Depuis Renaud, nous savons qu’une idylle entre un mec et sa mobylette est possible. Mais personne n’avait encore osé proposer un pédalier en lieu et place d’un être humain ou d’un cyclomoteur à deux-temps pour convoler en justes noces. Face à ce constat, on est en droit de se demander s’il s’agit d’une simple appellation marketing ou d’un fidèle « soundfriend ».
Une âme sœur à reluquer
Dès l’ouverture du carton, T-Rex enchaîne les bonnes, mais aussi les mauvaises surprises. En effet, on trouve immédiatement un schéma représentant le pédalier avec ses fonctionnalités expliquées (en anglais) et imprimées sur le carton lui-même, qu’on aurait aimé pouvoir détacher. Mais on peut surtout constater avec bonheur la présence d’une housse munie d’une confortable poignée. Je défais donc le scratch de celle-ci avec frénésie et tente de dézipper la housse avec une excitation peut-être légèrement exagérée, tant et si bien que l’ergonomique petit lacet me reste dans les mains, tel un(e) gamin(e) déboîtant l’épaule de son Spiderman/Monster High dès la première utilisation.
Après ce micro-incident, je dézippe enfin la housse et retire l’âme sœur de son écrin en dérivé pétrolifère transparent. Et là, force est de constater que le charme agit. Sa belle robe en alu brossé et son design noir et gris lui confèrent une gueule de LaCie à s’en lécher les babines. De plus, ses mensurations (445 × 60 × 150 mm) lui permettront de se caler au sol dans le triangle d’un pied de micro, le tout pour le poids d’un ordinateur portable (2,1 kg). Les utilisateurs de deux (ou trois) roues apprécieront le fait que le pédalier puisse rentrer en diagonale dans un gros top case, possiblement avec sa housse, mais en retirant l’adaptateur secteur de l’étui.
5 en 1
L’égalité est de rigueur chez les Danois : les quatre effets de gauche sont dotés d’une structure similaire avec quatre potards et un footstwich chacun. Ainsi, on trouve un overdrive avec réglage du gain, du volume, mais aussi un blend et un tone. La distorsion se retrouve classiquement en seconde position et troque le potard de blend contre un réglage de présence. Vient ensuite le delay avec un volume, un chorus pour les répétitions, un niveau de feedback, et un bouton time. Le tap associé est judicieusement relayé en bout de pédalier, car il permet également d’enclencher l’efficace, quoique rudimentaire, accordeur intégré à l’aide d’un « clic long ».
La « quatrième pédale » propose 4 types de réverbe (Spring, Room, Hall & LFO) sélectionnables à l’aide d’un potard cranté. On pinaillera sur le fait que le point du potard ne se trouve pas tout à fait en face des inscriptions, mais on s’en remettra rapidement en tripotant la quantité de réverbe, le tone et le decay. On finira le tour des effets proposés avec le boost, dont le réglage se situe sur la façade nord de la Soulmate. Nous y reviendrons donc ultérieurement.
Il reste encore les boutons bank, permettant de choisir… la bank, et live qui, quant à lui, désactive les banks pour pouvoir jouir des pédales séparément.
Attardons-nous quelques instants sur la programmation du pédalier, car ici, point d’ordinateur ni d’iTruc à connecter puisqu’aucune prise USB n’est présente sur la bête. Elle s’avère légèrement plus compliquée à exploiter que le reste de la pédale, car de nombreux clics seront nécessaires avant de sauvegarder convenablement un préset. Mais avec ses 2 banques de 5 présets chacune, le pédalier peut devenir un sérieux allié pour les professionnels ou ceux qui tournent beaucoup et qui n’utilisent pas 36 sons différents par show.
Oh, la belle prise !
Partons enfin à l’escalade de la face nord où l’on peut de suite constater une entrée jack, une prise ronde pour l’adaptateur secteur 12V (fourni) ainsi que les sorties stéréo. En y regardant de plus près, on peut remarquer une loop, prévue pour pouvoir insérer un effet additionnel entre la distorsion et le delay. De plus, une prise ronde destinée à alimenter la pédale que vous voudriez adjoindre se faufile entre le send et le return. Une vraie bonne idée, qui ne contentera malheureusement que quelques-uns, car les 12 V proposés excluront d’office un certain nombre de pédales.
Enfin, un petit potard encastrable par push-pull permet de régler la quantité de dB apportée par le Boost. À l’instar du potentiomètre dédié au type de réverbe, la course de celui-ci est peu orthodoxe… Encore une fois, rien de grave, mais cela détonne par rapport à l’impression de solidité conférée par l’ensemble.
Music & Lights
Avant de laisser place au son, une broutille me chiffonne concernant les LED. Tout à fait visibles dans n’importe quel environnement, elles se retrouvent masquées par le pied actionnant le switch. On est donc obligé de retirer rapidement le pied pour être sûr d’avoir déclenché le boost avant un solo par exemple. De petites frayeurs sont donc en perspective et il faudra apprendre à faire confiance à son coup de pied pour ne pas devenir un obsédé de la LED. Mais cela ne devrait théoriquement pas poser de problème, car T-Rex a justement porté son attention sur ce fait, comme je l’ai expliqué précédemment dans l’article concernant la réverbe Creamer.
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Mais puisque vous devez en avoir plus qu’assez de ces détails pratiques, je vais donc, sans transition, vous proposer d’écouter une Epiphone Riviera dotée de trois P90 et branchée dans un VOX AC-30. Avec tout d’abord le son dry, puis le couple overdrive + réverbe pour obtenir une coloration sympathique, pour terminer par l’association distorsion + delay jusqu’à ce que le son de la guitare devienne méconnaissable.
- Dry Epiphone central AC 30 00:15
- OD Reverb Epiphone central AC 30 00:15
- Disto Delay Epiphone manche AC 30 00:45
À première vue, on ne pourra pas se plaindre côté polyvalence !
L’AC-30 étant flatteur, je l’ai ensuite branché dans un Triamp MkII de chez Hugues & Kettner pour une plus grande transparence. Et puisque la Soulmate n’est autre qu’un judicieux agglomérat de pédales, nous allons voir ensemble chaque effet séparément avec son rendu lorsqu’on le couple à un simple bobinage et plus particulièrement le micro manche d’une Stratocaster Gilmour NOS, mais aussi avec un humbucker à l’aide du micro chevalet d’une Les Paul Gothic.
Overdrive
- OD Strat Triamp 00:24
- OD LP Triamp 00:37
L’Overdrive est tout simplement délicieux en tant que « dirty clean boost » avec la Strat. Mais il m’a bien moins convaincu avec le double bobinage ou lorsqu’on augmente le drive.
Distorsion
Même punition pour la distorsion avec la Strat suivie de la Les Paul sur les mêmes micros.
- Disto Strat Triamp 00:37
- Disto LP Triamp 00:27
Ceux qui l’ont déjà essayée reconnaîtront le grain de la Mudhoney. Sa sonorité à la fois propre et purement analogique la classe dans la catégorie des effets qu’on peut utiliser dans quasiment toutes les circonstances. Néanmoins, le rendu est cette fois bien meilleur avec la Les Paul qu’avec la Strat, qui perd significativement en précision, en particulier dans les graves.
Delay
Passons maintenant aux effets temporels en commençant par le delay.
Plutôt que d’utiliser traditionnellement celui-ci, j’ai joué le premier extrait avec le delay à fond et le time proche de 0, avec le chorus aux deux tiers et le deuxième extrait montre ce qu’il est capable de restituer lorsqu’il est réglé comme un Slapback.
- Delay Chorus Strat Triamp 00:46
- Delay LP Triamp 00:27
Il est donc possible d’obtenir un chorus de type « Ensemble » en prenant le temps de régler le delay en conséquence, ce qui ajoute une nouvelle corde à l’arc du pédalier danois. Quant à l’effet Slapback, on pourra l’associer à la réverbe pour un rendu « vintage rockab’ » du plus bel effet.
Reverb
Écoutons enfin les différentes réverbes proposées par la Soulmate, cette fois uniquement avec la Stratocaster pour entendre les différentes empreintes sonores dans le même contexte.
- Reverb Spring Strat Triamp 00:35
- Reverb Room Strat Triamp 00:27
- Reverb Hall Strat Triamp 00:29
- Reverb LFO Strat Triamp 00:29
Je me dois de saluer à la fois la richesse sonore et la relative discrétion du mode LFO. Le léger chorus irrégulier induit par cette réverbe non linéaire apporte un peu de « moelleux », sans toutefois gommer le signal initial. La Room et la Hall sont également tout à fait recommandables avec de belles ambiances en perspective. Je n’émettrai qu’un bémol concernant le mode Spring que je trouve moins réussi que celui de la Creamer.
Bonus
Comme vous avez eu la gentillesse et le courage de me lire jusqu’ici, vous méritez une petite récompense. Voici donc deux autres extraits, le premier mélange le delay rythmé au tap avec la réverbe LFO et le second a été effectué en enclenchant l’ensemble des effets dans un esprit volontairement « m’as-tu-vu ».
- Delay Reverb LP Triamp 00:47
- All effects LP Triamp 00:41
On est donc en présence d’un pédalier polyvalent, auquel il ne manquerait qu’un Flanger et/ou un Phaser pour être tout à fait complet.
Prêt pour les fiançailles ?
Comme toute âme sœur qui se respecte, le pédalier proposé par T-Rex n’est pas parfait. Mais la qualité des sons proposés et son esthétique flatteuse charmeront sans effort bon nombre de guitaristes à la recherche d’un pédalier qui sache en faire ni trop ni trop peu. Aussi pratique en studio que sur scène, il pourra rendre de fiers services et garantir un son chaud et un signal propre en toutes circonstances. On regrettera tout de même la finition de certains boutons et surtout la complexité du mode de programmation, à comparer avec la facilité avec laquelle on peut sortir de beaux sons forts inspirants en mode Live.