Le Quantum est un synthé hors normes disponible au compte-gouttes depuis sa première présentation mi-2017. Nous avons pu emprunter un exemplaire et tester le nouvel OS 2.0 beta… Nous a-t-il atomisés ?
Présenté pour la première fois lors de la Musikmesse 2017 à Red Led et Los Teignos par Rolf Wöhrmann, le Quantum est un synthé hybride sans compromis, dans la droite lignée des somptueux Wave et Q+. C’est fin 2018 qu’il a commencé à combler de joie ses heureux propriétaires, à dose homéopathique, compte tenu de la rareté de la machine en boutique. C’est à l’un d’entre eux, l’ami Clarinette66, fan de beaux synthés, de drones et de saucisses catalanes, que l’on doit ce test. Il a en effet gentiment accepté de se séparer de son exemplaire flambant neuf, le laissant partir à 1 000 kilomètres de ses bases pendant plusieurs semaines. Un grand merci à lui ! Plusieurs semaines, ce n’était pas de trop pour découvrir les multiples synthèses et les vastes territoires sonores de la machine. Avant de passer en distorsion, il reste une énigme que seuls les lauréats du match pain au chocolat contre chocolatine pourront résoudre : doit-on prononcer Qwanteum comme chez Donald, Kantoum comme chez Emmanuel ou Cannetom comme chez Clarinette66 ?
Objet du désir
Le Quantum est classieux, aussi beau que bien construit : coque en acier, flancs en alu usiné avec insert boisé, sous-face pliée oblique… une barre horizontale en alu attachée à l’arrière de la base des flancs permet de maintenir la façade avec un angle idéal (mais fixe). La machine mesure 1 006 × 410 × 131 mm et pèse 17,8 kg. Les commandes, logiquement arrangées par section (LFO, oscillateurs, mixeur, filtres analogiques, filtre numérique, enveloppes, effets), tombent sous la main : 79 potentiomètres ou encodeurs solidement ancrés avec capuchons en alu (certains équipés de poussoir), 38 boutons rétroéclairés, un grand écran couleur tactile à contraste élevé, un clavier 5 octaves Fatar TP/8SK haut de gamme, sensible à la vélocité et à la pression. À sa gauche, deux molettes en alu, sous les deux boutons de transposition (+/– 2 octaves) et les quatre boutons de jeu (accords, mono, Latch, arpèges).
Cette ergonomie est exceptionnelle sur tous les plans : édition directe, choix des modules à éditer, édition contextuelle, navigation limpide dans les différentes pages, excellente réactivité de l’écran (sélection, tirer-déplacer), indication de la valeur stockée / éditée du paramètre en cours d’édition, graphismes dynamiques aussi beaux que pédagogiques (on voit en temps réel les ondes vibrer, les grains s’égrener, les samples se dérouler, les enveloppes envelopper ; sans oublier les vues 3D des tables d’ondes, les schémas de routage des modules sonores ou les profils de filtrage superposés des VCF). Pour faciliter l’édition, les potentiomètres disposent de diodes arc-en-ciel dont la couleur est paramétrable par section ; elles changent de couleur lors de l’assignation en live des sources et destinations de modulation ; on ne peut plus intuitif !
La connectique, vissée ou sertie avec précision sur le panneau arrière, est très complète : sortie casque (jack 6,35) avec son petit potentiomètre de volume, une paire de sorties audio stéréo principales (jacks 6,35 TS), une paire de sorties audio stéréo directes (non assignées au compresseur et au volume finaux), une paire d’entrées audio stéréo (jacks 6,35 TS pour échantillonner un signal externe ou le traiter via le moteur granulaire, les filtres ou les effets), deux prises pour pédales (maintien et continue assignable), un duo USB vers ordinateur (MIDI uniquement) / USB vers hôte (contrôleur), un connecteur pour carte SD (programmes, samples, oscillateurs, tables d’ondes, tables MIDI, OS) à insérer tête-bêche, un trio MIDI DIN In/Out/Thru et une borne IEC avec interrupteur pour cordon secteur (alimentation interne, merci !). Tout cela est très pro, mises à part les sorties audio asymétriques (comme sur le Schmidt !).
Territoires interplanétaires
Il faut 15 secondes pour que le Quantum soit opérationnel. La machine offre une capacité de 10 000 programmes comprenant un ou deux canaux sonores, dont plusieurs centaines préchargées en usine. On peut les sélectionner par nom de banque, auteur et/ou 4 attributs au choix : ces paramètres sont enregistrables au moment de la sauvegarde des sons. Pour un rappel direct, par exemple en situation live, on peut organiser ses programmes en favoris (6 onglets de 20 sons). Une fonction permet, au chargement, d’initialiser un programme complet ou l’une des deux couches sonores. Par contre, il n’y a pas de fonctions Compare ou Panel… en revanche, on peut recharger la valeur stockée ou initiale de n’importe quel paramètre, mais ce n’est pas pareil.
Les potentiomètres peuvent répondre dans les modes saut/seuil/relatif. La précision est diabolique, avec un lissage parfait des paramètres continus. Nous verrons que dans les menus, ces paramètres s’ajustent avec trois niveaux de résolution : unité, centième, dix-millième (à peu de choses près). Toutes les commandes en façade transmettent des CC MIDI (idéal pour l’automation) et sont immédiatement assignables à une source de modulation en deux temps trois mouvements, nous y reviendrons. Dans les menus, chaque paramètre est assignable à un CC MIDI ou une source de modulation ; il suffit pour cela d’appuyer sur le nom du paramètre, ce qui ouvre une boite de dialogue permettant l’assignation.
Pour les exemples sonores de ce test, nous avons mis à contribution deux utilisateurs accomplis de Quantum et amoureux des beaux synthés, qui comptent parmi les premiers propriétaires de la machine : Tinhu et Astrolab. On sent immédiatement le talent et la maitrise de la bête, bravo ! Tinhu est capable de passer tour à tour de riches textures hybrides à des nappes analogiques bien grasses, de jolies berceuses pour enfants à des ambiances qui foutent les jetons (punaise, le son Tinhu 013, brrrr…). Astrolab, qui a réussi à aller chercher son Quantum en VTT sans tomber dans le lac, a ensuite développé des banques sous la marque CO5MA. La première, Stratos, comprend 32 programmes : nappes planantes évolutives, ambiances atmosphériques, textures envoûtantes large bande, cuisinées aux filtres multiples, aux modulations et aux effets. Il nous a également envoyé les premières moutures de deux autres banques en cours de développement, Isolated et QX7, utilisant le nouveau moteur de synthèse à noyaux. Voilà l’homme à embaucher pour la bande son de Blade Runner 3 ! Pour notre part, nous avons concocté quelques sons classiques pour montrer que le Quantum s’en sortait plus que bien dans le « registre analogique », un poil moins pour les basses monodiques qui tabassent.
- Quantum_1audio Tinhu 00100:45
- Quantum_1audio Tinhu 00200:41
- Quantum_1audio Tinhu 00300:36
- Quantum_1audio Tinhu 00400:59
- Quantum_1audio Tinhu 00501:03
- Quantum_1audio Tinhu 00600:29
- Quantum_1audio Tinhu 00700:44
- Quantum_1audio Tinhu 00800:35
- Quantum_1audio Tinhu 00900:33
- Quantum_1audio Tinhu 01000:42
- Quantum_1audio Tinhu 01100:55
- Quantum_1audio Tinhu 01200:40
- Quantum_1audio Tinhu 01300:57
- Quantum_1audio Tinhu 01401:30
- Quantum_1audio Tinhu 01501:10
- Quantum_1audio Tinhu 01601:30
- Quantum_1audio Astrolab 001 STRATOS – AKUA01:36
- Quantum_1audio Astrolab 002 STRATOS – CHILDHOOD01:14
- Quantum_1audio Astrolab 003 STRATOS – DRAGAN01:26
- Quantum_1audio Astrolab 004 STRATOS – GYGER01:03
- Quantum_1audio Astrolab 005 STRATOS – MOROCO02:01
- Quantum_1audio Astrolab 006 STRATOS – NAKEDO01:35
- Quantum_1audio Astrolab 007 STRATOS – SOYL II01:14
- Quantum_1audio Astrolab 008 STRATOS – VINTO01:14
- Quantum_1audio Astrolab 009 STRATOS – VLOATING01:06
- Quantum_1audio Astrolab 010 STRATOS – ZONATOR01:03
- Quantum_1audio Astrolab 011 ISOLATED – VI01:24
- Quantum_1audio Astrolab 012 ISOLATED – VIII01:35
- Quantum_1audio Astrolab 013 ISOLATED – X01:26
- Quantum_1audio Astrolab 014 ISOLATED – XI01:09
- Quantum_1audio Astrolab 015 ISOLATED – XII02:21
- Quantum_1audio Astrolab 016 QX7 – II01:09
- Quantum_1audio Astrolab 017 QX7 – III00:58
- Quantum_1audio Astrolab 018 QX7 – VI00:38
- Quantum_1audio Classic 01 PPG Choir00:57
- Quantum_1audio Classic 02 Bass & Strings00:22
- Quantum_1audio Classic 03 Bass & Poly00:42
- Quantum_1audio Classic 04 Bass & Phase01:04
- Quantum_1audio Classic 05 Sync Bass00:21
- Quantum_1audio Classic 06 Captain Paddock01:05
- Quantum_1audio Classic 07 Pad & Resonator01:10
- Quantum_1audio Classic 08 Arp & Solo01:19
- Quantum_1audio Classic 09 Glory Days00:23
- Quantum_1audio Classic 10 Brass Layer00:20
Générations multiples
Le Quantum est un synthé hybride bitimbral polyphonique 8 voix. Dans chaque programme, les deux canaux peuvent être joués seuls, séparés ou empilés. Pour chaque canal, on peut régler le volume, le panoramique, la vélocité sur le volume, le gain de l’entrée audio, le routage de l’entrée audio (vers la sortie principale, vers la sortie auxiliaire, ou encore vers les VCF, le DF ou les effets du canal de son choix), le mode unisson (nombre de voix, désaccordage, panoramique, délai) et la sortie audio de destination (principale, auxiliaire ou les deux). En façade, on ne peut éditer qu’une couche à la fois, la bascule se faisant directement à l’écran. En mode séparé, on définit le nombre de voix et la tessiture de chaque canal (on peut donc créer des chevauchements de sons) ; en mode empilé, la polyphonie tombe logiquement à quatre voix.
Pour chaque voix, on trouve 3 générateurs numériques, 2 filtres analogiques (VCF), 1 module de filtrage numérique (DF), 1 générateur de modulations complexes, 6 enveloppes, 6 LFO et 5 multieffets indépendants. L’OS officiel actuel (1.3) peut produire quatre types de moteurs de synthèse indépendants pour chaque générateur (et pour chaque couche sonore en mode bitimbral) : tables d’ondes, formes d’ondes, particules et résonateurs ; l’OS 2.0.0.4 beta en ajoute un cinquième : la synthèse à noyaux. On sélectionne le type de moteur avec des boutons dédiés (une combinaison de deux boutons pour le dernier) ; le rétroéclairage des boutons, les diodes et la représentation graphique des générateurs dans les menus changent alors de couleur en fonction du moteur choisi (tout cela est re-paramétrable, nous l’avons dit).
Chaque générateur dispose d’une section de commandes directes, le reste se faisant dans les menus en sélectionnant le module à éditer au-dessus de l’écran. On peut directement régler la fréquence (par demi-ton, par 0,2 centième de demi-ton ou par 0,02 centième) ; via le menu, on peut aussi régler le suivi de clavier sur le pitch (bipolaire), le volume (là encore trois niveaux de précision : normale, fine ou superfine), le panoramique, la destination de l’oscillateur (VCF, DF, VCA, balance discrète VCF/DF par paliers de 5%), le volume des modulations en anneau (1 × 2 et 2 × 3), la quantité de pitch bend et la variation de pitch. Ce dernier paramètre permet de simuler les variations aléatoires des oscillateurs analogiques. Les autres paramètres (accessibles en direct ou via les menus) dépendent du moteur de synthèse, nous allons y revenir en détail pour chaque moteur. Au plan global, on peut choisir un tempérament parmi une longue liste de presets ou programmer jusqu’à 8 tempéraments utilisateurs, sympa pour les adeptes des gammes microtonales.
À table !
Entrons maintenant dans le vif du sujet. Waldorf n’en est pas à son premier synthé à tables d’ondes, c’est même la spécialité maison depuis trente ans (premier Microwave, déjà un hybride !), dans la continuité de PPG. Le principe global est d’enchaîner des formes d’ondes plus ou moins proches, de manière plus ou moins lisse, puis de moduler la position de lecture dans la table ainsi créée pour créer des évolutions spectrales plus ou moins rapides. Quand on joue des notes différentes, la vitesse de lecture est constante (sauf si on le décide autrement). Sur le Quantum, on peut directement modifier la transposition du spectre sonore, le niveau de bruit, le début de lecture dans la table, la saturation et la modulation cyclique de lecture.
Pour éditer en détail via le menu, on commence par sélectionner sa table d’onde (84 tables fournies de 64 à quasi 400 ondes, 16 tables en preset, une quantité indéfinie de tables programmables par l’utilisateur), la position initiale de lecture dans la table, la phase initiale, le contenu spectral (transposition du contenu harmonique), la brillance, le suivi de clavier sur le contenu spectral, le mode de déplacement cyclique dans la table (cycle par voix, cycle global, synchro au tempo, coup unique, ping pong par voix, ping pong global), la qualité (clean, dur ou sale, pour simuler l’aliasing des anciens synthés de la marque et des ancêtres PPG), le type d’interpolation entre les ondes (avec ou sans fondu), le lissage de balayage (lisse ou granuleux), la saturation apportée à la table (drive, gain) et la vitesse de déplacement cyclique en lecture de la table (positive ou négative). L’écran représente en 3D le spectre de la table d’onde, dans laquelle on peut se balader en changeant la position de lecture de départ. Bluffant !
Une boite à outils est prévue pour ceux qui veulent aller plus loin, c’est-à-dire créer puis exporter leurs propres tables d’ondes : on peut taper des mots avec un clavier virtuel, le Quantum en fait l’analyse et la transformation en table d’onde dès qu’on appuie sur Return ; avec un peu d’exercice en jouant sur les phonèmes (à consonnance anglaise assez neutre), les répétitions et les courbes d’enveloppe de modulation, on arrive à des trucs sympas. On peut aussi demander au Quantum d’analyser un fichier audio importé dans sa mémoire flash et d’en faire une table d’onde. Autre possibilité, créer une table de huit ondes à cycle court à partir d’un extrait audio WAV ou AIFF, avec un maximum de 1 024 samples. Enfin, le Quantum peut convertir un fichier WAV ou AIFF en table d’onde à période constante (entre 64 et 4 096 samples, la plupart des synthés usuels fonctionnant en 2 024 samples). On peut bien évidemment charger ou sauvegarder une table d’onde à partir de la mémoire interne ou de la carte SD. Merci au constructeur d’avoir permis tout cela directement depuis le Quantum, qui décidément se passe fort bien d’un éditeur externe.
En grande forme
En passant à ce moteur de synthèse, on se dit que ça va être cool, quelques formes d’ondes basiques et hop c’est joué ! C’est mal connaître les cerveaux bouillonnants des ingénieurs de chez Waldorf. En fait, ce moteur est capable d’empiler jusqu’à 8 formes d’ondes clonées. On peut directement définir le pitch, le nombre d’ondes clonées, leur désaccordage (pour des sons énormes de type Supersaw), la forme d’onde de base (dent de scie, sinus, triangle, impulsion variable, bruit rose ou bruit blanc), le contenu harmonique (Wrap) et la quantité de synchro avec un oscillateur maître virtuel (bien vu, cela évite de manger un autre générateur sonore !).
Le rôle du paramètre Wrap dépend de l’onde sélectionnée : avec l’onde dent de scie, on passe progressivement d’une double dent de scie à une simple dent de scie, puis à une onde carrée ; avec l’onde sinus, on passe d’une rampe en pente douce à un sinus, puis à une dent de scie adoucie ; avec l’onde triangle, on passe d’une rampe à un triangle, puis à une dent de scie ; avec l’impulsion, on règle la largeur d’impulsion de quasi 0 à quasi 100% ; enfin avec les deux bruits, on passe d’un bruit filtré à un bruit non filtré, puis à un bruit pitché.
Très pédagogique, l’écran central affiche l’onde obtenue en temps réel, au fur et à mesure qu’on la sculpte. Il reste encore quelques paramètres accessibles via le menu et les 7 encodeurs ceinturant l’écran : largeur stéréo des clones, désaccordage par demi-ton de 4 paires de clones (1–5, 2–6, 3–7, 4–8) et phase de l’oscillateur (oscillation libre ou début de phase forcé à chaque note). Un bouton Preset permet de nommer, sauvegarder ou charger des oscillateurs en mémoire, tout comme précédemment avec les tables d’ondes. Typiquement le moteur de prédilection pour se rapprocher des sonorités produites par les synthés analogiques, mais pas que…
Particules fines
Le troisième moteur du Quantum travaille à partir d’échantillons, multiéchantillons ou flux audio. Il peut fonctionner en lecture de samples classique, en synthèse granulaire ou en synthèse granulaire live (traitement direct d’un signal externe). Ainsi, les échantillons proviennent de la mémoire interne, de la carte SD, des enregistrements faits à partir du Quantum ou de l’entrée audio. Au cœur même du moteur de synthèse, on peut éditer les samples comme dans l’éditeur du mode Global (voir encadré) ; on peut aussi les monter en multisamples, pour les utiliser ensuite tels quels en lecture ou via le mode granulaire. Au menu : choix du sample, pitch, tessiture, fenêtre de vélocité. Les samples ayant à la fois la même tessiture et la même vélocité ne sont pas joués simultanément, mais en alternance suivant différentes règles : Round Robin, Robin inversé, ping pong, aléatoire… excellent ! Voilà qui fait du Quantum un sérieux lecteur de multiéchantillons.
En mode granulaire, les samples, multisamples ou flux audio sont découpés en flux de grains. À partir du panneau avant, on peut éditer le nombre de flux de grains (1 à 8), la largeur de pitch (désaccordage des flux), le point de départ de lecture du sample, la longueur des grains (jusqu’à 250 ms) et la vitesse d’oscillation dans la lecture des grains (lecture en avant avec des valeurs positives, en arrière avec des valeurs négatives).
Via le menu, toujours en mode granulaire, on accède à d’autres paramètre : facteur aléatoire sur le point de départ de lecture, temps de gate des grains (ou densité), agitation des grains (action aléatoire sur la longueur et la densité des grains), mode de lecture (continu, coup unique, ping pong, global – tout cela modifiable en temps réel sans avoir à redéclencher le son), attaque d’enveloppe, déclin d’enveloppe, largeur stéréo. On peut aussi jouer sur le pitch des grains : dispersion par rapport au pitch central, mode de dispersion (différentes règles dont certaines aléatoires ou fixées par demi-ton…). Là aussi, le Quantum intègre quelques presets servant de base de travail. L’écran se révèle une nouvelle fois didactique dans l’affichage des grains, de leur édition en temps réel et de leur lecture, ce qui rend cette synthèse moins abstraite. Voilà au final un moteur de synthèse très réussi, complémentaire aux autres et peu courant sur un synthé matériel.
Résonateurs excités
Quatrième moteur, le résonateur est l’association d’une excitation (bruit court, sample ou multisample) qui passe dans une banque de filtres passe-bande, modélisant le corps de résonance. En façade, on peut directement régler le nombre de répétitions de l’excitation, l’espacement des partiels, le timbre (filtrage ou accentuation des partiels), la nature de l’excitation (d’une impulsion pour simuler une frappe, à un bruit court pour simuler un souffle) et la résonance des partiels (leur durée). L’écran affiche en temps réel le spectre obtenu sous forme de série d’harmoniques.
Via le menu (donc les 7 encodeurs situés autour de l’écran), on peut, en plus des paramètres directs, varier la quantité de partiels accentués (passer d’un son plutôt boisé à un son plutôt métallique), adoucir le signal (modifier le rapport entre les harmoniques bas et hauts), contrôler l’enveloppe de l’excitation (AD), régler l’accélération des répétitions (pour simuler par exemple une bille qui rebondit de plus en plus vite avant de s’immobiliser), définir la balance de filtrage des partiels, filtrer les hautes fréquences (entre l’excitation et la banque de filtres, pour calmer le premier au cas il s’excite trop dans les aigus), élargir la stéréo ou encore booster la fondamentale. On peut sélectionner un modèle de résonateur, avec là encore possibilité de charger, éditer, nommer et sauvegarder des presets (13 préchargés pour ne pas partir de zéro, merci).
Tout comme dans le moteur à particules, on peut aussi éditer les samples et les monter en multisamples, pour les utiliser ensuite comme signal d’excitation. La seule différence ici est qu’il n’y a qu’un mode Round Robin pour les samples ayant la même tessiture et la même fenêtre de vélocité. Les sons obtenus sont très variés : percussions bois ou métal frappées, tubes soufflés, ruissellements… Ce moteur est extrêmement intéressant quand on utilise ses propres samples pour l’excitation, que l’on joue sur les caractéristiques de la caisse de résonance et que l’on ajoute un délai ping pong et une longue réverbe. À explorer sans retenue !
Noyaux sans pépin
Comme si cela ne suffisait pas, la version 2 de l’OS apporte un cinquième moteur de synthèse, là encore original et balaise, où il est davantage question de noyaux que de pépins… Précisons que nous avons testé une version 2.0.0.4 Beta, donc ce qui est décrit ci-après est susceptible d’évoluer. Le moteur s’engage en appuyant simultanément sur les touches Wavetable et Waveform.
Il utilise de 1 à 6 noyaux (mini-oscillateurs) combinables et intermodulables dans l’audio. On a deux niveaux d’édition : Template, pour ceux qui veulent touiller du bout des doigts, utilisant uniquement les 5 potentiomètres contextuels situés dans la section oscillateur ; Edit, pour ceux qui veulent rentrer dans un niveau subatomique (nous y allons juste après…). Quand on choisit un gabarit (parmi une liste de 14 préchargés), le rôle assigné aux 5 potentiomètres contextuels est immédiatement précisé à l’écran ; on peut alors se contenter de modifier ces paramètres sans entrer dans le détail, puis sauvegarder nos propres gabarits.
Ceux qui n’ont peur de rien vont alors pouvoir lire ce qui suit… En entrant dans le mode Edit, on accède à l’arrangement des noyaux (algorithme), à l’assignation des 5 potentiomètres (jusqu’à 6 paramètres simultanés par potentiomètre — façon macro — avec pour chacun, choix du paramètre et quantité de modulation bipolaire), puis aux paramètres individuels des noyaux. Les noyaux sont ainsi combinables en algorithmes de 1 à 6 noyaux. Là, on fait ce qu’on veut ou presque : pour chaque noyau, on précise s’il est actif et s’il est assigné à la sortie audio (dans ce cas, un bouton Solo permet d’isoler le noyau pour écouter instantanément sa contribution au son) ; on choisit ensuite par quel(s) autre(s) noyau(x) il est modulé dans l’audio (1 à 3 modulateurs par noyau), puis le type de modulation : Phase FM (modulation de phase type DX7), FM linéaire, Ring Mod, AM ou modulation de lecture de table d’onde (le cas échéant). En Phase ou en AM, on peut définir un niveau de feedback pour chaque noyau. L’écran affiche sous nos yeux émerveillés l’algorithme en direct, un peu comme sur un DX1, mais avec toutes les subtilités des triples modulations, de leur type, des routages multiples entre noyaux, de l’activation des noyaux et de leur assignation à la sortie audio. Le type qui a pondu cette partie du programme du Quantum est un génie !
L’écran tactile permet, au moyen d’onglets, de passer instantanément d’un noyau à l’autre pour éditer les 4 pages de paramètres prévues, elles aussi accessibles par des onglets : forme d’onde, modulation, enveloppe et niveau. Dans la page de forme d’onde, on choisit le type d’onde : sinus, rampe, dent de scie, carré, bruit blanc, bruit rose, résonateur, table d’onde. On peut choisir le point de lecture initial dans une table d’onde, la phase dans une forme d’onde, le niveau (volume et/ou modulation suivant utilisation du noyau dans l’algorithme), le mode de pitch (ratio constant, permettant d’obtenir des harmoniques ou des partiels, fréquence fixe). Dans la page de modulation, on définit quels noyaux (1 à 3, au choix) modulent le noyau en cours. Dans la page d’enveloppe, on règle l’enveloppe de niveau (volume et/ou modulation) du noyau, de type AD1D2 avec suivi de clavier. Enfin, la page de niveau permet de contrôler le niveau, la réponse en vélocité, le suivi de clavier (on peut éditer à l’écran tactile les 2 points de coupure et les 2 courbes extrêmes) et le panoramique. Toujours là ? Bravo !
Tiens, mais alors, au fait, voyons-voyons, si nous pouvons fabriquer des algorithmes de 6 opérateurs FM à ondes sinus (parmi tant d’autres choses plus intéressantes), cela ne nous emmènerait-il pas en terrain connu ? Bingo, le Quantum peut directement importer des banques de 32 programmes de DX7 via Sysex, non pas pour cloner le fameux synthé de Yamaha, mais pour partir de sons déjà construits et voir ce qu’on peut en faire. Et en plus, ça marche bien, la qualité de conversion est bonne, le souffle en moins. Le plus impressionnant dans l’histoire, c’est qu’un seul générateur sonore (un oscillateur) se suffit à lui-même pour générer les 6 opérateurs, leur suivi de clavier et leurs enveloppes de niveau ; les autres modules du Quantum ne sont pas utilisés (mais peuvent l’être bien évidemment). La polyphonie reste toutefois de 8 voix, on se prend alors à rêver à un mode paraphonique entre générateurs sonores, qui irait puiser ses ressources additionnelles dans l’un ou les deux autres générateurs, pour sortir 16 ou 24 voix, et ce quel que soit le moteur d’ailleurs !
Filtres analogiques
Chaque voix dispose de deux VCF et d’un module de filtrage numérique très élaboré DF, placés en série (ordre VCF-DF ou DF-VCF) ou en parallèle. Rappelons que l’on peut doser la balance de chaque oscillateur et de la modulation en anneau entre les VCF et le DF (par pas de 5%, genre VCF 85% / DF 15%). Les VCF sont des filtres passe-bas capables de fonctionner suivant 6 types de réponse : 2 pôles, 2 pôles saturé, 2 pôles sale, 4 pôles, 4 pôles saturé ou 4 pôles sale. Les modes saturé et sale sont obtenus par un étage de saturation en sortie du DAC avant filtrage, alors que les modes classiques utilisent un limiteur de signal. Dommage que ce réglage soit commun aux deux filtres, on aurait aimé pouvoir combiner différentes pentes ou types de saturation.
On peut arranger les deux VCF suivant huit modes : Single (un seul filtre), Boost (deux filtres à fréquences décalées, résonance commune), Twin Peaks (distance constante entre les deux fréquences de coupure, résonance), Escaping (comme précédemment, sauf que l’ordre des deux fréquences de coupure est inversé), Opposition (comme précédemment, sauf que l’écart des deux fréquences est réglé en opposition), Endless (un dérivé du précédent), Independent (réglages séparés des deux fréquences et des deux résonances), Linked (comme précédemment, sauf que la première fréquence contrôle aussi la deuxième). Les VCF sont mono, mais il existe un réglage à trois valeurs permettant de créer un pseudo-effet stéréo en sortie. On aurait préféré un vrai mode stéréo, où chaque filtre est dédié à son canal, comme sur le Prophet-X. Pour utiliser les oscillateurs en pure stéréo, il faut contourner les filtres (routage direct vers le VCA).
Chaque filtre, quel que soit le type, peut entrer en auto-oscillation, dès que sa résonance dépasse un certain seuil. Il se met alors à produire une onde sinus maitrisée, qui peut siffler si on pousse le réglage. Tous les réglages continus proposent, ici encore, trois modes de résolution : normal, fin et superfin, garantissant une énorme précision (nous ne le redirons plus). En façade, on peut directement régler les fréquences de coupure, les résonances, le mode et le type. Il n’y a aucun, mais alors vraiment aucun effet de pas sur les fréquences de coupure ; on a essayé en auto-oscillation pure en coupant tout le reste, rien, nada, c’est lisse comme une anguille bien mouillée ; en allant trèèèèèès lentement avec les potentiomètres, on visualise une résolution numérique de l’ordre du millième. Pour chaque filtre, on peut régler le suivi de clavier sur la fréquence, le volume et le panoramique via les menus. L’écran affiche de manière très fluide les courbes de réponse des filtres en temps réel ; il permet également de visualiser le routage des différents composants sonores, oscillateurs, filtres, ampli, effets… très didactique !
Formeur numérique
Passons maintenant à la section DF, placée en série ou en parallèle des VCF, comme nous l’avons déjà dit. Elle est capable de produire des effets de Drive, de Bit Crusher ou des filtres numériques élaborés. En façade, on peut directement régler le type d’effet et deux paramètres suivant le contexte ; le reste se fait à l’écran. Il y a différents modèles de circuits de Drive : transistor, lampe, micro électrostatique, diode et Crunch (un Waveshaper à base de FM). On trouve aussi un algorithme de gain avec phase inversable. Viennent ensuite deux filtres en peigne (positif et négatif), dont on peut régler la fréquence et la réinjection. On continue avec le Bit Crusher, qui joue sur la résolution et la fréquence d’échantillonnage en temps réel.
Puis c’est le tour d’une série complète de filtres tirés des synthés de la marque, déclinés en modes passe-bas, passe-bande, passe-haut et réjection, en 2 ou 4 pôles : ceux du Nave (assurant ainsi la compatibilité avec cette machine) et ceux du Largo. On trouve aussi les filtres passe-bas 2 et 4 pôles du PPG Wave 3.V (modélisation des PPG Wave). Pour tous les filtres, on peut contrôler, depuis la façade, la fréquence de coupure et la résonance ; via le menu, on accède à des paramètres supplémentaires (toujours avec une précision diabolique — zut, nous l’avons redit !), tels que la configuration VCF-DF et le routage des oscillateurs, comme dans le menu VCF, puisque les deux modules de filtrage sont concernés. La qualité sonore de ces filtres est excellente, limpide, colorée et variée ; un excellent complément numérique à la section analogique, un ensemble qui constitue un gros point fort du Quantum, décidément une machine bien à part.
Paire de quinte
Chacun des deux canaux d’un programme dispose d’une chaine de cinq multieffets placés en série. Dommage qu’on ne puisse avoir des configurations plus poussées (série, parallèle, combinaisons…). Autre limitation, il n’y a qu’une seule instance possible par type d’effet dans les cinq blocs (on ne peut pas avoir deux délais, par exemple). En façade, on peut directement éditer deux paramètres pour les trois premiers effets. Cela aurait été sympa de fournir des commandes directes pour les cinq effets, il y avait de la place pour ajouter quatre pauvres potentiomètres, par exemple en repoussant ceux du compresseur et du volume à droite de la section, à la verticale !
Voici la liste des algorithmes assignables à chacun des cinq blocs d’effets (x2), avec la limitation mentionnée auparavant : phaser (différents types dont ceux du Nave et du PPG Wave 3.V, de 2 à 16 étages), chorus (2 à 8 étages), flanger, délai stéréo (avec synchro au tempo), réverbe (différentes couleurs), EQ paramétrique, Drive (modélisation de transistor, lampe, micro électrostatique, diode et Crunch comme dans la section DF, mais cette fois globalement) et compresseur (très complet, avec tous les paramètres souhaitables pour ce type d’effet, à part la chaine latérale). La plupart du temps, on a 10 paramètres programmables sous la main, mais seulement 4 pour la réverbe ; la plupart de ces paramètres sont des destinations de la matrice de modulation, bravo ! Pour ne pas partir de zéro, on peut charger et sauvegarder des presets pour chaque type d’effet. Nous avons beaucoup apprécié le chorus, profond, ample, épaississant, ainsi que la réverbe, très clean, précise, généreuse sur les temps très longs. Le phaser en version PPG est sympa, un peu métallique en version Nave, comme le flanger ; on aurait aimé des versions façon pédales analogiques, avec un son plus chaud et moins piquant.
En sortie, on peut router chacun des deux canaux vers les sorties de son choix (globale, directe ou les deux en même temps), avec leurs blocs d’effets indépendants. Sympa ! Uniquement sur la sortie principale, on trouve un compresseur global non mémorisable, utile pour renforcer les basses ou créer une forme de ducking entre deux canaux séparés. Il n’a qu’un seul réglage : un potentiomètre d’action. Il ne faut pas en abuser toutefois, car il peut être très étouffant ou pompant ; autant utiliser un compresseur dans les blocs d’effets séparés pour être plus précis.
Modulations abyssales
Les synthés Waldorf, du plus ancien au plus récent et du plus petit au plus grand, sont réputés pour leurs capacités de modulation. Au sommet de la gamme, le Quantum est exemplaire dans ce domaine. On commence par un petit Glide, dont on peut régler l’activation, le temps et le mode de déclenchement (permanent ou entre notes liées) en façade. Le temps étant une destination de la matrice de modulation, on peut générer des effets complexes de portamento. On poursuit par les LFO, tous identiques, au nombre de six. En façade, on peut modifier la forme d’onde (sinus, carrée, triangle, dent de scie, rampe, S&H), la fréquence (de 4 minutes à 100 Hz, donc dans l’audio, avec possibilité de synchronisation à l’horloge) et la quantité d’action pour le trois premiers LFO. Les autres paramètres et LFO sont accessibles via le menu, avec système d’onglets pour chaque LFO ; les formes d’onde sont affichées graphiquement en temps réel et on peut les éditer par tirer-déplacer (fréquence, Warp). Warp déforme l’onde de manière continue, en fonction de sa forme : compression pour le sinus, morphing sur le triangle, largeur d’impulsion du carré, repliement pour les ondes dent de scie / rampe, déformation des bords pour le S&H ; puissant ! Les LFO disposent aussi d’un fondu d’entrée, d’un fondu de sortie, d’une possibilité de synchronisation entre les cycles de toutes les voix, d’un lissage de forme d’onde, d’un réglage de phase et d’un délai. Un bouton Target permet de définir immédiatement les destinations affectées par le LFO en cours.
Plus fort, le modulateur complexe (Komplex Modulator dans la langue de Goethe) est une sorte de super LFO à deux formes d’ondes simultanées, source de modulation idéale pour les pads et les drones. On peut directement régler la fréquence, le mélange des deux courbes, la modulation des formes d’onde, la quantité de modulation, l’enveloppe de quantité de modulation et l’entropie (intensité de modulation aléatoire à chaque cycle) ; l’écran affiche la courbe de modulation obtenue. Là aussi, on peut synchroniser la modulation à l’horloge, synchroniser les voix, régler la phase, lisser la courbe et ajouter un délai. Les courbes de modulation peuvent être choisies parmi des presets (et sauvegardées) ou éditées précisément sur 32 pas (à l’encodeur ou en tirer-déplacer à l’écran) : pour chaque pas, on définit le niveau et la courbe qui le lie au pas suivant (linéaire, saut discret, cosinus, dent de scie). Là encore, on accède à la définition des destinations de modulation via un bouton Target.
Passons aux enveloppes, au nombre de six. Les trois premières sont accessibles directement en façade ; elles sont assignées aux deux VCF et au VCA, mais peuvent moduler tout ce qu’on veut ou presque. C’est aussi le cas des trois autres enveloppes, accessibles via les menus. On peut contrôler directement en façade les paramètres ADSR, l’influence de la vélocité sur l’enveloppe et la quantité de modulation bipolaire pour les fréquences de coupure des deux VCF et le VCA (mis à part la quantité de modulation pour ce dernier, l’enveloppe étant branchée en direct). Les autres paramètres et enveloppes sont accessibles par le menu, là encore très clair, avec ses six onglets : délai, variation de phase (pour simuler un synthé analogique), courbe d’attaque (exponentiel, RC pour simuler un synthé analogique, linéaire), courbe de déclin, courbe de relâchement, bouclage (AD ou ADSR), redéclenchement (simple, multiple). Là encore, l’écran affiche la courbe d’enveloppe en temps réel, on peut tirer dessus et on voit chaque voix la parcourir, ludique et pédagogique ! Les temps vont de 0 à 60 secondes, c’est hyper confortable. Sans oublier le bouton Target qui permet d’assigner les enveloppes à différentes destinations. Parlons-en dès à présent !
Voici donc le meilleur pour la fin : la matrice de modulation. Elle permet de relier 43 sources à 158 destinations via 40 cordons virtuels. Chaque cordon virtuel offre cinq paramètres : une source, une destination, une quantité bipolaire de modulation, un contrôleur de modulation et une quantité d’action du contrôleur. L’ergonomie de cette section est très bien réfléchie. On peut créer des assignations de différentes manières : la première se fait avec les commandes directes en façade : on appuie sur Mod, on choisit la destination parmi les commandes dont la diode est bleue en tournant son potentiomètre, on choisit la source parmi les commandes dont la diode passe en jaune, la quantité de modulation est directement définie avec le potentiomètre ; l’écran affiche alors tous les paramètres en jeu, que l’on peut alors éditer. La seconde manière de créer des assignations est de passer directement par la page de la matrice de modulation : elle affiche les connections sous forme de liste déroulante et les quantités de modulation sous forme de barres rouges / vertes ; on choisit le « cordon » à éditer et on accède à tous les paramètres grâce aux six encodeurs situés de part et d’autre de l’écran. On peut muter ou supprimer un cordon à tous instant. Simplissime !
Nous n’allons pas ici lister toutes les sources et destinations disponibles, mais citer les principales. Parmi les sources : les 6 LFO, les 6 enveloppes, le modulateur complexe, ls différents contrôleurs physiques, les CC MIDI 21 à 33, le numéro de note, la vélocité, le numéro de voix, le générateur aléatoire, une valeur constante, le pad virtuel sur l’écran (X/Y) et les 4 lignes de modulation du séquenceur. Parmi les destinations : le pitch global, le pitch de chaque oscillateur, le niveau de chaque oscillateur, les paramètres de synthèse de chaque table d’onde, les paramètres de chaque grain, les paramètres de chaque résonateur, tous les paramètres des filtres (VCF et DF y compris les niveaux et panoramiques), le volume, le panoramique, les segments de chaque enveloppe, la vitesse de chaque LFO, le gain de chaque LFO, les paramètres du modulateur complexe, le temps de glide, certains paramètres d’effets (2 à 5 suivant le cas) et certains paramètres de l’arpégiateur / séquenceur. Quand on disait abyssal !
Arpèges et séquences
Chaque couche offre un arpège ou une séquence à pas. Commençons par le premier. On peut l’enclencher directement (touche Arp), puis maintenir les accords (touche Chord) et même ajouter des notes à l’accord en cours de maintien (touche Latch). Dans ce dernier mode, appuyer sur une note déjà maintenue la retire de l’accord. Les paramètres disponibles sont le tempo, la division temporelle, le swing, le motif (à choisir parmi 31 types internes, avec différentes accentuations), la durée avant redéclenchement, le temps de porte de relâchement, le sens de lecture (haut, bas, haut et bas, haut et bas avec répétition, bas et haut, bas et haut avec répétition, aléatoire), l’octave (1 à 4), le tri des notes (désactivé, croissant ou décroissant suivant la hauteur de note, croissant ou décroissant suivant la vélocité, accord), le mode de restitution de la vélocité jouée… de quoi se concocter un bon paquet de motifs !
Pour ceux qui préfèrent les motifs programmés aux arpèges jouées, le Quantum offre un séquenceur mono à 32 pas. Pour chaque pas, on définit la note, la longueur, la vélocité et quatre lignes de modulation, assignables comme sources via la matrice de modulation. La programmation peut se faire directement à l’écran, en dessinant le motif à la main et en l’éditant ensuite avec précision. On peut activer un pas, le muter (le rendre inactif sans l’effacer) ou doubler sa longueur (il mange le pas suivant, sans le détruire de la programmation). Par contre, on ne peut pas lier deux pas ou créer des effets d’Autobend façon TB-303. Pour faciliter la tâche, l’écran peut afficher les pas 1–32 (pour une vision globale), 1–16 ou 17–32 (pour une édition précise), malin ! On peut aussi entrer les notes directement au clavier, pas par pas, en mode d’enregistrement. Là encore, le Quantum permet de sauvegarder et charger des presets de séquences. Ah oui, le sens de lecture est modifiable : en avant, en arrière, en ping pong, en alterné (comme ping pong mais avec répétition des notes extrêmes) et même en coup unique. De même, on peut définir à quel endroit la séquence commence quand on appuie sur une nouvelle note : au début, en cours, à un pas aléatoire. Les séquences sont directement transposables au clavier. Il est même possible de choisir un tempérament parmi une longue liste et une note racine, sympa de changer d’échelle en temps réel ! Les autres paramètres globaux (tempo, division temporelle, swing…) sont communs à ceux de l’arpégiateur. Signalons que les notes arpégées ou séquencées sont transmises en MIDI / USB, si l’option MIDI Out est activée dans les réglages globaux.
Noble lignée
Nous avons passé un merveilleux moment avec le Quantum. C’est un instrument exceptionnel dans le design, la qualité des matériaux et l’interface utilisateur. Les commandes directes relayées par l’écran tactile graphique hyper réactif apportent une expérience de jeu et de programmation sans équivalent. L’écran n’est pas un gadget, c’est un lieu privilégié d’édition directe et de pédagogie synthétique. À ce niveau, la lutherie électronique reste largement devant les solutions logicielles. En somme, un synthé complexe mais pas compliqué ! Le Quantum est également exceptionnel au plan de la puissance de synthèse et de l’originalité, avec cinq moteurs hors norme : tables d’ondes poussées à l’extrême dans le raffinement, formes d’onde à clones multiples, synthèse granulaire capable d’utiliser des samples utilisateur, résonateurs très évolués et synthèse à noyaux capable de faire interagir des générateurs en réseau dans le domaine audio. Ces différentes sources sont mixées en stéréo et injectées vers deux VCF et un DF très complémentaires, routés en série ou en parallèle, avant de passer dans une grosse section d’effets. N’oublions pas les modulations abyssales, via la matrice surpuissante, le modulateur complexe, l’arpégiateur ou le séquenceur à pas.
De toute cette puissance alliée à cette facilité de programmation, on tire des résultats sonores originaux, très variés, allant parfois jusqu’à chatouiller les textures analogiques classiques, sans pour autant remplacer un pur synthé analo, en particulier pour les basses ou leads percutants ; mais c’est surtout dans les nappes, les atmosphères, les ambiances évolutives que le Quantum excelle. Oyez oyez, illustrateurs à l’image et designers sonores, le Quantum génère des timbres inédits. Que peut-on alors lui reprocher, à part une polyphonie et une multitimbralité logiquement limitées par les huit paires de filtres analogiques ? La section d’effets nécessiterait plus de routages, plus d’instances disponibles et des phasers & flangers plus chauds. Avec la possibilité de lier les pas, le séquenceur atteindrait la perfection. De même, des fonctions globales Panel et Compare formeraient deux cerises sur ce beau gâteau. Sur tous ces points, le Quantum peut facilement progresser, le constructeur est déjà en train de prouver qu’il est dans une logique d’amélioration, en finalisant la V2 de l’OS, qui ajoute le moteur de synthèse à noyaux et améliore l’éditeur audio.
De la même classe que le Wave, partageant sa noble lignée, le Quantum est un concentré d’idées brillantes dans un instrument déjà légendaire, pour le plus grand plaisir des musiciens fortunés. Voilà, le moment est déjà venu de le remettre en boite pour qu’il retrouve son heureux propriétaire sous le soleil catalan (merci Stéphanou !), sans oublier de lui peindre sur le capot un gros Award Audiofanzine Valeur Sûre 2019.