Après le module Integra-7, Roland décline le moteur sonore du JP-80 dans une nouvelle série de workstations à la fois abordables et très ergonomiques. Alors, mettons les mains partout !
La dernière véritable workstation Roland remonte à la série Fantom-G, lancée en 2008. La philosophie de l’époque était de faire un tout-en-un autonome qui se passe du monde informatique, allant de la synthèse aux pistes audio, en passant par les effets et les séquences, totalement éditables depuis l’instrument. Depuis cette époque, le constructeur nippon a un peu délaissé la catégorie des synthés, déclinant des modèles que l’on peut compter sur les doigts de la main, avec ici un clavier avec des pistes audio, là un synthé à base d’arrangements, qui plus est basés sur une technologie héritée de la série XV elle-même héritée de la série JV. Mais en 2011, le Jupiter-80 propose un nouveau moteur sonore basé sur la modélisation et les samples. Instrument de scène classieux s’il en est, il est ensuite décliné en « petit modèle », le Jupiter-50, puis en module bourré de sons, l’Integra-7. La qualité sonore et l’expressivité sont les principaux points forts de ces instruments. Cette année, la série FA, basée sur le même moteur sonore que l’Integra-7, renoue avec la tradition des Workstations : au programme, des empilages, des effets, des arpèges, des séquences, des phrases samplées, sans oublier les potards et les pads pour jouer tout cela. Dire que nous avons eu beaucoup de mal à en attraper un est un doux euphémisme, alors sans plus attendre, jouons !
Plaisir de jouer
Le FA-06 est un synthé à clavier de 5 octaves empaqueté dans une coque tout en plastique. Légère (moins de 6 kg), la machine inspire toutefois confiance, avec une bonne rigidité et des potards bien ancrés. Le clavier est sensible à la vélocité, mais pas à la pression. Les touches sont plus courtes que le « standard » (13 cm contre 13,5 à 14 cm sur la plupart des claviers en plastique du studio). Aucun souci pour s’y accoutumer, car la différence de longueur entre les touches blanches et noires est de 4,8 cm, comme sur la majorité des claviers du studio ; de même, la largeur des 5 octaves mesure 83,5 cm, contre 84 cm sur la plupart des claviers du studio (autrement dit, 1 % de différence environ !).
Le clavier du FA-06 est très agréable au toucher : franc, avec une résistance agréable, un rebond satisfaisant et des touches qui restent dans l’axe quand on les martyrise ; très supérieur selon nous à ce que propose actuellement la concurrence dans cette gamme de prix. Il ne lui manque que la pression, qui pourra par exemple être compensée par les 2 touches situées au-dessus du stick pitchbend/modulation assignables à des modulations. Le FA-08 est la version 88 touches lourdes « Ivory Feel », pour un poids total de 16 kg.
La machine est plutôt jolie, avec son LCD graphique couleur 5 pouces haute résolution très contrasté situé au centre. Le nombre des commandes est assez généreux et leur disposition facilite la prise en main. À gauche, on modifie le son en temps réel, à commencer par un capteur optique D-Beam cher à la marque, permettant de piloter, suivant la position de la main dans l’espace, soit un mini-synthé mono, soit le volume global, soit un paramètre de synthèse assignable ; il est situé au-dessus du potard de volume. Juste à côté, un ensemble de commandes pour modifier les sons ou effets en temps réel, à savoir 6 potards pour piloter 4 lignes de paramètres : synthèse (filtre, enveloppe, volume, pan…), EQ, assignables et effets. Idéal pour les performances temps réel sans entrer dans l’éditeur. Cette section surplombe quelques touches bien pratiques, permettant de séparer/empiler deux sons en une seule pression (Split/Dual), de passer en mode multitimbral, de transposer à l’octave ou par demi-ton ; c’est simple, pratique et efficace.
Le centre du FA-06 est réservé à la sélection des programmes (Studio Set multitimbraux), avec motif de pré-écoute (nos exemples sonores en sont tirés), touche d’appel des favoris, banques et 10 touches de catégories. Le magnifique écran couleur 5 pouces ne passe pas inaperçu ; il est protégé par un cache en plastique un peu souple. On navigue dans les pages de menus à l’aide des 10 touches situées en dessous (dont 6 font office de touches de fonction suivant le contexte d’édition) et les commandes juste à droite (encodeur alpha-dial, 4 flèches, décrémentation/incrémentation, Enter/Exit…). Tout à droite enfin, on accède aux trucs qui bougent : arpégiateur, accords programmables, patterns rythmiques, tempo (avec écran 3 diodes 7 segments, potard et touche Tap, bien vu !), séquenceur (sélection des morceaux, commandes de transport) et section sampling. Cette dernière contient 16 pads lumineux multifonctions bien pratiques : appel des banques de samples (4 × 16), déclenchement des samples en temps réel (éclairage rouge), coupure des pistes (éclairage vert) ou sélection de parties/partiels sonore. Ils participent au plaisir de jeu indéniable avec le FA-06, qui pour le moment réalise le sans-faute… sauf qu’ils ne sont pas dynamiques, dommage !
Ergonomie excellente
Avant de tripoter un peu plus en profondeur, jetons un coup d’œil sur l’arrière de la machine. D’abord les sorties audio : casque (jack stéréo 6,35), ligne stéréo (2 jacks 6,35 symétriques, cool !) et Sub (jack 6,35 symétrique pour sortir un signal isolé d’une piste ou le métronome, pratique). Ensuite les entrée audio : mini-jack stéréo (niveau ligne), jack 6,35 mono (réglage du niveau pour guitare ou micro par commutateur). Puis viennent 3 prises pédales (2 continues + tenue), un duo MIDI, 2 prises USB 2. La première prise USB permet de mettre à jour l’OS, tandis que la seconde permet de véhiculer le MIDI et l’audio, transformant le FA-06 en carte son stéréo, bravo ! Vient ensuite la borne pour transfo externe type bloc au milieu, sans oublier le lecteur intégré SD/SDHC avec son petit cache ; une carte SD 4 Go est fournie pour stocker programmes, séquences, samples.
Le FA-06 boote en 10 secondes, un point fort pour la scène. La prise en main est immédiate, pas besoin du mode d’emploi (guide de démarrage rapide fourni, version complète disponible en téléchargement) pour faire ses premiers pas. D’autant qu’avec les 6 potards de gauche, on peut déjà créer quelques variations sonores à partir des nombreux programmes fournis.
L’édition détaillée se fait en appuyant sur la touche Shift. Selon le mode où l’on se trouve, l’éditeur s’ouvre et les 6 touches centrales situées sous l’écran permettent de sélectionner des pages d’édition suivant le contexte. Bien vu ! Naviguer dans les menus est un véritable plaisir, tant les pages sont claires et limpides : graphismes soignés, couleurs appropriées, navigation intuitive, valeurs exprimées dans les unités du système international, on applaudit des deux mains Roland, c’est ce qu’il se fait de mieux en la matière ! Si l’écran avait été tactile, on aurait atteint la perfection. Autre point de réjouissance, on peut programmer un pattern rythmique, éditer des sons, entrer dans le séquenceur ou encore déclencher un sample sans interruption du flux créatif. Encore un grand bravo pour l’ergonomie de la machine, sans précédent sur une workstation, même celles avec écrans tactiles bien souvent surchargées.
Banques de sons
Le FA-06 comprend plus de 2000 programmes tirés de l’Integra-7 : tous les sons synthétiques « SuperNatural », tous les sons PCM du XV-5080 et une partie des sons acoustiques SuperNatural, tels que pianos, orgues, basses, cordes, drums… La qualité sonore est excellente dans la plupart des domaines. Les pianos acoustiques sonnent bien dans bon nombre de registres, du plus sombre au plus brillant. Les pianos & claviers électriques sont très expressifs et bénéficient de l’excellent processeur de multi-effets intégré. Les orgues sont particulièrement soignés et déclinés dans un tas de modèles, à transistors ou roues phoniques, qui devraient convenir à tout le monde. Nous avons particulièrement apprécié les basses et guitares, qui utilisent différentes articulations suivant le phrasé de l’interprétation ; là aussi la section d’effets apporte un grain très agréable. Les ensembles de cordes sont corrects, sans être renversant ; Kurzweil fait mieux dans le domaine des sons orchestraux.
Pour les cuivres et les bois (uniquement disponibles en PCM), nous avons particulièrement apprécié les instruments solos, très soignés, avec là encore différentes articulations de jeu. Les percussions acoustiques offrent de nombreuses variations réalistes ; quant aux drums électroniques, ils reprennent les fleurons de la marque avec une patate indéniable. Enfin, les sons de synthèse sont légion ; les basses, leads ou nappes sont de très haut niveau, avec des émulations de machine vintage prestigieuses : Moog, SCI, Oberheim, sans oublier une belle panoplie de machines Roland, JP-8, Juno-106, SH-101, TB-303, VP-330… Les empilages et programmes multitimbraux sont de mise, avec ici un arpège, là un motif rythmique avec ses variations, sur lesquels on ajoute une séquence ou des samples à la volée. On sent la puissance de la section d’effets, permettant de traiter chaque son de manière indépendante. Qualité sonore au rendez-vous, belle homogénéité globale, bravo !
- 1 Piano A1A2 00:31
- 2 Piano Rock 00:27
- 3 Piano HkyTky 00:14
- 4 Piano E76 00:33
- 5 Piano E73 00:33
- 6 Reed 00:43
- 7 Clav 00:47
- 8 Organ Jazz 00:56
- 9 Organ Rock 00:54
- 10 Bass A 00:36
- 11 Bass E 01:14
- 12 Bass S 02:26
- 13 Guitar A 01:46
- 14 Guitar E 01:46
- 15 Strings 01:46
- 16 Orchestra 00:56
- 17 Brass 00:51
- 18 Winds 02:24
- 19 Vocal 02:00
- 20 Synth Poly 04:17
- 21 Synth Mono 01:46
- 22 Drums A 01:35
- 23 Drums E 01:39
- 24 Multi 01:37
Studio Sets
Le FA-06 évolue toujours en mode Studio Set, qui peut regrouper jusqu’à 16 parties sonores (Tone). On peut donc rapidement basculer d’un seul son à une séparation main gauche/main droite, un empilage à deux couches, ou plus si nécessaire. Pour cela, il suffit d’assigner les parties 3 à 16 au clavier ou aux pads (pour l’une d’entre elles). Cela se fait très rapidement en quelques clics, pas la peine de descendre aux fins fonds des menus pour rapidement se faire un Set multitimbral. Chaque Studio Set comprend des paramètres globaux (principalement liés aux contrôleurs) et des paramètres liés à chaque partie (tessiture, niveau, panoramique, départs d’effets, assignation au clavier/arpège, quelques paramètres de synthèse, tempérament, mode de jeu, réserve de voix, filtres MIDI…). L’éditeur graphique permet des réglages très rapides. Le FA-06 renferme 64 Studio Sets Presets et 512 Studio Sets utilisateur.
Passons maintenant à la synthèse. Tout se passe au sein des Tone. On trouve deux principaux moteurs de synthèse. Le premier, baptisé SuperNatural, est lui-même décomposé en 3 sous-types : acoustique (reproduisant les nuances issues du phrasé, des accords ou du jeu, en appelant différents échantillons de l’instrument imité), synthétique (modélisation analogique/PCM à base de chaînes oscillateur/filtre/ampli) et drum kit (semblable au sous-type acoustique, prenant en compte la force de frappe et les répétitions pour déclencher différents échantillons, pour un rendu sonore naturel). Le second moteur, baptisé PCM, est décomposé en 2 sous-types : synthétique (jusqu’à 4 couches de PCM passant dans des filtres et des modulations) et drum kit (kits de percussions, avec là aussi jusqu’à 4 couches de PCM, mais cette fois disponible touche par touche). En mémoire Preset, on trouve 100 Tones SuperNatural acoustiques, 1115 Tones SuperNatural synthétiques, 5 kits SuperNatural drums, 897 Tones PCM et 56 drum kits PCM (sans oublier une série sons/kits classés GM2). En mémoire utilisateur, ce sont 128 Tones SuperNatural acoustiques, 512 Tones SuperNatural synthétiques, 8 kits SuperNatural drums, 256 Tones PCM et 32 drum kits PCM. De quoi voir venir !
Moteurs SuperNatural
Les moteurs SuperNatural (acoustique et drum kit) donnent accès à un nombre très réduit de paramètres, suivant l’instrument reproduit : par exemple pour les pianos acoustiques, on accède à la résonance de corde, au bruit des marteaux, à la couleur du timbre et à la largeur stéréo ; pour les pianos électriques, on peut régler le bruit de relâchement de touche ; pour les orgues à roues phoniques, on a un accès (graphique) aux 9 tirettes harmoniques, aux percussions, au click et au Leakage ; pour les guitares, ce sont les notes liées, les harmoniques et la simulation du Strumming quand on plaque un accord ; pour les drums kits, on peut régler individuellement l’accord, l’attaque, le déclin, le niveau, le panoramique, les départs chorus/réverbe, la variation et le routage vers la section compresseur + EQ, pour chacun des 62 sons constituant le kit… le paramètre variation concerne le mode de jeu de la percussion (normal, fla, roulement, bruit de caisse, etc.), permettant un réalisme accru. Contrairement au Kronos, les effets souvent liés à certaines modélisations ne sont pas intégrés (genre pédales pour les pianos électriques ou Leslie pour les orgues).
Le moteur SuperNatural synthétique est quasi comparable à celui du JP-80, avec modélisation analogique et génération de multisamples PCM. Au programme, 3 couches indépendantes oscillateur + filtre + ampli. L’oscillateur peut utiliser 7 ondes modélisées (dent de scie, carrée, impulsion à largeur variable modulable, triangle, sinus, bruit, Supersaw) ou l’un des 450 multi-échantillons PCM. Les ondes de base ont 3 variations et la Supersaw possède un Detune pour élargir le son. Le pitch a sa propre enveloppe AD bipolaire. Le filtre est de type multimode résonant 2 et 4 pôles. On trouve 4 LPF, 1 HPF, 1 BPF et 1 Peak. La fréquence se module par le suivi de clavier et une enveloppe ADSR dédiée (modulation bipolaire). La résonance va jusqu’à l’auto-oscillation, de douce à brutale suivant le mode et le nombre de pôles. Pour la partie ampli, on accède aux paramètres de panoramique, niveau, réponse en vélocité et enveloppe ADSR. Pour moduler le tout, 2 types de LFO (triangle, sinus, dent de scie, carré, S&H, aléatoire) avec synchro au tempo global ; ils peuvent agir sur le pitch, le filtre, le volume et le panoramique. Les deux premières couches de synthèse peuvent s’intermoduler (anneau et Waveshape) mais il n’y a pas de synchro. Roland n’a en revanche pas oublié de créer l’instabilité artificielle des oscillateurs analogiques, le mode unisson (1, 2, 4 ou 8 voix) et le portamento.
PCM classiques
Les autres moteurs sonores, basés sur la lecture d’échantillons, sont comparables à ce qu’on trouve à la concurrence : un Tone PCM est constitué de 4 multi-échantillons (partiels) que l’on peut combiner sur le clavier en tessiture et en dynamique (avec fondus hauts et bas). L’édition se fait par défilement pour les 4 partiels, sympa. Chaque partiel a des réglages indépendants de pitch, filtre et ampli. Le pitch a sa propre enveloppe 4 temps/5 niveaux modulables. Le filtre est multimode résonant (LPx3, HP, BP, PK), avec fréquence pilotée par le suivi de clavier, la vélocité et une enveloppe dédiée 4 temps/5 niveaux (modulations bipolaires). Le tout est envoyé dans un ampli avec enveloppe séparée 4 temps/3 niveaux et panoramique (avec suivi de clavier, mode aléatoire). On dispose de 2 LFO assignables, un Step LFO et une matrice de modulations à 5 sources (CC à définir + 4 switches). C’est classique, mais il ne manque pas grand-chose dans cette section à lecture PCM.
Les drum kits PCM s’étendent sur 88 touches (contre 62 pour leurs confrères SuperNatural). Là encore, on a droit à 4 couches PCM combinables suivant la vélocité (avec fondus haut et bas). Les paramètres de synthèse sont un peu moins nombreux que dans le mode PCM Tone (pitch, filtre multimode et ampli avec 3 enveloppes dédiées, pas de LFO) et communs aux 4 couches. Chaque note dispose de ses propres départs chorus/réverbe ainsi qu’un départ vers un ensemble compresseur + EQ. Là encore, du classique, mais tout à fait complet pour ce type de synthèse.
Arpèges et Patterns
Rares de nos jours sont les synthés ou workstations qui n’ont pas leur arpégiateur. Celui du FA-06 est assez simple et n’existe qu’à un seul exemplaire. En mode multitimbral, une ou plusieurs partie(s) peu(ven)t lui être assignée(s), mais ce sera toujours le même arpège qui pilotera les parties. Il y a 128 styles d’arpèges en mémoire Preset et 16 en mémoire utilisateur. Pour chaque style, on peut choisir la tenue de l’arpège, le numéro de variation (plusieurs possibles selon le style Preset en cours), la réponse en dynamique de jeu, l’octave (+/- 3), l’accent, le Shuffle, sans oublier le type de lecture du motif (haut, bas, alterné, aléatoire, suivant l’ordre joué, glissando, accord, auto 1, auto 2, phrase). Le type Phrase rejoue à la fois le rythme et la mélodie du style choisi à la note jouée. Les styles sont variés, des formes les plus simples aux plus complexes, mono ou polyphoniques, droites ou syncopées… on peut créer des styles utilisateur par import de SMF (500 évènements de notes et 500 évènements type CC/ pitchbend / aftertouch, maximum) ou de Song du séquenceur interne, rien de plus simple !
Pour agrémenter le jeu, le FA-06 renferme 354 motifs de batterie Preset et 120 mémoires utilisateur, que l’on peut lancer à la volée en parallèle de tout le reste (arpèges, séquences, échantillons…). On peut partir d’un Pattern existant pour créer sa propre version ou partir de zéro. L’écran affiche une grille d’édition à la manière de ce qu’on trouve sur un séquenceur logiciel ; sa résolution est variable : triolet de croche, double croche, triolet de double croche, triple croche. On peut aussi régler la signature (de 2/4 à 19/16) et le nombre de mesures (jusqu’à 32). On choisit ensuite la valeur de note (blanche à triple croche), le temps de Gate (5 à 200 %) et la vélocité. Les notes peuvent aussi être entrées au clavier. Mais il n’y a pas d’enregistrement temps réel avec Overdub à proprement parler, par exemple avec les pads. Pour contourner cela, rien n’empêche d’importer une partie d’une Song du séquenceur (piste 10), qui elle peut avoir été programmée en temps réel. De même, on peut importer un SMF externe pour créer un motif (à concurrence de 4 000 événements et 32 mesures). Les Patterns peuvent ensuite être assemblés par 6 au sein de groupes rythmiques (intro, couplet 1, transition 1, couplet 2, transition 2, fin) pour être rejoués en temps réel. On peut alors déclencher/enchaîner ces motifs avec les touches de fonction situées en dessous de l’écran, à la manière d’un arrangeur simpliste. Il y a 59 groupes rythmiques Preset et 20 en mémoire utilisateur, pas mal.
Effets costauds
La section d’effets du FA-06 a été particulièrement soignée. Les allergiques aux blablas pourront aisément s’y retrouver avec les schémas joints à cet article. Pour commencer, chacun des 16 Tones d’un Studio Set dispose de son propre EQ (type 3 bandes, semi-paramétrique en bandes extrêmes, paramétrique en bande médium) et de son propre multi-effet (MFX). Celui-ci est capable de générer 67 algorithmes puissants et un vocodeur (limité à la piste 1). Au programme, EQ, phaser, autopan, ringmod, haut-parleur tournant, chorus, flanger, dimension-D, simulateur d’ampli guitare/EP, compresseurs, Gate, délai, réducteur de bit, effets doubles combinés… chaque algorithme propose un tas de paramètres à tripoter. Mieux, on peut en moduler un bon nombre en temps réel, grâce à une matrice à 4 cordons, avec une multitude de sources possibles, bravo ! Lorsque le moteur sonore est un drum kit (SuperNatural ou PCM), on dispose d’un complément de 6 effets combinés compresseur (complet avec attaque, release, seuil, ratio, gain) + EQ (3 bandes, extrêmes semi-paramétriques et médium paramétrique). En mode multitimbral, ceci est limité à une seule partie drum kit, au choix. On peut ainsi router toute note du kit vers l’un des 6 ensembles compresseur + EQ de son choix. Ces effets s’avèrent redoutables et permettent de faire émerger les percussions dans un ensemble multitimbral chargé.
Chaque Tone dispose en plus d’envois vers 2 effets globaux en parallèle, chorus et réverbe. Il y a 3 types de chorus : classique, délai ping-pong et GM2. Les paramètres éditables sont très nombreux (type de filtre, phase, coupure, réinjection, brillance, temps LCR…). Pour la réverbe, on a le droit à 6 types : 2 Room, 2 Hall, 1 Plate et GM2. Là encore, beaucoup de paramètres accessibles (pré-délai, densité, diffusion, largeur, LF/HF Damp…) ; dommage que ces effets n’aient pas de modulations temps réel comme le MFX. Mais ce n’est pas fini, puisqu’on peut encore intégrer soit un effet d’insertion IFX avant chorus, soit un compresseur maître situé juste après la réverbe. L’IFX offre 78 algorithmes : à peu près les mêmes que le MFX, auxquels s’ajoutent des simulateurs assez exotiques, quelques réverbes et une résonance ô combien sympathique ; mais cette fois, les paramètres ne sont pas modulables en temps réel. Le compresseur maître est de type multibandes (3 bandes pour être précis) avec paramètres séparés pour chaque bande : attaque, release, seuil, ratio, niveau.
Et ce n’est toujours pas fini, car le mixage stéréo de tous les signaux internes ainsi traités peut ensuite attaquer un EQ maître et un effet maître TFX. L’EQ est de type 5 bandes (2 extrêmes semi-paramétriques et 3 médiums paramétriques). Le TFX propose 29 algorithmes, tels que filtres, isolateur, réducteur de bit, wah wah, réverbe, délai, flanger, phaser, disto (différents types), avec seulement 3 paramètres ajustables et aucune modulation (c’est plutôt un effet de contexte). Terminons ce descriptif fastidieux en précisant que les entrées audio disposent d’un réducteur de bruit et d’une réverbe dédiée à 8 algorithmes, mixés au signal interne après le TFX. Bref, une énorme section d’effets de très haute qualité, parfaitement adaptée aux possibilités multitimbrales de la machine et de traitement de sources externes. Qui plus est, la qualité des effets proposée est top niveau.
Séquenceur
Le séquenceur du FA-06 est conçu pour programmer des séquences simples et les éditer avec précision. Il ne remplacera pas un séquenceur logiciel mais permet déjà quelques manipulations. On ne peut charger qu’une seule Song en mémoire, parmi 999. Nous n’avons pas trouvé d’information à ce jour sur la capacité mémoire… Une Song est constituée de 16 pistes MIDI linéaires rapidement assignables à un Studio Set, dont une peut être remplacée par une piste de pad. Il ne s’agit donc pas de Pattern assemblés en Song mais bien de pistes linéaires. S’ajoute une piste tempo/signature. Côté visualisation, il existe un mode Séquenceur (grille de pistes avec barre de défilement et deux niveaux de zoom) et un mode mixer (table de mixage virtuelle avec volumes, panoramiques, départs effets…) ; très chouette et très utile pour s’y retrouver. On peut boucler une Song entre 2 points à définir à la volée.
Côté enregistrement, on peut travailler en mode temps réel ou pas à pas. En temps réel, le séquenceur enregistre les notes et les CC MIDI ; s’il y a des notes et d’autres événements, la piste est repérée par une couleur rose ; s’il n’y a que des notes, c’est bleu et s’il n’y a qu’autre chose que des notes, c’est vert. Pour enregistrer en temps réel, on peut spécifier un décompte de métronome (1 ou 2 mesures) ou un démarrage direct (en appuyant sur Start ou sur le clavier). Une piste peut être bouclée (1 à 997 mesures), quantisée (mode grille de la noire à la triple croche, ou mode Shuffle de la croche à la double croche) avec une précision paramétrable (0 à 100 %). On peut également spécifier si les changements de tempo sont enregistrés. Il est possible de filtrer certaines données avant enregistrement (notes, Program Change, CC, PB, Poly AT, AT, Sysex). Toujours en temps réel, on peut effacer des données (notes spécifiques, plage de notes, Sysex).
En mode pas à pas, on doit spécifier le type de note à entrer, son temps de Gate, sa vélocité (jouée ou fixe entre 1 et 127). Une fonction Undo / Redo à un seul niveau permet de se tromper, mais juste un peu. Enfin, l’édition des pistes peut se faire à la hache (copie/collage/découpage/suppression/insertion, quantisation, transposition, modification de vélocité, de durée de notes, de décalage de notes… par Song, piste ou mesure) ou en mode microscopique, avec liste déroulante de tous les événements et clavier type piano roll simultanés. C’est écrit petit, mais c’est très visuel, d’autant que l’on peut filtrer un certain nombre d’informations (notes, Program Change, CC, PB, Poly AT, AT, Sysex) et zoomer selon deux niveaux. On peut lancer une séquence, l’éditer, passer en mode Studio Set, éditer un son, retourner dans le séquenceur, enregistrer des mouvements de commandes, sans stopper la séquence, bravo pour cet excellent workflow. A la fin de la session, une fois la Song enregistrée sur carte SD (la mémoire est volatile !), il est possible d’exporter le mix stéréo (à l’exception de la piste des pads) au format SMF ou audio WAV sur la carte SD ; on peut aussi exporter les 16 pistes en un seul coup au format WAV ; on peut enfin exporter les pads (mais pas la piste, hein, on vient juste de le dire !) en format WAV. En retour, on peut importer des fichiers SMF dans le séquenceur du FA-06. Sympa !
Échantillonneur streaming
Le FA-06 renferme un sampler de phrases polyphonique 8 voix dérivé du SP-404SX. Il fonctionne en 16 bits linéaires/44 kHz, mono ou stéréo. La lecture et l’enregistrement des samples se fait sans temps de chargement, directement sur la carte SD/SDHC connectée. La mémoire interne est liée au séquenceur : chaque Song a ses 64 samples assignés à 4 banques de 16 pads. Les pads permettent (entre autres) de déclencher les samples en temps réel, avec mode Hold, et d’entrer des événements sur l’une des pistes du séquenceur linéaire. Par contre, ils ne permettent pas de programmer quelque Pattern que ce soit, c’est bien dommage pour des pads ! Comme nous l’avons déjà écrit, ils ne sont hélas pas dynamiques.
On peut sampler via plusieurs sources : entrées audio analogiques, audio over USB ou sortie stéréo (resampling de ce que l’on est en train de jouer sur le clavier). Échantillonner est on ne peut plus basique : on appuie sur le pad à assigner, la source (audio, clavier, audio + clavier). On peut même traiter la source USB audio avec le TFX. Il suffit ensuite de régler le niveau d’échantillonnage grâce au vumètre, le niveau de trigger audio (si on veut que l’échantillonnage démarre automatiquement à partir d’un certain seuil audio) et c’est parti ! Ça peut même partir manuellement et s’arrêter de la même manière. Une fois le précieux sample capturé, reste à l’éditer : en interne, le FA-06 n’a pas grand-chose à offrir en ce sens, à part le réglage du volume et la troncature ; il faudra donc passer par un éditeur externe pour faire du traitement numérique plus poussé ; heureusement, le FA-06 permet d’importer des fichiers WAV, AIFF ou MP3 provenant d’un ordinateur. Nous comprenons donc ces restrictions internes, mais nous aurions tout de même bien aimé un Time Stretch / Slice et un Pitch Shift intégrés. On ne peut pas non plus utiliser les sons échantillonnés comme générateurs sonores au sein des Tones, l’intégration des samples est donc assez limitée. Bref, une petite section qui ajoute des possibilités temps réel, mais pas assez puissante pour remplacer un échantillonneur dédié.
Ouverture externe
Le FA-06 est doté d’une interface Midi/audio via son port USB2. On peut ainsi envoyer des sons externes vers sa DAW préférée sans aucune interface supplémentaire. Le mode DAW permet de piloter les principaux séquenceurs logiciels du marché à partir des commandes en façade (potards, transport, pads) : cela marche pour Logic Pro, Sonar et Cubase ; on peut aussi spécifier ses propres paramètres utilisateurs. Qu’en est-il des fonctions de clavier de commande de modules externes (MIDI/USB) ? Ce n’est pas terrible, car on doit se contenter d’une émission sur un seul canal de base, sans plus ; le FA-06 ne se hisse donc pas au niveau de la concurrence pour piloter des modules externes en multizone/multicanal.
Côté extension de sons, le FA-06 est capable d’importer 2 banques PCM dans ses entrailles (en plus des WAV). Sur le site Axial de Roland, des extensions tirées des anciennes cartes SRX pour série XV (samples + programmes) transformées au format FA-06 sont disponibles en téléchargement gratuit. Au moment où nous avons réalisé le test (juin 2014), 4 banques de 32 Mo étaient disponibles : EXP-01 Dance Trax Collection (361 Tones, 16 drum kits et 829 ondes orientés Electro Dance), EXP-02 Keys Collection (406 Tones et 629 ondes orientés claviers vintage), EXP-03 World Collection (406 Tones, 16 drum kits et 629 ondes orientés musiques du monde) et EXP-04 Concert Piano Collection (50 Tones et 48 ondes de piano de concert européen multi-échantillonné). Il suffit de les télécharger, les copier sur clé USB puis les importer dans la machine. Le FA-06 est aussi compatible avec les banques Integra-7, que l’on trouve en nombre sur le même site. Certains râlent que ces sons datent et que le FA-06 n’a pas les sons de Fantom-G dans sa section PCM ; nous disons juste merci, continuez comme ça !
Conclusion
Voilà une agréable surprise là où nous n’attendions plus Roland. Nous pensions que le constructeur avait purement et simplement abandonné le segment. Au lieu de cela, nous sommes en présence d’une workstation qui sonne, avec une approche un peu nouvelle centrée sur l’ergonomie et la simplicité, bref l’essentiel. On va vite et bien du premier coup, et on a une intégration suffisante avec les DAW pour aller plus loin. C’est très différent de l’approche du Fantom-G où la performance l’emportait largement sur la spontanéité. Le FA-06 est fait pour être branché, allumé, joué, enregistré, trimballé. Dans cette gamme de prix, il y a forcément des compromis : le manque d’aftertouch, les pads statiques, le séquenceur uniquement linéaire, ainsi que l’édition limitée et le manque d’intégration des samples utilisateur… mais ce serait oublier tout ce qu’on a pour ce prix et surtout ce qu’on peut en faire, que l’on soit en studio ou sur scène. Pour ce FA-06, chapeau Roland !
Téléchargez les fichiers sonores (format FLAC)