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Test du Timbre Wolf d'Akai - Quand le timbre se loupe…

3/10

Présenté au NAMM 2015, le Timbre Wolf intègre un synthé analogique polyphonique, un séquenceur quatre pistes et un clavier compact, à prix très agressif. Parlons donc du loup…

L’an­née dernière, Akai a marqué son retour dans le milieu des instru­ments analo­giques avec le Rhythm Wolf, une BAR à prix plan­cher. Ce fut une surprise, car on pensait le construc­teur repo­si­tionné sur les surfaces de contrôles (claviers/modules MIDI/USB), les systèmes de produc­tion audio et les MPC, plusieurs années après son inté­gra­tion par Numark (groupe inMu­sic). Au NAMM cette année, la marque a persisté et signé avec deux nouveaux produits analo­giques : le Tom Cat (un Rhythm Wolf décliné avec de nouveaux sons) et le Timbre Wolf, un combo synthé-séquen­ceur-clavier inté­grant 4 voix de la basse du Rhythm Wolf. Vu l’ac­cueil mitigé du Rhythm Wolf, dont le son singu­lier n’avait pas fait l’una­ni­mité, il était bien utile pour Akai de propo­ser une évolu­tion sonore de sa petite BAR (voir notre test du Tom Cat). Mais baser un produit unique­ment sur un son de basse assez peu convain­cant et surtout très limité, fût-il analo­gique, c’est carré­ment risqué. Prudem­ment donc, appro­chons-nous de la petite meute et allu­mons la bête…

La compa­gnie des loups

Comme pour le Rhythm Wolf et le Tom Cat, tout commence par une bonne surprise à l’ou­ver­ture du carton : le Timbre Wolf est bien plus grand, plus lourd et mieux construit que le prix ne le lais­se­rait suppo­ser. Il mesure 43 × 35 cm et affiche 4 kg sur la balance. La coque est en métal blanc séri­gra­phié bien costaud, avec 26 poten­tio­mètres à axe métal­lique vissés sur la façade. Oui, vissés, comme chez Moog et peu d’autres fabri­cants ! Les poten­tio­mètres ne bougent pas d’un poil et répondent parfai­te­ment aux touillages, c’est vrai­ment éton­nant à ce prix. Les 4 poten­tio­mètres Tune, bipo­laires, sont à détente centrale. Les 31 boutons, 5 sélec­teurs et l’en­co­deur cranté de tempo/valeur sont francs. Tout cela inspire confiance.

Akai Timbre Wolf

La prise en main est très facile, puisque la très large majo­rité des commandes est directe (tous les para­mètres de synthèse, la distor­sion, le volume), les quelques restantes étant acces­sibles avec la touche [Shift](#). On appelle/coupe/isole les voix et les pistes avec 4 boutons dédiés dans chaque partie. Juste en dessous, une rangée de 16 boutons à diode permet de program­mer les pas du séquen­ceur, sélec­tion­ner les séquences et appe­ler des fonc­tions secon­daires. Signa­lons aussi la présence de boutons bien pratiques de Tap tempo, liai­son de notes, contrôle de la vélo­cité, varia­tion de Pattern, Fill, trans­port du séquen­ceur…

Le clavier 2 octaves offre des touches de taille stan­dard et répond à la vélo­cité ; il est assez ferme du ressort, mais on s’y accom­mode faci­le­ment. Il est secondé par des sélec­teurs d’oc­tave, permet­tant une tessi­ture globale de 4 octaves. Une seule molette (à ressort de rappel assez mou) permet d’agir sur le pitch, tout le pitch, rien que le pitch… ajou­tons tout de suite que son action n’est pas mémo­ri­sable dans les séquences !

Toute la connec­tique est située à l’ar­rière : 6 sorties audio TRS compa­tibles TS (casque, ligne mono, 4 sorties mono sépa­rées pour chaque voix/piste) vissées sur le panneau, un trio MIDI, une paire d’en­trée/sortie Gate Trig au format mini-jack (nous y revien­drons), une prise USB (pour les données MIDI unique­ment), une borne pour alimen­ta­tion externe (four­nie, 12 V/2 A, de type bloc à l’ex­tré­mité) et un petit inter­rup­teur secteur pous­soir.

À quatre pattes

Akai Timbre Wolf

Le Timbre Wolf est une BAR analo­gique 4 pistes capable de déli­vrer 4 voix de synthèse sur une tessi­ture (limi­tée) de 4 octaves. Chaque voix reprend inté­gra­le­ment le moteur sonore de la partie synthé-basse du Rhythm Wolf. Akai recom­mande de lais­ser chauf­fer la bête quelques minutes après l’al­lu­mage pour lais­ser les circuits analo­giques se stabi­li­ser en tempé­ra­ture ; nous n’avons pas remarqué de problème parti­cu­lier, même à froid. Au pire, il existe une fonc­tion Auto­tune qui remet tout dans l’ordre en quelques secondes. Sur le Timbre Wolf, les oscil­la­teurs suivent parfai­te­ment le clavier, contrai­re­ment aux premiers modèles de Rhythm Wolf qui avaient un défaut de cali­brage, corrigé par la suite… Chaque voix propose les mêmes para­mètres de synthèse, très peu nombreux : volume, accor­dage fin de l’unique oscil­la­teur sur plus ou moins un demi-ton, choix de la forme d’onde (carré fixe/dent-de-scie), fréquence de coupure du filtre passe-bas 2 pôles, réso­nance, modu­la­tion (posi­tive) de l’en­ve­loppe sur le filtre et Decay sur le volume. Donc un seul oscil­la­teur, une plage d’ac­cor­dage trop limi­tée, pas de PWM, pas de géné­ra­teur de bruit, pas de suivi de clavier sur le filtre, une seule enve­loppe dépouillée sans accès aux para­mètres (Attaque fixe à 0, Sustain fixe à 100 %, Decay / Release communs), pas de LFO (ni même un vibrato)… Pire, on se rend compte à l’usage que la plage d’ac­tion des para­mètres est faible et que leur impact sur le son est limité. Niveau qualité sonore pure juste­ment, c’est aussi une grande décep­tion : oscil­la­teurs fades, filtre en manque de carac­tère dont la réso­nance pince du nez et écrase le reste de l’onde, enve­loppe mollas­son­ne… une disto analo­gique permet de donner un peu de peps et de grain au son, mais elle ne parvient pas à sauver la mise.

Hurle­ments

Le Timbre Wolf est équipé d’une distor­sion analo­gique située avant la sortie audio prin­ci­pale. Bapti­sée Howl, elle sature le signal tout en boos­tant les hautes fréquences. Quand on dépasse la mi-parcours, l’ef­fet devient granu­leux, dété­rio­rant profon­dé­ment le signal. Dommage qu’il n’y ait pas de compen­sa­tion de niveau en début de course (après, ça va mieux). Les sorties sépa­rées ne sont pas trai­tées par la distor­sion, ce qui permet de jongler sur certaines voix tout en conser­vant l’ef­fet sur la sortie prin­ci­pale, bien vu.

Les 4 voix du Timbre Wolf peuvent être jouées suivant 3 modes : solo (chaque voix est assi­gnée à une piste sépa­rée du séquen­ceur), unis­son (les 4 voix sont assi­gnées à la première piste et jouées ensemble) ou poly­pho­nique (les 4 voix sont dispo­nibles pour des accords et assi­gnées une par une en rota­tion à la première piste, donc en mono). Dans les modes où seule la première piste pilote le géné­ra­teur interne, les trois autres conti­nuent à émettre en MIDI. En mode poly­pho­nique, il faut aligner toutes les commandes si on veut avoir le même son sur les 4 voix. On se croi­rait revenu au temps du Four Voice Oberheim, le son en moins. On aurait préféré que la première voix puisse faire office d’édi­teur pour les autres, mais on reste en contrôle 100 % analo­gique. Nous avons aussi remarqué que lorsqu’on plaque un accord de trois notes et qu’on joue une quatrième note par-dessus (par exemple une basse sur une nappe), on redé­clenche les enve­loppes des trois notes tenues. Bizar­re…

Chaque voix peut être jouée suivant 3 types de prio­rité de note (haute, basse ou dernière jouée) et un mode legato (l’en­ve­loppe n’est pas redé­clen­chée). On ne peut pas mémo­ri­ser les réglages des para­mètres de synthèse. Pire, les commandes n’émettent pas de CC MIDI/Sysex et le Timbre Wolf est inca­pable de recon­naitre quoi que ce soit d’autre que le numéro de note, la vélo­cité et le pitch bend. Pas de mémoire, pas de CC, pas de Sysex, pas de dump MIDI, ça fait beau­coup !

A(u) poil…

Akai Timbre Wolf

Avec sa concep­tion « une fonc­tion un bouton », le Timbre Wolf est très intui­tif : on lance un motif, on enchaîne les varia­tions à la main ou avec le Fill, on passe de la program­ma­tion temps réel à la program­ma­tion par grille, on change de signa­ture tempo­relle, on modi­fie la longueur de motif, on coupe l’une des quatre pistes, on en isole une autre, on modi­fie les sons, tout ça sans inter­rompre le flux créa­tif. On n’a pas souvent recours au petit mode d’em­ploi papier fourni en 5 langues, dont le Français.

La mémoire interne renferme 16 motifs compo­sés chacun de 4 séquences de 16 pas : varia­tion A, varia­tion B, Fill A, Fill B. On peut lier les varia­tions A et B pour obte­nir un motif de 32 pas et un Fill de 32 pas. La fonc­tion Last Step permet de défi­nir à la volée la longueur globale du motif (de 1 à 16 ou de 17 à 32 pas). Elle s’ap­plique hélas aux 4 pistes simul­ta­né­ment, ce qui empêche quelques délires de bouclage. La touche [Fill](#) fonc­tionne comme sur un arran­geur, en restant sur la varia­tion en cours ou en bascu­lant vers la varia­tion alter­na­tive suivant la durée pendant laquelle elle est main­te­nue.

Chaque piste dispose de son propre canal MIDI : on le choi­sit pour la première (de 1 à 13), les autres suivant par incré­men­ta­tion. Chacune possède un mode Local (On/Off), ce qui permet de pilo­ter des machines externes en décon­nec­tant le géné­ra­teur interne, les notes séquen­cées étant émises en MIDI, nous l’avons dit. Les pistes sont hélas mono­diques, y compris en mode poly­pho­nique où il faut les program­mer une par une si on veut une séquence poly­pho­nique, ballot…

Akai Timbre Wolf

La machine fonc­tionne sans inter­rup­tion entre la lecture (avec enchaî­ne­ments), l’en­re­gis­tre­ment en temps réel (avec le clavier ou le MIDI) et l’en­re­gis­tre­ment par grille (avec la rangée de 16 touches de pas). La divi­sion tempo­relle des motifs varie de 1/4 à 1/32, avec les valeurs ternaires inter­mé­diaires. Pour chaque piste, on peut accen­tuer chaque pas suivant 3 niveaux de vélo­cité ; c’est en fait le géné­ra­teur sonore interne qui est limité à 3 niveaux de réponse, car le clavier émet bien sur 128 valeurs de dyna­mique, le séquen­ceur les enre­gistre toutes bien et l’émis­sion MIDI (via le clavier ou les séquences) se fait bien sur 128 valeurs ; en mode grille (avec les 16 touches), une touche [Velo­city](#) dédiée permet d’al­ter­ner les niveaux de vélo­cité souhai­tés ; une petite LED trico­lore indique alors la valeur de l’ac­cen­tua­tion : verte pour une vélo­cité basse, orange pour une vélo­cité moyenne et rouge pour une vélo­cité haute. Comme nous l’avons déjà dit, le niveau de vélo­cité affecte unique­ment le volume, c’est bien dommage. Il nous semblait d’ailleurs que sur le Rhythm Wolf, l’ac­cen­tua­tion modi­fiait aussi l’ac­tion de l’en­ve­loppe sur le filtre, mais pas là…

En meute

Il est possible d’in­ter­fa­cer le Timbre Wolf de diffé­rentes manières. Au plan MIDI/USB, seules les notes, le trans­port (Start / Stop / Conti­nue, Song Posi­tion Poin­ter) et l’hor­loge (interne, externe, USB) peuvent être trans­mis/reçus. Donc pas de CC MIDI ni Sysex au programme pour les para­mètres de synthèse (comme déjà dit, on reste dans le monde analo­gique pur). Il est toujours impos­sible de dumper les séquences, ce qui est un comble vu leur nombre limité. Pour s’in­ter­fa­cer avec le monde des modu­laires analo­giques, nous avons aussi les prises Gate Trig (entrée et sortie) permet­tant de faire avan­cer les pas du séquen­ceur un par un, par impul­sions de tension.

Lorsqu’on programme un pas, la durée de note est réduite à la longueur du pas, même pour les notes entrées au clavier. La fonc­tion Tie permet alors d’al­lon­ger la durée sur plusieurs pas consé­cu­tifs. Remarque au passage, soit notre timing de jeu est vrai­ment très mauvais (on le savait mauvais…), soit il y a un problème de scan sur l’auto-quan­ti­sa­tion, car on tombe très souvent à côté du pas visé ; du coup, il faut repo­si­tion­ner le pas au bon endroit avec la rangée de 16 touches… Un facteur Swing permet de déca­ler les notes (volon­tai­re­ment cette fois). Grosse décep­tion dont on avait un peu parlé, on ne peut pas enre­gis­trer le mouve­ment des poten­tio­mètres ni de la molette de Pitch bend. Au niveau global, on peut copier/coller/effa­cer un motif. Le sens de lecture se fait unique­ment à l’en­droit, il est impos­sible de program­mer un enchaî­ne­ment de plusieurs motifs (une Song) et on ne peut pas trans­po­ser les séquences au clavier en temps réel. Tout cela est très limi­tant…

T1 mono
00:0000:40
  • T1 mono 00:40
  • T2 multi A 00:59
  • T3 multi AB 01:00
  • T4 unis­son 01:15
  • T5 mono­poly 00:41
  • T6 poly 00:12


Crions au loup

Le Timbre Wolf nous laisse donc un goût amer dans les oreilles. Autant la qualité de construc­tion est excep­tion­nelle (surtout dans cette gamme de prix) et l’er­go­no­mie très réus­sie, autant les fonc­tion­na­li­tés sont limi­tées et les sono­ri­tés peu convain­cantes. La pauvreté des para­mètres de synthèse et leur manque d’ef­fi­ca­cité n’ar­rangent rien. Tout comme l’ab­sence de mémoires pour les programmes ou la trans­mis­sion de CC MIDI/Sysex hypo­thèquent une éven­tuelle utili­sa­tion en tant que contrô­leur MIDI/USB. On ajou­tera en bon point l’émis­sion de notes MIDI par le séquen­ceur pour ceux qui veulent pilo­ter des modules externes, mais c’est un peu réduc­teur comme utili­sa­tion, surtout qu’on reste en mono­die sur chaque piste et qu’on ne peut pas trans­po­ser en temps réel. Comme quoi la qualité de construc­tion ou l’er­go­no­mie ne suffisent pas ; un synthé-séquen­ceur, c’est d’abord des fonc­tion­na­li­tés mini­males et avant tout une ques­tion de son !

Télé­char­gez les extraits sonores (format FLAC)

  • Akai Timbre Wolf
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Notre avis : 3/10

  • Qualité de construction
  • Dimensions généreuses
  • Workflow bien pensé
  • Modes temps réel/grille de pas
  • Clavier dynamique à touches standard
  • Disto analogique intégrée
  • Sorties séparées pour chaque voix/piste
  • Emission des notes séquencées en MIDI
  • Connectique MIDI/USB/Trigger
  • Prix modéré
  • Son quelconque et peu varié
  • Insuffisance de paramètres de synthèse
  • Vélocité sur 3 niveaux et limitée au volume
  • Pistes monodiques sur le séquenceur
  • Nombre limité de séquences
  • Longueur des motifs trop faible
  • Absence de slide/autobend
  • Pas de mémorisation ni automation des paramètres
  • Pas d’émission/réception de CC MIDI/Sysex
  • Lecture des séquences uniquement à l’endroit
  • Pas de transposition des séquences au clavier
  • Pas de dump des mémoires de séquences
  • Pas de mode Song

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