Sortie en février 2023, elle arrive enfin sur notre établi : la voici, la nouvelle iD24, l'enfant du milieu d'Audient, mais certainement pas cadet de nos soucis puisque nous lui consacrons toute notre attention pour ce test aux petits oignons.
Commençons par une explication : le titre de cet article n’a apparemment aucun sens, j’en suis conscient.
C’est parce que la référence est si abstruse, si volontairement obscure, qu’on ne fait pas le lien entre l’assassinat de Jules César (je pars sur l’idée démocratique que cette partie de la référence n’a échappé à personne) et la nouvelle interface d’Audient. Mais voyez-vous, chez AF, le jeu de mots n’est pas seulement apprécié, il est de rigueur. Et on a déjà fait deux jeux de mots sur « idée », donc de ce côté-ci la source est un peu tarie. Alors, je me suis rappelé des Ides de Mars (vous comprenez, Ides = iD), les fêtes romaines célébrant le dieu de la guerre et là, merci Wikipédia, j’ai découvert qu’elles avaient été le théâtre de l’assassinat de Jules. Voilà, vous l’avez la réf, comme disent les jeunes (ou comme ils devaient le dire il y a 1 an — si c’est arrivé aux oreilles d’un vieux comme moi, c’est que c’est déjà passé de mode).
Annoncée en février 2023, cette nouvelle interface d’Audient se situe donc, comme le chapô de cet article le sous-entendait, entre ses deux modèles bien connus l’iD14 et l’iD44, toutes deux désormais disponibles en version mkII.
Présentation
La présentation pourrait être très courte : l’iD24 présente les mêmes technologies embarquées que l’iD14 ou 44 dans leur version mkII, mais en fait varier le nombre. Le design est similaire à celui de l’iD14 (petits boutons ronds à sensibilité « soft-touch »). En gros, on pourrait s’arrêter là. Mais on ne va pas…
- 2 préamplis de micro Audient Console de classe A
- 2 entrées audio micro/ligne sur combo XLR/jack (avec filtre coupe-bas, pad –10 dB et alimentation 48 V)
- Une entrée instrument JFET en façade, sur jack 6,35 mm (qui correspond à la tranche 1, en façade)
- 2 paires d’entrées/sorties Insert (1 par tranche) sur jack 6,35 mm
- Une entrée et sortie numérique (ADAT ou S/PDIF)
- 1 voie casque, avec 2 sorties montée en parallèle (choix dans le format — jack 6,35 et/ou mini-jack). Les deux sorties se voient donc assigner le même signal, on le regrette un peu.
- 4 sorties de niveau ligne sur jack 6,35 mm, pour vos enceintes de monitoring
- Une sortie World Clock
L’interface est autoalimentée sur un port USB-C.
Sur la face supérieure, de part et d’autre de l’encodeur cliquable qui permet de régler le niveau de sortie, on trouve différents boutons de contrôle d’option. Sous l’encodeur, trois boutons : CUT (qui coupe le signal, c’est pratique), DIM (qui l’atténue selon une valeur paramétrable dans l’environnement numérique), et iD, bouton servant à assigner différentes fonctions au « clic » de l’encodeur.
Sous le contrôle, le gain de la sortie casque, trois boutons de fonction (F1, 2 et 3) sont paramétrables depuis l’environnement logiciel, et permettent de commander, au choix, le phase, la sortie stéréo/mono, la commutation vers la sortie monitoring alternative, ou le talkback (très bonne option pour une interface de cette taille). Entre autres !
Logiciel
En ce qui concerne le software de mix qui accompagne l’iD24, on reste toujours sur le modèle présenté dans les tests précédents. On peut faire apparaître les entrées analogiques, les E/S numériques et les pistes de STAN au choix, et commuter leurs habituelles options Solo, Mute, Tranches stéréo, Phase, etc. Le contrôleur donne également accès à, en plus du mix principal, et d’un mix secondaire, à 2 mix « Cue ». Sur le côté droit du logiciel de mix, on trouve les différentes fonctions assignables aux boutons F1, 2 et 3.
Une seconde fenêtre de paramétrage permet d’assigner les différents canaux aux différentes sorties analogiques (enceintes ou casque) ou numériques.
De plus, dans ce second environnement, on peut aussi régler la monophonie (sommation ou sélection de voie droite ou gauche) et un niveau de gain différents (-6 à +6 dB) pour la paire d’enceintes alternatives. Par ailleurs, les entrées et sorties optiques peuvent fonctionner en ADAT ou S/PDIF au choix.
Le bouton iD, quant à lui, permet d’utiliser l’encodeur à la place de la souris, directement dans l’environnement de votre logiciel séquenceur (cela s’appelle le scrollcontrol, cf. les points forts), pour créer manuellement, en direct, des automations (notez bien que tous les séquenceurs actuels ne permettent pas cette fonction, en particulier les logiciels Ableton). Le procédé est simple : durant l’écriture d’automation, il suffit de sélectionner le mode manuel, de placer votre souris au-dessus de la fonction à modifier, puis d’enclencher le bouton iD pour écrire une automation en direct pour ce paramètre. La sensibilité de l’encodeur peut être réglée (important pour certains réglages fins) dans les paramètres de votre OS, comme vous le feriez pour régler la vitesse du pointeur.
Benchmark
Précisons-le d’abord, l’iD24 travaille dans une résolution max de 24 bits/96 kHz. Un petit tour du côté de RTL Utility nous apprend que la latence réelle est la suivante :
Le buffer sur 32 samples en 44.1 kHz, RTL Utility remonte une latence de 6.463 ms
Le buffer sur 64 samples en 44.1 kHz, RTL Utility remonte une latence de 6.689 ms
Le buffer sur 128 samples en 44.1 kHz, RTL Utility remonte une latence de 10.136 ms
Le buffer sur 256 samples en 44.1 kHz, RTL Utility remonte une latence de 16.168 ms
Le buffer sur 32 samples en 96 kHz, RTL Utility remonte une latence de 5.042 ms
Le buffer sur 64 samples en 96 kHz, RTL Utility remonte une latence de 5.240 ms
Le buffer sur 128 samples en 96 kHz, RTL Utility remonte une latence de 5.906 ms
Le buffer sur 256 samples en 96 kHz, RTL Utility remonte une latence de 9.365 ms
Afin de tester l’interface, nous avons fait un benchmark avec notre fidèle APx515 d’Audio Precision. Comme d’habitude, nous publions les résultats obtenus en THD, rapport signal/bruit et déviation des voies, pour les entrées et sorties analogiques. Pour toutes les configurations, je règle le gain pour obtenir le meilleur résultat possible.
Plage dynamique : 117.983 dB (très bien !)
Commençons par les entrées ligne :
Déviation : ±0,425 dB
THD+N : 0,002% THD : <0.002 %
Rapport signal/bruit : 108.103 dB
Si on leur applique le filtre passe-haut, on obtient :
Et l’on observe un beau déphasage d’une voie à l’autre si l’on enclenche seulement le filtre sur une des deux voies, tout en leur envoyant le même signal :
Rien d’inattendu, ce sont les effets habituels d’un filtre (passif ou actif). Il vaut mieux le savoir, c’est tout.
Passons aux entrées micro :
Déviation : ±0,176 dB
THD+N : 0,02 % THD : <0.002 %
Rapport signal/bruit : 103.070 dB
Sur cette entrée nous avons mesuré un gain max de 57.917 dB, qui génère une THD qui monte à 0.025 %
Qu’en est-il de la sortie casque ?
On arrive à en tirer 10 dBu dans une charge passive de 330 ohms. C’est très correct, mais à égal de ce que l’on mesure sur des interfaces moins chères tout de même (je pense à la récente Focusrite 2i2, ou la Minifuse 2 d’Arturia). Pour une interface à 300 euros et des poussières, on pourrait s’attendre à mieux.
En revanche, elle donne de bons résultats à la mesure, y compris en THD.
Déviation : ±0,234 dB
THD+N : 0,005 % THD : <0.005 %
Rapport signal/bruit : 98,256 dB
Conclusion
Pas de doute, on est sur une bonne interface. Certainement, quelques reproches peuvent lui être adressés : d’abord cette seule voie pour deux sorties casques, et sa puissance acceptable, certes, mais égale à ce que l’on trouve sur des interfaces de gamme inférieure, ce qui nous chagrine un peu. Mais surtout, cette impression que l’offre Audient est très « sérieuse », reproduisant à petite échelle les options d’une console pro (c’est bien), mais sans apporter les « petits plus » que de nombreux concurrents apportent aujourd’hui à leurs interfaces USB (autogain, simulation de transfo, effets embarqués en analo ou sur DSP…). On l’avait déjà dit pour l’iD44, on le redit ici : les interfaces Audient forcent le respect par leur sérieux et leur qualité très « puriste du son », mais elles manquent parfois de cette petite touche qui donne envie de se montrer créatif.
Cela dit, on notera au crédit de cette iD24 : tout particulièrement, des performances audio très bonnes, avec une THD basse, une très bonne linéarité des préamplis, et une plage dynamique très étendue. La latence est dans le domaine du normal, même plutôt basse en 96 kHz. Et l’on retrouve toutes les options intéressantes auxquelles Audient nous a habitués : des inserts sur chaque tranche, de nombreux contrôles directement accessibles depuis l’interface (Mute, Dim, Phase, Mono…), et par-dessus cela la fonction Scrollcontrol, qui est non seulement originale, mais qui offre surtout la possibilité de mettre un peu plus de « vie » ou de « jeu » pour parler en langage d’instrumentiste dans vos automations (finalement c’est cela leur « petit plus », mais il est très spécifique à certains usages, alors que les traitements du son dès le préampli intéresseraient plus d’utilisateurs).
Rien à jeter donc, juste dire qu’on espère un petit « pas de côté » pour la génération mkIII.