit statique (place­ment dans le champ stéréo), soit dyna­mique grâce au LFO1 (tremolo ou auto­pan). Là encore, on ne pourra pas faire évoluer indé­pen­dam­ment le niveau d’un oscil­la­teur ou modu­ler (par exemple) le pano­ra­mique par le numéro de note Midi. Enfin, les ADSR sont un peu trop lentes à la détente, ce qui prive la machine d’avant-centre percu­tants capables de débor­der sur les ailes. Autre­ment dit, le JP-8080 est plus à l’aise sur les terrains gras et larges que sur les terrains secs et étriqués. Carton jaune ! 

La Séquence du Spec­ta­teur

Roland JP-8080

Si l’ar­chi­tec­ture sonore du JP-8080 nous a semblé rela­ti­ve­ment figée, ce n’est par contre pas le cas des diffé­rents séquen­ceurs de la machine. Premier d’entre eux, l’ar­pé­gia­teur, direc­te­ment acces­sible depuis le panneau avant, se mémo­rise au niveau de la perfor­mance et peut affec­ter, au choix, l’un ou les deux programmes. Il peut agir de 1 à 4 octaves en modes haut, bas, haut & bas et aléa­toire avec, si on le souhaite, un calage sur un des 90 « beat patterns » permet­tant d’agir sur la durée des notes et sur leur accent. Dans la liste, on trouve des batte­ments bien carrés, des effets d’écho, de strum­ming de guita­riste et de glis­se­ments de harpe. Bref, du très complet ! Pour ceux qui veulent lancer des riffs en direct, la fonc­tion RPS permet d’en­re­gis­trer (en mémoire et sur une carte) 48 motifs ryth­miques poly­pho­niques à déclen­cher depuis les touches d’un clavier Midi. Les phrases s’en­re­gistrent sur 4 mesures maxi­mum en over­dub avec une poly­pho­nie totale de 10 voix et une quan­ti­sa­tion de 24bpqn. L’édi­tion, très sommaire, se fait en temps réel en choi­sis­sant à la volée les notes à suppri­mer.

Passons main­te­nant au dernier et génial séquen­ceur, baptisé « Motion Control », permet­tant d’en­re­gis­trer dans 4 mémoires internes (8 sur carte) les mouve­ments de toutes les commandes du JP et de les appe­ler à tout moment. La repro­duc­tion peut soit se faire en boucle (de 1 à 8 mesures), soit en linéaire sur un très confor­table maxi­mum de 99 mesures. L’en­re­gis­tre­ment s’ef­fec­tue en temps réel unique­ment, avec un métro­nome, l’en­trée des mouve­ments se faisant 1 par 1 ou 50 par 50 si toute la salle s’y met. En fait, il n’y a pas de limite de simul­ta­néité et le seul défaut du système est l’ab­sence de fondu enchaîné pour les séquences jouées en boucle. Quoi qu’il en soit, on peut, grâce aux « Motions », se fabriquer des sons évolu­tifs mons­trueux bien plus puis­sants que sur un modu­laire, car sur le JP, ce sont nos doigts et notre cerveau qui font office de patch­cords. On pardonne alors immé­dia­te­ment l’ar­chi­tec­ture sonore rela­ti­ve­ment figée et on se prend à rêver de « Motions » mémo­ri­sées au sein d’un programme, ce que permet­tra peut-être le JP-808080 en 2020. Bref, d’ici là, notre JP est doté de séquences qui invitent le spec­ta­teur à se lever de son siège pour la stan­ding ovation de la dernière séance !

Audio Gag

Pour s’amu­ser seul ou en famille avec le signal audio avant qu’il ne sorte pour rejoindre ses amis sur une tranche de la console, le JP-8080 met à notre portée une série impres­sion­nante de modules de trai­te­ments. Commençons par les proces­seurs d’ef­fets incar­nés sous les formes d’un égali­seur simple à deux bandes (grave et aiguë), d’un multi-effets (chorus, flan­ger et autres effets d’en­semble à LFO synchro­ni­sable ainsi que distor­sion) et d’un délai stéréo de 1,25 seconde maxi­mum lui aussi capable de se synchro­ni­ser en Midi. A noter que le multi-effets, quoique de bonne qualité, n’a rien à voir avec ce que l’on trouve habi­tuel­le­ment chez Roland, puisqu’il est entiè­re­ment preset, sans aucun para­mètre program­mable. De plus, l’ordre série des effets n’est pas modi­fiable, ce qui en limite l’uti­li­sa­tion.

Roland JP-8080

Passons main­te­nant au morphing, capable de passer progres­si­ve­ment entre deux sons program­més, soit par la vélo­cité et par deux contrô­leurs Midi à défi­nir. Là encore, la souplesse du JP-8080 est imbat­table, et va bien au-delà du « bête » contrôle de la réso­nance ou du volume par la vélo­cité, puisque le morphing, avec ses trois courbes de réponse, est mémo­risé au niveau du programme, magni­fique ! Pour conti­nuer, le JP-8080 dispose de deux entrées audio, capables d’en­voyer un signal externe au travers de ses filtres et enve­loppes, en le substi­tuant aux oscil­la­teurs 2 dans chaque programme d’une perfor­mance. 

Mais le clou du spec­tacle, c’est le modu­la­teur de voix qui, en conjonc­tion avec les entrées audio externes, va pouvoir fonc­tion­ner comme un voco­deur numé­rique 12 bandes ou jouer le rôle d’une banque de filtres avec 12 unités passe-bande. Allez, suite au prochain épisode !

Nulle part ailleurs

Pour le prix de deux voix de poly­pho­nie (ça n’est pas cher !), le JP se met à voco­der, c’est à dire à analy­ser un signal (voix humaine, boîte à ryth­mes…) en le décou­pant en 12 bandes de fréquence, pour aller modu­ler un signal de synthèse (riche en harmo­niques, comme une rampe) suivant les ampli­tudes obte­nues sur chaque bande. A nous les strings qui parlent et le bruit blanc qui chuchote ! Pour le signal de synthèse, rien n’em­pêche de rempla­cer le signal externe par l’un ou les deux programmes internes de la perfor­mance en cours, puisque c’est à ce niveau que les réglages du modu­la­teur de voix sont mémo­ri­sés. Pour un mini­mum de contrôle, le JP est équipé d’une porte à seuil réglable et de niveaux de volume pour les signaux d’en­trée. Afin de ne dérou­ter personne, Roland a eu l’ex­cel­lente idée d’in­clure 6 présé­lec­tions pour le voco­deur et 2 pour la banque de filtres. Appli­ca­tions : on branche le micro dans l’en­trée idoine (avec préam­pli !), on appelle le preset Robot et hop, on pousse un petit Kraft­werk ; ou encore, on entre sa boîte à rythmes, on choi­sit le preset « Break­beat » et voilà, on sort immé­dia­te­ment des ryth­miques battues.

Pour ceux qui n’ont pas peur de se salir, il faut commen­cer par choi­sir parmi 3 algo­rithmes de voco­deur (« solid » pour une réponse raide, « smooth » pour plus de douceur et « wide » pour une bande de fréquence élar­gie) ou 2 algo­rithmes de banques de filtres (« wide » à large bande et « narrow » à bande plus étroite). Ensuite, il reste à régler les 12 bandes grâce aux 12 curseurs d’en­ve­loppes du panneau avant, le mix signal direct / vocodé et la réso­nance des 12 filtres. Fin du fin, le modu­la­teur de voix dispose d’un multi-effets et d’un délai calqués sur ceux de la section prin­ci­pale d’ef­fets. Et pour clore le chapitre, on va pouvoir affec­ter aux 2 contrô­leurs du panneau avant 2 para­mètres parmi 26, dont la réso­nance des 12 filtres, le pano­ra­mique, le délai ou encore le seuil de déclen­che­ment de la porte. Magni­fique !

Enfin, cerise sur le gâteau, le JP-8080 nous permet d’uti­li­ser notre propre voix comme contrô­leur de morphing entre deux profils de para­mètres. La détec­tion est opti­mi­sée pour le « a », autre­ment dit, on pourra « morpher » un piano élec­trique en strings en prononçant « aiaiai », hila­rant ! La qualité est surpre­nante, l’in­tel­li­gi­bi­lité très correcte avec une détec­tion voyelle / consonne parfaite et une excel­lente resti­tu­tion des sifflantes. Même en pous­sant à fond la 12e bande, pas le moindre larsen en vue. Roland a vrai­ment fait fort sur ce point et on applau­dit de toutes nos cordes vocales ce voco­deur numé­rique program­mable d’ex­cel­lente facture et ses facul­tés inédites de pilo­tage par la voix. 

Le Cercle de Midi

Roland JP-8080

Nous avons salué le large panneau de commandes du JP-8080, que Roland a eu l’ex­cel­lente idée de ne pas réduire à la taille d’un timbre-poste lors de la mise en rack. Le mieux, c’est que toutes les commandes sont capables d’émettre et de rece­voir un contrô­leur Midi, si bien que l’on pourra très faci­le­ment program­mer des évolu­tions sonores complexes et les éditer sur un séquen­ceur externe. De plus, voilà un moyen supplé­men­taire de contour­ner les limites de l’ar­chi­tec­ture sonore figée de la machine, pour peu que l’on accepte de renon­cer au temps réel. Bref, le JP-8080 se distingue par une expres­sion directe de ses commandes.

Une bonne nouvelle ne venant jamais seule, la vitesse du LFO, le temps de délai, le LFO du multi-effets et le délai du modu­la­teur de voix peuvent être synchro­ni­sés en Midi, avec une réso­lu­tion du 16e de mesure à 8 mesures en passant par les trio­lets et notes poin­tées ; tout ceci en plus de l’ar­pé­gia­teur, des RPS et des Motions. Une nouvelle qui ravira les amateurs de techno et autres musiques où la synchro est un culte qui se sème comme des graines de star pour récol­ter le tempo.

Enfin, nous ne refer­me­rons pas le cercle sans dire un petit mot sur le curieux trio Midi du panneau arrière consti­tué de deux entrées et une sortie. En fait, l’en­trée bapti­sée « remote keyboard in » permet de contrô­ler l’ar­pé­gia­teur et les RPS alors que l’autre ne le permet pas. Eh oui, voici le premier synthé bi-timbral de l’his­toire avec deux entrées Midi ; c’est incroyable mais vrai ! Quant à la sortie, elle peut être commu­tée en Thru, ce qui est la moindre des choses. En tout cas, le JP-8080 fait partie du cercle fermé des synthé­ti­seurs qui ne cherchent pas Midi à quatorze heures ! 

ۂa se Discute

Forte­ment inspiré du  Jupi­ter 8 et capable d’en repro­duire le compor­te­ment avec brio, le JP-8080 hérite égale­ment des limites de son modèle. Pour commen­cer, le LFO2 est une simple modu­la­tion trian­gu­laire comman­dée par la molette et agis­sant sur le pitch, la fréquence de coupure du filtre et le volume global, avec profon­deurs bipo­laires indé­pen­dantes. Ensuite, l’ar­chi­tec­ture de la machine est figée : en effet, plutôt que de doter son synthé­ti­seur d’une modu­la­tion matri­cielle comme sur le Super­nova de Nova­tion, Roland a choisi de connec­ter les modules entre eux une fois pour toutes. Rien de tel pour comprendre faci­le­ment le parcours et le trai­te­ment du signal, mais la souplesse de la machine s’en trouve consi­dé­ra­ble­ment réduite. Ainsi, certaines sono­ri­tés sont impos­sibles à réali­ser sans consom­mer une des quatre « Motions », tels des brui­tages avec LFOs à appa­ri­tion et vitesse progres­sives ou encore des balayages de réso­nance de filtre.

Roland JP-8080

Enfin, le JP est seule­ment bi-timbral, c’est-à-dire qu’en mode perfor­mance, seuls deux programmes pour­ront être assem­blés (en split ou en dual). Pire, l’as­si­gna­tion entre les deux n’est même pas dyna­mique, il faudra déter­mi­ner à l’avance dans chaque perfor­mance la réserve de voix pour chaque son. Sous cet angle tout de même, l’imi­ta­tion pous­sée à l’ex­trême de vieilles bécanes est discu­table et on est en droit de se deman­der pourquoi le construc­teur n’a pas profité de la tech­no­lo­gie de cette fin de siècle pour surmon­ter certains écueils de la machine origi­nelle (voire certaines limites, mises en avant dans la presse sérieuse, de son propre JP-8000). Bref, de quoi avoir la fureur !

Le Bigdil

Le JP-8080 évolue dans un marché très convoité, avec peu de chaînes de télé­vi­sion mais une qualité d’émis­sion très élevée. Sur certains critères, il souffre un peu en compa­rai­son de la concur­rence : un peu moins de poly­pho­nie, des possi­bi­li­tés limi­tées de modu­la­tion directe et une multi­tim­bra­lité réduite. Par contre, il n’a rien à envier à ses enne­mis dans d’autres domaines : l’er­go­no­mie est excel­lente, les possi­bi­li­tés de trai­te­ment d’un signal audio externe sont bien­ve­nues, le voco­deur est un must, la surface de contrôle est parfai­te­ment dimen­sion­née, les fonc­tion­na­li­tés Midi sont déve­lop­pées et, non des moindres, la modé­li­sa­tion analo­gique est réus­sie. De plus, et c’est un argu­ment de poids au moment des comptes, il affiche un prix imbat­table.

Assu­ré­ment, le JP-8080 s’adresse aux musi­ciens qui souhaitent ajou­ter à leur arse­nal un bon complé­ment capable de repro­duire le son d’an­tan sans se ruiner et sans se prendre la tête, en y ajou­tant leur voix comme outil de créa­tion. Nous le conseillons même aux débu­tants qui entendent s’at­taquer à la synthèse en compre­nant ce qu’il se passe, sans déco­deur, tout en passant de sacrées soirées, tant ses vertus péda­go­giques semblent indé­niables. De plus, le manuel très bien fait se termine par des exemples graphiques pour se fabriquer les prin­ci­paux sons usités. Bref, une bonne émis­sion de prime-time diffu­sée en clair et réali­sée sans budget holly­woo­dien. A regar­der de très près ! 

Ques­tions pour un cham­pion

Synthèse sous­trac­tive : tech­nique consis­tant à couper des harmo­niques au sein d’une forme d’onde au moyen d’un filtre, à la manière d’un sculp­teur. On partira de préfé­rence d’une onde au contenu harmo­nique riche, telle une dent de scie (rampe). 

Onde sinus : onde ne conte­nant qu’une fréquence (sa propre fonda­men­tale), ce qui n’en fait pas un sujet de choix pour la synthèse sous­trac­tive, mais plutôt pour la synthèse addi­tive (addi­tion de diffé­rentes fréquences) ou la FM (multi­pli­ca­tion). 

Onde dent de scie : onde conte­nant des multiples (entiers) de sa fréquence fonda­men­tale, à ampli­tude inver­se­ment propor­tion­nelle à leur coef­fi­cient multi­pli­ca­teur. La richesse du timbre obtenu en fait le candi­dat de choix au filtrage intense. 

Onde pulse : onde ne conte­nant que les multiples pairs de sa fréquence fonda­men­tale. Moins riche et plus pâle qu’une rampe, la modu­la­tion de la largeur de ses impul­sions (balayage des harmo­niques) par un LFO lui redon­nera de bonnes couleurs.

  • Prix attractif
  • Modélisation de qualité
  • Ergonomie réussie
  • Boutons et potentiomètres
  • Capacités de morphing
  • Polyphonie accrue
  • Interface Smartmedia
  • Traitement d’un signal externe
  • Vocodeur programmable 12 bandes
  • Midi très développé
  • Architecture figée
  • Seulement bi-timbral
  • Jeux à « saut de boutons »
  • Souplesse limitée des effets

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