Le revival 80’s qui irrigue toute la pop culture depuis de nombreuses années s’éternise. La musique n’échappe pas à ce phénomène, et un instrument en particulier tire son épingle du jeu : le synthétiseur. Pendant ce temps-là, les guitaristes tirent la gueule… Heureusement, il existe des solutions.
Qu’on se le dise, la guitare – particulièrement électrique – n’a plus le vent en poupe. La six cordes c’est has been, et il va falloir s’y faire. Chez Audiofanzine, nous savons qu’un deuil n’est jamais facile, et nous souhaitons vous accompagner dans ce délicat moment. Mieux : nous pouvons offrir une seconde vie à votre instrument fétiche ! N’enterrez donc pas tout de suite votre guitare dans un coin sombre du jardin, elle peut encore vous être utile. Comment ? En la travestissant en synthé bien sûr ! Dubitatifs ? Vous ne seriez pourtant pas les premiers à tenter l’expérience…
La genèse
Dès les années 60, des inventeurs s’attelèrent à reproduire les sonorités de différents claviers à l’aide d’une guitare. L’un des exemples les plus notables est certainement celui des Guitorgans, des guitares embarquant divers circuits électroniques et capables de produire un son d’orgue. Différents fabricants s’illustrèrent alors, dont Vox qui s’empara rapidement du concept et le popularisa, notamment avec son modèle V251.
En parallèle, d’autres aventuriers de l’audio préférèrent miser sur des boîtiers externes très proches des futurs multi-effets. Il suffisait de brancher sa guitare dans le boîtier, puis d’actionner différents boutons pour modifier le signal à la manière d’un synthétiseur. C’est la marque Maestro, pionnière de la fuzz, qui marqua alors les esprits avec son avant-gardiste USS-1 Universal Synthesizer System.
Si les années 60 marquent les prémisses des « synthétiseurs guitares », il faudra attendre les années 70 pour voir naître des machines encore plus ambitieuses. Ainsi, en 1977 sort l’Avatar d’ARP. ARP est un spécialiste du synthé extrêmement populaire, et souhaite s’attaquer à la guitare. Il sort donc un synthétiseur calqué sur l’Odyssey, une machine de légende, mais qui accepte le signal d’une guitare électrique. L’Avatar est considéré comme le premier véritable synthétiseur guitare produit à grande échelle, mais, malheureusement, il connaîtra un échec commercial retentissant au regard de l’investissement initial, et ce naufrage signera l’arrêt de mort du fabricant. Étonnamment, de nombreuses personnes s’emparèrent de l’appareil quelques années plus tard en tant que pur synthétiseur. Ironique, non ?
La même année que la sortie de l’ARP Avatar, Roland entre lui aussi dans la danse avec le GR-500. Le constructeur nippon a déjà la création de beaux synthés à son actif et l’ambition est la même : convertir les guitaristes. L’approche est cependant différente, puisque le GR-500 nécessite l’utilisation d’une guitare spécifique fabriquée par Ibanez pour Roland : la GS-500. Cette machine connait un succès d’estime et pousse les Japonais à persévérer.
En 79, le GR-300 sort. Il s’inscrit dans la continuité de son précedesseur, mais peut toutefois être piloté avec les pieds ! La formule s’affine donc petit à petit et, en 1985, le MIDI apparaît enfin avec le GR-700. Mais il reste un problème de taille : il faut encore utiliser une guitare Roland. Heureusement, un an plus tard, la révolution débute vraiment avec la sortie du GK-1, un capteur que l’on installe sur le corps d’une guitare et qui permet d’utiliser les synthétiseurs guitares de la marque avec n’importe quelle six cordes. En 1992, Roland entre enfin de plain-pied dans la modernité avec le synthétiseur guitare GR-1 et le capteur GK-2. Fini les énormes câbles, finis les problèmes de tracking, le nouveau capteur et la nature numérique du GR-1 permettent enfin d’offrir une expérience simplifiée et plus complète. Roland propose encore aujourd’hui des synthétiseurs guitare, et tous découlent du GR-1 et du GK-2.
Vous devriez à présent vous sentir plus à l’aise avec l’idée de transformer votre guitare en synthé. Après tout, vous ne feriez que perpétuer une tradition plus ancienne qu’on ne le croit ! Point d’hérésie ici, nous nous inscrivons bien dans une démarche saine et constructive… Nous pouvons donc passer à la seconde étape de ce dossier : les solutions actuellement disponibles pour remettre au goût du jour votre bonne vieille pelle.
Solution numéro 1 – Installer un capteur hexaphonique
L’héritage de Roland est tel que les capteurs hexaphoniques et leurs modules synthétiseurs sont encore à envisager en 2018. Le principe est simple, puisqu’il suffit de placer sur le corps de la guitare un petit appareil qui détectera l’activité de chacune des six cordes (il est donc possible de traiter indépendamment chacune des cordes). La plupart des systèmes sont faciles à mettre en oeuvre et ne nécessitent pas de modification du corps de la guitare.
Parmi les capteurs les plus performants du marché, l’on trouve le Roland GK-3, ainsi que le Fishman Triple Play. Ce dernier est particulièrement intéressant puisqu’il fonctionne sans-fil ! Il est notamment livré avec un receveur USB qui vous permettra de brancher l’appareil sur un ordinateur et d’ainsi exploiter les logiciels de votre choix pour créer des sonorités originales.
Les anciennes générations d’appareils nécessitaient souvent, en plus du synthétiseur pour générer de sons, un convertisseur MIDI pour transformer le signal détecté par le capteur en données MIDI (on en trouve notamment chez Roland, Axon, ou Sonuus). Aujourd’hui, de nombreuses machines réunissent un convertisseur et des sons. Il suffit donc d’acheter un capteur, d’acheter un pédalier synthétiseur guitare, et roulez jeunesse ! Encore une fois, Roland domine le marché avec ses appareils GR-55, VG-99, ou encore le Boss GP-10.
Enfin, notons qu’il existe des convertisseurs MIDI logiciel, comme JamOrigin MIDI Guitar. Il n’y a alors plus besoin de capteurs, puisqu’il suffit de brancher une guitare dans une interface audio, et le logiciel se chargera de convertir le signal en données MIDI, de façon à exploiter ces dernières dans le logiciel de votre choix (dont des synthétiseurs VST).
Solution numéro 2 – Echanger sa gratte contre une guitare MIDI/à modélisation
Sentant le vent tourner, vous vous êtes déjà débarrassé de votre guitare ? Avant de vendre votre âme au diable en achetant un clavier, vous devriez envisager une solution hybride : les guitares MIDI.
Ces instruments reprennent le format de la guitare électrique, mais sont avant tout destinés à produire des données MIDI et à piloter des synthétiseurs. Ces « guitares » sont apparues pour proposer un meilleur tracking. Il s’agit donc de contrôleurs faisant fi d’une lutherie traditionnelle, mais toutefois équipé de « cordes ». On trouve parfois de véritables cordes couplées à un capteur hexaphonique et des micros magnétiques, comme sur le Jamstik+ de Zivix, ou bien de « fausses » cordes uniquement destinées à la production de données MIDI. Dans cette dernière catégorie, l’on trouve notamment la You Rock Guitar YRG-1000 d’Inspired Instruments. Sa touche est sensible à la pression, et vous pourrez donc pratiquer du tapping ou des Hammer-on et Pull-off avec un excellent tracking, ce qui est rarement possible avec d’autres systèmes. Le vibrato de la You Rock Guitar permet même d’obtenir des changements de hauteur de notes assez radicaux.
Des guitares électriques plus classiques embarquant d’origine des capteurs existent aussi, souvent chargées avec des produits de chez RMC ou Roland. L’intérêt de ces « guitares à modélisation » est d’intégrer parfaitement les sonorités numériques au sein de l’instrument, que ce soit en termes de tracking ou de contrôles. On citera notamment la marque Godin avec ses instruments Synth Access, Fender avec sa VG Stratocaster conçue en collaboration avec Roland, Line 6 et sa Variax, ou encore la Starstream Vox. Attention toutefois, toutes ces guitares ne permettent pas de se brancher dans le synthé de son choix ou de produire des sons de clavier, puisque c’est souvent à des modélisations de guitare que l’on a affaire.
Solution numéro 3 – Acheter des pédales
Les technologies numériques ont énormément évolué dans les années 2000, et l’on peut aujourd’hui produire des sons polyphoniques avec un tracking excellent et une latence quasi nulle sans passer par des capteurs. De nombreuses pédales qu’il suffit de brancher dans un ampli ou un système son existent, et l’expressivité à la guitare est même mieux retranscrite, notamment les bends et autres vibratos. Toutefois, il n’est pas possible de piloter un synthétiseur externe, comme on peut le faire avec un capteur et un convertisseur MIDI. De plus, contrairement aux systèmes avec capteurs, il est impossible de traiter chaque corde différemment.
Une alternative à ces pédales numériques se développe aussi ces dernières années, notamment chez les fabricants « boutique ». Il s’agit la plupart de temps de machines analogiques à base d’échantillonnage, qui permettent de triturer le signal de la guitare et d’ainsi obtenir des sonorités proches d’un synthétiseur. Le son est souvent moins lisse, plus aléatoire et expérimental, et tout cela stimule indéniablement la créativité.
Nous vous avons concocté une petite sélection de 18 pédales qui nous paraissent incontournables, ou du moins intéressantes. En cliquant sur le nom d’un produit, vous découvrirez une vidéo de la bête en action. Si vous avez d’autres suggestions, n’hésitez pas à nous en faire part dans les forums.
Les classiques :
- Roland SY300
- EHX Superego+
- EHX Synth9 (test sur Audiofanzine)
- EHX Hog 2
- Digitech Dirty Robot
- Earthquaker Devices Arpanoid
- Earthquaker Devices Bit Commander
- Earthquaker Devices Data Corrupter
- Pigtronix Mothership 2
Les méconnues :
- Red Panda Particle
- Red Panda Tensor
- Hologram Infinite Jets Resynthesizer
- Old Blood Noise Endeavors Excess
- Glouglou Rendez-vous (test sur Audiofanzine)
- Red Witch Synthotron
- Montreal Assembly Count to Five
- Dwarfcraft Devices Grazer
- Alexander Pedals Syntax Error
Voilà, vous avez à présent toutes les clefs pour recycler comme il se doit votre guitare en synthétiseur. Et, qui sait, peut-être le rock reviendra-t-il à la mode. Vous pourrez alors fièrement ressortir votre pelle et vos plans shred ! À moins qu’il soit déjà trop tard pour la guitare…