Cette semaine, on a vu arriver à notre bureau l’Apollo x4 de chez Universal Audio. Interface de format desktop, la x4 est une variante augmentée de la maintenant célèbre Twin X. Elle a donc fait un tour sur notre banc d’essai, pour voir ce qu’elle a dans le ventre.
On vous en avait parlé en fin d’année dernière, la x4 est une évolution de l’interface Apollo Twin X. L’article avait fait couler beaucoup d’encre numérique dans la section forum, laissant supposer une attente assez forte de la part des home-studistes.
La nouvelle version de l’Apollo reprend les éléments classiques de cette interface (que nous listerons plus loin, pour ceux qui ne connaissent pas bien), tout en bénéficiant de quelques augmentations, avec plus d’entrées, plus de sorties.
Présentation
On sort l’Apollo de sa boîte. Immédiatement, une petite surprise : l’absence de câble Thunderbolt 3. On cherche partout… Non il n’y en a pas. En cherchant sur le manuel de mise en service, c’est bien indiqué : « connectez votre interface à un port Thunderbolt 3 (câble non fourni) ». À ce niveau de gamme, on aurait espéré un peu plus. En revanche, l’interface est livrée avec un petit chiffon microfibre, pour l’entretenir. Pas sûr que cette attention rattrape ce manque.
Au contraire d’autres modèles plus légers, cette Apollo a besoin d’une alimentation +12VDC, ce qui limite un peu sa portabilité. Une fois la X4 alimentée, sa mise en service et l’installation de son driver se révèlent simples et rapides. On relèvera seulement (mais ça n’aura pas échappé à nos lecteurs pointus) que le choix du Thunderbolt 3, apportant une rapidité de transfert remarquable, peut se révéler assez contraignant selon votre système préexistant. À ce jour, seule l’interface Apollo Solo, la plus petite dans cette gamme, existe en version USB. De plus, c’est bien connu, la firme américaine a une préférence pour les utilisateurs Mac : leur STAN propriétaire Luna, offert avec l’achat de toute interface, est développée en Mac only.
Faisons un tour de l’interface : le modèle ergonomique est exactement le même que celui des modèles Twin et Twin X : un seul gros bouton, assignable depuis le hardware ou le software, contrôle les niveaux d’entrée et de sortie. Deux petits boutons permettent de sélectionner, pour l’un, l’entrée sur laquelle on travaille (Channel 1, 2, 3 ou 4), pour l’autre la sortie (Monitor, HP1 ou 2). Sous l’écran, une série de six boutons, non assignés, permet de contrôler des paramètres variables qui s’affichent au-dessus de chacun, selon la sélection entrée/sortie. Ces paramètres sont les mêmes que pour la Twin MkII. Exemple : sélectionnez une entrée Mic et le troisième bouton se trouve coiffé d’un « 48V » rouge ; appuyez sur ce bouton et le 48V s’illumine un peu plus, signalant l’activation d’une alimentation fantôme sur cette entrée. À noter qu’UA a gardé le micro de Talkback intégré sur la façade, qui avait été introduit il y a trois ans, avec possibilité depuis la console virtuelle de router ce talkback vers différent sorties au choix.
On ne change donc pas les habitudes des utilisateurs d’Apollo : prise en main simple et intuitive au point de vue de la façade.
À l’arrière, on trouve nos quatre entrées analogiques, au format combo XLR/Jack 6,35 mm, deux sorties Monitor (Jack 6,35 mm TSR), quatre sorties Line Out (même format), le port Thunderbolt 3 et celui d’alimentation, puis les entrées/sorties numériques optiques, avec jusqu’à huit canaux en ADAT.
À l’avant, on trouve deux entrées haute impédance (Hi-Z), qui se sélectionnent automatiquement à l’insertion d’un jack 6,35 mm mono. Sur la droite, deux sorties casque HP1 et HP2, avec niveau de sortie réglable indépendamment.
Les impressions laissées par la prise en main du software Console sont, bien entendu, plus subjectives, et chacun sera sensible au logiciel selon ses propres habitudes. Personnellement, j’ai surtout été frappé par la symbiose software/hardware : pendant les tests audio, je réglais aussi bien mes niveaux et mes entrées/sorties sur l’interface que sur mon écran, passant d’un geste physique à un geste virtuel sans trop réfléchir. Seul petit point qui m’a fait lever le sourcil : impossible d’assigner un signal aux sorties lignes sur l’interface physique, il faut passer par le software.
À l’intérieur du boitier, on prend les mêmes et on recommence… L’Apollo X4 embarque, comme pour les autres modèles desktop, les processeurs UAD-2, ici en version Quad Core. On reste donc sur une technologie qui a été introduite il y a 12 ans, déjà. Toutes les entrées analogiques bénéficient de la plus récente technologie Unison, qui permet d’intégrer des émulations de préamplis classiques en changeant l’impédance d’entrée de vos tranches pour interagir avec vos micros.
Pour finir, et avant de passer aux tests à proprement parler, rappelons que cette interface se place pile entre l’Apollo Twin X et l’Apollo x6 en termes de prix, avec un prix public recommandé à 1599 €. Il s’agit de l’interface desktop la plus généreuse en entrées/sorties et options du constructeur, et se repose sur les éléments déjà bien connus de ses petites et grandes sœurs. L’interface vient donc combler un vide dans la gamme, même si elle n’apporte finalement pas de véritable nouveauté.
Benchmarks
Afin de tester l’interface, nous avons fait un benchmark avec notre fidèle APx515 d’Audio Precision. Comme d’habitude, nous publions les résultats obtenus en THD et déviation des voies, pour les entrées et sorties analogiques.
Cela fait plus deux ans que nous n’avions pas testé une Apollo desktop. Pour référence je vous renvoie aux deux derniers tests : Arrow et Twin MkII
Commençons donc avec les entrées niveaux lignes :
J’envoie un sweep de 1Vrms dans les entrées 1 et 2, et je règle le gain pour obtenir 0 dB à la sortie (sorties Monitor 1 et 2, non atténuées).
Les mesures de THD sont tout simplement excellentes : moins de 0,001 % sur toute la ligne. On remarque une belle régularité de la THD qui ne monte pas dans le haut du spectre (comme sur la x8p par exemple).
La linéarité est mesurée à ±0,089 dB pour la voie 1 et ±0,076 dB pour la 2 (fréquence de référence 1 kHz). C’est moins bien que la Twin mkII (±0,052 dB) et bien moins bien que la Apollo 8 à ±0,019 dB. Quant à la concurrence, on a trouvé de meilleurs résultats chez Antelope à ±0,032 dB ou chez RME à ±0,021 dB. Nos mesures ont donné des résultats similaires sur les entrées lignes 3 et 4.
À noter, j’ai également testé les sorties line out 1 et 2, avec ce même réglage, et j’ai obtenu exactement les mêmes résultats.
Passons aux entrées micro :
Le test est effectué avec un sweep de 100 mVrms dans les entrées micro 1 et 2, et je règle le gain pour obtenir 0 dB à la sortie (sorties Monitor 1 et 2, non atténuées).
Linéarité : ±0,075 dB (fréquence de référence : 1 kHz), également sur les entrées 3 et 4. Les résultats sont donc similaires avec ceux obtenus en niveau ligne.
THD : On remarque un pic à 0,008 % à 5 kHz, en revanche la courbe reste le plus souvent en dessous de 0,003 % ce qui est excellent. La THD plus présente n’est pas étonnante sur une entrée à sensibilité plus élevée, comme une entrée micro.
J’ai ensuite testé l’entrée haute impédance, cette fois-ci avec un signal monophonique de 200 mVrms.
Les résultats en THD sont très corrects, inférieurs à 0,005 % sur la majorité des fréquences.
Sur la linéarité, il n’y a rien à redire, c’est même excellent : la réponse égale de 20 Hz à 20 kHz augure une entrée bien adaptée aux basses comme aux guitares, parfaitement neutre, et qui laissera la part belle aux émulations d’amplis.
Pour finir, j’ai testé les sorties casques. Je ne reproduis ici que les résultats pour la sortie HP1, étant donné qu’ils sont égaux sur HP2. La linéarité est similaire aux sorties Monitoring : ±0,0077 dB environ, rien à redire. Pour les mesures en THD, c’est très bas :
0,0005 % sur la plupart des fréquences, résultat de très bonne qualité pour une sortie casque.
Et les plug-ins dans tout ça ?
L’Apollo X4 est livrée avec le bundle Realtime Analog Classics, qui comprend le préampli et égaliseur à lampes UA 610-B, les éditions Legacy des UA 1176LN, UA 1176SE, le Pultec EQP-1A EQ, Pultec Pro EQ et Teletronix LA-2A, ainsi que les émulations d’amplis Marshall Plexi, Ampeg SVT-VR, la Raw Distortion, les Precision Channel Strip, Precision Reflection Engine, Precision Delay Mod, Precision Delay Mod L et RealVerb Pro Custom Room Modeler. Un joli bundle donc, complet et qui a fait ses preuves !
Conclusion
Au final, cette interface nous inspire exactement les mêmes réflexions que leurs modèles précédents. Les points positifs sont toujours là, et toujours irréprochables : les bonnes performances audio, le bundle de plug-ins UAD, classique mais de qualité, la latence très faible et l’ergonomie toujours aussi bonne. Le micro de talkback routable, déjà introduit, est également intéressant. Et bien sûr, quelques entrées et sorties de plus sont toujours les bienvenues. En revanche, comme sur la Twin on regrettera de retrouver encore les DSP UAD-2, vieux de près de 12 ans maintenant, et l’absence d’auto-alimentation pour un desktop portatif en Thunderbolt 3.
En vérité, à 1599 € (prix recommandé en France) la X4 semble être surtout le chaînon manquant, chez UA, entre l’Apollo Twin X Quad (1300 €) et l’Apollo x6 (1950 €). Il nous semble donc justifié de dire que la x4 apparaît surtout comme une Twin X « augmentée », sans se rapprocher des avantages de la x6 (hexacœur, wordclock, deux ports Thunderbolt 3, plus d’entrées/sorties ADAT). De ce point de vue, la x4 n’est peut-être pas le produit le plus sexy du constructeur américain, mais nous gageons qu’elle comblera les besoins d’une certaine frange de musiciens ou producteurs.