Avec le Seqtrak, Yamaha se relance sur le marché de la groovebox, via une proposition au design osé et quelques liens de parenté avec les produits Teenage Engineering. Regardons donc ensemble si cela peut nous intéresser en 2024 !
20 ans après la série des SU ou la RM1X, Yamaha sort le Seqtrak, sa nouvelle groovebox, avec un design curieux qui ne laisse pas indifférent, rectangulaire de 42 fois 16 fois 9 cm, et disponible en deux coloris (noir ou blanc + orange). Ce secteur semble aujourd’hui assez dynamique, avec des propositions très différentes les unes des autres sur la forme comme sur la fonction. Tantôt elles sont utilisables comme hubs pour des sets plus complexes, parfois axées sur la portabilité, plus ou moins solides sur la partie synthèse ou la partie sampling, construites pour être polyvalentes ou bien dédiées à des types de sonorités particulières, totalement standalone ou très dépendantes de contrôleurs et d’applications de pilotage, avec des pads élaborés ou le strict minimum pour enclencher des notes de musique, centrées sur la performance ou les séquences… Difficile en effet de ne trouver que des points communs qui sautent aux yeux entre un Novation Circuit Tracks, un Roland MC-101, un Elektron Syntakt, un Sonicware Liven Lo-Fi 12, un Akai Force ou un Teenage Engineering OP-Z.
Pour ce nouveau produit de la firme aux 3 diapasons, sorti en ce début d’année, l’inspiration se trouverait plutôt du côté du OP-Z, qui est sur une même gamme de prix en plus de partager quelques points communs, au niveau de l’apparence ou de la connectivité avec une application dédiée. Toutefois, s’arrêter là-dessus serait faire abstraction des spécificités du Seqtrak, comme la gamme d’effets conséquente ou l’usage des technologies Yamaha AWM2 (Advanced Wave Memory 2) et FM embarquées – qui rappellent surtout le Yamaha SY77 ou le MOTIF avec leurs petites puces génératrices de son (utilisées aussi dans des consoles de salon ou des interfaces audio des années 90 à 2000). Voyons voir de quoi il retourne ici !
Yama Heart, Yama Soul
La nouvelle groovebox rectangulaire de Yamaha a des caractéristiques assez impressionnantes. Elle dispose de onze pistes avec des moteurs sonores différents, d’un séquenceur à pas pour contrôler tout ça, de deux modes Song (avec les scènes qui se jouent à la suite ou en boucle), du resampling live de la sortie audio, d’une quantité importante d’effets différents qui peuvent être cumulés en série et en send sur chaque piste et sur le master, avec des encodeurs en masse (17), des pads (24), des boutons (20), un switch, trois contrôleurs tactiles, de LEDs, avec une connectivité USB (audio mais seulement sur le bus stéréo / MIDI / contrôle), WiFi et Bluetooth, un micro et un haut-parleurs intégrés, une batterie avec entre 3 et 5 heures d’autonomie en jeu, le tout pour un tarif autour des 380 euros.
Le Seqtrak possède également une sortie ligne / casque minijack avec une bonne réserve de gain, une entrée audio minijack, le port USB-C pour le recharger, le connecter à un ordi ou un smartphone / tablette et même à un contrôleur de type Arturia Keystep, le sampling des trois (!) entrées audio disponibles, et une prise minijack MIDI non conventionnelle. La machine est livrée avec un bidule qui permet d’en faire une entrée et une sortie MIDI au format DIN qu’on essaiera de ne pas perdre, ainsi qu’avec de la documentation papier et un câble USB-C.
Le tout peut interagir avec une application pour Windows, mac OS, et même iOS et Android (toutes les versions sont très proches) qui propose un tutoriel, le backup des projets, l’envoi de contenu additionnel pour remplir l’espace mémoire (plus de 500 Mo et des espaces pour un millier de patchs de synthés et de sons différents), des pense-bêtes avec tous les raccourcis à connaître (on y reviendra) ou la liste des présets d’effets, une fonction appelée « Visualizer » (on y reviendra aussi), et bien sûr un navigateur (le GUI Editor) qui donne accès à toutes les commandes du Seqtrak, aux différents onglets, avec même des fonctionnalités supplémentaires ! Inutile de dire qu’il y a ici de quoi faire.
Ce qui frappe donc en premier lieu avec cette machine, c’est une certaine générosité dans le contenu associé et dans les spécifications. On regrettera que celle-ci ne soit pas livrée avec un bundle logiciel comme d’autres grooveboxs, mais on est impressionné par les possibilités offertes avec 11 pistes (sept de sons de BAR, deux de synthétiseur AWM2 avec 128 voix de polyphonie, une pour le synthétiseur DX avec 8 voix, et une pour le sampling ou les sons importés également), les différents effets et leur combinaison, ou par la quantité de présets inclus ainsi que leur variété. Dans l’application, un rapide coup d’œil à l’onglet permettant de rajouter des présets montre la présence d’une trentaine de packs classés par style ou par artiste, avec pour chacun une combinaison de sons de drums, de sons pour le sampleur, et de patchs de synthèse (quoi qu’en nombre moins important que les samples purs et durs pour le moment). On imagine aussi que ce nombre de packs va grandir au fil du temps avec le suivi du Seqtrak.
De plus, certains packs possèdent un projet d’exemple que l’on peut charger dans un des 8 slots disponibles, dont 3 sont pris par défaut par les projets de démonstration d’usine de Yamaha. Même si la fonctionnalité de sauvegarde des projets est relativement fluide, on regrettera toutefois de ne pas avoir accès à beaucoup plus de place pour les projets, d’autant que l’espace mémoire disponible ne semble pas être un problème ici. Peut-être une amélioration à venir dans une future mise à jour ? Un bon point pour l’application d’ailleurs, c’est que tous les patchs et projets accessibles se chargent en un ou deux clics, et disposent systématiquement d’une fonction de pré-écoute bienvenue et ludique.
Au passage, je tiens à signaler que j’ai rencontré quelques petits problèmes avec l’application. Tout fonctionne correctement sur mon Mac mini en M2 avec le câble USB-C inclus, par contre j’ai eu des soucis de synchronisation entre l’appli et la machine sur Windows avec divers câbles USB-C vers USB-A, ainsi que sur iOS en Bluetooth. D’après mes recherches sur les forums et les infos que j’ai obtenues via support, ces problèmes ne sont pas toujours reproductibles, et peuvent venir d’un défaut sur mon exemplaire. On vous tiendra au courant là-dessus.
Vitesse maximale
Après avoir chargé un certain nombre de patchs et de samples, on découvre que les moteurs du Seqtrak couvrent un grand nombre de territoires sonores, contrairement à d’autres groovebox de cette gamme de prix. En plus des possibilités offertes par des fichiers audio, les moteurs AWM2 et DX et leurs patchs associés fournissent une certaine polyvalence remarquable. J’ai pu ainsi m’amuser avec des sons typiquement FM (Lately Bass like, pianos électroniques, cloches, basses agressives, pads etc.) et d’autres que l’on voit surtout sur les workstations (pianos acoustiques, orgues, cordes, cuivres, vents, instruments du monde, percussions chromatiques etc.) ou dans des synthétiseurs généralistes grâce au moteur AWM2.
Pour la synthèse FM, tout le moteur est disponible dans l’application, mais une partie seulement sur la groovebox. Les paramètres accessibles directement sur le hardware peuvent d’ailleurs être automatisés dans le step sequencer, par exemple en assignant une valeur spécifique du paramètre sur un pas. Par contre, les possibilités de sound design sur le moteur AWM2 sont assez limitées, probablement dépendantes de formes d’ondes proposées dans les patchs et non accessibles pour l’utilisateur final, et il faudra parfois ajouter des effets supplémentaires pour modeler un son.
Néanmoins, il reste possible quelque soit la piste de jouer sur un ensemble de paramètres en commun, tel que l’attaque, le relâchement, le pitch pour les sons (ce qui permet même via l’automation de jouer d’un sample en chromatique dans le séquenceur à pas !), volume et panning en global ou par pas, les effets additionnels, et même un LFO réglable qui peut avoir plusieurs cibles ! De plus, les synthés possèdent des modes accords et arpégiateur bienvenus pour le jeu en live ou pour enregistrer des séquences. De quoi nous faire regretter quand même qu’il n’y ait pas encore plus de pistes de synthétiseurs ! Précisons enfin que le moteur sampleur permet comme son nom l’indique d’enregistrer des sons de l’extérieur, ou la sortie du master bus produit par la machine en live, qu’il permet de jouer de 7 sons différents en même temps, et que les réglages d’édition des sons enregistrés sont limités mais pertinents.
- Crying for a silk song02:01
- FM in the house01:16
- Démos Bass Sounds01:33
- Démos Pads Sounds01:01
Une machine qui fait son petit effet
Parlons maintenant un peu plus des effets embarqués dans le Seqtrak. La groovebox de Yamaha propose non seulement un nombre d’algorithmes d’effets distincts assez impressionnant pour une machine de ce type (pratiquement une centaine !), ceux-ci sont en plus utilisables un peu partout sur le chemin du signal et sur les différentes pistes. En effet (!), chaque piste possède un filtre qui peut être de trois types (passe-bas, passe-bande ou passe-haut), un égaliseur deux bandes paramétriques, le LFO qui peut être assigné à un certain nombre de cibles, deux volumes de send vers une réverb et un délai globaux dont on peut changer le type et les paramètres, et un effet parmi la grosse liste, classés par catégories (filtres, délai, réverb, distorsion, compresseur classique, ducker pour compresseur sidechain modulé par la piste de kick, modulations, et autres).
De plus, le bus master a également deux volumes supplémentaires de send, un égaliseur 5 bandes, un compresseur, encore un master FX, et deux effets dédiés à la performance. Ces trois derniers effets ont d’ailleurs un réglage « live », dont le type est customisable, qui est assigné sur le hardware aux 3 zones sensibles au toucher. Ce sont par défaut une réverb, un filtre passe-haut et le beat repeater, qui sont très amusants à manipuler pendant la lecture des séquences pour faire des transitions. Cela fait donc beaucoup d’effets qui sont activés en même temps, on saluera l’optimisation du software et le dimensionnement du hardware qui ont rendu cela possible.
Parmi les effets disponibles, on notera la présence d’une modélisation de filtre Transistor Ladder Minimoog, de pratiquement une dizaine de types de délais différents, de distorsions numériques de type bitcrusher ou wavefolder, de nombreux simulateurs d’amplificateurs, de compresseurs avec signatures variées comme le multibande pour faire du OTT ou de la modélisation de DBX 376 avec la technologie VCM (Virtual Circuitry Modeling) de Yamaha, toutes les modulations possibles et imaginables du chorus à la Leslie, un pitch shifter, des enhancers, des filtres de formants, un tape stop, des effets agissant sur la stéréo… Petit moment d’étonnement aussi en tombant sur un algorithme qui ne paye pas de mine, intitulé « multi FX ». Celui-ci propose sur 3 pages de paramètres à lui tout seul un simulateur d’amplificateur, d’enceinte, une wah, une modulation, un compresseur, un phaser, tout au même endroit ! On ne se privera pas d’explorer les possibilités soniques décuplées offertes par cette démesure de moyens, au même titre que les moteurs de génération de son eux-mêmes, et on pourrait même imaginer se servir à l’occasion du Seqtrak comme d’un multieffets via son entrée audio.
On aurait aimé toutefois qu’il existe une documentation pour tous ces effets, pour comprendre précisément les différences entre certains algorithmes qui semblent proches. De plus, la navigation sur le Seqtrak hardware ne permet pas exactement de naviguer d’un effet à l’autre sur chaque piste ou dans chaque onglet, mais plutôt de présets en présets pré-enregistrés dans la machine, classés par catégories, et qui couvrent une partie seulement des possibilités offertes par le moteur en termes de choix d’algorithmes et de paramètres. Ces présets sont éditables mais non remplaçables dans leur contenu, ce qui ne permet pas une utilisation d’un son particulier dans un autre projet sans passer par l’application. Pire, j’ai trouvé personnellement que certains présets sont carrément ratés. Par exemple, tous ceux présents dans la catégorie « ducker » n’utilisent pas l’algorithme de compression le plus intéressant à mes yeux, et ont des réglages trop doux pour créer l’effet « sidechain compresseur » si recherché en musique électronique… C’est d’autant plus dommage que les algorithmes disponibles peuvent faire ça très bien, et qu’il existe même un compresseur sidechain multibandes très utile pour des sonorités plus modernes (on peut entendre ici le rendu de certains projets fournis avec la machine qui utilisent pas mal d’effets).
- Démo – D. Dan01:38
- Démo – Demo Project 101:36
- Démo – Demo Project 202:00
- Démo – Hard Trance Techno 101:36
- Démo – They Call It Acid 101:26
Séquences unitaires
Finissons à présent notre tour d’horizon des fonctionnalités et de l’application. On apprécie énormément le confort d’utilisation de celle-ci, que ce soit avec toutes les informations proposées, comme les pense-bêtes de commandes accessibles constamment, le tutoriel dynamique qui affiche des informations en lien avec ce que vous êtes en train de faire, et bien sûr le GUI Editor qui permet d’interagir avec toutes les commandes. La navigation sur chaque fonctionnalité se fait très simplement via les onglets Master, Drums, Synths / Sampler, Perform et Settings. Sans surprises les trois premiers onglets donnent surtout accès à des paramètres de sound design dont nous avons déjà parlé, ainsi qu’aux informations enregistrées avec le step sequencer ou en direct à l’enregistrement + quantification, avec régulièrement quelques informations qui s’affichent qui concernent les commandes assignées actuellement sur le hardware.
On a également accès à des paramètres globaux dans le dernier onglet tels que le swing, le BPM, la gamme préférée, le nombre de patterns différents accessibles par piste (trois ou six), l’activation de groupes de drum chokes (pour que jouer un son sur une piste coupe la lecture des sons sur une autre), l’activation d’un noise-gate sur l’entrée, des réglages MIDI etc. Et l’onglet Perform permet en plus de jouer avec les niveaux de volume, de sends, l’état solo ou mute de chaque piste, les patterns actuellement joués, et les deux modes song (mais pas le panning bizarrement).
Profitons-en pour parler enfin de la partie séquenceur à pas ! Chaque piste dispose donc de 3 ou 6 patterns, qui possèdent par défaut 16 pas mais qui peuvent en contenir jusqu’à 128 (y compris toutes les valeurs intermédiaires pour créer des séquences rigolotes). Sur le hardware, en comportement par défaut du Seqtrak, chaque encodeur labellisé avec le nom d’une piste possède trois LEDs sur son côté gauche, qui indiquent le pattern en cours de lecture, avec une couleur différente pour les patterns 1–3 et les patterns 4–6. En tournant cet encodeur, on change de pattern instantanément. Pour un mode de fonctionnement de type « quantisation » qui doit jouer un certain nombre de pas avant de changer de pattern, on peut rester appuyé sur l’encodeur avant de le tourner, et choisir un temps de « quantisation » en nombre de pas ou en nombre de mesures. Il est intéressant d’avoir ici les deux modes de fonctionnement.
Sur chaque pas, on peut décider de rentrer une information ou non (trig sur les drums, une note ou plusieurs sur les synthés, un son ou plusieurs sur la piste sampleur). Chaque pas a ensuite une information également de décalage ou micro timing, de longueur de note sur les synthés et le sampleur, d’un nombre de sous-pas à déclencher avec une temporalité réglable, de l’automation de certains des paramètres de design, et même une information de probabilité de déclenchement dans le cas seulement des sons de drums malheureusement. L’application donne d’ailleurs accès à toutes ces informations et à un piano roll pour l’édition des patterns sur les pistes polyphoniques. Notons que pour le moment le mode de fonctionnement des encodeurs peut être problématique pour entrer sur le hardware l’information de la longueur d’une note tenue, qui oblige à effectuer un nombre très important de tours pour arriver à plusieurs pas de longueur.
Au passage, les deux modes Song permettent de capturer un état particulier du Seqtrak dans une scène parmi 16 possibles, à savoir les index en cours de patterns de chaque piste mais aussi les états solo et mute. Les différents modes songs et diverses options supplémentaires permettent de décider si chaque scène sera jouée en boucle, ou si elles doivent s’enchainer, avec la lecture qui s’arrête ou qui peut recommencer à la fin de la dernière scène.
Terminons notre petit tour de l’application en vous parlant d’une bizarrerie, à savoir le « visualizer » qui permet de créer des vidéos avec l’enregistrement live de l’audio, grâce au moteur Unity, et qui permet ensuite de sauvegarder le résultat au format mp4 ! L’outil semble être un délire des développeurs, et rappelle furieusement une fonctionnalité équivalente présente dans l’application du Teenage Engineering OP-Z. Elle pousse quand même l’idée assez loin car il y a une vingtaine de templates différents, les objets 3d disponibles sont hautement personnalisables et synchronisés avec le contenu de chaque pattern, il est même possible de déplacer la caméra pendant la performance de différentes manières, de modifier les lumières ou de rajouter des effets post-processing… Assez étrange mais fun !
Dans le mille pour les JOs ?
Maintenant que nous avons parlé de la navigation fluide dans les fonctionnalités proposée par l’application, qu’en est-il du workflow sur le hardware seul ? Et bien, je dois vous avouer que j’ai n’ai pas été particulièrement emballé par cette partie du produit. Pour commencer, la machine est légère, voire même trop, et ses côtés sont recouverts de tous petits boutons qui permettent d’accéder aux différentes pages d’édition. En fonction de ce que l’on fait, l’accès peut être peu praticable, notamment lorsqu’il s’agit de lancer la lecture ou de la couper. Le tout donne une impression de solidité relative, que ce soit au niveau des boutons, des encodeurs qui peuvent être pressés, ou des pads assez « plocs plocs » de type clavier d’ordinateur, que j’ai personnellement assez peu envie d’utiliser pour jouer avec l’absence de vélocité, un feedback sous les doigts assez particulier, et leur légèreté. Il est pourtant possible de les transformer en « clavier » de jeu chromatique, ou d’utiliser les sept (le huitième sert de bouton d’enregistrement) sur la droite avec les notes de la gamme en cours sur un seul octave ou comme banque d’accords, avec le bouton qui sert à changer l’octave en cours. Je les ai trouvés fonctionnels toutefois dans le cadre de l’édition de notes du step sequencer, chaque nouveau pas entré étant assigné à la dernière note ou au dernier accord que l’on a joué.
De plus, l’ergonomie est assez rude, et on comprend l’intérêt d’avoir l’application sous la main pour utiliser certaines fonctionnalités avancées mais aussi pour se familiariser avec la philosophie de la machine. La plupart des raccourcis pour accéder à certaines pages nécessitent d’utiliser un seul bouton avec une étiquette présente sur la façade, mais parfois il faudra appuyer sur un bouton et sur un encodeur, et se souvenir de ce que cela fait car c’est indiqué uniquement dans l’application ou sur le manuel ! Pire, l’accès à certaines fonctions peut se faire d’une manière différente selon qu’on soit sur les pistes de drums ou sur les synthés. Je ne comprends pas trop non plus l’intérêt d’avoir mis des « … » sur les étiquettes des FXs au lieu de choses plus parlantes… Avec un peu d’habitude, et d’effort de mémorisation, on accède aux fonctionnalités les plus importantes facilement heureusement, mais je trouve dommage d’avoir mis autant de boutons et de contrôles pour proposer ensuite des fonctionnalités accessibles de cette manière.
Pendant l’écriture de ce test et la production des démos audio, j’ai dû me servir beaucoup du manuel et de l’application pour me souvenir de tout. Il m’est arrivé aussi régulièrement de ne plus me souvenir de l’onglet dans lequel j’étais ou de chercher un peu trop longtemps à modifier une fonction. Pourtant certaines choses font sens heureusement, notamment l’édition des patterns, après un peu de temps de prise en main. On apprécie beaucoup aussi la présence d’une fonction d’annulation, qui est presque obligatoire ici étant donné que toutes les modifications apportées sont sauvegardées automatiquement dans le projet. En tout cas après quelques sessions application et manuel sous les yeux, il me semble tout à fait possible de jouer avec tout seul, mais il faudra s’accrocher les premières heures et peut-être utiliser des antisèches !
Une fois vos scènes fabriquées, les sons + effets choisis (là aussi plutôt avec l’application pour avoir les noms des patchs et samples sous les yeux), on peut imaginer s’amuser avec la machine seule sans problème, même si il est difficile de résister à l’ajout d’un contrôleur MIDI, reconnaissable d’ailleurs branché directement sur le port USB, d’autant que le Seqtrak ferait également un très bon rompleur. Les interactions avec les 3 surfaces sensibles au toucher sont amusantes, notamment avec tous les effets disponibles, et le fait que l’effet se coupe sur les deux dernières lorsqu’on retire le contact des doigts. On regrettera toutefois que rentrer dans le mode Song stoppe la lecture audio, ce qui empêche de faire des allers-retours entre le choix des scènes et l’onglet de mixage sur le hardware (ce n’est pas le cas en passant par l’application). J’espère que ce mode de fonctionnement un peu étrange fera l’objet également d’une correction via une mise à jour car cela peut limiter l’utilisation de la machine sans ordinateur ou smartphone à proximité…
Enfin, je dois vous faire part de difficultés que je rencontre personnellement quand il s’agit d’enregistrer la sortie audio du Seqtrak, qui concernent d’ailleurs une majeure partie des groovebox. Même si la machine propose un séquenceur à pas, des effets master et des outils de « performance », dans le cadre de la production d’une démo audio ou d’un morceau il est aisé de comprendre que ce n’est pas toujours idéal de simplement enregistrer la sortie. La démo qui va suivre aurait pu être streamée en direct, mais j’ai préféré le faire en découpé, et organiser les sections par piste directement dans le STAN, pour mieux gérer le mixage en plus de l’arrangement. La sortie audio proposée via USB ne donne accès qu’à la sortie du bus master, et s’utilise facilement sur macOS mais un peu moins d’ailleurs sur Windows où il faudra jongler avec les drivers audio de votre interface audio classique et avec ASIO4ALL (là aussi ce n’est pas spécifique à Yamaha, à ma connaissance la solution idéale étant seulement présente sur les machines Elektron avec l’Overbridge).
Conclusion
Avant de conclure, je voudrais glisser un petit mot à propos du concurrent direct du Seqtrak qu’est le OP-Z. Il n’aura pas échappé aux gens qui le connaissent et qui auront lu mon test qu’il y a entre les deux propositions des points communs assez importants, et ce jusque dans le design de l’application (on pense notamment au module Motion qui permet également de faire de la vidéo et à l’usage d’Unity). Toutefois, les différences sont suffisamment importantes pour parler plutôt de variation sur le même concept et justifier l’existence de chaque produit avec des cibles et des usages différents. En effet, chaque machine a ses points forts (la polyphonie et les effets notamment pour le Seqtrak, le nombre de moteurs de synthèse, le looper ou la Control Track chez TE) et des spécificités sur les sonorités accessibles et le workflow. Si vous êtes intéressés par une groovebox dans cette gamme de prix, je vous conseillerai donc de vous intéresser à tout ça de près avant de faire votre choix, et je trouve que c’est une bonne chose pour Yamaha d’avoir pu proposer quelque chose d’intéressant et d’alternatif à l’existant.
En tout cas nous sommes très contents de les voir se relancer sur le marché de la groovebox après toutes ces années avec ce Seqtrak. Il possède un design et une philosophie qui déclencheront des réactions très variées. Parmi les choix de fabrication réalisés par la marque, il y en a qui sont d’une générosité démesurée (les packs de son, le contenu de l’application avec la vidéo, la polyphonie etc.), et d’autres qui créent de la frustration notamment au niveau du workflow ou des contrôles physiques. Personnellement, je préfère avoir à retenir quelques raccourcis plutôt que de faire des tonnes de menu diving pour manipuler une machine, mais avec tous ces boutons et ces étiquettes je me suis dit qu’il aurait pu être possible d’aller plus loin pour les gens avec des gros doigts et qui n’ont pas envie de se désarticuler pour accéder à une fonction en live, ou peur de faire s’envoler la machine à cause d’une manipulation trop brutale.
J’ai eu aussi parfois la mauvaise impression que l’application essayait un peu trop de compenser des problèmes d’ergonomie ou de retours plutôt qu’à augmenter les capacités de la machine, par le côté pédagogique ou la clarté qu’elle apporte, ou encore avec la quantité assez importante de paramètres et d’informations supplémentaires accessibles uniquement de la sorte. De plus, l’utilisation d’un contrôleur MIDI externe apporte un énorme plus dont il est difficile de se priver. Cela rend la machine moins intéressante pour une utilisation standalone.
Toutefois, il est étonnant de voir tout ce que l’on arrive à caler dans aussi peu d’espace, avec la polyvalence globale des moteurs de synthèse, à l’aise autant avec des sons de type synthétiques que acoustiques, le nombre de voix simultanées, les accès mémoires pour les samples, la quantité d’effets, le nombre de présets que l’on peut enregistrer en même temps sur la machine pour y accéder à n’importe quel moment etc. Enfin, des mises à jour ont déjà été réalisées pour rendre la machine plus agréable à utiliser, notamment avec l’ajout du mode Scène ou du séquenceur à pas pour les synthétiseurs. On peut donc facilement imaginer que le Seqtrak sera un produit encore plus intéressant dans quelques mois, et que Yamaha continuera à sortir des nouveaux produits on l’espère dans cette direction.