Akai, la marque fétiche des beatmakers, s'ouvre au marché de la workstation avec la MPC Key 61, vendue aux alentours de 1999 €. Après l'hybridation contrôleur/DAW opérée il y a quelques années, Akai tenterait-elle l'hybridation beatmaker/claviériste ?
Tour de l’extérieur
La boîte contient, outre le MPC Key 61 lui-même, un câble d’alimentation de type C13, un câble USB 3 pour la connexion à un ordinateur, un poster avec le rappel des principales fonctionnalités de l’instrument, les traditionnelles instructions de sécurité, et un petit chiffon pour entretenir l’écran tactile de l’appareil.
Le MPC Key 61 présente, de l’extérieur, toutes les caractéristiques d’une workstation de taille moyenne. L’instrument mesure 986 mm x 313 mm x 97 mm pour un poids de 8 kg. Il dispose d’un clavier de 61 touches semi-lestées sensibles à la vélocité et à l’aftertouch par canal, ainsi que des 16 pads classiques des MPCs, sensibles à la vélocité et à l’aftertouch polyphonique. À la gauche du clavier, on trouve les deux molettes traditionnelles de pitch-bend et de modulation. À la gauche des pads se situe un bandeau tactile accompagné de ses deux boutons de configuration, ainsi que d’un bouton de déclenchement de la fonction « note repeat ». Au-dessus se trouvent les quatre boutons de sélection de banque des pads, à leur gauche, le bouton de volume général, et en dessous de lui les boutons de gestion du métronome et du tap tempo, de l’arpégiateur et de la transposition d’octave. Au centre de la partie supérieure du MPC Key 61, on dispose d’un écran de 6,9 pouces de diagonale, capacitif et multipoint. À sa droite, on trouve les quatre traditionnels potards rotatifs, sans fin, non crantés et sensibles au toucher, les fameux « Q-Links » que l’on retrouve sur toute la gamme MPC actuelle, accompagnés de leur sélecteur de banques, du gros potentiomètre cranté et cliquable qui permet de naviguer dans les menus, de sélectionner des items ou de modifier n’importe quel paramètre désigné à l’instant « t », ainsi que deux boutons « + » et « - ». À droite se situent tous les boutons destinés à la gestion du transport, et au-dessus d’eux les boutons d’accès directs à diverses fonctionnalités centrales de l’appareil. Une très riche connectique garnit toute la face arrière de l’appareil.
On y trouve en effet, en plus de la prise d’alimentation et du bouton de marche/arrêt, une prise Ethernet pour une connexion réseau, une prise USB 3 type B pour la connexion à un ordinateur, 2 prises USB A 3.0 pour connecter des unités de stockage supplémentaires, contrôleurs externes, et même des interfaces audio (oui, oui, c’est possible) si celle intégrée ne vous suffit pas. D’ailleurs, puisque nous en parlons, nous arrivons aux connectiques dédiées à l’interface audio du MPC Key, à savoir une sortie casque au format jack 6,35 mm, 4 sorties mono au même format, puis deux entrées hybrides XLR/jack accompagnées chacune d’un bouton de sélection d’impédance ligne/instrument et d’un potard de gain.
Enfin, de l’autre côté de la face arrière du clavier, nous avons 8 sorties CV/gate, un trio de prises MIDI DIN (IN, OUT, THRU) et les trois prises jack 6,35 pour connecter une pédale de sustain, une pédale secondaire et une pédale d’expression. Pour ce qui est des ressources internes, on précisera que le MPC Key 61 fonctionne avec 4 Go de RAM, et 32 Go de stockage (dont 13 de contenu préinstallé et 4 pour le système d’exploitation). Si cela nous semble chiche, nous avons non seulement la possibilité déjà évoquée de connecter un disque ou une clé externe, mais aussi celle d’étendre le stockage interne grâce à la connectique SATA intégrée. Enfin, en plus de la prise Ethernet, le MPC Key 61 dispose pour la communication externe, la mise à jour de son firmware et la connexion avec un éventuel compte Splice, du protocole WIFI ainsi que du protocole Bluetooth, ce dernier étant pour l’instant réservé à la connexion de claviers d’ordinateurs et claviers-maîtres compatibles avec cette norme.
Avant de pousser plus avant notre test, il me semble important de rappeler à tous ce qu’est réellement une MPC.
MPC… mais keskecé ?
Le système MPC, c’est déjà tout simplement l’instrument mythique né à la toute fin des années 80, sans lequel le hip-hop et une bonne part de la musique populaire actuelle n’existeraient pas telles que nous les connaissons. Il s’agissait au départ d’une boîte à rythmes autonome comme toutes les boîtes à rythmes et les appareils de l’époque. Elle embarquait entre 750 ko et 1,5 Mo de RAM, ce qui lui permettait d’enregistrer et de reproduire des échantillons en 12 bits et 40 kHz. Ces échantillons étaient déclenchés via 16 pads sensibles à la vélocité et proposant une polyphonie pouvant aller jusqu’à 16 voix. Ces échantillons pouvaient être arrangés en séquences, et ces séquences en morceaux entiers. Ceux qui souhaitent se renseigner plus en détail sur le fonctionnement et le workflow de la MPC peuvent consulter le paragraphe que j’y ai dédié lors du banc d’essai de la MPC Touch.
La MPC Touch a été d’ailleurs l’un des symboles de l’évolution de la philosophie MPC. Elle a en effet été le premier vrai succès de la marque dans le domaine des systèmes hybrides basés sur un contrôleur physique pilotant un logiciel installé sur un ordinateur pour la génération des sons et leur séquençage, après les essais en demi-teinte de la MPC Renaissance et de la MPC Studio première du nom. Elle était également la première à proposer un écran tactile. Akai Professional a poursuivi ensuite dans cette voie-là avec la MPC Live, la MPC X et le MPC Force, trois modèles qui reprennent de nombreuses caractéristiques de la Touch (aspect hybride du concept, écran tactile), tout en retrouvant également l’autonomie des premières machines de la série. On notera qu’avec ces appareils et les mises à jour du logiciel sont apparues de nouvelles fonctionnalités centrales comme la gestion des sorties CV/Gate et la possibilité de lancer des clips. L’évolution générale visant à réunir en un seul appareil une station de production autonome et un contrôleur dédié à la DAW maison MPC2 se poursuit aujourd’hui avec le MPC Key 61. Toutefois, c’est un nouveau palier qu’Akai Professional franchit aujourd’hui, puisque pour la première fois, la marque affuble son produit phare d’un clavier, marchant ainsi allégrement et ouvertement sur les plates-bandes des fabricants traditionnels de « workstations » tels que Roland, Yamaha ou Korg. Et en agissant de la sorte, Akai Professional fait le choix de sortir de sa zone de confort et de s’adresser à un public peut-être différent de celui qui constituait sa clientèle jusque-là, à savoir les créateurs d’« instrus » pour le hip-hop et ses dérivés.
Ce nouveau public, c’est potentiellement celui des musiciens de studio et de scène, des compositeurs plus traditionnels qui souhaiteraient se mesurer à de nouvelles manières de faire de la musique sans pour autant sacrifier leur outil de création habituel : le clavier.
Le clavier
Car oui, le MPC Key 61 est un clavier qui s’impose avec ses 61 touches, ses grosses molettes bien calées et ses multiples commandes. Les touches sont agréables à jouer, avec un lestage typique de synthé, ce qui tombe plutôt bien, car l’instrument ne s’oriente clairement pas vers un usage pianistique pur et dur. Le paramétrage des caractéristiques de jeu se fait d’ailleurs très simplement via le bouton « keyboard control » et l’écran tactile. Celui-ci s’avère bien lisible et réagit tout à fait correctement au toucher. On éprouve en fait un réel plaisir à simplement jouer sur cet instrument, toutes les commandes tombant parfaitement sous les doigts et répondant très bien. On apprécie également le fait de bénéficier à la fois de molettes et d’un bandeau tactile — là où la concurrence ne propose souvent que l’un ou l’autre — ainsi que de la possibilité de brancher les pédales que l’on souhaite, ce que je me suis empressé de faire. Un petit détail à noter, mais qui simplifie grandement la vie : la présence de deux touches shift (et non pas qu’une seule comme c’est souvent le cas), permettant d’atteindre le plus souvent d’une seule main la touche dont on souhaite activer la fonction alternative. Très pratique, surtout sur scène, s’il s’agit de continuer à jouer avec l’autre main par exemple. Évidemment, ce n’est pas la première fois qu’Akai fabrique des claviers. La marque nous avait gratifiés il y a quelques années de la série « Advance », une gamme de claviers maîtres destinée à concurrencer les Komplete Kontrol de Native, notamment sur la gestion rationnelle et pratique des banques de plugins et de presets. Disons pour l’instant qu’à ce sujet, le MPC Key 61 et l’« Advance » n’ont pas grand-chose en commun. J’y reviendrai.
Pour l’instant, je vous invite à explorer ce que la dernière version du logiciel MPC au cœur du système nous propose – un certain nombre de ces nouveautés étant bien entendu directement lié à la nature « claviéresque » de l’instrument.
De nouvelles habitudes…
Akaï Professional a édité la dernière version de sa DAW — la 2.11 — il y a environ deux mois. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il ne s’agit pas d’une mise à jour mineure. Le logiciel tournant à la fois sur ordinateur et au sein des machines autonomes de la marque, les nouveautés se répartissent sur les deux plateformes.
… pour l’ordi
Commençons par l’ordinateur, et par une bonne nouvelle pour les possesseurs de Macs. MPC 2 prend dorénavant en charge nativement les puces M1 de chez Apple, ce qui devrait assurer un gain certain de performances. Les utilisateurs d’Ableton Live sur les deux plateformes salueront le fait que MPC 2 soit maintenant compatible avec la version 3 d’Ableton Link, la dernière itération en date du protocole de synchronisation sans fil de l’éditeur allemand. Enfin, MPC 2 s’enrichit maintenant de nouvelles interfaces graphiques pour les plugins.
… pour le contrôleur
Cet enrichissement visuel, les MPC autonomes ou non en profitent également, notamment au sein du nouveau browser qui affiche maintenant de jolies miniatures graphiques pour chacun des instruments virtuels de la marque. On clique du doigt sur lesdites miniatures et l’on accède ainsi aux presets, rangés ou non selon leurs catégories. Oui, j’écris « rangés ou non » et c’est bien le problème : nous y reviendrons plus bas. Une fois qu’on a choisi un preset, on peut immédiatement accéder à l’interface de l’instrument virtuel concerné, effectuer les modifications sonores souhaitées et sauvegarder le nouveau preset dans un emplacement réservé aux favoris, l’une des fonctions proposées par cette nouvelle interface. Cette dernière propose encore bien des choses intéressantes. On peut ainsi sauvegarder des raccourcis vers nos propres dossiers de fichiers personnalisés. Tout comme on peut se créer une « setlist » afin d’avoir sous les yeux tous les projets que l’on souhaite, et de pouvoir y accéder d’une simple pression du doigt sans naviguer des heures dans des sous-menus. Très bien vu, notamment s’il s’agit d’opérer de rapides changements de projets sur scène. Enfin, ladite interface propose le chargement de templates un peu particuliers, les « performances ». Il s’agit là d’assortiments de presets d’instruments et de batteries « prêts à jouer » afin de démarrer immédiatement dans un style donné. Mais le plus intéressant là-dedans, à mon sens, c’est que ces dites « performances » tirent partie d’une autre grande nouveauté de la version 2.11 du logiciel MPC : les « layers » d’instruments. En s’inspirant assez lointainement des « instrument racks » d’Ableton Live — nous reviendrons également sur les limitations de la « version Akai » — ce nouvel outil permet de superposer des sons et d’organiser les splits de clavier de manière très simple et visuelle. On pourra même filtrer les messages MIDI selon les différentes couches instrumentales de plugins de drum programs, de keygroups… Et puisque l’on parle de drum programs et de keygroups, félicitons-nous qu’Akai ait enfin comblé le retard incompréhensible des MPC par rapport aux Maschine de Native Instruments : on peut maintenant transformer n’importe quel sample d’un drum program en keygroup, c’est-à-dire en sonorité automatiquement transposée et jouable sur l’intégralité du clavier !
L’interface que je veux (ou presque)
Akai va encore plus loin dans la refonte de son interface utilisateur, car on a maintenant la possibilité de customiser complètement l’écran « Menu » dans lequel apparaissent tous les éléments de base du fonctionnement de la MPC (éditeur de samples, step sequenceur, browser, etc.). Cela modifie non seulement l’ordre dans lequel ces éléments sont affichés sur l’écran, mais également le pad auquel chacun d’eux sera affecté pour y accéder le plus rapidement possible. Pour compléter cette volonté de personnalisation, une nouvelle barre de raccourcis fait son apparition lorsque l’on balaie l’écran de la gauche vers la droite. Celle-ci est totalement paramétrable et permet d’accéder à cinq éléments de son choix sans devoir repasser par l’écran « menu ». J’ai à titre personnel très vite pris l’habitude de l’utiliser. Bien évidemment, chacun jugera de la pertinence ou non de la chose selon ses propres habitudes ergonomiques. Mais personne ne pourra reprocher à Akai de développer, au sein de gamme de produits MPC, un effort constant pour offrir à l’utilisateur de nombreux moyens différents d’obtenir un même résultat.
À tout hasard…
Enfin, pour terminer avec les nouveautés de la dernière version en date du logiciel MPC, notons deux évolutions majeures dans le séquenceur MIDI. Il y a tout d’abord la fonction « ratchet » qui permet de créer à la volée des effets de répétitions rapides de notes, très pratique notamment lorsqu’il s’agit de créer des fills de batterie. Mais surtout, le logiciel MPC se dote enfin d’une fonction de randomisation des événements MIDI grâce à un pourcentage que l’on pourra attribuer à chacun d’eux et qui déterminera leur chance respective d’être déclenché. Un moyen toujours pratique d’ajouter facilement de la vie à vos boucles et qui faisait cruellement défaut dans l’univers MPC.
Une MPC qui fait de l’effet
La nouvelle mouture du logiciel MPC n’apporte pas uniquement des améliorations ergonomiques ou de workflow, mais également de nouveaux outils de traitement sonore, tous développés par AIR, le studio de développement désormais attitré d’Akai. Outre un petit accordeur bien pratique, MPC Tuner, nous avons deux nouveaux plugins : Amp Sim et Flavor. Le premier est comme son nom l’indique un simulateur d’amplis, qui propose une gamme plutôt étendue de configurations. Jugez plutôt. On dispose de 6 catégories (guitare clean, avec disto, basse, voix, batteries, et synthé), chacune regroupant entre 7 et 28 presets de têtes d’amplis et d’enceintes de tous formats, du 1×8 » au 4×12 » en passant par le 2×12 ». Un outil de ce genre est toujours pratique à avoir dans sa besace sonore et manquait clairement dans l’offre MPC : bien vu.
Et si les amplis sont des outils cruciaux de façonnage sonore, le second plugin en fait carrément sa raison d’être principale. « Flavor », comme son nom l’indique, est là pour donner rapidement une couleur Lo-Fi à vos productions, à l’aide de quelques commandes simples et efficaces : « distorsion », « flutter » (pleurage), « noise » et « monofy » (pour transformer un signal stéréo en mono), dont les paramétrages sont réunis au sein de 17 presets aux noms évocateurs tels que « rust » (rouille), « old vinyl » ou « cassette tape » (dois-je vraiment traduire ?). Un petit outil bien pratique qui rendra de fiers services. Mais nous n’en avons pas terminé avec les plugins d’effets.
Ça me laisse sans voix !
Car avec la sortie du MPC Key 61, Akai en a remis une couche en proposant la « Vocal suite », un ensemble de trois modules dédiés au traitement de la voix. Le premier est « Vocal Tuner » et sert à corriger la hauteur d’un signal audio entrant et plus spécifiquement de la voix humaine. Il dispose de 5 algorithmes de détection de désaccord et se propose de corriger ceux-ci en se basant sur quelques critères que nous lui donnons, comme une indication globale de la tessiture de la voix sur laquelle il doit agir, la tonalité, la fréquence du « La » de référence, etc. Attention, on n’est pas du tout ici en présence d’un Melodyne, mais vraiment beaucoup plus d’un autotune. L’outil est plutôt efficace. Mais à titre personnel, j’ai été vraiment très agréablement surpris par les deux autres plugins. « Vocal Doubler » et « Vocal Harmonizer » proposent en effet tous les deux de multiplier le signal audio et de décaler les signaux audio résultants entre eux à la fois dans le temps et la tonalité. On obtient à mon sens des résultats très naturels avec vraiment peu, voir pas d’artefact.
Je vous en propose ici quelques exemples. N’étant moi-même pas chanteur du tout, je me suis permis de me rabattre momentanément sur Omnisphère de Spectrasonics et sur sa banque vocale « Classical Tenor Ah » pour trouver une belle voix masculine et lui fabriquer une petite mélodie à chanter.
- Voix seule00:31
- voix doublee00:31
- voix harmonisee00:31
Après avoir fait le tour des nouveautés ergonomiques et des effets audio, il est venu maintenant le temps de nous pencher sur les nouveaux plugins de génération sonore qui accompagnent le MPC Key 61.
Du ! Son ! Du ! Son !
Le MPC Key 61 intègre non seulement les générateurs sonores déjà existants de la marque, tels que « Hype », « Tubesynth », « Odyssey », Solina », « Mellotron », « Bassline », « Electric » et « Drumsynth ». Mais il arrive également avec un certain nombre de nouveaux instruments virtuels : « OPX 4 », « Organ », « Studio Strings », « Stage piano », « Stage EP » et — attention — « Fabric XL », « Fabric », « Fabric piano, et « Fabric electric piano ». Vous aussi, vous trouvez que cela fait beaucoup de « Fabric » et de « pianos » ? Ne vous en faites pas, on va éclaircir tout cela, mais procédons par ordre et intéressons-nous tout d’abord à OPX 4.
Opx4
OPX 4 est un synthé FM 4 voix, mais qui au-delà d’être déjà bien pourvu en opérateurs, s’offre le luxe de nous offrir un petit rompler en plus. Très bien vu pour ajouter par exemple une touche un peu plus brute et « concrète » à une sonorité FM parfois jugée froide. On notera toutefois que le module rompler ne dispose pas d’algorithme de time-stretch. Chacun des opérateurs est intégralement programmable, tout comme leurs interactions entre eux au sein de la matrice qui les régit. Concernant les modulations, nous avons 32 chemins de modulation possibles, avec 35 sources et une infinité de paramètres en cible. Enfin, on dispose de 3 slots d’effets individuels offrant un choix de 12 effets, et de 2 slots d’effets globaux à choisir parmi 27. Ce synthé est une très bonne surprise, il offre un grand nombre de presets et une belle qualité audio ! Ici, quelques exemples :
- OPX 4 100:24
- OPX 4 200:16
- OPX 4 300:32
- OPX 4 400:20
Studio Strings
Le deuxième module proposé en nouveauté avec le MPC Key 61, ce sont les Studio Strings. Il s’agit ici d’une banque de samples de cordes qui réunit violon, alto, violoncelle et contrebasse. Pour chaque preset, on peut choisir de faire jouer chacun de ces instruments séparément ou bien tous ensemble. Il n’est en revanche pas possible de choisir violon + contrebasse par exemple. On dispose également de trois formats différents : solo, orchestre de chambre et orchestre symphonique, ce qui donne une diversité sonore assez intéressante. Les deux vrais défauts sont intimement liés et trouvent leur origine dans l’absence d’articulation dynamique. D’une part, vous devrez charger à chaque fois un preset différent par articulation. D’autre part AIR a cherché à combler partiellement cet inconvénient en affectant à l’aftertouch et à la molette de modulation une fonction vibrato logicielle au rendu très artificiel, à éviter à tout prix !
- Violons 100:11
- Violons 200:12
- Violons 300:12
- Violons 400:12
On notera que le module est affublé d’un certain nombre de paramètres tels que filtre, enveloppe, et dosage de l’action de la molette et de l’aftertouch sur le vibrato (qui ne le rendent pas moins artificiel pour autant, dommage !)
Stage piano et Stage EP
Les deux modules suivants pourraient presque être réunis en un seul, tellement leur interface est proche. De fait ils se distinguent bien sûr comme leurs noms l’indiquent par les instruments dont ils reproduisent les sonorités, à savoir le piano acoustique pour le premier et électrique pour le second. Le premier se base sur quatre instruments : le C7 de Yamaha, le modèle D de Steinway, le piano droit Bechstein et une galerie de sons typiques de « pianos acoustiques » issus de workstations classiques. On peut choisir le type de rendu (« hard », « soft », « bright », etc.), le type d’accordage, et enfin le niveau de polyphonie, dont Akai reste assez discret concernant le niveau maximal en se contentant d’indiquer « max » lorsque l’on atteint la limite. Sachant que le degré précédent est 45, je ne me fais guère d’illusion sur la polyphonie qui ne dépasse certainement pas 64 voix, donc le minimum pour un piano numérique. On peut gérer le comportement des pédales, la couleur générale du son, ajouter un compresseur et des effets de délai et de reverb.
- Yamaha00:32
- Steinway00:32
- Bechstein00:32
Pour ce qui est du Stage Electric piano, le principe est proche. Ici aussi, on a différents modèles de base : Rhodes, Rhodes Hot, Suitcase, Wurlitzer et Pianet. On accède ici aussi à différents types de rendus (« hard », « soft » et « real » ici), avec le choix entre la reprise de sons réels via microphone et la synthèse FM, un chorus, un trémolo et un simulateur d’ampli avec une dizaine de modèles différents. Les sonorités sont riches, puissantes, et chaudes, sans doute parmi les meilleures parmi les banques proposées ici (meilleures que celles du Stage Piano à mon sens), une caractéristique qu’il partage avec le module Organ.
- EP 100:34
- EP 200:33
- EP 300:33
- EP 400:36
Organ
Organ est à mon sens l’une des autres réussites sonores de cette collection. Il s’agit de l’émulation d’un orgue électrique type Hammond, avec neuf tirettes, une dizaine de choix pour les roues phoniques, un vibrato, une Leslie et une section d’effets contenant un délai et une réverbe. Ici aussi le résultat sonore est riche et puissant.
- Organ 100:21
- Organ 200:32
- Organ 300:18
FabricXL, Fabric, Fabric Piano et Fabric Electric Piano
Fabric XL est présenté par Akai comme le plat de résistance des nouveaux générateurs sonores de la marque. Il s’agit d’un instrument virtuel basé sur une architecture déjà éprouvée, notamment par Hybrid, l’un des synthés précédents d’AIR, à savoir un système qui repose sur deux layers, chacun contenant un générateur de son et ses propres paramétrages associés. À la différence de Hybrid, FabricXL n’intègre pas de générateurs de synthèse, mais uniquement des lecteurs de samples – samples qui peuvent d’ailleurs être des formes d’ondes, mais qui ne peuvent évidemment pas être modifiées comme avec un « vrai » synthétiseur virtuel. Cela n’empêche pas les paramétrages disponibles d’être très riches, avec filtres, enveloppes, LFOs et tutti quanti. On dispose également d’un chorus, d’un trémolo et d’un phaser globaux, ainsi que d’un EQ, d’un simulateur d’ampli, d’un délai et d’une réverbe intégrés.
Les presets proposés couvrent à peu près tous les styles et les instruments, leads, pads, chœurs, guitares acoustiques et électriques, basses, FX, percussions, etc.
À mon sens, les sons purement synthétiques sont les plus intéressants. En ce qui concerne les sonorités qui se veulent plus réalistes, la qualité audio est un peu inférieure. Notamment les pianos acoustiques et électriques sont moins qualitatifs que ceux des modules Stage Piano et Stage Electric Piano. Enfin, au sein de la version « non-XL » de Fabric, les banques sonores se trouvent encore amaigries. Cela tient au fait que Fabric « tout court » est une version du plugin qui permet de ménager les ressources de votre MPC, là où la version XL sera davantage à son aise sur un ordinateur (attention, elle reste tout à fait utilisable sur une machine autonome, juste qu’elle ne permettra pas d’ajouter autant d’autres plugins). Et les modules Fabric Piano et Fabric Electric Piano regroupent les presets des deux instruments concernés issus de la version non-XL de Fabric. Comme on le voit, il n’est pas forcément facile de s’y retrouver, un sujet qui peut éventuellement enclencher une réflexion plus globale.
- Fabric XL 100:26
- Fabric XL 200:26
- Fabric XL 300:20
- Fabric XL 400:17
Alors oui, mais…
Avant toutefois d’aborder ce thème, je souhaiterais relever un certain nombre de choses
Tout d’abord, quelques petits défauts mineurs. On peut ainsi s’étonner de la disparition du lecteur de carte SD par rapport à la MPC Live par exemple, une disparition à mon sens d’autant moins pertinente que si ce clavier est destiné à être emmené sur scène, un disque dur externe se trouve quand même nettement moins sécurisé dans ce contexte qu’une petite carte SD bien à l’abri dans la coque du clavier, si l’on a besoin d’une extension de l’espace de stockage. Mais soit.
On pourra également s’agacer du fait que le passage via le mode Song implique toujours une interruption du flux sonore, ou bien qu’il soit toujours impossible d’enregistrer une automation sur les effets de la piste master, ce qui interdit dans les deux cas la création d’un morceau complet à la volée comme on peut le faire par exemple avec Ableton Live. Le système MPC maintient ici malheureusement toujours son retard sur ce sujet précis.
Un autre domaine où le système d’Akai est encore un peu à la traîne malgré les récents efforts, c’est au niveau du multi-layering d’instruments. Si la nouvelle fonction est vraiment bienvenue et pratique d’utilisation, elle manque encore de maturité. En effet, les layers ne se déclenchent de manière différenciée que via les splits de clavier. Il n’y a pas pour l’instant pas de déclenchement différencié selon la vélocité par exemple. Ce qui est d’autant plus regrettable que le multi-layering de samples sur la même machine fonctionne selon ce principe ! Bon, mais saluons tout de même l’arrivée de cette fonctionnalité particulièrement pratique !
Une chose qui me semble déjà un peu plus surprenante, c’est que contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, le clavier et les pads ne sont pas affectables à des pistes différentes, alors qu’un clavier externe branché à l’entrée USB ou MIDI du MPC Key peut quant à lui être affecté librement à toute autre piste différente. On peut imaginer que cela fera l’objet d’une mise à jour – on l’espère en tout cas ! – car en l’état c’est particulièrement frustrant !
Tout comme il est également très frustrant de constater qu’Akai n’a pas profité de la refonte de son browser pour y intégrer des tags et un rangement plus rationnel des éléments. Un non-choix d’autant plus incompréhensible qu’il y a quelques années, InMusic, la maison mère d’Akai, avait développé le logiciel VIP en réponse au Komplete Kontrol de Native Instruments qu’il dépassait même sur un certain nombre de points, par exemple la capacité de gérer des formats de plugins au-delà du NKS. Pour en revenir à l’interface qui nous est proposée ici, elle ne permet même pas pour l’instant de pré-écouter les sons et presets, ce que sait faire encore heureusement l’ancienne interface toujours incluse et vers laquelle on finit par se retourner dans le quotidien de la production. Car non, Akai, les jolis visuels ne font pas tout ! On espère juste que ce n’est qu’une question de temps avant qu’une mise à jour ne vienne corriger tout cela et amener la nouvelle interface à réaliser tout son potentiel, bien réel.
On regrettera également que le produit ne soit pas forcément très ouvert à la concurrence, puisqu’en dehors d’un mode MIDI assez traditionnel, aucun template n’est pour l’instant prévu pour piloter des DAWS autres que la DAW propriétaire, MPC 2. D’un autre côté, quand on propose un produit aussi complet, avec quasiment tous les éléments d’un home studio réunis en une seule machine, on peut leur pardonner cet oubli.
Enfin, nous avons vu qu’Akai dans le paragraphe précédent qu’Akai entretient un certain flou autour de ses licences de plugins, et qu’il n’est pas forcément simple de s’y retrouver. L’argument du gain de performance est effectivement valable dans la comparaison entre Fabric et Fabric XL. On peut être en revanche plus circonspect sur la pertinence de la présence de « Fabric Piano » et « “Fabric Electric Piano”, qui sont des versions identiques à un layer prêt de ce qui se trouve dans Fabric XL. Akai aurait-il cherché à multiplier les plugins de manière un peu artificielle pour rendre le MPC Key 61 encore plus attrayant ? Le fait est que la marque vend également ces plugins de manière indépendante sur son site, et à un tarif un peu conséquent : 249 € pour la Fabric collection complète, 149 € pour chacun des autres éléments séparés (Stage piano, Stage EP, Organ et Studio Strings). Offrons-nous une petite comparaison : prenons le Stage Piano et le Stage EP. Achetés ensemble, on obtient un bundle d’environ 300 €. Pour 50 € de plus, on a Keyscape de Spectrasonics qui propose une qualité sonore plus importante. Ne nous méprenons pas : les sonorités embarquées du MPC Key 61 ne sont pas mauvaises, beaucoup sont très correctes et certaines sont excellentes comme les pianos électriques et les orgues, mais d’autres ne sont pas au niveau de la concurrence “ordinateur”, par exemple les Studio Strings.
Alors vous me direz à juste titre qu’un Keyscape n’est pas installable sur le MPC Key, et ce pas uniquement pour des raisons de pure incompatibilité informatique qui pourrait être facilement levée d’un coup de programmation. Non, on touche là à un problème de fond. Les banques pour ordinateurs sont très gourmandes en ressources et notamment en espace de stockage, et les stations de production autonomes disposent souvent de disques durs et de RAM ridiculement restreints par rapport à ce que le moindre ordinateur dédié à la bureautique embarque aujourd’hui. Je pense que les fabricants de cesdites stations de travail autonomes vont devoir sérieusement repenser leur stratégie, au risque de perdre à terme la guerre de la qualité sonore.
Conclusion
Akai place la barre de ses ambitions très haut avec le MPC Key 61, c’est un fait. Il est tout à fait courageux de sa part de proposer un produit qui soit à la fois une MPC dans le sens traditionnel du terme, un clavier de scène, une workstation… on peut considérer que pour environ 2000 €, on a finalement tout ce qu’il faut pour composer, aussi bien selon la bonne vieille méthode à base de samples comme le monde de la MPC la connaît depuis la fin des années 80, que selon des méthodes plus traditionnelles à base d’improvisations clavieresques et d’enchaînements d’accords. Le fait est que les claviéristes comme moi auront du plaisir à utiliser cet instrument bien pensé sur de nombreux points, et que les habitués de la tradition MPC retrouveront également facilement leurs petits… jusqu’à y retrouver également les défauts, comme le mode Song toujours un peu contraignant, ou l’absence obstinée depuis toutes ces années d’un système cohérent de browsing et de tagging des presets. Une absence d’autant plus regrettable qu’Akai a lancé une refonte complète de son système de browsing avec une nouvelle interface graphique prometteuse, mais qui réussit le tour de force de ne pas intégrer de fonction de pré-écoute, pourtant présente sur l’ancienne interface heureusement toujours disponible. Comme on le voit, il y a encore du rififi chez Akai dans le domaine du browsing. Enfin, on pourra s’interroger quand même sur les choix qui sont faits, et ce au-delà d’Akai, chez les fabricants de workstation lorsqu’il s’agit de constituer la partie informatique hardware de leurs matériels. Aujourd’hui, 4 Go de Ram et 17 Go de stockage utilisables pour des systèmes basés essentiellement sur le sample, c’est potentiellement des limitations sur la qualité sonore dans les plugins proposés – limitations que l’on retrouve dans les versions “Fabric” de certains modules proposés ici. Ce qui est dommage, car d’autres sonorités – notamment celles non optimisées pour économiser les ressources, ou alors celles reposant sur de la synthèse pure, bénéficient d’une plutôt bonne, voire très bonne qualité, comme c’est par exemple le cas pour les pianos électriques et les orgues.
Mais en tout cas et malgré les défauts constatés, il s’agit pour Akai d’un premier pas plutôt réussi dans le monde des workstations !