Fin de l’arlésienne à la pomme : la nouvelle version de Logic Pro est arrivée. Quasiment quatre ans sans mise à jour importante, d’aucuns ont douté de sa possible sortie, voire ont conclu à sa disparition. Le logiciel est là. Doit-on en être content ou pas ? Réponses.
Un propos liminaire : on n’imagine pas quel peut parfois être le parcours pour tester un logiciel. À l’annonce de l’arrivée de Logic Pro X, toute l’équipe d’Audiofanzine a réagi, motivée par la perspective de réaliser un de ces longs tests dont le site est coutumier quand il s’agit de sorties aussi importantes. Immédiatement, prise de contact avec le service RP pour obtenir une version de test, façon de procéder habituelle. Et là, surprise : pas moyen d’avoir un code pour télécharger le logiciel depuis l’App Store (seul moyen d’acquérir maintenant la DAW d’Apple). Pour contourner ce qu’impose Apple, voyage à Londres tous frais payés, retour avec un iMac (euh, pour les cartes PCI, on fait quoi ?) et un iPad, tous deux à disposition « le temps qu’il faudra », entretien avec les spécialistes maison (lesquels, pas moyen de savoir ?) avant de se voir remettre un code, on prend la décision d’acheter le logiciel pour le tester, sans passer sous les fourches caudines de la présentation officielle et de ses features indispensables…
Sans avoir besoin d’évoquer certaines raisons de notre refus, évidentes, il n’est que de mentionner les problèmes de compatibilité, d’installation (sur les machines du studio, il y a toutes les banques de son, les instruments virtuels, les plugs et leurs autorisations, les To de vidéo et de projets réalisés depuis la version 4.5, les pilotes, les cartes d’extension, etc.) et la date de parution repoussée à fin septembre à cause des agendas respectifs des uns et des autres. Donc, deux minutes après avoir accédé à l’App Store, Logic Pro X est en cours d’installation sur le Mac Pro et le MacBook Pro.
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Les DAW sont en mouvement, comme le prouvent les sorties de Live 9 d’Ableton, Digital Performer 8 de Motu, Pro Tools 11 d’Avid, Sonar X2 de Cakewalk, Studio One 2 de PreSonus, Cubase 7 de Steinberg, ou encore Reason 7 de Propellerhead. Elles passent par des étapes, si ce n’est révolutionnaires, du moins importantes, avec des changements d’architecture, de compatibilité impliquant des choix pratiques et financiers parfois conséquents. Et comme le rappelle Mister Yann Coppier dans son récent test de Pro Tools, la plupart des DAW se piquent les fonctionnalités les unes les autres, et toutes permettent de travailler professionnellement. Les restrictions se feront en fonction des compatibilités (possibilité de rajouter des instruments ou plugs externes à tel ou tel format, fonctions de travail à l’image, etc.) et surtout de continuité de workflow (ergonomie, habitude de certaines procédures, etc.) et de compatibilité/rétro-compatibilité.
Voyons donc quelles nouveautés nous réserve Logic Pro X.
Introducing Apple Logic Pro X
Dixième version du logiciel créé par Emagic puis repris par Apple, Logic Pro X n’est donc plus disponible pour les ordinateurs sous Windows depuis la date de son rachat, 2002 et la version 5.5.1. Nouvelle version, vendue seule, pas de pack Logic Studio 3 en vue, il faudra acquérir Mainstage et Compressor à part, le premier passant du coup en version 3, le second restant dans sa dernière version en date (du 28 mars de cette année, version 4.0.7). Quant à WaveBurner et Soundtrack Pro, comment dire, ils sont perdus dans les limbes du binaire (ne parlons même du Logic Node)… Les possesseurs de Soundtrack seront néanmoins ravis (?) d’apprendre que l’on peut toujours le sélectionner comme éditeur externe (ainsi que n’importe quel autre éditeur audio), via le raccourci dans le menu Edit.
Pour un nouveau venu sur le logiciel d’Apple, le tarif est pour le moins intéressant : 179,99 euros, ce qui en fait quasiment la DAW la moins chère du marché, compte tenu de son offre logicielle et sonore (on y revient). Pour ceux qui ont payé toutes les versions, les mises à jour, les plugs et instruments virtuels en version séparée depuis les débuts du logiciel, ça donne l’impression de payer une nouvelle fois plein tarif.
Aucune protection via clé ou numéro de série pour cette DAW complète, la possibilité de l’installer sur plusieurs machines (le téléchargement se faisant automatiquement ou non suivant les réglages utilisateur de l’App Store), et un paquet d’échantillons, boucles et instruments virtuels que l’on téléchargera après l’installation du logiciel lui-même (menu Logic Pro X > Download Additional Content). Ce téléchargement installe près de 50 Go de contenu, avec reconnaissance automatique des tags des boucles, compatibilité garantie avec les sons et instruments de Logic Studio 2 (celui contenant Logic Pro 9), des mises à jour des bibliothèques existantes et du contenu inédit.
Un premier bon point, l’installeur détecte si besoin est la version précédente et son organisation (banques déportées sur disques durs externes, alias et lien symbolique, fichiers Template, présets et programmes d’instruments, d’exs24 maison, etc.) et déplace le tout dans un dossier situé dans User > Library > Audio Music Apps, tout en mélangeant ses propres fichiers à ceux de la version 9 (par exemple) dans HD > Library > Application Support > Logic. S’il s’agit d’une première installation, elle est automatique, et il faudra aller fouiller dans les dossiers si l’on veut déplacer du contenu sur des disques durs différents, selon les routines habituelles. On peut regretter que dans un souci de simplification, Apple ne propose pas comme d’autres développeurs le choix de la destination d’installation des différents contenus.
Petite précision : pour le test, Logic sera en anglais, la localisation française s’avérant encore, disons, particulière (on aime beaucoup le « Se Connecter » à la place de « Joindre les Régions », ou le « Exemple » pour « Sample » dans « Valeur de déplacement » !) et plus simplement pour des questions d’habitude, les précédentes versions ayant été du point de vue traduction catastrophiques (remember le « Tempo des Claquettes » pour « Tap Tempo » ?) et d’ergonomie : les noms anglais des fonctions étant généralement moins longs, on peut mettre plus d’outils et de fonctions dans la barre d’outils ou de boutons dans celle de transport (on y reviendra). Faisons d’abord le tour des nouveautés.
Du neuf avec du vieux, ou du vieux avec du neuf ?
La question se pose, Logic ayant été patché pendant des années, des fonctions se rajoutant sur un moteur ancien, créant bugs et instabilité que l’on espérait et espère corrigés dans les mises à jour, très rares depuis le passage chez Apple. Qu’on ne me fasse pas dire cependant ce que je ne dis pas : Logic est un logiciel tout à fait utilisable, professionnel, avec des défauts clairement identifiés, mais qui n’en comporte ni plus ni moins que d’autres logiciels équivalents. Si je l’utilise depuis presque 15 ans, ce n’est pas par masochisme pur et dur, il m’a permis de répondre à toutes les demandes professionnelles. Et puis, comme pour me faire mentir, Apple a sorti deux mises à jour coup sur coup, offrant une liste assez conséquente de correctifs, les versions 10.0.1 et 10.0.2. Les bugs constatés lors des tests et corrigés par les mises à jour ne seront donc pas (plus) mentionnés dans cet article.
Le premier changement notable concerne l’interface graphique, que les esprits chagrins qualifieront de garagebandesque, et les plus optimistes de finalcutesque. Ou l’inverse.
Les couleurs, tout d’abord, à base de nuances de gris beaucoup plus foncées, assez réussies, alors que les indicateurs, boutons et autres adoptent malheureusement une palette de couleurs qui n’offre plus de tons vifs (ni de noir ou blanc), mais des nuances comme recouvertes d’un voile marron/gris et qui surtout n’offre plus de personnalisation possible, bien que le manuel prétende le contraire… Il faut pour cela, si l’on y tient absolument, rentrer dans le « paquet » Logic, aller dans les Frameworks et modifier un des fichiers .plist.
Plus notable est le changement de position de la Library (bibliothèque de présets), qui bascule à gauche (pas bête, puisque plus proche des tranches de l’Inspector), et celui de la barre de transport, qui passe en haut, en prenant la place de la barre d’outils qui apparaîtra grâce à une icône (ou un raccourci à définir). Cette barre de transport nouveau genre regroupe les écrans, les boutons de transport ainsi que différents raccourcis sous forme d’icône. Le problème est qu’Apple a revu à la fois les noms et les boutons, en rendant tout plus grand. Ce qui pose de sérieux problèmes sur des écrans de portable, voire de tours (un 24” sur le MacPro), renvoyant les fonctions dans des menus, allant ainsi à l’encontre du but recherché (voir la capture d’écran affichant les barres de Logic Pro 9 et Logic Pro X).
Et c’est la même chose pour la barre d’outils, avec en plus un désagrément supplémentaire, l’impossibilité de déplacer et placer les icônes où on le souhaite. Bref, une idée pertinente au départ, et malheureusement une mise en œuvre qui handicape plus l’utilisateur qu’elle ne lui rend service (tout le monde n’a pas un 30”…).
Une des grandes peurs de certains utilisateurs était de voir disparaître l’Environment, superbe Lego Midi qui permet des choses assez extraordinaires (tel que l’environnement créé par George Whitty pour Michael Brecker, que l’on peut trouver présenté dans cet article du magazine Virtual Instruments), mais totalement en opposition avec la philosophie Apple, supposant qu’on mette le moins possible les mains dans le cambouis. Il est toujours là, youpi. En revanche, il ne semble pas avoir changé d’un iota (à l’exception de son nom, Midi Environment), à tel point que l’on y retrouve le look et les couleurs des tranches et objets Logic 9, ce qui est assez bizarre, et les divers objets à l’identique depuis, ouh… Autre bizarrerie, certains menus ou objets restent en français, ce qui fait un peu peur quant à la stabilité de l’ensemble. Les bugs connus seraient donc a priori toujours latents. Il en est un autre plus ennuyeux : l’impossibilité d’effacer un câble en le sélectionnant et en appuyant sur Supp. On est obligé de passer par l’outil Gomme ou « remettre » le câble sur lui-même.
L’import d’anciens Environments n’est pas non plus sans défaut, les noms, couleurs ou positions des faders et autres outils pouvant disparaître voire laisser la place à des signes plus ou moins ésotériques, tandis que les polices, du fait de leur plus grande taille, se chevauchent systématiquement et que les fonctions ne… fonctionnent parfois plus du tout.
De la simplification
On le sait, Apple ne jure que par des interfaces simples, une ergonomie la plus efficace et logique possible, afin d’offrir une utilisation possible par le néophyte comme par le pro/confirmé. Autant dire que l’usine à gaz Logic ne correspond pas aux standards maison. Les peurs étaient d’ailleurs que la DAW perde tout ce qui faisait sa puissance au fur et à mesure des mises à jour. La X laisse intacte la bête, mais l’éditeur y a quand même apporté une fonction significative : dans les Preferences, on peut, en cochant ou décochant Show Advanced Tools donner accès ou non à toutes les fonctions les plus complexes du logiciel, permettant ainsi de passer de l’outil que l’on connaît avec toutes ses nouveautés à une sorte de gros Garage Band.
Graphiquement vôtre
Cependant, la nouvelle présentation et organisation est aussi bénéfique, grâce à de nombreuses petites astuces et aides. Une fois l’architecture des tranches acceptée (les entrées sont maintenant situées au-dessus des Sends, un Midi FX est apparu pour les instruments), la visualisation de ce qui est en cours est très claire : complétant la représentation des corrections dans la fenêtre EQ, un afficheur horizontal montre le niveau de compression en cours, à condition bien sûr d’avoir inséré soit le Compressor, soit le Limiter de Logic. Et l’agencement des entrées vers la sortie semble plus logique. Le déplacement des inserts ou leur copie est bien plus rapide, le Bypass ne nécessite plus d’utilisation du bouton Alt et l’éditeur a séparé l’affichage des niveaux, d’un côté celui du fader de la tranche, de l’autre celui du volume atteint. On est moins d’accord sur la couleur d’alerte de saturation des pistes (orange), le rouge étant réservé au Master, même si c’est compréhensible dans un sens (il ne s’agit pas réellement de saturation sur les tranches, alors que sur le bus de sommation, si). Dommage pour les pistes, on ne peut toujours pas les déplacer dans le Mixer (raaah…).
À propos de pistes, passons par les Global Tracks, pour constater qu’elles sont toutes là, à l’exception de la piste Chord (et pourquoi ?). Les divers boutons ont disparu, leurs fonctions étant rendues disponibles dans les menus déroulants. Question préoccupante : la piste Video (renommée Movie) fonctionne-t-elle correctement, alors qu’elle comptait un certain nombre de bugs en 64 bits dans Logic 9 ? Présence de la barre de progression ? Affirmatif. Détection correcte des Scenes Cuts ? Affirmatif. La fonction Export Audio To Movie fonctionne-t-elle correctement ? Affirmatif. Retour des petites flèches dans la fenêtre du film permettant de se déplacer image par image ? Aïe, non. Et toujours pas moyen de déplacer le film dans la timeline en même temps que les Markers créés lors de la détection des Scene Cuts. Bref, du mieux, et encore du « à améliorer ».
On peut aussi contester la modification de certains raccourcis ou fonctions depuis longtemps implémentés : ainsi le Caps Lock Keyboard a disparu pour mieux renaître sous le nom de Musical Typing Keyboard, mais le raccourci Caps Lock n’est plus disponible, et non assignable dans la fenêtre de raccourcis. On dispose cependant d’un Pitch Bend, de la modulation, d’un Sustain, d’un réglage de vélocité, etc. On peste aussi contre la disparition du Alt-Clic permettant de remettre à la valeur par défaut les réglages effectués dans l’Inspector. Les fonctions Set Optimal Regions Size ne fonctionnent plus correctement non plus…
Tout aussi problématique, le changement apporté à la possibilité de zoomer en cliquant-tirant de haut en bas la tête de lecture dans la timeline : il faut maintenant appuyer sur Alt en même temps. Quelle idée saugrenue, on perd la rapidité de la fonction, qui était pourtant bien pratique en mode édition intensive. Et le bug graphique du passage par une forme d’onde grossière lors de zooms très prononcés n’est toujours pas corrigé… Apprécions en revanche les trois mémoires de zoom offertes par fenêtre, la possibilité de zoomer verticalement sur la totalité de la fenêtre ou via le trackpad.
Autres changements appréciables, ceux effectués dans le Piano Roll. On dispose maintenant d’un espace de réglages supplémentaires, incluant Time Quantize, avec sélection de la valeur rythmique, bouton d’action, et curseurs de taux d’application (Strength) et de Swing, puis Scale Quantize, un moyen de forcer les notes à se caler sur une petite vingtaine de modes différents et pour finir un curseur Velocity, qui évite ainsi de changer d’outil. Le tout est bien pensé et efficace, dommage qu’il y ait trois bugs, assez pénibles : l’outil Pencil ne se change plus en l’espèce de crochet (Resize Tool) permettant de redimensionner une note quand on pointe la souris sur le coin inférieur droit de la note (alors que cela fonctionne correctement sur le coin inférieur gauche…). Deuxièmement, le champ affichant le nombre de notes sélectionnées n’indique le nombre correct que si l’on fait un rafraîchissement de la fenêtre. Enfin, quand on cache l’Inspector du Piano Roll, la partie droite a un bug graphique, la grille de fond se transformant en un fond gris clair, disparaissant après un scroll à droite/gauche.
Les divers changements à la fois graphiques et fonctionnels (qui ne sont pas tous présentés ici, faute de place, on peut penser à la gestion des Groups, par exemple) se révèlent après quelques semaines d’utilisation à la fois bien pensés et surtout offrent une rapidité et une logique de travail assez étonnante par rapport aux versions précédentes (on est content de voir le retour de l’Auto Save, par exemple, même si présenter ça comme une nouveauté est assez gonflé…).
Adios 32 bits ?
Nouveauté incontournable, l’abandon du 32 bits et de l’Audio Unit Bridge fait beaucoup jaser. Entre les possesseurs de plugs non encore portés en 64 bits alors que le passage est quand même annoncé depuis quelques années, et les détenteurs de cartes, racks ou plugs abandonnés par leurs éditeurs, les raisons d’être mécontents sont variées et parfois justifiées. Difficile de me passer du MD5 et de la VSS3 de TC Electronic, liés à la PowerCore qui ne sera jamais en 64 bits.
Ce passage en 64 bits complet (sous réserve de bugs non encore rencontrés, comme certains aspects de l’Environment pourraient le laisser croire) est pourtant garant d’une plus grande stabilité, et les utilisateurs de grosses bibliothèques d’échantillons (hors exs24, qui pouvait gérer ses propres 4 Go de RAM, même si Logic était en 32 bits) ne peuvent que s’en réjouir.
Il existe pourtant plusieurs solutions pour continuer à utiliser les plugs 32 bits dans le nouveau Logic 64 bits. L’une d’entre elles consiste en convertir les plugs VST désirés via jBridgerM, et placer ces derniers dans le dossier VST d’Independence Pro (maintenant chez Magix). La latence est quasi insignifiante, mais la stabilité est encore aléatoire, suivant le type de plug employé. Et rien ne dit que cela fonctionne encore dans quelques mises à jour de Logic, ou d’OS X.
Les possesseurs de Vienna Ensemble Pro seront en revanche plus avantagés, la communication entre serveurs 32 bits et application 64 bits ne posant pas de problèmes, et la stabilité étant cette fois-ci à toute épreuve, avec compensation complète de la latence. Indéniablement, une des solutions à retenir.
Enfin, une solution aussi très stable, celle proposée grâce à la version 2 à venir du MB-7 de Blue Cat Audio. L’éditeur y a en effet inclus des slots pour effets, et l’on peut donc charger, dans Logic X, des VST 32 bits portés en 64 bits via jBridge. Cela fonctionne parfaitement, c’est une solution assez légère et totalement transparente pour l’utilisateur. Bravo !
Audio, Midi et tout le toutim
Autre nouveauté, les Track Stacks, qui offrent deux modes de fonctionnement : les Folder et les Summing. Les premiers offrent la possibilité de combiner plusieurs pistes et de les commander via une unique tranche, sans que leur routing ne soit modifié, la tranche en question n’offrant que volume, mute, solo, automation et groupe. On peut considérer le principe comme une évolution des Folders (par ailleurs toujours disponibles), puisqu’on y gagne les réglages susmentionnés. Les seconds permettent de router en un seul clic (avant ou après création de régions, la fonction pouvant être appelée par un raccourci clavier) un ensemble de pistes vers un Aux via un Bus, comme on pouvait le faire précédemment manuellement, avec ici une rapidité accrue. Dans les deux cas, la possibilité de ne laisser visible à la fois dans la fenêtre Main Window (autrefois Arrange) et dans le Mixer que la piste « maître », que l’on peut ouvrir grâce à un petit triangle : l’activation de la fonction Follow Track Stacks permet d’afficher/cacher les sub-pistes dans le Mixer. Liberté totale est laissée en ce qui concerne le type de pistes, leur réorganisation, les noms et couleurs, etc. Dans Main Window, le fond prendra une variation de la couleur de la piste « maître » et le nom de celle-ci sera affiché sur ce même fond. Le principe de Track Stacks, à l’usage et sans être révolutionnaire, se révèle un ajout fonctionnel bien vu et très utile en termes de workflow et de rapidité.
Petit ajout fonctionnel très sympathique, les Smart Controls, équivalents de Macros chez d’autres éditeurs (ou chez Logic, dans l’es2, par exemple, même s’ils ne sont pas assignables), la possibilité de créer plusieurs contrôles d’accès rapide par tranche, en sélectionnant un effet ou un instrument virtuel (ou plusieurs, dans la limite apparente de douze potards), avec un Learn des paramètres à assigner à un potard ou bouton très rapide (une simplification bien vue de la fenêtre Controller Assignments, qui s’ouvre quand on double-clique sur un champ d’assignation), la sélection d’interface et de types de contrôleurs parmi un large choix (l’héritage Mainstage, peut-être…), une gestion via contrôleurs externes, un offset des réglages (limites inférieures et supérieures de la plage d’action), la possibilité de réorganiser les paramètres, sachant que plusieurs paramètres peuvent être assignés à un seul potard, chacun avec son propre réglage de plage, inversion, etc. Bravo, bien vu et encore une fois gain de rapidité, avec de plus une ouverture supplémentaire pour l’utilisation de Logic sur scène.
Grosse nouveauté aussi (enfin, pour ceux qui ne mettaient pas les mains dans l’environnement…), les plugs Midi (les utilisateurs de Cubase devraient sourire…). Au menu, Arpeggiator, Chord Trigger, Modifier, Modulator, Note Repeater, Randomizer, Scripter, Transposer, Velocity Processor. Insérés avant n’importe quel instrument Midi, ils permettront d’y appliquer nombre de fonctions leur manquant, en proposant des interfaces claires (un peu grandes, mais on peut les réduire) et intuitives, et le lot de paramètres et possibilités que l’on trouve généralement dans ce type d’outils, ni plus, ni moins. Comme déjà dit, les familiers de l’Environement, des Transformers (maintenant directement accessibles sous forme de fenêtre flottante, Midi Transform) et autres objets ne découvriront rien de particulier (à l’exception d’un module Scripter), mais, tout comme les néophytes en la matière seront contents d’éviter câblages et paramétrages pour utiliser des modules simples, mais riches de présets bien conçus.
Le Scripter en question permet de créer ses propres scripts, en utilisant l’API JavaScript, plusieurs exemples et des descriptions précises dans le manuel dédié aux effets permettront de se lancer. Sans compter que l’on peut espérer que les gourous des scripts sous Kontakt de Native se pencheront certainement sur cette opportunité, l’exs24mkII restant toujours le plus optimisé des échantillonneurs virtuels pour Logic (et pour cause, sachant de plus qu’il est loin de proposer toute la puissance de ses concurrents). À ce propos, on regrette de ne pas avoir constaté de changements dans ce sampler, notamment dans le domaine de l’édition, alors que le développeur de Redmatica, qui avait créé des outils incroyables pour ce logiciel, travaille maintenant pour la pomme. Notons aussi à cette occasion, que le Mixer de Logic n’affiche pas les huitièmes Slots d’inserts Midi et Send (alors que l’Inspector, si), ce qui est quand même un bug assez grave…
Saluons aussi l’apparition de la Groove Track, une amélioration de ce que l’on trouve dans GarageBand depuis quelques années, qui propose de désigner une piste comme la référence rythmique du morceau (une étoile dans la partie gauche de la Track Header, visible seulement si on active Groove Track dans Configure Track Header, ce qui évite de cliquer pendant des heures en se demandant pourquoi rien ne se passe…), puis en cochant les nouvelles cases apparues sur les autres pistes, on « forcera » celles-ci à se caler rythmiquement sur la piste-référence. On est étonné par la qualité du résultat, que ce soit en partant d’une piste Midi ou audio, les unes et les autres se calent assez fidèlement, sans nécessairement perdre tout le groove de base. Le résultat faisant appel à du stretch via des marqueurs/Slices ou de la quantisation Midi, rien n’empêche d’affiner le résultat après coup. Les habitués auront bien entendu reconnu une amélioration/simplification du processus associant Audio To Midi Groove Template et du Make Groove Template du Quantize de l’Inspector. Reconnaissons volontiers que c’est éminemment simplifié (dans le sens très simple à mettre en œuvre), et très, très efficace. Une véritable pépite quand on travaille avec des sources provenant d’enregistrements différents, tout comme pour expérimenter des mixes totalement incongrus.
Puisqu’on parle de stretch et Slices, notons aussi que si le Slice At Transients Markers est toujours limité à 32 mesures, il semble être un peu moins précis que dans la version précédente. Ce n’est pas systématique, mais les mêmes fichiers découpés dans Logic 9 et Logic X ont quelquefois donné des résultats différents. Mystère.
Anciens projets, Logic Pro X et OS 10.8.4
Il conviendra de bien vérifier que tous les anciens projets Logic sont au minimum sauvegardés avec la version 7.2.1 de Logic. En effet, depuis Logic 9, impossible d’ouvrir un fichier antérieur à cette version.
Les possesseurs de Logic 7 seront cependant heureux d’apprendre qu’on peut l’installer sur un OS 10.8.4 (avec l’aide de Pacifist suivant le type d’installeur dont on dispose), que le logiciel fonctionne très bien (certains Audio Units tiers ne sont pas utilisables, mais ils ne sont pas si nombreux, essentiellement, sur la configuration de test, les Sonnox pour PowerCore) à condition que le pilote de l’interface soit géré (ici, SK48 de TC Electronic, aucun problème).
On pourra ainsi importer de vieux projets (jusqu’à la version 4, sans garantie pour cause de projets non disponibles en ce qui concerne les versions précédentes), et les sauvegarder dans un format qui sera lu par Logic Pro X. On peut ainsi se demander si, en dehors des apports les plus visibles, tant de choses ont changé dans Logic Pro X.
Mais du moment que cela fonctionne…
Du groove et de la justesse
Un article tel que celui-ci ne peut aborder toutes les fonctions nouvelles. On se contentera avant de dresser le bilan de cette nouvelle version de parler de deux dernières, Drummer et Flex Pitch. Le premier peut être appelé dès la création de pistes dans la fenêtre idoine, apparaissant à côté des Sotfware Instrument, External Midi et Audio (notons aussi la nouvelle Guitar or Bass, ouvrant une piste pré-chargée pour le monitoring avec Noise Gate, Pedal Board, Amp, etc.). Automatiquement, un plug-in Drum Kit Designer et des régions Drummer seront ouverts. Si le projet contient une structure d’Arrangement (des marqueurs spécifiant les sections Chorus, Verse, Bridge, Intro, etc.), les régions Drummer suivront celle-ci. Si le projet n’en contient pas, Logic n’en chargera que deux de huit mesures.
Ces régions ont un statut bizarre, puisqu’elles utilisent clairement des programmations Midi (ce que confirme l’affichage du Score), mais ne sont pas directement accessibles via le Piano Roll ; il faut d’abord les convertir en régions Midi pour pouvoir les éditer. La conversion vers une région Drummer est aussi possible, mais au prix de la perte des modifications Midi, et hélas, la conversion en piste Midi fait perdre toute la possibilité d’action sur le jeu du batteur. Même un fichier Midi programmé indépendamment, puis glissé sur la piste Drummer se verra modifié pour adopter le style de jeu du batteur sélectionné, c’est dommage, la personnalisation (en termes de groove créé par l’utilisateur) restant donc assez restreinte.
La création d’une piste Drummer ouvre donc aussi un Drummer Editor, fenêtre spécifique qui cohabitera avec le Drum Kit Designer pour créer et paramétrer un kit et un comportement répondant aux souhaits de l’utilisateur. D’abord, on choisit entre quatre styles différents (Alternative, Rock, Songwriter et R & B), chacun des styles offrant les choix entre plusieurs batteurs, chacun avec son kit et son style de jeu. En plus du kit spécifique, un batteur dispose de plusieurs présets offrant des variations importantes du pattern de base (la région Drummer change en même temps). Un pad X-Y permet de complexifier/simplifier, rendre plus fort/moins fort le pattern en cours. À cela, on ajoute un rotatif Fills qui règle le nombre de breaks dans le pattern, et un autre Swing qui rend plus ou moins ternaire le jeu du batteur. Au centre, un premier écran permet d’activer ou désactiver les différents éléments du kit, en donnant pour chacun plus ou moins de variations grâce aux différents sliders correspondants. Un bouton Details fait basculer cet écran sur des réglages Feel (jeu en avant ou au fond du temps, très efficace), Ghost Notes (afin d’en régler le volume global) et Hi-Hat, qui permet de choisir entre charley fermé ou ouvert, avec plusieurs degrés d’ouverture (ou de laisser le plug le gérer via le bouton Automatic). On peut décider de figer ces réglages afin de changer de batteur (donc de kit) ou de kit (et pas forcément de batteur).
Tout cela en liaison avec le plug-in Drum Kit Designer, qui offre la possibilité, lorsque l’on charge la version de base d’un kit, de choisir entre quelques instruments au sein d’un kit (par exemple, différentes caisses claires ou grosses caisses, etc.), et affiner leurs réglages (accord, étouffement et volume). On peut de plus choisir un fonctionnement GM, GM avec molette pour l’ouverture du charley et V-Drums.
Plus intéressant est le choix d’ouvrir un Producer Kit (le nom reste le même mais est doté d’un suffixe +). Car on dispose là d’un accès à toute la panoplie d’instruments (échantillonnés, bien sûr), qui se révèle fort copieuse. Mais aussi et surtout à un accès total au mixage des pistes, car la piste Drummer se transforme en Track Stacks de type Summing, où l’on s’aperçoit que Drum Kit Designer offre jusqu’à 13 sorties stéréo séparées (non accessibles depuis l’interface du plug, donc pré-assignées par l’éditeur, dommage)… On dispose alors de quelques réglages supplémentaires, Leak permettant d’activer ou non la repisse des micros, Overheads et Room plaçant l’élément sélectionné dans les micros aériens et ceux placés pour prendre la réverbe naturelle de la pièce. On notera que l’éditeur a fourni un excellent travail de sound design, les Producer Kits offrant souvent au sein des Track Stacks des bus d’effets (compression parallèle, distorsion, traitement particulier d’un élément du kit, etc.). Bravo.
Même si l’on ne compte pas se servir des régions Drummer (on peut souhaiter que de futures mises à jour permettent plus de souplesse dans les allées et venues entre Midi et format Drummer), on dispose là d’un instrument virtuel de batterie de grande qualité, c’est une des réussites de Logic X.
On terminera le tour entrepris par un apport très attendu par certains, le Flex Pitch. Apple s’aventure là sur le terrain jusque-là parfaitement occupé par Melodyne, et hélas celui que l’on peut considérer comme définitivement perdu pour la cause logiquienne, le très performant Radius d’iZotope. Bien entendu, le Flex Pitch ici proposé n’est que monophonique, mais la lecture de quelques brevets déposés par les équipes d’Apple laisse à croire que la détection et la correction polyphoniques pourraient bien faire leur apparition à un moment ou à un autre dans Logic…
Mais revenons à ce dont on dispose déjà : on importe un fichier mono ou stéréo, on active le mode Flex, et l’on choisit Flex Pitch. Logic procède dans un premier temps à une analyse du fichier, puis propose dans la fenêtre Main Window une première visualisation de la dérive de justesse des notes. La reconnaissance est assez efficace, on peut commencer à corriger en cliquant-tirant vers le haut ou le bas les fines lignes (avec pop-up indiquant la note et la dérive). Mais il sera plus intéressant de passer directement dans l’Audio Editor, qui en plus du mode de travail habituel sur le fichier (File), gagne un mode Track, celui que nous utiliserons. On y visualise en effet la forme d’onde et plus important, des barres horizontales très proches de celles produites dans Melodyne, indiquant la hauteur de la note, complétées par des lignes brisées représentant la dérive ou le portamento entre les notes. Très proche de l’éditeur de Celemony, ça…
Bref. Quand on passe la souris au-dessus d’une des barres/notes, elle affiche aussitôt six points, trois au-dessus, représentant à gauche (l’attaque) et à droite (le relâchement) la dérive de hauteur et au milieu l’accord fin, et trois en-dessous, le gain, le vibrato et l’ajustement des formants. Il suffit de cliquer-tirer sur les divers points pour corriger instantanément les imprécisions, avec une qualité assez étonnante sur les voix (et les autres instruments monodiques), en cela que les sifflantes, le souffle et les consonantes sont beaucoup moins affectés que chez le grand concurrent. Pas de doute, pour un coup d’essai, c’est un véritable coup de maître. D’autant qu’un outil de cette qualité vaudrait à lui seul beaucoup plus cher que ce qu’est vendu Logic X. Mais ça, on commence à en avoir l’habitude, puisque dans Logic, c’est le dongle qui coûte le plus cher : il s’agit en effet du Mac sur lequel la DAW est hébergée…
Vintage sound
Parmi toutes les nouveautés, Apple nous a concocté un « petit » synthé fort réussi, Retro Synth, donnant accès à plusieurs types de synthèse en partant de deux oscillateurs : Analog, Analog avec Sync, Table (façon PPG) et FM (façon DX2, 33, un hypothétique DX7 à deux opérateurs…). Deux oscillos à formes d’ondes multiples, donc, modulation de l’onde via LFO ou Enveloppe, vibrato, mix entre les oscillos, réglages fin et grossier de l’accord, filtre résonant multimode et multipente avec modulation (LFO, Env) et suivi de clavier, Glide ou Autobend paramétrable, Chorus ou Flanger paramétrable, enveloppes de filtre et d’amplitude, Synchro, une chouette émulation de porteur/modulateur FM, plus une palanquée de présets assez bien conçus, voilà un synthé qui remplit bien son office.
Il fera difficilement de l’ombre à l’es2 ou a fortiori à des synthés tiers dédiés pour la création de sons plus complexes, mais sa qualité enrichit la palette sonore déjà conséquente de Logic, et sa simplicité d’usage (maître mot de cette version de Logic) permettra aux moins calés en synthèse de se faire les mains sur un outil relativement polyvalent et assurément pédagogique.
Bilan
Après un mois de travail soutenu sur la bête, se pose l’heure du bilan. Les premières impressions, à prendre en main le logiciel, n’étaient pas forcément très bonnes, tant les changements de workflow pour les utilisateurs de longue date ou les bugs pénibles, nouveaux ou non corrigés depuis, ouh… sautaient au visage ; notons en plus de ceux déjà cités, le non-affichage permanent du cadenas des régions verrouillées sur SMPTE, l’impossibilité de sauver un Template avec un tempo personnalisé (120 BPM par défaut), les changements de signature dans le List Editor pour le moins fantaisistes, la fonction Increase/Decrease Last Clicked Parameter by 1 ou by 10 qui ne fonctionne plus, tout comme la sélection du paramètre d’Automation via le menu contextuel dans la piste ou le déplacement dans Even List et Even Float avec les flèches (qui affiche la région), ou encore l’impossibilité d’accéder de façon graphique à la valeur 127 en Hyper Draw (renommé Midi Draw dans LPX), etc.
Puis au fur et à mesure, le superbe travail de simplification des fonctions (résultant par exemple en les Smarts Controls, les plugs Midi et la Groove Track), le gain de temps en résultant, les petites astuces de raccourcis, la présence dans les menus de fonctions jusque-là accessibles plus difficilement, les Track Stacks, le Flex Pitch, la qualité du Drummer, et les diverses corrections de bugs anciens (ainsi que la rapidité des mises à jour, plutôt un bon signe) prennent le dessus, et si l’on y ajoute une stabilité exemplaire et une consommation CPU nettement inférieure à celle de Logic 9 à projet d’égale complexité, eh bien, il semble difficile de faire marche arrière.
Bien sûr, rien ne pousse à faire l’update pour les utilisateurs de longue date, pour qui tout se passe bien avec la précédente version et pour qui le 32 bits peut être encore important (les solutions sont cependant là). Pour les nouveaux venus, l’approche parfois complexe a été grandement simplifiée et le nombre de fonctionnalités, la richesse des contenus sonores et la possibilité de travailler uniquement avec les outils fournis sont quasi uniques à ce prix.
On pouvait craindre le passage à la X, pour des tas de raisons. En tout cas, force est de constater que loin de perdre de ses qualités (puissance, malléabilité et richesse fonctionnelle impressionnantes), Logic en version X gagne encore en souplesse, autonomie et ergonomie, ce qui n’était pas une mince affaire. Plaintes contre X, alors ? Non.