Avec le Seqtrak, Yamaha se relance sur le marché de la groovebox, via une proposition au design osé et quelques liens de parenté avec les produits Teenage Engineering. Regardons donc ensemble si cela peut nous intéresser en 2024 !
![Test de Yamaha Seqtrak : Sur la piste du nouveau bolide de Yamaha](https://img.audiofanzine.com/img/fr/article/cover/5571.png?fm=pjpg&w=704&h=396&fit=fill&s=fd608af936e6870d4a9ce5100b311e85)
20 ans après la série des SU ou la RM1X, Yamaha sort le Seqtrak, sa nouvelle groovebox, avec un design curieux qui ne laisse pas indifférent, rectangulaire de 42 fois 16 fois 9 cm, et disponible en deux coloris (noir ou blanc + orange). Ce secteur semble aujourd’hui assez dynamique, avec des propositions très différentes les unes des autres sur la forme comme sur la fonction. Tantôt elles sont utilisables comme hubs pour des sets plus complexes, parfois axées sur la portabilité, plus ou moins solides sur la partie synthèse ou la partie sampling, construites pour être polyvalentes ou bien dédiées à des types de sonorités particulières, totalement standalone ou très dépendantes de contrôleurs et d’applications de pilotage, avec des pads élaborés ou le strict minimum pour enclencher des notes de musique, centrées sur la performance ou les séquences… Difficile en effet de ne trouver que des points communs qui sautent aux yeux entre un Novation Circuit Tracks, un Roland MC-101, un Elektron Syntakt, un Sonicware Liven Lo-Fi 12, un Akai Force ou un Teenage Engineering OP-Z.
Yama Heart, Yama Soul
La nouvelle groovebox rectangulaire de Yamaha a des caractéristiques assez impressionnantes. Elle dispose de onze pistes avec des moteurs sonores différents, d’un séquenceur à pas pour contrôler tout ça, de deux modes Song (avec les scènes qui se jouent à la suite ou en boucle), du resampling live de la sortie audio, d’une quantité importante d’effets différents qui peuvent être cumulés en série et en send sur chaque piste et sur le master, avec des encodeurs en masse (17), des pads (24), des boutons (20), un switch, trois contrôleurs tactiles, de LEDs, avec une connectivité USB (audio mais seulement sur le bus stéréo / MIDI / contrôle), WiFi et Bluetooth, un micro et un haut-parleurs intégrés, une batterie avec entre 3 et 5 heures d’autonomie en jeu, le tout pour un tarif autour des 380 euros.
Au passage, je tiens à signaler que j’ai rencontré quelques petits problèmes avec l’application. Tout fonctionne correctement sur mon Mac mini en M2 avec le câble USB-C inclus, par contre j’ai eu des soucis de synchronisation entre l’appli et la machine sur Windows avec divers câbles USB-C vers USB-A, ainsi que sur iOS en Bluetooth. D’après mes recherches sur les forums et les infos que j’ai obtenues via support, ces problèmes ne sont pas toujours reproductibles, et peuvent venir d’un défaut sur mon exemplaire. On vous tiendra au courant là-dessus.
Vitesse maximale
Après avoir chargé un certain nombre de patchs et de samples, on découvre que les moteurs du Seqtrak couvrent un grand nombre de territoires sonores, contrairement à d’autres groovebox de cette gamme de prix. En plus des possibilités offertes par des fichiers audio, les moteurs AWM2 et DX et leurs patchs associés fournissent une certaine polyvalence remarquable. J’ai pu ainsi m’amuser avec des sons typiquement FM (Lately Bass like, pianos électroniques, cloches, basses agressives, pads etc.) et d’autres que l’on voit surtout sur les workstations (pianos acoustiques, orgues, cordes, cuivres, vents, instruments du monde, percussions chromatiques etc.) ou dans des synthétiseurs généralistes grâce au moteur AWM2.
Pour la synthèse FM, tout le moteur est disponible dans l’application, mais une partie seulement sur la groovebox. Les paramètres accessibles directement sur le hardware peuvent d’ailleurs être automatisés dans le step sequencer, par exemple en assignant une valeur spécifique du paramètre sur un pas. Par contre, les possibilités de sound design sur le moteur AWM2 sont assez limitées, probablement dépendantes de formes d’ondes proposées dans les patchs et non accessibles pour l’utilisateur final, et il faudra parfois ajouter des effets supplémentaires pour modeler un son.
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- Crying for a silk song02:01
- FM in the house01:16
- Démos Bass Sounds01:33
- Démos Pads Sounds01:01
Une machine qui fait son petit effet
Parlons maintenant un peu plus des effets embarqués dans le Seqtrak. La groovebox de Yamaha propose non seulement un nombre d’algorithmes d’effets distincts assez impressionnant pour une machine de ce type (pratiquement une centaine !), ceux-ci sont en plus utilisables un peu partout sur le chemin du signal et sur les différentes pistes. En effet (!), chaque piste possède un filtre qui peut être de trois types (passe-bas, passe-bande ou passe-haut), un égaliseur deux bandes paramétriques, le LFO qui peut être assigné à un certain nombre de cibles, deux volumes de send vers une réverb et un délai globaux dont on peut changer le type et les paramètres, et un effet parmi la grosse liste, classés par catégories (filtres, délai, réverb, distorsion, compresseur classique, ducker pour compresseur sidechain modulé par la piste de kick, modulations, et autres).
De plus, le bus master a également deux volumes supplémentaires de send, un égaliseur 5 bandes, un compresseur, encore un master FX, et deux effets dédiés à la performance. Ces trois derniers effets ont d’ailleurs un réglage « live », dont le type est customisable, qui est assigné sur le hardware aux 3 zones sensibles au toucher. Ce sont par défaut une réverb, un filtre passe-haut et le beat repeater, qui sont très amusants à manipuler pendant la lecture des séquences pour faire des transitions. Cela fait donc beaucoup d’effets qui sont activés en même temps, on saluera l’optimisation du software et le dimensionnement du hardware qui ont rendu cela possible.
![](https://img.audiofanzine.com/images/u/audio/505697.png)
- Démo – D. Dan01:38
- Démo – Demo Project 101:36
- Démo – Demo Project 202:00
- Démo – Hard Trance Techno 101:36
- Démo – They Call It Acid 101:26
Séquences unitaires
Finissons à présent notre tour d’horizon des fonctionnalités et de l’application. On apprécie énormément le confort d’utilisation de celle-ci, que ce soit avec toutes les informations proposées, comme les pense-bêtes de commandes accessibles constamment, le tutoriel dynamique qui affiche des informations en lien avec ce que vous êtes en train de faire, et bien sûr le GUI Editor qui permet d’interagir avec toutes les commandes. La navigation sur chaque fonctionnalité se fait très simplement via les onglets Master, Drums, Synths / Sampler, Perform et Settings. Sans surprises les trois premiers onglets donnent surtout accès à des paramètres de sound design dont nous avons déjà parlé, ainsi qu’aux informations enregistrées avec le step sequencer ou en direct à l’enregistrement + quantification, avec régulièrement quelques informations qui s’affichent qui concernent les commandes assignées actuellement sur le hardware.
Sur chaque pas, on peut décider de rentrer une information ou non (trig sur les drums, une note ou plusieurs sur les synthés, un son ou plusieurs sur la piste sampleur). Chaque pas a ensuite une information également de décalage ou micro timing, de longueur de note sur les synthés et le sampleur, d’un nombre de sous-pas à déclencher avec une temporalité réglable, de l’automation de certains des paramètres de design, et même une information de probabilité de déclenchement dans le cas seulement des sons de drums malheureusement. L’application donne d’ailleurs accès à toutes ces informations et à un piano roll pour l’édition des patterns sur les pistes polyphoniques. Notons que pour le moment le mode de fonctionnement des encodeurs peut être problématique pour entrer sur le hardware l’information de la longueur d’une note tenue, qui oblige à effectuer un nombre très important de tours pour arriver à plusieurs pas de longueur.
Dans le mille pour les JOs ?
Maintenant que nous avons parlé de la navigation fluide dans les fonctionnalités proposée par l’application, qu’en est-il du workflow sur le hardware seul ? Et bien, je dois vous avouer que j’ai n’ai pas été particulièrement emballé par cette partie du produit. Pour commencer, la machine est légère, voire même trop, et ses côtés sont recouverts de tous petits boutons qui permettent d’accéder aux différentes pages d’édition. En fonction de ce que l’on fait, l’accès peut être peu praticable, notamment lorsqu’il s’agit de lancer la lecture ou de la couper. Le tout donne une impression de solidité relative, que ce soit au niveau des boutons, des encodeurs qui peuvent être pressés, ou des pads assez « plocs plocs » de type clavier d’ordinateur, que j’ai personnellement assez peu envie d’utiliser pour jouer avec l’absence de vélocité, un feedback sous les doigts assez particulier, et leur légèreté. Il est pourtant possible de les transformer en « clavier » de jeu chromatique, ou d’utiliser les sept (le huitième sert de bouton d’enregistrement) sur la droite avec les notes de la gamme en cours sur un seul octave ou comme banque d’accords, avec le bouton qui sert à changer l’octave en cours. Je les ai trouvés fonctionnels toutefois dans le cadre de l’édition de notes du step sequencer, chaque nouveau pas entré étant assigné à la dernière note ou au dernier accord que l’on a joué.
Pendant l’écriture de ce test et la production des démos audio, j’ai dû me servir beaucoup du manuel et de l’application pour me souvenir de tout. Il m’est arrivé aussi régulièrement de ne plus me souvenir de l’onglet dans lequel j’étais ou de chercher un peu trop longtemps à modifier une fonction. Pourtant certaines choses font sens heureusement, notamment l’édition des patterns, après un peu de temps de prise en main. On apprécie beaucoup aussi la présence d’une fonction d’annulation, qui est presque obligatoire ici étant donné que toutes les modifications apportées sont sauvegardées automatiquement dans le projet. En tout cas après quelques sessions application et manuel sous les yeux, il me semble tout à fait possible de jouer avec tout seul, mais il faudra s’accrocher les premières heures et peut-être utiliser des antisèches !
Une fois vos scènes fabriquées, les sons + effets choisis (là aussi plutôt avec l’application pour avoir les noms des patchs et samples sous les yeux), on peut imaginer s’amuser avec la machine seule sans problème, même si il est difficile de résister à l’ajout d’un contrôleur MIDI, reconnaissable d’ailleurs branché directement sur le port USB, d’autant que le Seqtrak ferait également un très bon rompleur. Les interactions avec les 3 surfaces sensibles au toucher sont amusantes, notamment avec tous les effets disponibles, et le fait que l’effet se coupe sur les deux dernières lorsqu’on retire le contact des doigts. On regrettera toutefois que rentrer dans le mode Song stoppe la lecture audio, ce qui empêche de faire des allers-retours entre le choix des scènes et l’onglet de mixage sur le hardware (ce n’est pas le cas en passant par l’application). J’espère que ce mode de fonctionnement un peu étrange fera l’objet également d’une correction via une mise à jour car cela peut limiter l’utilisation de la machine sans ordinateur ou smartphone à proximité…
Enfin, je dois vous faire part de difficultés que je rencontre personnellement quand il s’agit d’enregistrer la sortie audio du Seqtrak, qui concernent d’ailleurs une majeure partie des groovebox. Même si la machine propose un séquenceur à pas, des effets master et des outils de « performance », dans le cadre de la production d’une démo audio ou d’un morceau il est aisé de comprendre que ce n’est pas toujours idéal de simplement enregistrer la sortie. La démo qui va suivre aurait pu être streamée en direct, mais j’ai préféré le faire en découpé, et organiser les sections par piste directement dans le STAN, pour mieux gérer le mixage en plus de l’arrangement. La sortie audio proposée via USB ne donne accès qu’à la sortie du bus master, et s’utilise facilement sur macOS mais un peu moins d’ailleurs sur Windows où il faudra jongler avec les drivers audio de votre interface audio classique et avec ASIO4ALL (là aussi ce n’est pas spécifique à Yamaha, à ma connaissance la solution idéale étant seulement présente sur les machines Elektron avec l’Overbridge).
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Conclusion
Avant de conclure, je voudrais glisser un petit mot à propos du concurrent direct du Seqtrak qu’est le OP-Z. Il n’aura pas échappé aux gens qui le connaissent et qui auront lu mon test qu’il y a entre les deux propositions des points communs assez importants, et ce jusque dans le design de l’application (on pense notamment au module Motion qui permet également de faire de la vidéo et à l’usage d’Unity). Toutefois, les différences sont suffisamment importantes pour parler plutôt de variation sur le même concept et justifier l’existence de chaque produit avec des cibles et des usages différents. En effet, chaque machine a ses points forts (la polyphonie et les effets notamment pour le Seqtrak, le nombre de moteurs de synthèse, le looper ou la Control Track chez TE) et des spécificités sur les sonorités accessibles et le workflow. Si vous êtes intéressés par une groovebox dans cette gamme de prix, je vous conseillerai donc de vous intéresser à tout ça de près avant de faire votre choix, et je trouve que c’est une bonne chose pour Yamaha d’avoir pu proposer quelque chose d’intéressant et d’alternatif à l’existant.
J’ai eu aussi parfois la mauvaise impression que l’application essayait un peu trop de compenser des problèmes d’ergonomie ou de retours plutôt qu’à augmenter les capacités de la machine, par le côté pédagogique ou la clarté qu’elle apporte, ou encore avec la quantité assez importante de paramètres et d’informations supplémentaires accessibles uniquement de la sorte. De plus, l’utilisation d’un contrôleur MIDI externe apporte un énorme plus dont il est difficile de se priver. Cela rend la machine moins intéressante pour une utilisation standalone.
Toutefois, il est étonnant de voir tout ce que l’on arrive à caler dans aussi peu d’espace, avec la polyvalence globale des moteurs de synthèse, à l’aise autant avec des sons de type synthétiques que acoustiques, le nombre de voix simultanées, les accès mémoires pour les samples, la quantité d’effets, le nombre de présets que l’on peut enregistrer en même temps sur la machine pour y accéder à n’importe quel moment etc. Enfin, des mises à jour ont déjà été réalisées pour rendre la machine plus agréable à utiliser, notamment avec l’ajout du mode Scène ou du séquenceur à pas pour les synthétiseurs. On peut donc facilement imaginer que le Seqtrak sera un produit encore plus intéressant dans quelques mois, et que Yamaha continuera à sortir des nouveaux produits on l’espère dans cette direction.