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Pédago
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Métaphysique du tube - Le dernier guide du tube

Cette semaine, on va conclure (temporairement ?) cette courte série d'articles sur les amplis à tubes en nous penchant sur quelques questions subsidiaires, qui touchent à notre utilisation de l'ampli : pourquoi utiliser le stand-by ? C'est quoi la "présence" ? Quand changer ses tubes...?

Le dernier guide du tube : Métaphysique du tube

Cette semaine, j’ai compilé pour vous quelques ques­tions subsi­diaires qui méritent leur article, mais n’ont pas encore trouvé leur place natu­relle dans ce petit tour d’ho­ri­zon. Ces ques­tions sont surtout liées à l’uti­li­sa­tion directe de l’am­pli par le guita­riste, et à son entre­tien au quoti­dien. Commençons direc­te­ment en nous deman­dant…

À quoi sert le stand-by ?

Vaste sujet que le commu­ta­teur de stand-by. On pour­rait écrire tout un article à ce propos… mais on va tenter de se limi­ter et de main­te­nir une distance objec­tive sur la ques­tion. 

Réponse : le commu­ta­teur de stand-by permet de tempo­ri­ser la mise sous tension des tubes, en atten­dant que leurs fila­ments n’at­teignent leur chaleur adéquate.

Commutateur de stanby FenderEn pratique, mais égale­ment en théo­rie, la néces­sité du commu­ta­teur de stand-by est sujet à polé­mique. Il a les détrac­teurs (Merlin Blen­cowe est l’un des plus célèbres d’entre eux sur la Toile) et ceux qui jugent, en revanche, que son inclu­sion sur des amplis depuis plus de 70 ans sans problème majeur de fonc­tion­ne­ment prouve assez raison­na­ble­ment qu’il n’y a aucun danger (on pour­rait les appe­ler les « empi­ristes »), voire qui remettent carré­ment en cause la notion que le fait de lais­ser un tube en chauffe sans le pola­ri­ser pose véri­ta­ble­ment un problème sur la longé­vité des tubes. Comme je le disais au début, c’est un énorme sujet…

Pour éviter de se perdre, commençons en expliquant préci­sé­ment ce que fait le commu­ta­teur de stand-by.

Le stand-by sur un ampli permet d’in­ter­rompre la tension de pola­ri­sa­tion des tubes (la tension d’ali­men­ta­tion de plusieurs centaines de volts qui arrivent à l’anode de chaque tube). Quand vous allu­mez votre ampli en stand-by, les tubes reçoivent seule­ment la tension de 6,3 V AC qui alimente les fila­ments. Le tube atteint progres­si­ve­ment sa chaleur opti­male (les fila­ments ont une certaine iner­tie, et donc ont un temps de chauffe) et l’émis­sion ther­moïo­nique commence à se produire (pour cette notion je vous renvoie à l’ar­ticle 2) avant que l’anode ne soit pola­ri­sée : sous l’ef­fet de la chaleur du fila­ment, la cathode va relâ­cher des élec­trons qui vont venir former ce qu’on appelle l’es­pace de charge, puis quand l’anode sera pola­ri­sée (quand vous enle­vez le stand-by), ces élec­trons déjà présents dans le vide du tube seront atti­rés par elle et crée­ront le courant interne du tube (courant d’anode). 

Schema commutateur stanby FenderDe nombreuses personnes utili­sant régu­liè­re­ment le stand-by consi­dèrent que ce temps de chauffe permet d’avoir les résul­tats posi­tifs sur la durée de vie des tubes. De plus, le commu­ta­teur de stand by présente l’in­té­rêt de pouvoir mettre l’am­pli en « pause » partielle lorsqu’on souhaite ne pas l’uti­li­ser pendant un temps (par exemple durant les inter­mèdes entre diffé­rentes parties d’un concert, ou les pauses d’une répé­ti­tion) sans avoir besoin de relan­cer l’am­pli à chaque fois. Cela présente l’in­té­rêt évident d’éco­no­mi­ser de l’éner­gie, de gagner du temps, et de limi­ter autant que possible le déga­ge­ment de chaleur. 

Les critiques formu­lées contre le stand-by sont les suivantes :

  • La première critique, et la plus fondée à mon avis, consiste à souli­gner qu’aucun article ou manuel, parmi toute la litté­ra­ture scien­ti­fique clas­sique (des années 1930 à 1960) concer­nant l’am­pli­fi­ca­tion à tube, ne mentionne la néces­sité d’un temps de chauffe pour les tubes d’am­pli­fi­ca­tion basse fréquence (20 Hz – 20 kHz, ce temps de chauffe est néces­saire dans d’autres domaines). C’est seule­ment à partir de leur appli­ca­tion dans des amplis de guitare qu’on a vu des commu­ta­teurs de stand-by appa­raîtrent occa­sion­nel­le­ment sur d’autres ampli­fi­ca­teurs (par exemple en Hi-Fi, où ils restent néan­moins rares). D’ailleurs, avant que Fender ne l’in­tro­duise dans sa série E, en 1955, aucun ampli Gibson, Vox, Selmer, Wem, Supro, Ricke­ba­cker, même Fender, n’en avait jamais eu, sans pour autant causer des problèmes de fonc­tion­ne­ment récur­rents. CQFD.
  • La deuxième critique constate qu’avec un tube redres­seur dans l’ali­men­ta­tion, aucun besoin d’un temps de chauffe, puisque le courant DC sera four­nit par un tube qui lui-même a un temps de chauffe. Là aussi, c’est évident.
  • La troi­sième critique, plus ponc­tuelle, souligne qu’un commu­ta­teur de stand-by mal conçu peut causer des dégâts impor­tants dans l’am­pli, par exemple dans le cas d’un commu­ta­teur installé entre le dispo­si­tif de redres­se­ment (tube ou diodes à semi-conduc­teur) et le premier conden­sa­teur de filtrage de l’ali­men­ta­tion. Les premiers modèles des Vox AC30CC sont connus pour ce problème, et une de leur panne la plus courante vient en effet du tube redres­seur (je peux en témoi­gner, c’est un problème récur­rent).
  • La quatrième critique, et la plus sujette à contro­verse, souligne qu’une cathode qui chauffe dans un tube pola­risé peut déve­lop­per ce que l’on nomme une résis­tance d’in­ter­face (ou, selon l’ex­pres­sion plus drama­tique, du cathode poiso­ning). Le problème est que, si ce phéno­mène est bien connu et peut se trou­ver dans des ouvrages scien­ti­fiques (en parti­cu­lier dans Getting the Most Out of Vacuum Tubes, Robert Tomer, 1960), les exemples donnés dans ces ouvrages ne concernent pas des amplis audio, mais des oscil­la­teurs ou des calcu­la­teurs dans lesquels un tube pouvait rester en stand-by pendant des centaines d’heures avant d’être momen­ta­né­ment activé pour faire passer une seule impul­sion de courant.
  • Le dernier argu­ment, pas le plus impor­tant, mais tout à fait vrai : un stand-by mal conçu peut causer un gros « boom » dans le haut-parleur à chaque allu­mage. Et c’est pas très agréable !

Alors pourquoi ce stand-by ? Eh bien personne ne sait pourquoi les ingé­nieurs de chez Fender ont un jour adopté cet élément. Une des théo­ries les plus probables est que ce temps de chauffe permet­taient surtout à la tension déli­vrée par le tube redres­seur de se stabi­li­ser après l’al­lu­mage (la tension peut alors parfois passer par un pic au moins 50% supé­rieur à la valeur nomi­nale) et donc risquait moins de dépas­ser les valeurs admis­sibles des conden­sa­teurs de filtrages de l’alim. En effet, dans les premiers Fender avec stand-by, un condo se trouve avant le stand-by avec une tension admis­sible de 600V, mais ceux après le stand-by sont seule­ment à 450V. Un autre élément, mis en avant par Blen­cowe, est la protec­tion de certains étages d’am­pli­fi­ca­tion à cathode suiveur, typique­ment présents dans ces premier amplis Fender (sur ce point, je ne rentre­rai pas dans les détails, trop compliqué pour ce court article).

Bref, que choi­sir ?

L’opi­nion la plus nuan­cée, il me semble, est de dire que l’uti­li­sa­tion occa­sion­nelle et pas trop prolon­gée du stand-by ne risque pas d’abî­mer vos tubes, ni vos amplis, mais que de facto ce commu­ta­teur n’est abso­lu­ment pas obli­ga­toire, et qu’il peut donc égale­ment toujours être laissé commuté (même dans les amplis dont le redres­se­ment est fait par des diodes).

C’est quoi ce contrôle de « Presence » ?

C’est simple : c’est pour voir si vous êtes présent. Vous répon­dez « présent » ou « là ».

Qu’est-ce qu’on se marre… Bon, en vérité : il y a diffé­rent type de contrôle de « Presence », certains font partie des contrôles de tona­lité de l’am­pli et affectent souvent les haut-médiums, mais certains affectent la boucle de contre-réac­tion de l’am­pli de puis­sance. C’est le « presence » origi­nel, celui inventé par Fender, et son fonc­tion­ne­ment n’est pas juste un contrôle de tona­lité, mais aussi de dyna­mique.

Bouton présence sur apli Fender BlondeC’est un contrôle très inté­res­sant : certains amplis ont une boucle de contre-réac­tion, où le signal est prélevé à la sortie pour être réinjecté à l’en­trée de l’am­pli de puis­sance. Ces boucles permettent une dimi­nu­tion de la distor­sion (et de la satu­ra­tion), une réponse en fréquence élar­gie, et une impé­dance de sortie plus basse.

L’in­tro­duc­tion d’un poten­tio­mètre avec un conden­sa­teur permet de filtrer une partie du signal renvoyé à l’en­trée de l’am­pli de puis­sance, et d’en élimi­ner les aigus (c’est un filtre passe-bas). Plus vous tour­nez le bouton de « Presence », moins les aigus du signal prélevé à la sortie sont réinjec­tés dans l’am­pli, moins cette partie du signal sera affecté par la contre-réac­tion. Cela a plusieurs effets. Vous pouvez rete­nir : 

  • Une impres­sion audi­tive d’ai­gus plus présents, qui passe mieux dans le mix (d’où le nom, « présence »).
  • Des aigus qui vont satu­rer d’un manière moins abrupte, plus douce, mais qui satu­re­ront égale­ment un peu plus tôt que le reste du signal
  • Des aigus avec une dyna­mique moins limi­tée par la boucle
  • Une inter­ac­tion plus impor­tante de l’am­pli avec la courbe d’im­pé­dance du haut-parleur dans la plage de fréquences aiguës affec­tée par la bouton « présence ».

La plage de fréquence affec­tée dépend de la valeur du poten­tio­mètre et de la valeur du conden­sa­teur (puisqu’ils forment un filtre RC).

Je peux chan­ger mes tubes moi-même ?

Réponse : oui, il n’y a aucun risque à cela. Atten­dez juste qu’ils soient froids.

Ensuite si un réglage du bias est néces­saire, mieux vaut le deman­der à un pro (sauf quelques exemples d’am­plis où le réglage du bias est à la portée de l’uti­li­sa­teur, on en a parlé dans le forum). En tout cas, chan­ger soi-même ses tubes ne présente ni danger pour l’uti­li­sa­teur, ni problème pour l’am­pli (à moins que le tube ne soit dans le châs­sis de l’am­pli, comme c’est le cas de certains amplis hybride, dans ce cas-là il vaut mieux ne pas ouvrir l’am­pli soi-même !!).

Mais alors, quand chan­ger ses tubes ?

C’est comme deman­der : comment savoir si je dois chan­ger un ou plusieurs des tubes ?

La meilleure solu­tion reste le testeur de tube, mais ce n’est pas ouvert à toutes les bourses.

Certains signes sont clairs : 

  • Un tube blan­chi (fuite du tube qui n’est plus hermé­tique)
  • Un tube fendu (il sera sûre­ment blan­chi)

Tube à vide fendu blanchi

  • Un tube qui se détache de son culot (rare mais cela arrive)
  • Un tube qui ne s’al­lume plus du tout, ou seule­ment à moitié pour une double-triode (fila­ment rompu)
  • Un tube dont une partie s’est déta­chée à l’in­té­rieur (rare mais cela arrive, ça se constate en le tour­nant dans ses mains)
  • Un tube à l’anode brulée (rare aussi, mais cela arrive égale­ment)
  • Tube redresseru arc électriqueUn tube redres­seur qui a subit un arc élec­trique (il a fallu regar­der le tube au moment où cela s’est produit, donc pas facile à consta­ter, mais une fois que cela arrive le redres­seur est bon pour la poubelle car l’iso­la­tion entre ses élec­trodes a chuté, et un arc peut se produire à nouveau, exac­te­ment au même point que précé­dem­ment).

Si un bruit vous pose des problèmes, un test simple consiste à ôter le premier tube de préam­pli (le plus proche de l’en­trée de l’am­pli) et d’al­lu­mer l’am­pli sans. Le bruit persiste ? Ôtez le deuxième tube juste à côté, allu­mez l’am­pli… Et ainsi de suite jusqu’aux tubes de puis­sance. Le bruit est présent avec seule­ment les tubes de puis­sance ? Alors le problème peut prove­nir de l’ali­men­ta­tion, ou des tubes de puis­san­ce… en revanche, si le bruit dispa­raît avec un tube précé­dent, tentez de chan­ger ce tube par un tube neuf.

Atten­tion, cela n’in­dique pas néces­sai­re­ment que ce tube était la cause du bruit (cela peut prove­nir d’un autre compo­sant avant le tube enlevé) mais c’est déjà une piste.

De toute façon, dans tous les cas, la meilleure solu­tion reste d’avoir toujours un ensemble complet des tubes de son ampli en double. Problème durant un enre­gis­tre­ment, une répète ? On peut toujours chan­ger les tubes sur le moment et voir si le problème s’en va. Si ça ne marche pas, le problème ne vient pas des tubes, mais au moins vous aurez tenté.

NB : dans le même genre : avoir toujours des fusibles en double !

Et sur ce conseil, nous arri­vons à la fin de cette série d’ar­ticles. J’es­père qu’elle a pu répondre à certaines de vos ques­tions et que vous en ressor­tez avec une meilleure compré­hen­sion du fonc­tion­ne­ment de nos chers amplis à tube. Dans deux semaines, nous nous penche­rons sur l’his­toire de l’en­re­gis­tre­ment sur bande !


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