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Test de l'OB-1 d'Oberheim - Le premier Jedi

9/10

Il y a bien longtemps, dans une galaxie lointaine, très lointaine… un petit synthé analogique au son énorme est mis sur orbite. Succédant au SEM, il fait un passage éclair dans la voûte étoilée de la synthèse analogique. Voyons pourquoi il est aujourd’hui aussi introuvable que recherché…

Test de l'OB-1 d'Oberheim : Le premier Jedi

Tom Oberheim, qui a récem­ment colla­boré avec Dave Smith sur l’OB-6, est un des pion­niers améri­cains de la synthèse analo­gique. On lui doit le SEM (Synthe­si­zer Expan­der Module), lancé en 1974 pour complé­ter le terri­toire sonore du Mini­moog. Il remplit parfai­te­ment son rôle avec son VCF de deux pôles colo­rant, capable de passer en continu entre les modes passe-bas / passe-bande / passe-haut. Fort de son succès, le module est ensuite décliné en plusieurs versions avec claviers : deux voix, quatre voix, huit voix, avec séquen­ceur et mémoires pour certains, desti­nés aux gars fortu­nés et costauds. En 1978, un an après la sortie du premier Star Wars (auquel il ne contri­bue pas pour les sons de R2D2, que l’on doit plutôt à un ARP 2600) et un an avant la sortie de l’OB-X, Oberheim produit une machine singu­lière : l’OB-1. Non seule­ment c’est l’un des tout premiers synthés analo­giques à mémoires (si ce n’est le premier), mais il béné­fi­cie en plus d’une concep­tion assez parti­cu­lière pour ses VCO et VCF, qui ne sera ensuite plus jamais recon­duite par la marque. Fabriqué en peu d’exem­plaires, il est diffi­cile d’en trou­ver quarante ans plus tard, qui plus est en pleine forme. Raison de plus pour lui consa­crer ces quelques lignes et une bonne place dans notre série de vintage tests…

Couleur Sith

OB 1 2tof 01.JPG

L’OB-1 porte un costume noir de tôle (pour la coque) et de bois (pour les flancs). Les pliages lui assurent une bonne résis­tance en façade, mais la plaque de dessous est fine et se déforme, malgré un usinage en diamant. Heureu­se­ment, rien n’y est fixé, c’est juste un capot ! Dans sa première mouture ici testée, la machine est inté­gra­le­ment noire ; décli­née ensuite en « version A », elle prend le look de l’OB-X en deve­nant noire et grise (voir enca­dré pour la liste des modi­fi­ca­tions). Ce qu’on appré­cie sur les machines de cette époque, au-delà du son, c’est l’er­go­no­mie exem­plaire : des commandes géné­reuses, bien espa­cées, logique­ment posi­tion­nées, faciles à mani­pu­ler. L’OB-1 est de cette trempe. La partie supé­rieure gauche est dédiée aux mémoires : touche WRITE, mode MANUAL et rangée de huit sélec­teurs de programmes. Juste en dessous, la section Perfor­mance permet de jouer en temps réel sur les sons : LFO, Keyboard (porta­mento, redé­clen­che­ment des enve­loppes, trans­po­si­tion sur +/- une octave, poten­tio­mètre continu de filtre) et Bend (avec un levier bien singu­lier à axe verti­cal et ressort de rappel, assi­gnable au pitch bend ou à la modu­la­tion). Au-dessus du clavier, on trouve les modules de synthèse avec, de gauche à droite : VCO1, VCO2, VCF, VCA, enve­loppes (deux) et volume (program­mable et global). Le clavier de trois octaves, statique, est de type Pratt-Read de première géné­ra­tion ; il est très agréable à jouer lorsque les bushings sont en bon état et lubri­fiés ; il convient aussi que le bus-bar soit bien entre­tenu pour que les contacts se fassent correc­te­ment avec les tiges métal­liques. En revanche, les touches longues sont fragiles et peuvent casser net sans crier gare…

La partie numé­rique de l’OB-1 est archaïque : faute de véri­table proces­seur et RAM, les sons sont stockés sur une carte utili­sant unique­ment des compo­sants logiques. Du coup, on n’a que huit mémoires, avec des valeurs figées une fois sauve­gar­dées. Il faut donc repar­tir du mode MANUAL pour faire de nouveaux sons. Heureu­se­ment, un brillant élec­tro­ni­cien états-unien a récem­ment mis au point une carte numé­rique de rempla­ce­ment qui améliore bien les choses (voir second enca­dré). Tous les para­mètres de synthèse sont mémo­ri­sés (VCO, VCF, VCA, enve­loppes) ; seuls la section Perfor­mance (LFO, levier, porta­mento, trans­po­si­tion, reset des enve­loppes) et l’ac­cor­dage fin des fréquences (deux VCO et VCF) ne le sont pas, ce qui est un peu bête pour ces trois dernières. En revanche, les para­mètres non mémo­ri­sables sont modi­fiables à tout moment. Oberheim a eu l’ex­cel­lente idée d’ajou­ter dans cette section un poten­tio­mètre supplé­men­taire sur la fréquence de coupure du filtre, qui du coup est modi­fiable en perma­nence (il s’ad­di­tionne à la valeur stockée via l’autre poten­tio­mètre de Cutoff). De même, on trouve un volume par programme (mémo­ri­sable mais pas modi­fiable) et un volume global (modi­fiable mais pas mémo­ri­sable). La mémo­ri­sa­tion d’un son vaut son pesant de caca­huètes : on appuie sur le bouton capa­ci­tif WRITE et tout en le main­te­nant, on appuie sur le bouton capa­ci­tif de mémoire souhaité : bref, c’est notre corps qui fait contact !

La façade arrière porte l’en­semble de la connec­tique au format jack 6,35 mm : sorties audio mono haute et basse impé­dances, entrée CV vers le VCA, entrée CV vers le VCF, entrée audio vers le VCF et quatre entrées/sorties CV/Gate. Sans oublier l’in­ter­face proprié­taire pour l’op­tion K7, un boitier externe permet­tant à l’OB-1 de s’in­ter­fa­cer avec un enre­gis­treur de K7 pour sauve­gar­der ses quelques mémoires. Boitier aussi obso­lète qu’in­trou­vable ! L’ali­men­ta­tion est interne (transfo de 117 V modi­fiable en 235 V), avec un cordon secteur captif…

Droïde sonore

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Le mode d’em­ploi de l’OB-1 tota­lise six pages de texte dacty­lo­gra­phié, sans le moindre schéma à l’ho­ri­zon… Certes, la machine n’a pas vrai­ment besoin d’un manuel utili­sa­teur compte tenu de son ergo­no­mie « une fonc­tion un bouton » (outre la méthode de sauve­garde origi­nale que nous avons décrite aupa­ra­vant) ; l’in­té­rêt du mode d’em­ploi est plutôt histo­rique, puisqu’on y trouve le nom des huit sons d’usine livrés à l’ori­gine avec la machine, juste pour la petite anec­dote : Bass, Harmo­nica, Flute, Zipper, Talk Box Guitar, String, Horn, Steel Drum… comme quoi à l’époque, l’idée était quand même bien d’imi­ter d’autres instru­ments quand on utili­sait un synthé ! Nous n’avons hélas pas retrouvé ces banques origi­nelles, que ce soit sur bande, en MP3, en photo ou en sché­ma… avis à la popu­la­tion !

Nous avons d’em­blée été agréa­ble­ment surpris par la poly­va­lence de l’OB-1. Bien sûr, les basses sont à l’hon­neur, soit bien grasses avec le filtre ouvert, soit arron­dies en jouant sur l’en­ve­loppe ultra rapide ou la forte réso­nance. Ajou­ter les sub-oscil­la­teurs crée un bas de spectre surpuis­sant, le studio vibre sous l’ef­fet de notre 7060B. L’OB-1 fait partie des synthés les plus puis­sants dans les graves qu’il nous a été donné d’en­tendre !

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Assez vite, on remplit les mémoires de décli­nai­sons de sons de basse, en jouant tantôt sur le filtre, tantôt sur les formes d’onde variables des VCO. En enclen­chant la synchro des VCO, on passe vite d’un extrême à l’autre : de mons­trueux balayages qui tombent de cinq octaves en modu­lant la fréquence du VCO2 par l’en­ve­loppe de filtre, aux solos émou­vants de deux ondes en dent de scie à peine filtrées synchro­ni­sées avec un léger vibrato sur le VCO1. L’OB-1 sait donc faire preuve de finesse.

On le découvre aussi à l’aise sur les sons de lead percu­tants avec des ondes carrées que sur des voix humaines solo, grâce aux ondes variables et à la réso­nance marquée du filtre. Cette dernière permet d’ailleurs de créer bon nombre de percus­sions analo­giques et effets spéciaux, en faisant si besoin appel au géné­ra­teur de bruit inté­gré. Une bonne claque sonore !

 

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  • OB 1 1audio 01 Bass1 00:47
  • OB 1 1audio 02 Bass2 00:34
  • OB 1 1audio 03 Bass3 00:32
  • OB 1 1audio 04 Bass4 00:15
  • OB 1 1audio 05 Human Voice 00:20
  • OB 1 1audio 06 Hard Sync 00:29
  • OB 1 1audio 06 Soft Sync 01:01
  • OB 1 1audio 08 Square Lead 00:16
  • OB 1 1audio 09 Kicks 00:18
  • OB 1 1audio 10 Noise 4 2 00:47

Cheva­lier Jedi

OB 1 2tof 11.JPG

L’OB-1 est un synthé analo­gique mono­dique à compo­sants traver­sants tous discrets dans sa version d’ori­gine (voir enca­dré ci-avant pour les évolu­tions). Il est composé d’une chaîne VCO-VCF-VCA qui sort des sentiers battus. Commençons par les deux VCO. Iden­tiques, ils disposent de deux posi­tions d’ondes conti­nuel­le­ment variables (à la discré­ti­sa­tion numé­rique près) grâce à un poten­tio­mètre WAVE­FORM : la première posi­tion permet de passer du triangle à la dent de scie, la seconde permet de passer de l’onde carrée à l’im­pul­sion. La varia­tion de forme d’onde est une desti­na­tion de modu­la­tion, nous y revien­drons. Le pitch de chaque oscil­la­teur peut être accordé par demi-ton sur cinq octaves ou fine­ment, avec pour ce dernier cas un petit poten­tio­mètre dont la posi­tion n’est pas mémo­ri­sée. Chaque VCO offre un Sub-VCO carré au son énorme, placé à l’oc­tave infé­rieure. Le mixage des deux VCO et deux Sub-VCO n’est pas des plus souples, puisqu’on ne trouve que trois posi­tions : à fond, à –3 dB ou éteint. Idem pour le géné­ra­teur de bruit blanc, indé­pen­dant des VCO. Une vieille habi­tude chez Oberheim qui aura la vie dure ! À fond, les oscil­la­teurs saturent le filtre de manière très musi­cale. Les VCO peuvent inter­agir dans l’au­dio, avec synchro ET cross modu­la­tion (pour des sons métal­liques), chouette !

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Les sources audio internes (et externes, le cas échéant) sont ensuite envoyées au filtre. Il est très diffé­rent du filtre multi­mode de deux pôles SEM si carac­té­ris­tique du son des premiers Oberheim. On a ici affaire à un filtre passe-bas commu­table sur deux ou quatre pôles. Il est doté d’une réso­nance hyper oscil­lante, qui passe en auto-oscil­la­tion dès que le poten­tio­mètre fran­chit midi ! Rien à voir avec la colo­ra­tion douce du SEM. La fréquence de coupure est modu­lable par un LFO, une enve­loppe dédiée et le suivi de clavier (0 ou 100%). Les modu­la­tions sont hélas unique­ment posi­tives.

Mani­pu­ler le poten­tio­mètre de Cutoff crée des effets de pas impor­tants. Ce n’est pas un problème, puisqu’Obe­rheim a prévu un second poten­tio­mètre de Cutoff dans la section Perfor­mance, cette fois parfai­te­ment lisse (car non program­mable, donc non quan­ti­fié). Signa­lons au passage que l’on peut accor­der fine­ment la fréquence de coupure du filtre, grâce à un petit poten­tio­mètre (non mémo­risé). Au stade final, le son passe par un VCA, avec poten­tio­mètre de volume program­mable et enve­loppe dédiée. Un inter­rup­teur permet de lais­ser le VCA ouvert en perma­nence, pour les amateurs de drones sans fin…

Sabre laser

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L’OB-1 est très bien conçu pour l’époque au plan des modu­la­tions. La section Perfor­mance comprend des modu­la­tions non mémo­ri­sables mais modi­fiables à chaque instant. On commence par l’unique LFO, capable de produire des ondes sinus, carrée ou S&H. On peut en régler le délai et la vitesse (infra audio). Il peut modu­ler un certain nombre de desti­na­tions : pitch ou forme d’onde des VCO, coupure du VCF, mais pas le VCA. Le levier de Pitch bend peut se trans­for­mer en molette de modu­la­tion pour créer du vibrato. Elle peut affec­ter les VCO ou seule­ment le VCO 2 (utile pour les synchro).

L’OB-1 dispose aussi de deux enve­loppes ADSR hyper rapides (d’au­tant plus dans l’OB-1 première géné­ra­tion où elles sont discrètes). Elles permettent d’ob­te­nir des sons aussi claquants que sur un Pro-One. La première enve­loppe est non seule­ment assi­gnable au filtre, mais égale­ment au VCO 2, où elle peut modu­ler le pitch ou la forme d’onde ; c’est parti­cu­liè­re­ment bien pensé et inédit sur un synthé compact de cette époque ! La seconde est assi­gnée au VCA. On peut forcer le retour à zéro des enve­loppes au relâ­che­ment de note via l’in­ter­rup­teur RESET non program­mable, situé en section Perfor­mance. Termi­nons le chapitre des modu­la­tions par le porta­mento, égale­ment placé en section Perfor­mance (donc modi­fiable mais non program­mable), dont on peut régler le temps. Rappe­lons par la même occa­sion qu’il existe deux entrées CV vers le VCF et le VCA pour utili­ser des sources de modu­la­tion externes (pédales, séquen­ceurs, modules analo­giques…)

Endor

Nous voici arri­vés à la fin de ce vintage test, qui nous a permis de faire un petit tour d’OB-1, l’un des premiers synthés analo­giques mono­diques entiè­re­ment program­mables. Il béné­fi­cie d’une concep­tion très parti­cu­lière, avec des oscil­la­teurs à ondes conti­nues et un filtre passe-bas discret de 2–4 pôles, spéci­fi­ci­tés jamais recon­duites ensuite par la marque à la paire de croches. C’est aussi un synthé construit entiè­re­ment en compo­sants analo­giques discrets, du moins dans sa première mouture (les enve­loppes utili­sant par la suite des CEM). Sa qualité sonore est excep­tion­nelle, grâce notam­ment à ses deux Sub-VCO, son VCF ultra réso­nant et ses enve­loppes hyper rapides. Les limi­ta­tions de la tech­no­lo­gie numé­rique de l’époque ont été comblées récem­ment grâce à la mise au point d’une nouvelle carte mémoire par un tech­ni­cien bien inspiré. Tout ceci contri­bue à rendre ce petit teigneux encore plus sympa­thique, avec sa belle variété de timbres analo­giques pur jus seven­ties, que l’on peut de surcroit rappe­ler quand bon nous semble.

Télé­char­gez les extraits sonores (format FLAC)

  • OB 1 2tof 01.JPG
  • OB 1 2tof 02.JPG
  • OB 1 2tof 03.JPG
  • OB 1 2tof 12.JPG
  • OB 1 2tof 10.JPG
  • OB 1 2tof 09.JPG
  • OB 1 2tof 08.JPG
  • OB 1 2tof 11.JPG
  • OB 1 2tof 07.JPG
  • OB 1 2tof 06.JPG
  • OB 1 2tof 05.JPG
  • OB 1 2tof 04.JPG
  • OB 1 2tof 13 (acienne carte).JPG
  • OB 1 2tof 14 (nouvelle carte).JPG

 

Notre avis : 9/10

  • Son bien gras et chaud des 70’s
  • Grande variété de timbres
  • Electronique analogique discrète
  • Ondes continues sur les VCO
  • Deux Sub-VCO au son énorme
  • Interactions des VCO
  • VCF ultra résonant de 2/4 pôles
  • Modulations bien pensées
  • Enveloppes hyper rapides
  • Nouvelle carte numérique Tauntek
  • Résolution limitée (escaliers)
  • Pas de filtre passe-haut
  • Certains paramètres non mémorisables
  • Gestion mémoire (modèle de base)

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