Un peu par surprise, PreSonus avait choisi le Superbooth 2017 pour annoncer une nouvelle interface audio intégrant pour la première fois chez le constructeur américain une connectique Thunderbolt. Mieux vaut tard que jamais ?
Car il faut l’avouer, PreSonus arrive avec un peu de retard sur le créneau des interfaces audio Thunderbolt. Chez Audiofanzine, nous les avons vu débarquer pour la première fois en 2012 avec les Apollo d’Universal Audio et depuis pas mal de marques ont suivi : Resident Audio, Zoom, Apogee, MOTU, Focusrite, Antelope, RME… Le chemin est donc clairement balisé et les Louisianais arrivent sur un marché déjà bien rempli et occupé notamment par Focusrite avec sa Clarett 8Pre (et sa grande sœur la Clarett 8PreX) que nous avons testée précédemment, ou encore pour un budget un peu plus élevé, Apogee et sa Element 88 (que nous avons aussi testée) ou encore MOTU et sa 8M AVB (bon OK, celle-là on ne l’a pas testée, mais on a fait un article sur la 1248 !).
Au déballage, la Quantum fait plutôt bon effet, avec sa finition gris foncé, ses potards gris clair et mats et ses rangées de petites LED. À l’avant on retrouve les deux premières entrées qui peuvent opérer aux niveaux ligne, micro ou instrument, et deux petites flèches bleues permettant de choisir une entrée afin de régler via l’encodeur rotatif, son gain d’entrée quand on est en niveau micro, son niveau de référence (+4 dBu ou –10 dBv) quand on est en niveau ligne, ou encore d’activer l’alimentation fantôme de 48V.
Juste à droite est placé le micro de talkback avec le bouton permettant de l’activer, sachant qu’il est possible d’acheminer son signal où l’on veut et de régler aussi son niveau. C’est le genre de chose que l’on commence à voir de plus en plus sur les interfaces audio modernes et c’est pour notre plus grand plaisir, plus besoin de brancher un micro externe !
Les LED permettent quant à elles de visualiser les niveaux des entrées et des sorties avec une relativement bonne précision grâce à ses rangées de huit loupiotes. Le gros potard servira simplement à régler le niveau des sorties principales et deux boutons permettront de couper ou diminuer le signal (dim/mute) ou encore de passer en mono. Un dernier bouton A/B servira à changer de mix rapidement, passant du « Main Stream » (1/2) au « Headphones Stream » (5/6) en un clic. Il sera aussi possible de choisir d’autres sources via la partie logicielle. C’est le genre de chose que l’on ne voit pas souvent chez la concurrence et c’est une plutôt bonne idée. Enfin, un bouton permettra de mettre sous tension l’interface sans avoir à aller tâtonner derrière le rack, ce qui est plutôt cool. Enfin, sachez que vous pourrez brancher deux casques en totale indépendance, que ce soit en matière de volume que de sources, ce qui est aussi une très bonne nouvelle.
À l’arrière de l’interface, c’est très bien fourni avec les 6 combos XLR/Jack TRS restants, ce qui fait bien au final 8 préamplis, les 10 sorties lignes en Jack TRS (dont deux pour les enceintes de monitoring), les E/S S/PDIF en RCA, les E/S Wordclock en BNC, les 4 connecteurs TOSlink pour les E/S ADAT (16×16 en 48 kHz), les E/S MIDI en DIN 5 broches et enfin de quoi brancher l’alimentation qui demeure hélas, externe.
Passons maintenant à la partie logicielle.
Tout dans la STAN
PreSonus a été très clair sur le sujet dès le début : pas de DSP, pas de section de mixage intégrée, pas de traitement, on rentre directement dans la STAN et on gère presque tout dedans. Vous êtes donc prévenus, la partie logicielle de l’interface dénommée Universal Control est très simple et ne fera pas office de section de mixage intégrée. On pourra seulement régler les gains des préamplis, choisir les niveaux de référence des entrées ligne et quelques autres paramètres comme le champ d’action du potard de volume en façade, ou encore les fonctions mute/dim/mono et talkback.
On retrouvera aussi les sources des sorties casques, ou encore la source « B » du bouton « A/B », mais c’est à peu près tout. Le reste, c’est-à-dire le mixage et le routing, s’effectuera dans votre STAN, sachant que Studio One est forcément un peu privilégié (voir encadré). À noter que UC Surface propose aussi un analyseur en temps réel avec quelques paramètres pour toutes les entrées et les sorties de l’interface.
En pratique, qu’est-ce que cela implique ? L’interface ne propose pas de véritable mode « zéro latence » qui permet d’écouter le signal entrant dans l’interface sans passer par l’ordinateur, comme c’est généralement le cas sur les interfaces audio que nous testons. Est-ce que c’est gênant dans l’absolu ? Si vous utilisez une STAN, non. C’est même plutôt le contraire si vous utilisez Studio One, car vous aurez tout (mixage et routage ainsi que les playbacks) dans une seule fenêtre.
On se retrouve ici avec une philosophie très proche des Element d’Apogee et de leur intégration avec Logic Pro, même si ces dernières ne sont pas aussi radicales et proposent quand même une section de mixage interne via le logiciel Apogee Control. Le constructeur californien nous avait expliqué sa démarche lors du test de l’Element : vu les temps de latence des interfaces Thunderbolt, les DSP ne servent plus à grand-chose et vous pouvez très bien avoir des retours incluant des traitements natifs sans ressentir une quelconque gêne due à la latence.
Ici avec la Quantum c’est la même histoire et côté latence, il n’y a vraiment rien à redire, car nous sommes en présence d’une interface Thunderbolt et les résultats de ce côté-là sont tout bonnement excellents (1 ms aller-retour en 96 kHz !). Si vous avez en revanche l’habitude d’utiliser votre interface de manière autonome, à savoir sans STAN et juste avec la section de mixage interne afin de, par exemple, mélanger des sources en « live », vous risquez de trouver la solution de PreSonus peu moins pratique.
Benchmark
Avec la mémoire tampon réglée au minimum (32 échantillons), nous avons obtenu une latence de 0,42 ms en entrée et 0,58 ms en sortie (en 96 kHz). Ce sont d’excellents résultats, parmi les meilleurs. Merci le Thunderbolt !
Afin de tester l’interface, nous avons fait des benchmarks avec notre APx515 d’Audio Precision, et nous allons pouvoir comparer les résultats à ceux obtenus avec les interfaces précédemment testées.
Voici les résultats avec les niveaux ligne, en 96 kHz :
Avec ±0,087 dB de déviation, le résultat est plutôt honnête vis-à-vis du prix de l’interface, sachant que la pourtant plus onéreuse Element d’Apogee fait à peu près la même chose (±0,085 dB). En revanche, la Clarett 8Pre de Focusrite obtient un meilleur score de ±0,054 dB. On reste loin des ténors (Apollo 8 avec ±0,019 dB ou RME babyface Pro avec ±0,021 dB) mais en regard du prix, c’est bien.
La distorsion reste sous la barre des 0,002 % en dessous de 8 kHz et cela grimpe un peu au-dessus. Sur ce coup-là, l’Element d’Apogee fait mieux (moins de 0,001 %) et la Clarett fait moins bien (moins de 0,01 %). C’est donc un résultat dans la bonne moyenne.
Avec le gain réglé sur 34 dB on obtient une déviation de ±0,131 dB, ce qui est moins bon que la Clarett (qui est vraiment très bonne à ce niveau-là avec ±0,036 dB) et l’Element (±0,090 dB). Quand les préamplis sont activés, on note une légère atténuation dans le bas du spectre, ce qui fait augmenter le chiffre de la déviation. La distorsion augmente elle aussi, mais reste quasiment tout le temps sous la barre des 0,005 %. C’est encore une fois moins bien que l’Element (presque toujours moins de 0,001 %) et à peu près équivalent à la Clarett.
Les préamplis contrôlés numériquement offrent 60 dB de gain, ce qui est correct et on note un rapport signal/bruit de 103 dB avec le gain à 34 dB, ce qui est à peu près équivalent à l’Element (106 dB) et la Clarett (105 dB).
Pour conclure, la Clarett 8Pre a pour elle l’argument du prix et des performances à peu près équivalentes aux deux autres, même si par rapport à la Quantum, il manque deux prises ADAT TOSlink, une entrée Wordclock BNC, un micro de talkback et un deuxième port Thunderbolt pour chainer d’autres périphériques. L’Element est la plus chère, elle possède beaucoup moins de sorties ligne, aucune prise MIDI, aucun contrôle en façade et un seul port Thunderbolt mais possède la distorsion la plus faible et une chouette télécommande en option.
Pour finir, la Quantum est un peu dans un entre-deux niveau tarification, elle possède la connectique la plus fournie avec notamment deux ports Thunderbolt, des prises MIDI et 4 prises TOSlink ADAT, son bundle et son intégration avec Studio One 3 sont très sympathiques, son micro de talkback intégré est très pratique mais ses performances restent très légèrement de deçà des deux autres, même si ça se joue dans un mouchoir de poche.
Conclusion
La Quantum a clairement des arguments à faire valoir avec sa connectique très complète, son bundle bien fourni, son intégration complète avec Studio One 3, son micro de talkback intégré, ses deux ports Thunderbolt pour la chainer avec plein de choses, des contrôles en façade et une latence ultra faible. Ses défauts restent pour la plupart les mêmes que chez la concurrence (pas de câble Thunderbolt, pas de traitements internes) et seule l’absence de véritable section de mixage autonome et interne pourrait en freiner certains.